« Comme votre esprit divague facilement, vous lui présenterez de temps à autre quelque bonne pensée, quelque passage de l’Écriture Sainte, et vous lui livrerez, dis-je, cette bonne pensée pour qu'il s'y amuse, mais ce ne sera pas là votre oraison ; pendant que l'homme sensible s'amuse avec cette pensée, vous vous tiendrez toujours dans votre intérieur, uni à Dieu à votre façon ordinaire. Il en est de cela comme de quelqu'un qui serait à table, son petit chien aboie contre lui, parce qu'il veut aussi avoir quelque chose, il le tourmente sans relâche et le tire par ses habits. Que fait alors le maître ? Il lui jette un morceau, et puis mange quelque temps en repos. Faites-en de même avec votre esprit ; jetez-lui de temps en temps un morceau pour le contenter, et demeurez toujours renfermé en toute paix et tranquillité dans votre intérieur. Votre oraison ne consistera pas dans cette bonne pensée que vous abandonnez à votre esprit, mais dans le repos intérieur de votre âme devant Dieu. Je sais bien que ce moyen ne vous servira pas toujours, mais, du reste, ne vous inquiétez jamais, allez toujours votre petit train, et ne cherchez que Dieu seul en toutes choses. »
Vénérable François Libermann (1802-1852), Lettre 76 à un séminariste, 1837, cité par Auguste Saudreau, in "Les degrés de la vie spirituelle" Tome Second (3e P., ch. III, 3), Angers, Société anonyme des Éditions de l'Ouest, 1920.