Méditation : les oeuvres de miséricorde (10 novembre 2015)

« Les divins commandements, bien-aimés, aussi bien que l'institution apostolique, nous ont appris que tout homme placé parmi les périls de cette vie doit chercher par l'exercice de la miséricorde la miséricorde de Dieu. Quelle espérance, en effet, pourrait relever ceux qui sont tombés, quel remède guérir les blessés, si les aumônes ne déliaient les fautes, et si les besoins des pauvres ne devenaient l'antidote des péchés ? Le Seigneur avait dit : « Heureux les miséricordieux, parce que Dieu leur fera miséricorde » (1) ; or il a montré suivant quelle règle de justice se fera tout cet examen par lequel, sa majesté présente, il doit juger le monde : une fois élucidée la seule question de la qualité de nos œuvres au regard des pauvres, tout sera prêt pour que les impies aillent brûler avec le diable et les bons régner avec le Christ. Quelles actions ne mettra-t-on pas alors sous les yeux de tous ? Quels secrets ne dévoilera-t-on pas ? Quelles consciences pourront rester cachées ? Nul alors ne se glorifiera d'avoir le cœur chaste ou d'être pur de péché (2). Mais, parce que la miséricorde sera élevée au-dessus du jugement (3) et que les dons inspirés par la clémence primeront toute rétribution exigée par la justice, la vie entière des mortels et leurs actes les plus divers seront estimés d'après une règle unique, à savoir que nulle mention de la moindre faute ne sera faite là où, de l'aveu du Créateur, se seront trouvées des œuvres de bonté. Ceux qui seront mis à gauche n'auront donc pas fait que ce qu'on leur reprochera, et ce n'est pas parce qu'on les montrera alors étrangers aux actes d'humanité qu'ils seront trouvés exempts d'autres péchés ; mais, coupables en beaucoup de choses, ils seront surtout condamnés pour n'avoir pas racheté leurs crimes par une seule aumône. Car c'est le fait d'un coeur très dur de n'être pas ému par la misère, quelle qu'elle soit, de ceux qui souffrent, et celui qui, ayant le moyen de soulager, ne secourt pas l'affligé, est aussi injuste que s'il opprimait le faible ; quel espoir dès lors restera-t-il au pécheur s'il ne fait miséricorde afin de recevoir lui-même miséricorde ?
C'est pourquoi, bien-aimés, celui qui n'est pas bon pour les autres, est d'abord méchant pour soi-même, et il nuit à sa propre âme en ne secourant pas celle d'autrui comme il le pourrait (4). »

1. Matth. V, 7. 2. Cf. Prov. XX, 9. 3. Jac. II, 13. 4. Ainsi saint Augustin : « Quid verius, quid justius, ut qui dare detrectat se fraudet ipse ? » : « Quoi de plus conforme à la vérité, à la justice, que celui qui refuse de donner se prive lui-même du plaisir de recevoir ? » (Sermon CCVI, in Quadragesima, II, 2. P.L., XXXVIII, 1041).

St Léon le Grand, Sixième Sermon sur les Collectes (XI, I), in "Sermons" Tome II, Trad. Dom René Dolle, Sources Chrétiennes n°49, Éditions du Cerf, 1957.

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Jean-Louis Bézard (1799-1881), Les Sept œuvres de miséricorde
Eglise paroissiale de l'Invention-de-la-Sainte-Croix d'Aubusson (Creuse)

Précisions sur ce tableau ici.

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