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misère - Page 2

  • Méditation : Le trésor incomparable des miséricordes de Dieu

    « Mes délices sont d'être avec les enfants des hommes (1) ! O mon Seigneur, quelle parole que celle-là ! Chaque fois que je l'aie entendue, elle a toujours été pour moi, même au milieu de mes grandes infidélités, la source des consolations les plus vives. Mais, ô mon Dieu, serait-il possible de trouver une âme qui, après avoir reçu de Vous des faveurs si élevées, des joies si intimes, et compris que vous mettiez en elle vos délices, vous ait offensé de nouveau, et ait oublié tant de faveurs et tant de marques de votre amour dont elle ne pouvait douter puisqu'elle en voyait les effets merveilleux ? Oui, cela est possible, je l'affirme. Il y a une âme qui vous a offensé, non pas une fois seulement, mais souvent, et cette coupable, c'est moi, ô mon Dieu ! Plaise à votre Bonté, Seigneur, que je sois la seule âme de cette sorte, la seule qui soit tombée dans une malice si profonde et qui ait manifesté un tel excès d'ingratitude ! Sans doute, vous avez daigné, dans votre infinie Bonté en tirer quelque bien ; et plus ma misère a été profonde, plus aussi elle fait resplendir le trésor incomparable de vos miséricordes. Et avec combien de raison ne puis-je pas les chanter éternellement ! Je vous en supplie, ô mon Dieu, qu'il en soit ainsi, que je puisse les chanter, et les chanter sans fin ! Vous avez daigné me les prodiguer avec tant de magnificence ! »

    1. Prov. 8, 31.

    Ste Thérèse de Jésus (d'Avila, 1515-1582), Vie écrite par elle-même (ch. XIV), in "Œuvres complètes", Trad. R.P. Grégoire de Saint Joseph, Éditions du Seuil, Paris, 1948.

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  • Méditation : La miséricorde de Dieu n'a point de bornes

    « La vue de vos faiblesses vous décourage trop. Il faut avoir plus de confiance en la bonté de Dieu. Ce qu'il a fait pour votre salut est une marque qu'il vous aime, et ses miséricordes sont plus grandes sur vous que vous ne le concevez. Si vous aviez les yeux aussi ouverts à son amour et aux motifs qui vous devraient obliger de vous confier en lui, comme vous les avez ouverts à vos misères et à ces sujets qui vous abattent, vous seriez bientôt délivré de vos peines. Car, soit qu'elles naissent de votre propre infirmité ou de la multitude de vos péchés, tout cela ne vous paraîtrait rien auprès de l'étendue des biens qu'une foi vive et constante vous ferait trouver en Jésus-Christ.

    Je vous conseille d'avoir souvent en vue sa miséricorde infinie, qui absorbe tout péché, comme une fournaise ardente consume en un moment un brin de paille, ou comme le vaste océan absorbe dans son sein un grain de sable qu'on y jette. La miséricorde de Dieu n'a point de bornes : elle est immense, et nos péchés devant elle ne sont rien qu'un atome. Sa grande gloire est d'engloutir les plus grands crimes. Plus elle en absorbe, plus elle paraît éclatante. De la multitude de nos péchés et de nos misères immenses il prend sujet de faire sa puissance et d'exalter la grandeur infinie de sa bonté. C'est là le grand fondement de la confiance chrétienne, dont vous devez vous servir souvent pour vous soutenir dans vos abattements, et pour vous fortifier contre vos craintes. »

    M. Jean-Jacques Olier (1608-1657), Lettres spirituelles, extrait de la Lettre LVIII, in "Œuvres complètes" publiées par M. l'Abbé Migne, J.-P. Migne Éditeur, 1856.

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  • Méditation : Humilité et Providence divine (1)

    « Si vous ne vous rendez semblables à des enfants, vous n'entrerez point dans le royaume du ciel... Laissez venir à moi les petits enfants, car c'est à ceux qui leur ressemblent qu'appartient le royaume des cieux. (Mt XVIII, 3-4 ; Lc XVIII 16-17) »

    « Lorsque l'enfant s'est souillé, il ne peut se laver ; un autre doit lui rendre ce service ; s'il tombe, il est incapable de se relever sans le secours d'autrui ; une fois relevé, il ne peut même pas se tenir debout si on ne le soutient, ni faire un pas sans appui ; a-t-il faim ou soif, il ne peut ni manger, ni boire que ce qu'on lui présente ; qu'un ennemi le mette en danger, qu'il souffre du froid ou de quelque incommodité, il ne pourra ni se défendre, ni se soulager par lui-même. Enfin, pour comble de misère, il ne sait ni ne peut demander ce qui lui manque, ne s'en rendant même pas compte.

    Voilà ce qui caractérise les tout-petits ; telles sont leurs misères ; elles n'ont qu'un remède : la tendre sollicitude, l'amour plein de compassion de leur maman... Je me verrai donc devant Dieu comme un tout-petit, et m'appliquerai les différentes marques de faiblesse que nous venons d'énumérer.

    1. Ma misère est telle que ma volonté libre, laissée à elle-même, peut pécher et se souiller de mille manières ; mais ensuite, impossible de me laver, de me purifier si Dieu ne le fait lui-même : Seigneur, dois-je donc dire avec David, lavez-moi complètement de mon iniquité et purifiez-moi de mon péché (1).

    2. Le poids de mes inclinations charnelles et de ce corps terrestre, qui alourdit l'âme, me fait pour un rien donner du nez en terre, et j'y reste fixé par mon affection désordonnée aux choses de ce monde, car je suis le fils de l'Adam terrestre ; une fois tombé, je ne puis donc pas me relever, mais il faut que Dieu me tende la main et me redresse, sans quoi je resterais toujours dans la poussière, comme la maison d'Israël dont parlait Amos : La voilà tombée, jamais elle ne retrouvera sa splendeur (2).

    3. Si Dieu, par miséricorde, me relève ; s'il me place debout en me communiquant quelque courage ou sentiment de dévotion, je reste impuissant à me maintenir debout, à conserver ses dons, à réaliser le moindre progrès sans son aide ; aussi devrai-je toute ma vie craindre les rechutes, selon l'avertissement de saint Paul : Que celui qui pense se tenir debout prenne garde de tomber (3).

    4. Si j'ai faim et soif des choses saintes, comme des sacrements, de la parole de Dieu, et autres bonnes œuvres, je ne puis par mes seules forces ni les chercher efficacement, ni m'en nourrir avec profit, à moins qu'en tout cela Dieu ne me secoure ; et s'il naît en moi quelque désir de me rendre meilleur, ce désir restera vain si le Seigneur, qui me l'a donné, ne m'accorde encore sa grâce pour le réaliser.

    5. Le démon, la chair et le monde me tentent et m'entourent si dangereusement que, livré à moi-même, je suis perdu : Dieu seul peut me délivrer. Quant aux armes pour me défendre, c'est encore le Seigneur seul qui me les donne. Toujours je resterais avec mes fautes, tiède et froid, si Dieu ne me réchauffait du feu de son amour ; et s'il ne me rafraîchissait avec l'eau vive de sa grâce, l'incendie de l'amour-propre ne s'éteindrait jamais dans mon cœur.

    6. Enfin, telle est ma misère que je ne sais même pas ce que je dois, selon mes besoins, demander dans mes prières (4) : il faut que ce soit l'Esprit Saint qui me l'enseigne ; même aveuglement sur mes périls et mes besoins, à moins que Dieu ne m'en découvre la gravité. »

    « C'est vouloir que Dieu nous abandonne que de nous attribuer ce qu'il y a de bien en nous. Il faut ne rien être à ses propres yeux pour devenir un instrument entre les mains du Créateur. Voulez-vous ne cesser jamais de lui être agréable, n'oubliez en aucun temps que vous n'êtes absolument que ce que sa main vous a faites, que vous ne pouvez rien que par sa grâce, et que vous ne réussirez que là où il aura mis sa bénédiction. »
    Sainte Angèle Merici, dernier avis à ses filles.

    1. Ps. 50. - 2. Amos V, 2. - 3. I Cor X, 12. - 4. Rom VIII, 26.

    P. J.-B. Gosselin s.j., Sujets d'oraison pour tous les jours de l'année, Tome V (54), 2ème édition revue et augmentée, Apostolat de la Prière, Toulouse, 1947.
    Traduction littérale de la Méditation du Vénérable Louis du Pont (VIe partie, sujet I), faite sur l'édition castillane.

    (à suivre demain)

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  • Méditation : De la connaissance de soi-même

    « Au-dedans de nous-mêmes, des témoins intéressés sont toujours prêts à nous vanter la droiture de notre jugement, l'élévation et la profondeur de nos vues, la bonté de notre cœur, la justice, le désintéressement, la modération de notre caractère et mille autres qualités avantageuses dont nous composons un portrait propre à flatter notre vanité. Si un reste de pudeur ne nous permet pas de nous égaler aux plus grands et de nous attribuer ces qualités dans toute leur perfection, du moins nous mettons-nous au-dessus de la foule, et trouvons-nous aisément à qui nous préférer : il est rare surtout, même en convenant, comme l'exige la bienséance, que nous ne sommes pas sans défauts, que nous consentions à reconnaître celui qu'on nous reproche, et nous pouvons, même à nos heures de modestie, nous reconnaître dans ces paroles si vraies de Bossuet. « Au moment, dit-il, où je me crois le plus pénétré du sentiment de ma faiblesse et de ma misère, si quelqu'un va trouver que je n'ai point raison en quelque chose, me voilà plein aussitôt de raisonnements et de justifications. Cette horreur que j'avais de moi-même s'est évanouie, je ressens l'amour-propre, ou plutôt je montre que je ne m'en étais pas défait un seul instant. » - Le fruit de l'opinion que forment en nous ces lumières trompeuses de l'amour-propre, c'est de nous rendre fiers et exigeants à l'égard des autres, susceptibles, ombrageux, jaloux du mérite d'autrui, impatients, présomptueux, ambitieux, et, pour tout dire en un mot, de nourrir et d'exalter cet orgueil naturel que l'Esprit-Saint déclare le principe de tous les maux (1). Telles sont les pensées dont notre amour-propre aime à se repaître ; il faudrait, pour ainsi dire, nous arracher les yeux que nous tenons de la nature, pour nous obliger à voir les choses sous un autre aspect.

    La foi nous tient un bien autre langage ; en nous découvrant la honte de notre origine, souillée par le péché, elle nous y fait voir la source de l'affreuse corruption qui a envahi toutes les puissances de notre corps et de notre âme. Elle nous montre nos sens enclins au mal dès l'enfance, nos passions révoltées contre la raison, l'entraînant sans cesse au mal, qu'elle désapprouve, et lui rendant d'une difficulté extrême le bien, dont elle reconnaît la beauté ; l'ignorance profonde où nous sommes naturellement de ce qu'il nous importe le plus de savoir ; le dérèglement d'une imagination délirante qui vient sans cesse troubler et fausser les opérations de notre esprit ; enfin notre impuissance radicale à rien faire par nous-mêmes dans l'ordre du salut. Cette idée de nous-mêmes, si différente de celle que nous présente l'amour-propre, doit naturellement produire aussi des effets tout opposés. Elle est la source des vertus d'humilité, de modestie, de patience, de la défiance de soi, première condition requise pour que nous tournions comme il faut nos regards vers Dieu, et que nous mettions en lui notre confiance : et comme l'humilité sincère, qui n'est autre chose que la vérité sur le tout de Dieu et le néant de la créature, est le fondement de toutes les vertus, cet humble et véridique jugement sur nous-mêmes, en nous mettant à notre véritable place vis-à-vis de Dieu, des autres hommes et de nous-mêmes, fait bientôt fleurir dans l'âme toutes les vertus. »

    1. Initium omnis peccati est superbia. Eccl. X, 15.

    P. Edouard de Lehen s.j. (1807-1867), La Voie de la Paix intérieure dédiée a Notre-Dame de la Paix, Seconde Partie Chap. VI, Nouvelle édition, Paris, René Haton, 1883 (1ère éd. Paris, 1855).

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    Connais-toi toi-même : La jeunesse entre le vice et la vertu
    Tableau de Jacob Jordaens (1593-1678), Musée des Beaux-Arts de Rennes

  • Méditation : Zèle et pardon

    « Pour exercer le zèle, il faut d'abord ne pas s'offenser des défauts de nos frères, mais les supporter avec compassion et indulgence. « Nous devons, nous qui sommes forts, dit saint Paul, supporter les faiblesses de ceux qui ne le sont pas. » (Rm XV, 1.) D'ailleurs, si nous n'avons pas certains défauts, que nous déplorons chez autrui, si nous sommes plus forts, plus éclairés, nous avons cependant nos misères, et tous nous avons besoin d'indulgence et de bonté. Et le support doit aller jusqu'à la condescendance : « A celui qui veut t'appeler en justice pour avoir ta tunique, dit le Seigneur, abandonne encore ton manteau ; si quelqu'un veut te contraindre à faire mille pas, fais-en avec lui deux mille ; à qui te demande donne ; à qui veut t'emprunter prête. » (Mt V, 40-42.)

    Nous disons chaque jour à Dieu : « Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. » Notre Seigneur qui nous a appris à faire cette prière, a dit encore : « Pardonnez et il vous sera pardonné ; car on vous appliquera la même mesure que celle avec laquelle vous aurez mesuré les autres. » (Lc VI, 37.) Il nous pardonne bien ce grand Dieu, Lui, qui comme dit le prophète, jette au fond de la mer tous nos péchés (Michée VII, 19.) Et cependant les injures qui Lui sont faites par le péché sont bien autrement graves que les offenses, les procédés indélicats, auxquels nous sommes si sottement sensibles. « Il n'y a rien, dit saint Jean Chrysostome, qui nous rende semblables à Dieu comme de demeurer paisibles à l'égard de ceux qui nous offensent. » (Hom. 20 in Matth.) Jésus a dit encore : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour ceux qui vous persécutent et vous calomnient. » (Mt V, 14.) Ce n'est donc pas un demi-pardon que Jésus veut de nous, mais un pardon complet. Par là non seulement nous obtiendrons le complet pardon de nos fautes, mais nous attirerons sur nous des grâces puissantes, qui nous feront faire de grands progrès dans la vertu. »

    Auguste Saudreau (1859-1946), Manuel de spiritualité (Chap. XIV, 4), Deuxième édition, Charles Amat - Paris / Brunet - Arras / Imp. G. Grassin - Angers, 1920.
    (Le P. Saudreau fut aumônier des religieuses du Bon Pasteur à Angers, de 1895 à sa mort)

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  • Méditation : « Dieu est plus grand que notre coeur » (1Jn 3,20)

    « Combien vous [Dieu] êtes bon envers les pécheurs, et que votre miséricorde est au-dessus de toute malice, que rien n'est capable de l'épuiser, que nulle rechute, quelque honteuse et criminelle qu'elle soit, ne doit porter un pécheur au désespoir du pardon. Je vous ai gravement offensé, ô mon aimable Rédempteur ; mais ce serait encore pis, si je vous faisais cet horrible outrage de penser que vous n'êtes pas assez bon pour me pardonner. [...] Quand je serais retombé cent fois et que mes crimes seraient cent fois plus horribles qu'ils ne le sont, j'espérerais encore en vous. »
    St Claude la Colombière, Lettre 96, in Gérard Dufour, "A l'école du Cœur de Jésus", Éditions de l'Emmanuel, Paris, 1992.

    « Il n'y a pas de misère qui puisse se mesurer à ma miséricorde, ni de misère qui puisse en venir à bout puisqu'au moment de se communiquer - ma miséricorde s'amplifie. L'âme qui fait confiance à ma miséricorde est la plus heureuse car je prends moi-même soin d'elle. »
    Jésus à Ste Faustine, in "Petit Journal" n° 1273, Parole et Dialogue, Paris, 2002 (deuxième édition).

    « Ayez une grande confiance en Dieu et ne vous défiez jamais de sa miséricorde qui surpasse infiniment toutes nos misères. Jetez-vous souvent entre ses bras ou dans son divin Cœur. »
    Ste Marguerite-Marie, « Avis particuliers » n° 22, in "Vie et Œuvres de sainte Marguerite-Marie Alacoque" Tome II, éd. Saint-Paul, Paris, 1990-1991.

    Toutes citations in Joël Guibert, "Rendre amour pour amour - Une spiritualité du Cœur de Jésus" (Deuxième partie, I), Pierre Téqui, Paris, 2015.

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  • Méditation : Qu'est-ce que la miséricorde ?

    « Selon l'étymologie, la miséricorde consiste à jeter son cœur dans la misère d'autrui, à aimer l'autre au cœur de sa misère. Mais la miséricorde exige, avant de nous inonder de sa bienveillance, la vérité, la justice et le repentir. En Dieu, la miséricorde va se faire « pardon ». Nous sommes ainsi au centre du message évangélique.
    Le pardon est le visage le plus marquant de l'amour de Dieu pour l'homme. Ainsi saint Pierre demanda à Jésus : « Seigneur, combien de fois mon frère pourrait-il pécher contre moi et devrais-je lui pardonner ? Irais-je jusqu'à sept fois ? Jésus lui dit : je ne dis pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à soixante-dix-sept fois » (Mt 18, 21-22). Autrement dit, inlassablement...
    En fait, il nous faut aimer comme Dieu. Dieu connaît les déchéances et les grandes faiblesses de l'homme, mais Il jette son cœur sur notre misère. Dieu se réjouit de nous pardonner. Le pardon consiste à recommencer à aimer avec plus de gratuité et de générosité lorsque l'amour a été mis à mal.
    Sans la grâce de Dieu, sans un regard fixé sur le crucifix d'où nous parvient la voix de Jésus priant pour ses bourreaux, et si nous n'ouvrons pas la faille de nos cœurs pour les greffer au cœur transpercé et débordant d'amour de Celui qui vient brûler nos péchés, il nous sera difficile de pardonner, car cet acte exige de donner en plénitude. Il faut être débordant d'amour, il faut être surabondant d'amour pour accéder à la vérité du pardon. La meilleure imitation de Jésus, c'est le pardon. Dans l’Évangile, le fils prodigue, la femme adultère, Marie Madeleine, sont des exemples merveilleux du pardon que le Christ nous donne à imiter.
    Dieu est pardon, amour et miséricorde ; la nouveauté radicale du christianisme se situe ici et nulle part ailleurs. Les hommes doivent pardonner comme Dieu lui-même pardonne de manière inlassable. Nous avons été façonnés par Dieu, et il nous suffit de nous souvenir de nos origines divines pour accéder sans peine à sa volonté qui nous demande d'être parfaits comme notre Père céleste est parfait dans la miséricorde. Le pardon permet toujours une recréation de l'homme, car il s'agit d'une chance venue du Ciel... »

    Cardinal Robert Sarah, Dieu ou rien - Entretien sur la foi (ch. VII), Fayard, 2015.

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  • Méditation 5ème semaine de Carême : le luxe (1)

    « Heureusement que la charité et le dévouement nous demeurent encore dans une élite de la société chrétienne, pour amoindrir les effets que produit sous nos yeux le luxe contemporain. Ah ! le ciel en soit béni ! la charité est vivante encore parmi nous, et elle défend la misère des injures d'un luxe égoïste et brutal. Mais, nous essayerions en vain de nous le dissimuler, ce luxe des vêtements, des habitations, des ameublements et des festins, qu'on croirait mieux d'un peuple païen vivant sous l'emprise de l'égoïsme, que d'un peuple chrétien élevé dans la loi d'amour, ce luxe a je ne sais quoi qui insulte l'humanité autant que l’Évangile, quelque chose d'inhumain. Ce luxe si brillant, si soyeux, si élégant, si poli, est comme le tigre : sous sa robe lustrée et chatoyante il porte des instincts féroces ; c'est un monstre qui mange le pain de ceux qui ont faim et boit les larmes de ceux qui pleurent. Aussi, partout, sur ce luxe qui se déploie aux regards des affamés, insolent et provocateur, mon oeil consterné croit voir des pleurs, pour ne pas dire du sang ; tant il y a de douleurs qui gémissent, de misères qui souffrent, et quelquefois de vies qui meurent de ces raffinements cruels !... »

    R.P. C.J. Félix s.j. (1810-1891), Le Progrès par le christianisme - Conférences de Notre-Dame de Paris, Année 1857 (Sixième conférence : le luxe obstacle au progrès), 4e édition, Paris, Librairie d'Adrien Le Clere et Cie, s.d.

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    Le pauvre Lazare et le banquet du mauvais riche, tableau de Leandro Bassano (1557-1622)

  • Méditation 2ème semaine de Carême : égoïsme et amour de Jésus-Christ (6)

    « Que pouvait-il sortir du triomphe de l'amour et de la défaite de l'Egoïsme, si ce n'est le dévouement ? Quand l'homme a cessé de se donner à lui-même, quel autre besoin peut-il éprouver, si ce n'est le besoin de se donner aux autres, c'est-à-dire de se dévouer ? Dieu a creusé au fond du cœur humain comme un immense réservoir d'amour d'où les dévouements peuvent jaillir toujours. Mais l'Egoïsme, posé au cœur humain par le péché, était comme la pierre qui y scellait la source des dévouements, et retenait dans son fonds cette eau vive et féconde qui a besoin de se répandre. Jésus-Christ a ôté cette pierre ; et de tous les cœurs d'où l'Egoïsme s'est retiré, les dévouements vont déborder pour se répandre sur toutes les misères ; ils vont former dans l'humanité chrétienne ce fleuve vaste et profond de la charité qui, coulant à travers les siècles, ira grandissant tous les jours par les milliers d'affluents grossir son cours...

    Ah ! dans ces dévouements que l'amour de Jésus-Christ fera sortir du cœur humain, quelle multiplicité ! et dans cette prodigieuse multiplicité, quelle unité plus prodigieuse encore ! multiplicité des dévouements sortant d'un même amour pour y retourner sans cesse, comme on voit tous les fleuves aller se verser dans l'abîme d'un même océan, d'où ils sont sortis par mille canaux mystérieux pour arroser la terre. Ces dévouements créés pour toutes les misères, qui les comptera ! qui pourra dire, avec leur nombre, leurs divines industries ? Il y en aura pour les vieillards, il y en aura pour les enfants, il y en aura pour les veuves, il y en aura pour les orphelins, il y en aura pour les sourds, il y en aura pour les muets, il y en aura pour les aveugles, il y en aura pour les paralytiques, les estropiés, les lépreux, les captifs ; il y en aura pour ceux qui manquent de pain, de travail, de santé. Aussi intelligent que libéral, le dévouement chrétien visitera, pour se donner à elles, toutes les misères humaines, il découvrira toutes les douleurs, sondera toutes les blessures, devinera tous les malheurs : et il trouvera pour chaque douleur un soulagement, pour chaque blessure un remède, et pour tout malheur une consolation ; il attestera enfin par les miracles du sacrifice la défaite de l'Egoïsme au fond du cœur humain : et il prouvera par la plus invincible démonstration que comme Jésus-Christ pose dans sa doctrine le fondement de tous les progrès, il leur donne par son amour leur couronnement sublime. »

    R.P. C.J. Félix s.j. (1810-1891), Le Progrès par le christianisme - Conférences de Notre-Dame de Paris, Année 1858 (Septième conférence : le progrès moral par la destruction de l'égoïsme), 4e édition, Paris, Librairie d'Adrien Le Clere et Cie, s.d.

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    Rembrandt (1606–1669) : Le Christ prêchant
    (Bibliothèque Nationale de France, Paris, Inv. W.B. 74.2, Bartsch 74)

  • Méditation 1ère semaine de Carême : humilité et sainteté (4)

    « Le malheur, le grand malheur de beaucoup d'hommes de notre temps, si vous voulez le savoir, le voici : c'est d'ignorer encore ce premier élément de perfection chrétienne. Comme nous et avec nous, tous vous voulez le progrès moral de l'humanité. Je vous adjure de répondre ici à la vérité qui vous interroge : Que vous manque-t-il par dessus tout pour entrer dans cette voie, et y entraîner les autres après vous ? pour féconder en vous-mêmes tous ces germes de grandeur que Dieu a laissés tomber de son sein au fond de vos riches natures, que faudrait-il ? Une seule chose, l'humilité. Un acte d'humilité volontaire, un seul, ferait de plus de mille d'entre vous des prodiges de vertus et des instruments de progrès. L'humiliation volontaire du repentir ferait en vous cette transfiguration, par où il faut passer pour monter vers le parfait. Mais on ne veut pas ; on se croit trop grand pour s'abaisser dans l'aveu de sa misère, et cette conviction superbe fait qu'on ne sortira jamais de sa misère. »

    R.P. C.J. Félix s.j. (1810-1891), Le Progrès par le christianisme - Conférences de Notre-Dame de Paris, Année 1858 (Troisième conférence : le progrès moral par l'humilité chrétienne), 4e édition, Paris, Librairie d'Adrien Le Clere et Cie, s.d.

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    Saint Dominique en prière, El Greco (1541-1614)
    (Collection privée - Source)

  • Méditation 1ère semaine de Carême : humilité et sainteté (3)

    « C'est le fait dominant dans la vie de tous les saints : le progrès dans la perfection et le progrès dans l'humilité, se rencontrant dans une harmonie parfaite. On se demande souvent avec surprise, comment ont fait les saints illustres pour croire à leur néant ? Dignes de tant de respects, d'où leur venait l'ambition de tant de mépris ? Si grands dans leurs vertus, et souvent par leurs œuvres, comment arrivaient-ils à se trouver petits ? Comment le miracle de la sainteté n'effaçait-il pas en eux le miracle de l'humilité ? Messieurs, à cette question il y a une réponse : leur sainteté était leur humilité même : l'une croissait avec l'autre, parce que l'une sortait de l'autre, ou plutôt parce que l'une était l'autre. La vue de leur imperfection et l'ambition d'être parfaits, le sentiment de leur vide et la passion de la plénitude, la conviction de ce qui leur manque et le besoin de se compléter, croissent et se développent ensemble dans la vie des saints. Ils sentent l'harmonie profonde de ces deux paroles de l’Évangile : Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ; Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur. Ils entendent Jésus-Christ qui leur révèle au plus intime de l'âme ce secret unique de leur progrès : Apprenez à descendre dans l'abîme de votre misère et de votre néant, pour entrer par moi et avec moi dans la grandeur et l'infini de Dieu. »

    R.P. C.J. Félix s.j. (1810-1891), Le Progrès par le christianisme - Conférences de Notre-Dame de Paris, Année 1858 (Troisième conférence : le progrès moral par l'humilité chrétienne), 4e édition, Paris, Librairie d'Adrien Le Clere et Cie, s.d.

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  • Méditation : "tout concours au bien de ceux qui aiment Dieu"

    « Apprenons à espérer constamment en notre Sauveur, jusqu'à ce qu'il vienne enfin nous consoler de ses grâces. Apprenons à ne pas nous lasser de souffrir, puisque c'est dans les souffrances que nous trouverons la vie. Et si l'extrémité des dangers affaiblit notre espérance, fortifions-nous par ces mêmes dangers en nous remettant en l'esprit que nous sommes à la veille de notre repos ; et que l'heure heureuse approche, que le Seigneur nous doit délivrer, puisque nous sommes dans le plus fort de la tribulation. Ainsi nous voyons dans l’Évangile qu'il laissa les Disciples sur la Mer, plus de la moitié de la nuit, agités des flots et tourmentés de la tempête ; et qu'à la fin il vint à eux pour les rassurer par sa présence, et pour les tirer de l'orage. Ainsi nous lisons dans l'Exode que lorsque le peuple Juif gémissait le plus sous le joug de la servitude, Dieu vint le délivrer, et lui apprendre qu'il ne l'avait ainsi éprouvé que pour lui imprimer la crainte, afin qu'en le craignant il ne péchât point. Et ainsi, ma Fille, il viendra à vous, lorsque vous penserez le moins à cette grâce, et lorsque vous serez le plus tourmentée. Cependant s'il vous semble que vous voudriez vivre si saintement, que vous puissiez employer à la gloire de Dieu tous les moments de votre vie, sachez qu'il y a des âmes si enflées de présomption, qu'elles ne peuvent reconnaître leur faiblesse, qu'en souffrant des grandes tentations, et quelquefois même de très grandes chutes. Car ces sortes de personnes sont si lâches à servir Dieu, qu'ils ne pourraient pas s'approcher de lui, si lui même ne les y poussait comme à coups d'éperon. Ils ont le cœur si dur, qu'il n'y a que le marteau des souffrances qui le puisse briser : comme la vanité de leurs pensées les aveugle, il faut qu'ils tombent en quantité d'égarements, afin d'acquérir de la prudence. Et comme enfin il s'estiment excessivement quand ils font quelque bonne œuvre, ils ont besoin de tomber en beaucoup de maux, afin de s'humilier devant Dieu et envers le prochain. Ainsi, dis-je, Dieu permet qu'ils soient accablés d'adversités, qu'ils souffrent de grandes peines, qu'ils aient l'esprit couvert de ténèbres ; et qu'ils succombent même à beaucoup de péchés, afin de les en délivrer dès qu'ils commenceront à s'humilier dans le sentiment de tant de misères. Il les laisse venir jusqu'en Babylone, pour les tirer de la main de leurs ennemis, selon le langage du Prophète : car la confusion où ils sont de leurs chutes les humilie et leur fait demander à Dieu le remède qu'ils n'eussent peut-être pas recherché s'ils ne fussent tombés, et qu'ils eussent peut-être perdu par leur arrogance, ou par leur tiédeur.

    Soyez donc, ô mon Dieu, soyez éternellement adoré, que toutes vos créatures vous bénissent à jamais, et que tous les hommes reconnaissent la grandeur de votre puissance, qui rend dignes du Ciel ceux qui étaient dignes de l'Enfer, et qui rend votre gloire aussi grande à pardonner aux pécheurs, comme à faire des justes et à les soutenir. Car vous sauvez par la douleur et par le regret d'un cœur contrit et humilié, celui qui ne pouvait vous être fidèle ; vous faites que nos offenses nous rendent humbles et prudents, et ardents à votre service. Enfin, que ceux qui vous ont le plus offensé vous aiment davantage, parce que vous leur pardonnez plus abondamment. En quoi nous reconnaissons l'accomplissement de ces paroles de votre Apôtre : "que vous faites avantage de tout à ceux qui vous aiment" (italiques), et de leurs péchés mêmes, selon saint Augustin. »

    St Jean d'Avila (1499-1569), Œuvres chrestiennes sur le verset Audi Filia et Vide (chap. XXIV), A Paris, Chez Edme Couterot, 1662.

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  • Méditation : de la tristesse

    « Pour ce qui regarde une certaine tristesse qui resserre le cœur et qui l'abat, voici deux règles qu'il me paraît important d'observer. La première est de remédier à cette tristesse par les moyens que la Providence nous fournit : par exemple, ne se point surcharger d'affaires pénibles, pour ne point succomber sous un fardeau disproportionné ; ménager non seulement les forces de son corps, mais encore celles de son esprit, en ne prenant point sur soi des choses où l'on compterait trop sur son courage ; se réserver des heures pour prier, pour lire, pour s'encourager par de bonnes conversations ; même s'égayer pour délasser tout ensemble l'esprit avec le corps, suivant le besoin...
    La seconde règle est de porter paisiblement toutes les impressions involontaires de tristesse que nous souffrons, malgré les secours et les précautions que nous venons d'expliquer. Les découragements intérieurs nous font aller plus vite que tout le reste dans la voie de la foi, pourvu qu'ils ne nous arrêtent point, et que la lâcheté involontaire de l'âme ne la livre point à cette tristesse qui s'empare, comme par force, de tout l'intérieur...
    Ô mon Dieu ! pourvu que je ne cesse de vous voir, je ne cesserai point de me voir dans toutes mes misères, et je me verrai bien mieux en vous qu'en moi-même. La vraie vigilance est de voir en vous votre volonté pour l'accomplir, et non de raisonner à l'infini sur l'état de la mienne.
    Quand les occupations extérieures m'empêcheront de vous voir seul, en fermant dans l'oraison les avenues de mes sens, du moins alors, Seigneur, je vous verrai faisant tout en tous. Je verrai partout avec joie votre volonté s'accomplir, et au dedans de moi et au dehors ; je dirai sans cesse amen ! comme les bienheureux, je chanterai toujours dans mon cœur le cantique de la céleste Sion ; je vous bénirai même dans les méchants, qui par leur volonté mauvaise ne laissent pas d'accomplir malgré eux votre volonté toute juste, toute sainte, toute-puissante. »

    P. Edouard de Lehen s.j., La voie de la paix intérieure, dédiée à Notre-Dame de la Paix (ch. IV, art. XIV), Paris, René Haton, 1876 (1ère éd. Vve Poussielgue-Rusand, 1855).

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  • Méditation : « Je suis Jésus que tu persécutes »

    « Les impies se croient héroïques de résister à un Tout-Puissant. Ces superbes, dont quelques-uns ne sont pas inaccessibles à la pitié, pleureraient de honte, s'ils pouvaient voir la faiblesse, la misère, la désolation infinies de Celui qu'ils bravent et qu'ils outragent. Car Dieu, qui s'est fait pauvre en se faisant homme, est, en un sens, toujours crucifié, toujours abandonné, toujours expirant dans les tortures. Mais que penser de ceux-ci qui ne connurent jamais la pitié, qui sont incapables de verser des larmes, et qui ne se croient pas impies ? Et que penser enfin de ceux-là qui rêvent la vie éternelle, en bras de chemise et en pantoufles, au coin du feu de l'enfer ?

    ... Je vous ai parlé des locataires pauvres dont cette paroisse est suffisamment approvisionnée, et qui tremblent déjà, en songeant à ce que vous pouvez leur faire souffrir demain. Ai-je parlé à une seule âme vraiment chrétienne ? Je n’ose le croire.

    Ah ! que ne puis-je crier en vous ! sonner l’alarme au fond de vos cœurs charnels ! vous donner l’inquiétude salutaire, la sainte peur de trouver votre Rédempteur parmi vos victimes ? Ego sum Jesus quem tu persequeris ! est-il dit à saint Paul fumant de rage contre les chrétiens, qui étaient alors comme les locataires de la Cité du Démon et qu’on pourchassait de gîte en gîte, l’épée ou la torche dans les reins, jusqu’à ce qu’ils payassent de tout leur sang le logis permanent des cieux. Je suis Jésus que tu persécutes !

    On sait que ce Maître s’est souvent caché au milieu des indigents, et quand nous faisons souffrir un homme plein de misère, nous ne savons pas quel est celui des membres du Sauveur que nous déchirons. Nous avons appris du même saint Paul qu’il y a toujours quelque chose qui manque aux souffrances de Jésus-Christ, et que ce quelque chose doit être accompli dans les membres vivants de son Corps.

    — Quelle heure est-il ? Père, disent à Dieu ses pauvres enfants, tout le long des siècles, car nous veillons « sans savoir le jour ni l’heure ». Quand finira-t-on de souffrir ? Quelle heure est-il à l’horloge de votre interminable Passion ? Quelle heure est-il ?... »

    Léon Bloy (1846-1917), La femme pauvre (ch. XXIII), Paris, Bernouard, 1897 - Paris, Georges Crès et Cie, " Les maîtres du livre", 1924.

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  • Méditation : la simplicité, une grâce à demander...

    « Notre Seigneur nous fait connaître combien la simplicité lui est agréable par ces paroles qu'il adresse à Dieu son Père : Confiteor tibi, Pater, quia abscondisti haec sapientibus et prudentibus, et revelasti ea parvulis (Mt 11, 25). Je reconnais, mon Père, et je vous en remercie, que la doctrine que j'ai apprise de vous, et que je répands parmi les hommes, n'est connue que des petits et des simples, et que vous permettez que les sages et les prudents du monde ne l'entendent pas, et que le sens et l'esprit de cette divine doctrine leur soit cachée. [...]
    Or pour bien connaître l'excellence de cette vertu, il faut savoir qu'elle nous approche de Dieu, et qu'elle nous rend semblables à Dieu, dans la conformité qu'elle nous fait avoir avec lui, en tant qu'il est un être très simple, et qu'il a une essence très pure qui n'admet aucune composition ; si bien que ce que Dieu est par son essence, c'est cela même que nous devons tâcher d'être par vertu, autant que notre faiblesse et misère en est capable. Il faut avoir un cœur simple, un esprit simple, une intention simple, une opération simple ; parler simplement, agir bonnement, sans user d'aucun déguisement ni artifice, ne regardant que Dieu, auquel seul nous désirons plaire. [...]
    Or je vous demande, mes Frères, si cette vertu de simplicité n'est pas belle et désirable ? Et s'il n'est pas juste et raisonnable de se garder avec grand soin de tous ces déguisements et artifices de paroles et d'actions ? Mais pour l'acquérir il la faut pratiquer, et ce sera par les fréquents actes de la vertu de simplicité que nous deviendrons vraiment simples, avec le secours de la grâce de Dieu, que nous devons souvent lui demander. »

    St Vincent de Paul, in Louis Abelly, "Vie de S. Vincent de Paul", Tome IV, Livre III ch. XXXIV, Nouvelle édition, Paris, 1823 / "Conférences, Discours, Exhortations et Fragments divers de Saint Vincent de Paul", XXXV. Conférence sur la simplicité (Abelly t. II), in "Collection intégrale et universelle des orateurs chrétiens", Deuxième série, publié par Jacques-Paul Migne, 1805 (Google Books).

    NB : Du même et sur le même sujet, voir également la méditation proposée le 19 juillet 2014.

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    Tiffany Glass & Decorating Company (v.1890)
    (Source et crédit photo)

  • Méditation : le Corps Eucharistique de Notre Seigneur

    « Pour avancer réellement dans la voie de la prière véritable et bien faite, il n'est pas de secours plus grand et plus utile que l'adorable et précieux corps eucharistique de Notre Seigneur Jésus Christ que l'homme doit recevoir en temps convenable, afin de s'y renouveler et de s'y régénérer pleinement. Mes chers enfants, vous devez être extraordinairement reconnaissants de ce que cette grande grâce vous soit plus souvent accordée qu'auparavant et vous devez en user plus que de tout autre secours ; car la nature est aujourd'hui si faible et si prompte à tomber en une foule de fautes et de péchés, que l'homme a grand besoin de puissants secours pour se relever et d'un appui pour se soutenir ; et cela, cette divine nourriture l'est plus que toute autre chose.
    [...]
    Il n'est pas du tout nécessaire d'avoir une grande dévotion bien sentie et d'avoir fait de grandes œuvres extérieures, il suffit qu'on soit sans péché mortel, qu'on ait le désir d'être bon, qu'on se tienne dans une humble révérence, qu'on se confesse indigne et qu'on reconnaisse sa misère. Cela suffit, mais cela est nécessaire et fort utile. Si l'homme veut continuer à se garder des chutes et des fautes graves, il est grandement nécessaire qu'il soit nourri de cette noble et forte nourriture ; elle l'entraîne en avant et l'élève jusqu'au sommet d'une vie divine... Vous devez vous hâter d'aller [à la table sainte], car c'est de là que viennent, c'est là que sont déposées et cachées toute force, toute sainteté, toute aide et toute consolation. »

    Jean Tauler, Sermon 48 (1 & 3, extraits), Éditions du Cerf, Paris, 1991.

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  • Méditation : livrés à l'Amour...

    « Vivons d'amour, soyons simples comme elle (*), livrées tout le temps, nous immolant de minute en minute en faisant la volonté du bon Dieu sans rechercher des choses extraordinaires. Et puis faisons-nous toutes petites, nous laissant porter, comme l'enfant dans les bras de sa mère, par Celui qui est notre Tout. Oui, ma petite sœur, nous sommes bien faibles, je dirais même nous ne sommes que misère, mais Il le sait bien, Il aime tant nous pardonner, nous relever, puis nous emporter en Lui, en sa pureté, en sa sainteté infinies ; c'est comme cela qu'Il nous purifiera par son contact continuel, par des attouchements divins. Il nous veut si pures, mais Lui-même sera notre pureté : il faut nous laisser transformer en une même image avec Lui, et cela tout simplement, en aimant tout le temps cet amour qui établit l'unité entre ceux qui s'aiment !

    Moi aussi, je veux être sainte, sainte pour faire son bonheur. Demandez-Lui que je ne vive plus que d'amour, « c'est ma vocation ». Et puis unissons-nous pour faire de nos journées une communion continuelle : le matin éveillons-nous dans l'Amour, tout le jour livrons-nous à l'Amour, c'est-à-dire en faisant la volonté du bon Dieu, sous son regard, avec Lui, en Lui, pour Lui seul. Donnons-nous tout le temps sous la forme qu'Il veut... Et puis, quand vient le soir, après un dialogue d'amour qui n'a pas cessé en notre cœur, endormons-nous encore dans l'Amour. Peut-être verrons-nous des fautes, des infidélités, abandonnons-les à l'Amour : c'est un feu qui consume, faisons ainsi notre purgatoire dans son Amour ! »

    (*) : "elle" désigne Ste Thérèse de l'Enfant-Jésus, à qui elle a recommandé sa correspondante à qui elle adresse cette lettre. Ce passage résume nombre d'aspects de la spiritualité de la sainte du Carmel de Lisieux.

    Bse Élisabeth de la Trinité, extrait de la Lettre à Germaine de Gemeaux [20 août 1903], in "Œuvres complètes", Éditions du Cerf, Paris, 1980.

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  • Méditation : ne jamais abandonner l'oraison

    « Ô mon Dieu ! qu'il nous est utile de connaître la grandeur de notre misère. Sans cette connaissance, il y aura pour nous du danger partout. Saint Pierre croyait être très courageux ; voyez ce qu'il fut à l'épreuve. Mais se relevant de sa chute, il se défia de lui-même, et mettant toute sa confiance en Dieu, il endura le martyre avec ce courage que tout le monde a vu. c'est pourquoi il nous est avantageux que l'on nous commande des choses qui nous fassent voir notre bassesse. Selon moi, un seul jour d'humiliation et de connaissance de soi-même, fallût-il l'acheter au prix d'afflictions et de souffrances amères, est une plus grande faveur de Dieu que plusieurs journées d'oraison.

    Pour l'amour de Dieu qu'on y fasse une attention sérieuse qu'une âme qui reçoit dans l'oraison de grandes faveurs, peut tomber encore ; qu'ainsi elle ne doit point se fier à elle-même, ni s'exposer en aucune manière aux occasions. Qu'on pèse cet avis, il est de la plus haute importance. Car le démon a ses artifices, même contre une âme véritablement favorisée de Dieu : il cherche, le traître, à tourner le plus qu'il peut contre elle les grâces destinées à son avancement, et il attaquerait avec succès des personnes qui ne sont point encore ni fortes dans les vertus, ni avancées dans la mortification et le détachement.

    Ah ! plutôt que de permettre encore un seul instant que je sois rebelle au Seigneur, je l'en conjure, qu'à cet instant même il me réduise en cendres ! Il suffit, pour montrer l'excès de sa miséricorde à mon égard, qu'il m'ait si souvent pardonné une si grande ingratitude. Que de fois il a renouvelé en ma faveur un pardon qu'il n'accorda à saint Pierre qu'une seule fois ! Je crois pourtant que lorsque Notre Seigneur élève une âme à une oraison contemplative, il continue de la favoriser, et ne permet pas qu'elle se perde, à moins qu'elle ne s'éloigne entièrement de lui. Mais si, comme je l'ai dit, elle tombe, qu'elle se souvienne, je l'en conjure pour l'amour de Dieu, qu'elle se souvienne de ne pas donner dans le piège du tentateur : qu'elle se garde bien, sous prétexte d'humilité, d'abandonner l'oraison, comme j'eus le malheur de le faire. Qu'elle se confie en la bonté de Dieu : elle est plus grande que tout le mal que nous pouvons faire. »

    Père Alphonse de la Mère des Douleurs (1842-1927), Carme déchaussé, Pratique journalière de l'oraison et de la contemplation divine d'après la méthode de sainte Thérèse et de saint Jean de la Croix, Tome quatrième (Fête des Apôtres SS. Pierre et Paul), Desclée, De Brouwer, Lille - Paris - Bruges, 1916.

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  • Méditation : des "distractions"...

    « Te distraire. - Tu as besoin de te distraire !... En ouvrant les yeux tout grands pour qu'y pénètrent bien les images des choses, ou bien en les tenant presque fermés, à cause de ta myopie...
    Ferme-les tout à fait ! Aie donc une vie intérieure ; tu verras alors, sous des couleurs et dans un relief insoupçonnés, les merveilles d'un monde meilleur, d'un monde nouveau ; tu traiteras avec Dieu..., tu connaîtras ta misère..., et tu te raviras en Lui, d'un ravissement qui, te rapprochant de ton Père, te fera davantage le frère de tes frères, les hommes. »

    St Josemaría Escrivá de Balaguer (1902-1975), fêté ce jour, Chemin, S.E.P.A.L., Paris, 1957-66.

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  • Méditation : misère humaine et grâces de Dieu

    « Combien les prédicateurs, les livres de dévotion, sont-ils fatigants, avec des affirmations du genre de celles-ci :
    "Si nous ne sommes pas davantage saints, c'est parce que nous ne savons pas faire telle ou telle chose"... (nous renoncer, etc.)
    "Si nous ne progressons pas dans l'amour de Dieu, c'est parce que nous ne sommes pas assez fervents, généreux."...
    Pourquoi toujours mettre en cause nos déficiences, comme si elles étaient la raison unique et suprême de notre "médiocrité" ? Pourquoi ne pas avouer que cette "médiocrité" est voulue de Dieu pour la plupart d'entre nous ?
    On prend toujours comme référence un saint Paul, un Curé d'Ars, une Thérèse de l'Enfant-Jésus (quand ce n'est pas la Sainte Vierge ou Notre-Seigneur lui-même !) et l'on affirme : "Si nous ne sommes pas comme eux, c'est notre faute, car Dieu veut, voudrait (!?) nous faire saints comme eux !"

    C'est ignorer l'anti-égalitarisme dont Dieu fait preuve toujours (cf. l'Ancien Testament).
    C'est ignorer que union à Dieu, sainteté, et toutes choses du même genre, relèvent, en grande partie sinon en totalité, du domaine de l'infus. C'est Dieu qui donne ou qui ne donne pas.

    Le propos de Dieu est de faire, de la plupart d'entre nous, non des géants dans l'ordre de la grâce, mais des pygmées. Voilà ce qui, tout autant que nos déficiences ou défaillances, rend notre vie si lourde. Dieu peut, pourrait, nous donner sa grâce à grands flots ; or il nous la donne au compte-goutte ; il nous mène par le chemin du minimum, de la misère spirituelle. Voilà la seule explication vraie. Nous sommes les "petites gens" dont parle Isaïe (1).

    Accepter cette volonté divine, ne pas se scandaliser, patience ; c'est toujours là qu'il faut en revenir. Et n'est-ce pas une attitude plus saine, au point de vue affectif, et plus juste au point de vue théologique, que de se répéter : "Si je ne suis pas plus avancé, c'est parce que je ne sais pas faire ceci ou cela."
    Ne pas arracher à Dieu plus qu'il ne veut donner, c'est le principe numéro un de la vie d'intimité !
    Ne pas avancer la main.
    Quand Dieu t'offrira quelque chose, attend qu'il réitère deux ou trois fois !

    Mon Dieu, il faudra que les dons que vous voudrez me faire m'arrivent sans que je sois obligé d'avancer la main. Car moi, je ne l'avancerai pas ! Je sais trop ce qu'il en coûte de vouloir saisir des appâts que Dieu fait passer à votre portée, mais qu'il ne vous destine pas.

    N'ayons pas peur ! Quand Dieu veut vraiment donner, il sait donner ! »

    (1) : Is 29,19

    Père Jérôme (1907-1985), L'Appel se poursuit, théologie spirituelle - II (Deuxième thèse - Dieu, amour toujours premier), Parole et Silence, 2001.

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