Méditation : "tout concours au bien de ceux qui aiment Dieu" (14 février 2015)

« Apprenons à espérer constamment en notre Sauveur, jusqu'à ce qu'il vienne enfin nous consoler de ses grâces. Apprenons à ne pas nous lasser de souffrir, puisque c'est dans les souffrances que nous trouverons la vie. Et si l'extrémité des dangers affaiblit notre espérance, fortifions-nous par ces mêmes dangers en nous remettant en l'esprit que nous sommes à la veille de notre repos ; et que l'heure heureuse approche, que le Seigneur nous doit délivrer, puisque nous sommes dans le plus fort de la tribulation. Ainsi nous voyons dans l’Évangile qu'il laissa les Disciples sur la Mer, plus de la moitié de la nuit, agités des flots et tourmentés de la tempête ; et qu'à la fin il vint à eux pour les rassurer par sa présence, et pour les tirer de l'orage. Ainsi nous lisons dans l'Exode que lorsque le peuple Juif gémissait le plus sous le joug de la servitude, Dieu vint le délivrer, et lui apprendre qu'il ne l'avait ainsi éprouvé que pour lui imprimer la crainte, afin qu'en le craignant il ne péchât point. Et ainsi, ma Fille, il viendra à vous, lorsque vous penserez le moins à cette grâce, et lorsque vous serez le plus tourmentée. Cependant s'il vous semble que vous voudriez vivre si saintement, que vous puissiez employer à la gloire de Dieu tous les moments de votre vie, sachez qu'il y a des âmes si enflées de présomption, qu'elles ne peuvent reconnaître leur faiblesse, qu'en souffrant des grandes tentations, et quelquefois même de très grandes chutes. Car ces sortes de personnes sont si lâches à servir Dieu, qu'ils ne pourraient pas s'approcher de lui, si lui même ne les y poussait comme à coups d'éperon. Ils ont le cœur si dur, qu'il n'y a que le marteau des souffrances qui le puisse briser : comme la vanité de leurs pensées les aveugle, il faut qu'ils tombent en quantité d'égarements, afin d'acquérir de la prudence. Et comme enfin il s'estiment excessivement quand ils font quelque bonne œuvre, ils ont besoin de tomber en beaucoup de maux, afin de s'humilier devant Dieu et envers le prochain. Ainsi, dis-je, Dieu permet qu'ils soient accablés d'adversités, qu'ils souffrent de grandes peines, qu'ils aient l'esprit couvert de ténèbres ; et qu'ils succombent même à beaucoup de péchés, afin de les en délivrer dès qu'ils commenceront à s'humilier dans le sentiment de tant de misères. Il les laisse venir jusqu'en Babylone, pour les tirer de la main de leurs ennemis, selon le langage du Prophète : car la confusion où ils sont de leurs chutes les humilie et leur fait demander à Dieu le remède qu'ils n'eussent peut-être pas recherché s'ils ne fussent tombés, et qu'ils eussent peut-être perdu par leur arrogance, ou par leur tiédeur.

Soyez donc, ô mon Dieu, soyez éternellement adoré, que toutes vos créatures vous bénissent à jamais, et que tous les hommes reconnaissent la grandeur de votre puissance, qui rend dignes du Ciel ceux qui étaient dignes de l'Enfer, et qui rend votre gloire aussi grande à pardonner aux pécheurs, comme à faire des justes et à les soutenir. Car vous sauvez par la douleur et par le regret d'un cœur contrit et humilié, celui qui ne pouvait vous être fidèle ; vous faites que nos offenses nous rendent humbles et prudents, et ardents à votre service. Enfin, que ceux qui vous ont le plus offensé vous aiment davantage, parce que vous leur pardonnez plus abondamment. En quoi nous reconnaissons l'accomplissement de ces paroles de votre Apôtre : "que vous faites avantage de tout à ceux qui vous aiment" (italiques), et de leurs péchés mêmes, selon saint Augustin. »

St Jean d'Avila (1499-1569), Œuvres chrestiennes sur le verset Audi Filia et Vide (chap. XXIV), A Paris, Chez Edme Couterot, 1662.

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