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21 novembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

Parabole des talents : "Faites-les fructifier pendant mon voyage." (Lc 19, 11-28)

« Il est remarquable que dans cette parabole des talents il n’y a ni vignerons ni vigne, mais que tous sont ouvriers ; car il ne parle pas ici seulement aux princes des Juifs, ou au peuple, mais généralement à tous. Et considérez, mes frères, que lorsque ces serviteurs s’approchent de leur maître pour lui offrir ce qu’ils ont gagné dans leur trafic, ils reconnaissent tous avec une grande franchise, et ce qui vient d’eux, et ce qui vient de leur maître. L’un lui dit humblement qu’il a reçu cinq talents, et l’autre deux, et ils avouent tous deux par cette humble reconnaissance que c’est de lui qu’ils ont reçu le moyen d’agir. Ils lui témoignent tous qu’ils ne sont pas ingrats, et ils lui attribuent ce qu’ils ont comme venant uniquement de lui.

Que leur répond donc leur maître : "Bien ! serviteur bon et fidèle". Car c’est être bon que d’être attentif et appliqué à faire du bien à ses frères : "Bien ! serviteur bon et fidèle, parce que vous avez été fidèle en peu de choses, je vous établirai sur beaucoup. Entrez dans la joie de votre Seigneur" : Ce seul mot renferme tout le bonheur de l’autre vie. Mais ce serviteur paresseux et lâche ne lui parle pas comme les deux autres.

[...]

Dieu exige moins de ses serviteurs : "Vous deviez", dit-il, "mettre mon argent entre les mains des banquiers", et me laisser à moi seul le soin de l’exiger avec usure, comme j’eusse fait à mon arrivée. Ce mot "d’usure" se doit prendre pour la pratique des bonnes oeuvres. Vous deviez donc faire ce qui était le plus aisé, et vous reposer sur moi du plus difficile. Mais puisque vous ne l’avez pas fait "Qu’on lui ôte le talent qu’il a, et qu’on le donne à celui qui a dix talents. Car on donnera à tous ceux qui ont déjà, et ils seront comblés de richesses, mais pour celui qui n’a point, on lui ôtera même ce qu’il a." C’est-à-dire, celui qui a reçu de Dieu le don de science pour l’utilité des autres, et qui ne s’en sert pas, le perdra entièrement. Au lieu que celui qui dispense sagement et avec soin ce qu’il sait, fera croître encore ce don que l’autre étouffe et détruit par sa paresse. Mais le malheur de ce serviteur paresseux et négligent ne se termine pas là et cette première parole est aussitôt suivie d’une sentence terrible.

"Qu’on précipite donc dans les ténèbres extérieures ce serviteur inutile : C’est là qu’il y aura des pleurs et des grincements de dents." Remarquez donc ici, mes frères, que ce ne sont pas seulement les voleurs et les usurpateurs du bien d’autrui, ni ceux qui commettent des violences, qui seront condamnés par Jésus-Christ aux flammes éternelles de l’enfer, mais encore ceux qui sont lâches pour faire le bien.

Ecoutons, mes frères, ces paroles effrayantes, et pendant que nous en avons encore le temps, travaillons sérieusement à notre salut. Prenons de l’huile dans nos lampes, et faisons fructifier le talent que Dieu nous a donné en dépôt. Si nous vivons ici dans la paresse et dans la négligence , personne n’aura alors compassion de notre misère ni de nos larmes. Nous voyons que celui qui osa se présenter à ces noces saintes de l’Evangile avec un vêtement sale, se condamna lui-même par son silence, et que néanmoins cet arrêt qu’il porta contre lui-même ne lui servit de rien, et qu’il n’empêcha pas qu’on ne le jetât dans les ténèbres extérieures. Nous venons encore de le voir, le serviteur paresseux a beau rendre tout l’argent qu’il avait reçu, il n’évite pas néanmoins la juste colère de son maître...

Il faut donc que la vue et que la méditation de ces vérités terribles nous porte à assister nos frères de nos biens, de nos soins, de notre autorité et de tout ce qui nous sera possible. Car il faut par ce mot de "talent" entendre tout ce par quoi chacun peut contribuer à l’avantage de son frère, soit en le soutenant de son autorité, soit en l’aidant de son argent, soit en l’assistant de ses conseils, soit en lui rendant tous les autres services qu’il est capable de lui rendre.

Et que personne ne dise en lui-même : Que puis-je faire n’ayant reçu qu’un seul talent ? Un seul talent peut vous suffire pour témoigner votre fidélité envers votre maître, et pour vous rendre agréable aux yeux de Dieu. Vous n’êtes pas plus pauvre que cette veuve de l’Evangile qui n’avait que deux petites pièces de monnaie. Vous n’êtes pas plus grossier que ne l’était saint Pierre ou que saint Jean, qui étaient des hommes sans lettres et qui sont devenus néanmoins les princes du ciel, par cette charité catholique et universelle qu’ils ont eue pour toute la terre.

Rien n’est si agréable à Dieu que de sacrifier sa vie à l’utilité publique de tous ses frères. C’est pour cela que Dieu nous a honorés de la raison, qu’il nous a donné la parole, qu’il nous a inspiré une âme, qu’il a formé nos pieds et nos mains, qu’il a répandu la force dans tout notre corps, afin que nous puissions user de toutes ces choses pour le bien de tous les hommes. Car la parole ne nous sert pas seulement pour chanter à Dieu des cantiques de louanges, et pour lui rendre grâces de ces dons : elle nous sert encore pour instruire nos frères, et pour leur donner de saints avis. Si nous sommes fidèles en ce point, nous imiterons Jésus-Christ notre maître, en ne disant aux hommes que ce que Dieu lui-même nous dit dans le coeur. Si au contraire nous y sommes infidèles, nous imiterons le démon. »

Saint Jean Chrysostome (v.345-407), Commentaires sur l'Evangile selon Saint Matthieu, Homélie LXXVIII (2-3), in Oeuvres complètes (Tome VIII) traduites pour la première fois sous la direction de M. Jeannin, Bar-le-Duc, L. Guérin & Cie, 1865.

Source : Abbaye Saint Benoît.

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