Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

St Grégoire le Grand

  • Méditation - Ecole de contemplation

    « Quand l'âme ne fait que débuter dans la voie de l'amour, sa contemplation est encore grossière et rudimentaire, elle ne goûte pas tout de suite les joies de la contemplation véritable... Et quand elle commencera à entrer sérieusement dans cette contemplation des choses éternelles (Dieu et les choses divines), elle aura d'autant plus de peine à en éprouver les douceurs qu'elle sera moins attentive à leur merveilleuse beauté ; car comment se délecter de merveilles qu'on ne voit pas. De plus, à ses débuts dans la contemplation, elle mettra d'autant plus de temps à s'y élever qu'elle sera plus lente à rejeter les ténèbres qui enveloppent les créatures humaines. En effet, tant qu'elle n'aura pas renoncé aux sollicitudes mondaines, elle aura dans les yeux une poussière qui l'empêchera de voir. Avant tout donc, qu'elle se débarrasse de cette poussière, puis qu'elle fortifie sa vue : elle rejettera la poussière quand elle éloignera de son esprit toutes les images des choses corporelles, elle fortifiera sa vue quand par une méditation assidue elle tournera son attention vers ce qui est éternel. Quand elle se sera de la sorte pendant longtemps habituée à demeurer dans ces régions supérieures, sa persévérance lui vaudra d'être purifiée davantage ; ainsi purifiée, elle verra plus clairement les biens éternels, et, découvrant leurs splendeurs, elle en éprouvera une joie plus vive. [...] Celui qui désire la contemplation voudrait jouir aussitôt des joies surabondantes qu'elle procure, mais l'auteur de ce don, l'Esprit-Saint, ne l'accorde pas si vite ; elle perdrait de son prix si elle était si facile à obtenir ; la jouissance, du reste, en sera d'autant plus douce, et on veillera à garder ce trésor d'autant plus soigneusement, qu'on aura eu plus de peine à l'acquérir. »

    St Grégoire le Grand (540-604), Commentaire sur le Premier Livre des Rois, ch. II n°4 (Cf. SC 391).
    Cité in Abbé A. Saudreau, La vie d'union à Dieu et les moyens d'y arriver d'après les Grands Maîtres de la Spiritualité (n°117), Angers - Paris, Germain & G. Grassin - Charles Amat, 1900.

    nuages_soleil_9a.jpg

  • Méditation : « Sanctifiez le jeûne » !

    « L’homme est une hostie à la fois vivante et immolée lorsque, sans quitter cette vie, il fait cependant mourir en lui les désirs charnels. La chair satisfaite nous a entraînés au péché ; que la chair mortifiée nous ramène au pardon. L’auteur de notre mort [Adam] a transgressé les préceptes de vie en mangeant le fruit défendu de l’arbre. Il faut donc que déchus des joies du paradis par le fait de la nourriture, nous nous efforcions de les reconquérir, autant que nous le pouvons, par l’abstinence.
    Mais que personne ne s’imagine qu’il nous suffise de cette abstinence, alors que le Seigneur dit par la bouche du prophète : « Le jeûne que je préfère ne consiste-t-il pas plutôt en ceci ? » Et il ajoute : « Partage ton pain avec l’affamé, reçois chez toi les pauvres et les vagabonds ; si tu vois quelqu’un de nu, habille-le, et ne méprise pas celui qui est ta propre chair. » (Is 58, 6-7). Voilà le jeûne que Dieu approuve : un jeûne qui élève à ses yeux des mains remplies d’aumônes, un jeûne réalisé dans l’amour du prochain et imprégné de bonté. Prodigue à autrui ce que tu retires à toi-même ; ainsi, la mortification même de ta chair viendra soulager la chair de ton prochain qui est dans le besoin.
    C’est en ce sens que le Seigneur dit par la voix du prophète : « Lorsque vous jeûniez et que vous vous lamentiez, est-ce pour moi que vous jeûniez tant ? Et quand vous mangez et buvez, n’est-ce pas pour vous que vous mangez et pour vous que vous buvez ? » (Za 7, 5-6). Celui-là mange et boit pour lui-même, qui consomme, sans les partager avec les indigents, les aliments du corps, qui sont des dons du Créateur appartenant à tous. Et c’est pour soi qu’on jeûne, si l’on ne donne pas aux pauvres ce dont on s’est privé pour un temps, mais qu’on le garde pour l’offrir un peu plus tard à son ventre.
    A ce sujet, Joël dit : « Sanctifiez le jeûne. » (Jl 1, 14). Sanctifier le jeûne, c’est rendre son abstinence corporelle digne de Dieu en y associant d’autres bonnes œuvres. Que cesse la colère ; que les querelles s’apaisent. Car il est vain de tourmenter sa chair si l’on ne met un frein aux plaisirs mauvais de l’âme, puisque le Seigneur affirme par la voix du prophète : « Voilà qu’au jour de jeûne, vous ne faites que votre volonté. Voilà que vous jeûnez en vue des procès et des luttes ; vous frappez méchamment à coups de poing, et vous réclamez leurs dettes à tous vos débiteurs. » (Is 58, 3-4). Celui qui réclame à son débiteur ce qu’il lui a donné ne fait rien d’injuste ; mais à celui qui se mortifie par la pénitence, il convient mieux de s’interdire de réclamer même ce qui lui revient de droit. Quant à nous, mortifiés et pénitents, Dieu ne nous remettra ce que nous avons fait d’injuste que si nous abandonnons, par amour pour lui, même ce qui nous revient de droit. »

    St Grégoire le Grand (540-604), Homélie 16 (5-6), Prononcée devant le peuple dans la basilique de saint Jean, dite Constantinienne, le premier dimanche de Carême, 4 mars 591. Traduction et édition papier par les Moines bénédictins de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux (84330 - France). (Source)

    Saint_Gregoire-le-Grand_gravure2.jpg

    Grégoire le Grand dictant la réforme liturgique sous l'inspiration de l'Esprit Saint
    Gravure illustrant "Histoire du pontificat de Saint Grégoire le Grand", Maimbourg, 1686.
    (Source et crédit photo)

  • Méditation : le temps de la purification

    « Quand l'âme ne fait que débuter dans la voie de l'amour, sa contemplation est encore grossière et rudimentaire, elle ne goûte pas tout de suite les joies de la contemplation véritable... Et quand elle commencera à entrer sérieusement dans cette contemplation des choses éternelles (Dieu et les choses divines), elle aura d'autant plus de peine à en éprouver les douceurs qu'elle sera moins attentive à leur merveilleuse beauté ; car comment se délecter de merveilles qu'on ne voit pas. De plus, à ses débuts dans la contemplation, elle mettra d'autant plus de temps à s'y élever qu'elle sera plus lente à rejeter les ténèbres qui enveloppent les créatures humaines. En effet, tant qu'elle n'aura pas renoncé aux sollicitudes mondaines, elle aura dans les yeux une poussière qui l'empêchera de voir. Avant tout donc, qu'elle se débarrasse de cette poussière, puis qu'elle fortifie sa vue : elle rejettera la poussière quand elle éloignera de son esprit toutes les images des choses corporelles, elle fortifiera sa vue quand par une méditation assidue elle tournera son attention vers ce qui est éternel. Quand elle se sera de la sorte pendant longtemps habituée à demeurer dans ces régions supérieures, sa persévérance lui vaudra d'être purifiée davantage ; ainsi purifiée, elle verra plus clairement les biens éternels, et, découvrant leurs splendeurs, elle en éprouvera une joie plus vive. [...] Celui qui désire la contemplation voudrait jouir aussitôt des joies surabondantes qu'elle procure, mais l'auteur de ce don, l'Esprit-Saint, ne l'accorde pas si vite ; elle perdrait de son prix si elle était si facile à obtenir ; la jouissance, du reste, en sera d'autant plus douce, et on veillera à garder ce trésor d'autant plus soigneusement, qu'on aura eu plus de peine à l'acquérir. »

    St Grégoire le Grand (540-604), Commentaire sur le Premier Livre des Rois, ch. II n°4 (Cf. SC 391).

    nuages_soleil_9a.jpg

  • 17 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Jésus quarante jours au désert (Lc 4, 1-13)

    « Le diable s'est attaqué au premier homme, notre parent, par une triple tentation : il l'a tenté par la gourmandise, par la vanité et par l'avidité. Sa tentative de séduction a réussi, puisque l'homme, en donnant son consentement, a été alors soumis au diable. Il l'a tenté par la gourmandise, en lui montrant sur l'arbre le fruit défendu et en l'amenant à en manger ; il l'a tenté par la vanité, en lui disant : "Vous serez comme des dieux" ; il l'a tenté enfin par l'avidité, en lui disant : "Vous connaîtrez le bien et le mal" (Gn 3,5). Car être avide, c'est désirer non seulement l'argent, mais aussi toute situation avantageuse, désirer, au-delà de toute mesure, une situation élevée...
    Le diable a été vaincu par le Christ qu'il a tenté d'une manière tout à fait semblable à celle par laquelle il avait vaincu le premier homme. Comme la première fois, il le tente par la gourmandise : "Ordonne que ces pierres se changent en pains" ; par la vanité : "Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas" ; par le désir violent d'une belle situation, quand il lui montre tous les royaumes du monde et lui dit : "Tout cela, je te le donnerai, si tu tombes à mes pieds et m'adores"...
    Il est une chose qu'il faut remarquer dans la tentation du Seigneur : tenté par le diable, le Seigneur a riposté par des textes de la Sainte Ecriture. »

    St Grégoire le Grand, Homélies sur l'Evangile n°16 (Trad. Maurice Véricel, L’Evangile commenté par les Pères, Editions Ouvrières, Paris, 1961).

  • 2 janvier : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Saint Jean Baptiste (Jn 1, 19-28)

    « "Moi, je baptise dans l'eau ; mais au milieu de vous se trouve quelqu'un que vous ne connaissez pas." Ce n'est pas dans l'esprit, mais dans l'eau que Jean baptise. Impuissant à pardonner les péchés, il lave par l'eau le corps des baptisés, mais ne lave pas l'esprit par le pardon. Pourquoi donc baptise-t-il, s'il ne remet pas les péchés par son baptême ? Pourquoi, sinon pour rester dans son rôle de précurseur ? De même qu'en naissant, il avait précédé le Seigneur qui allait naître, il précédait aussi, en baptisant, le Seigneur qui allait baptiser. Précurseur du Christ par sa prédication, il le devenait également en donnant un baptême qui était l'image du sacrement à venir.
    Jean a annoncé un mystère lorsqu'il a déclaré que le Christ se tenait au milieu des hommes et qu'il ne leur était pas connu, puisque le Seigneur, quand il s'est montré dans la chair, était à la fois visible en son corps et invisible en sa majesté. Et Jean ajoute : "Celui qui vient après moi a passé devant moi" (Jn 1,15)...; il explique les causes de la supériorité du Christ lorsqu'il précise : "Car il était avant moi", comme pour dire clairement : "S'il l'emporte sur moi, alors qu'il est né après moi, c'est que le temps de sa naissance ne le resserre pas dans des limites. Né d'une mère dans le temps, il est engendré par le Père hors du temps".
    Jean manifeste quel humble respect il lui doit, en poursuivant : "Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale". Il était de coutume chez les anciens que si quelqu'un refusait d'épouser une jeune fille qui lui était promise, il dénouait la sandale de celui à qui il revenait d'être son époux. Or le Christ ne s'est-il pas manifesté comme l'Époux de la sainte Église ?... Mais parce que les hommes ont pensé que Jean était le Christ - ce que Jean lui-même nie - il se déclare indigne de dénouer la courroie de sa sandale. C'est comme s'il disait clairement... : "Je ne m'arroge pas à tort le nom d'époux" (cf Jn 3,29). »

    Saint Grégoire le Grand (v.540-604), Homélies sur l'Évangile, n°7 (Trad. Le Barroux rev.).

  • 2 décembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    « Notre Seigneur et Rédempteur désirant nous trouver prêts, dénonce les maux qui vont arriver à un monde vieillissant, pour nous retenir de l'amour de ce monde.
    "Les hommes verront alors le Fils de l'homme venant sur les nuées, avec grande puissance et majesté." Ce qui veut dire en clair : "Ils verront en puissance et majesté celui qu'ils n'ont pas voulu écouter en son humilité, de sorte qu'ils sentiront alors d'autant plus rigoureusement sa force, qu'ils n'inclinent pas la nuque de leur coeur au temps de sa patience."
    Mais parce que ces paroles sont adressées aux réprouvés, elles laissent bien vite place à la consolation des élus : "Quand cela commencera d'arriver, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche !" Que votre coeur soit en joie, car tandis que finit un monde dont vous n'êtes pas amis, la rédemption que vous cherchez approche. Ceux qui ont choisi Dieu sont invités à la joie et au rire devant la fin du monde, car ils vont bientôt trouver celui qu'ils aiment, tandis que passe ce qu'ils n'ont pas aimé.
    Que tout fidèle qui désire voir Dieu se garde bien de pleurer sur les secousses qui ébranlent le monde, puisqu'il n'ignore point que ces secousses mêmes sont sa fin. »

    Saint Grégoire le Grand, Homélie I pour l'Avent.

  • 10 novembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l'argent" (Lc 16, 9-15)

    « Vouloir mettre son espoir et sa confiance en des biens passagers, c'est vouloir poser des fondations dans une eau courante. Tout passe ; Dieu demeure. S'attacher au transitoire c'est se détacher du permanent. Qui donc, emporté par les tourbillons agités d'un rapide, peut demeurer fixe à sa place dans ce torrent bouillonnant ? Si donc on veut refuser d'être emporté par le courant, il faut fuir tout ce qui coule ; sinon l'objet de notre amour nous contraindra à en arriver à ce que l'on veut précisément éviter. Celui qui s'accroche à des biens transitoires sera sûrement entraîné là où dérivent ces choses auxquelles il s'accroche.
    La première chose à faire donc est de se garder d'aimer les biens matériels ; la seconde, de ne pas mettre toute sa confiance dans ceux de ces biens qui nous sont confiés pour en user et non pour en jouir. L'âme attachée à des biens qui ne font que passer perd très vite sa propre stabilité. Le courant de la vie actuelle entraîne celui qu'il porte, et c'est une illusion folle, pour celui qu'emporte ce courant de vouloir s'y tenir debout. »

    Saint Grégoire le Grand (v.540-604), Morales sur Job, 34 (Trad. Soleil Levant, 1964 rev.).

  • 8 novembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    La brebis perdue et retrouvée
    "C’est ainsi, je vous le dis, qu’il y aura plus de joie dans le Ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentir." (Lc 15, 1-10)

    « Il nous faudrait ici examiner, mes frères, pourquoi le Seigneur déclare qu’il y a plus de joie dans le Ciel pour la conversion des pécheurs que pour la persévérance des justes ; mais l’exemple quotidien de ce que nous avons sous les yeux nous l’enseigne : souvent, ceux qui ne se sentent pas coupables de grands péchés demeurent bien dans la voie de la justice, et ils ne commettent aucune action défendue, mais ils ne ressentent pas non plus beaucoup d’ardeur pour la patrie céleste, et ils se privent d’autant moins des choses permises qu’ils ne se souviennent pas d’en avoir commis de défendues. Ainsi demeurent-ils souvent paresseux dans la pratique des bonnes œuvres élémentaires, se sentant en pleine sécurité du fait qu’ils n’ont jamais péché de façon vraiment grave.
    Au contraire, certains de ceux qui se souviennent d’avoir accompli des actions défendues, se trouvant transpercés de componction par leur douleur même, s’enflamment d’amour pour Dieu et s’exercent à de grandes vertus ; ils entreprennent tous les difficiles combats de la sainteté, ils abandonnent tous les biens du monde, fuient les honneurs, se réjouissent des outrages reçus, brûlent de désir [pour la vie éternelle] et aspirent à la patrie céleste. Et considérant qu’ils s’étaient écartés de Dieu, ils rachètent leurs pertes du passé par les profits qu’ils font dans la suite de leur vie.
    Il y a donc plus de joie dans le Ciel pour la conversion d’un pécheur que pour la persévérance d’un juste, de même qu’un chef préfère dans la bataille le soldat qui, revenu après s’être enfui, charge l’ennemi avec vigueur, à celui qui n’a jamais tourné les talons devant l’ennemi, mais ne l’a jamais non plus vraiment combattu avec courage. Ainsi, le paysan préfère la terre qui, après les épines, porte des fruits abondants, à celle qui n’a jamais eu d’épines, mais ne produit jamais non plus de riche moisson.

    Cependant, il faut savoir qu’il y a bien des justes dont la vie est une telle joie [pour le Ciel] qu’elle ne le cède en rien à la vie pénitente des pécheurs. Car il en est beaucoup qui, tout en n’ayant conscience d’aucune mauvaise action, font pourtant paraître une douleur aussi grande que s’ils étaient chargés de tous les péchés. Ils refusent toutes choses, même celles que Dieu autorise ; ils s’enveloppent d’un souverain mépris pour le monde, s’interdisent absolument tout, se privent même des biens licites, se détournent du visible et s’enflamment pour l’invisible ; ils mettent leur joie dansles lamentations et s’humilient eux-mêmes en tout ; d’autres pleurent les péchés de leurs actions, mais eux, ils pleurent les péchés de leur pensée. Aussi, que dire de ces hommes, sinon qu’ils sont à la fois justes et pénitents, puisqu’ils s’humilient dans la pénitence pour les péchés de leur pensée, sans jamais cesser de persévérer dans la droiture par leurs œuvres ? Il nous faut donc reconnaître quelle immense joie un juste doit donner à Dieu par les larmes de son humilité, quand un pécheur en cause déjà une si grande dans le Ciel en se punissant, par la pénitence, de ce qu’il a fait de mal. »

    Saint Grégoire le Grand, Homélies sur les Evangiles, Homélie 34 (4-5), prononcée devant le peuple dans la basilique des bienheureux Jean et Paul, 29 septembre 591.

    Source : Scribd.

  • 28 octobre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Jésus, fils de David, aie pitié de moi !" (Mc 10, 46-52)

    « Que tout homme qui connaît les ténèbres qui font de lui un aveugle... crie de tout son esprit : "Jésus, fils de David, aie pitié de moi". Mais écoutons aussi ce qui fait suite aux cris de l'aveugle : "Ceux qui marchaient en tête le rabrouaient pour lui imposer silence". Qui sont-ils ? Ils sont là pour représenter les désirs de notre condition en ce monde, fauteurs de trouble, les vices de l'homme et leur tumulte, qui, voulant empêcher la venue de Jésus en nous, perturbent notre pensée en y semant la tentation et veulent couvrir la voix de notre cœur en prière. Il arrive souvent, en effet, que notre volonté de nous tourner vers Dieu à nouveau..., notre effort pour éloigner nos péchés par la prière, soit contrarié par leur image : la vigilance de notre esprit se relâche à leur contact, ils jettent la confusion dans notre cœur, ils étouffent le cri de notre prière...
    Qu'a donc fait cet aveugle pour recevoir la lumière malgré ces obstacles ? "Il criait de plus belle : 'Fils de David, aie pitié de moi !'"... Oui, plus le tumulte de nos désirs nous accable, plus nous devons rendre notre prière insistante... Plus la voix de notre cœur est couverte, plus elle doit insister vigoureusement, jusqu'à couvrir le tumulte des pensées envahissantes et toucher l'oreille fidèle du Seigneur. Chacun se reconnaîtra, je pense, dans cette image : au moment où nous nous efforçons de détourner notre cœur de ce monde pour le ramener à Dieu..., ce sont autant d'importuns qui pèsent sur nous et que nous devons combattre. C'est un essaim que le désir de Dieu a du mal à écarter des yeux de notre cœur... Mais en persistant vigoureusement dans la prière, nous arrêtons en notre esprit Jésus qui passait. D'où le récit de l'Évangile : "Jésus s'arrêta et ordonna qu'on le lui amène". »

    Saint Grégoire le Grand (v.540-604), Homélies sur l'Évangile, n°2 ; PL 76, 1081 (Trad. Luc commenté, DDB 1987 rev.).

  • 18 octobre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Le Seigneur en désigna encore soixante-douze, et il les envoya deux par deux devant lui..." (Lc 10, 1)

    « Notre Seigneur et Sauveur, frères très chers, nous instruit tantôt par ses paroles, tantôt par ses actions. Ses actions elles-mêmes sont des commandements, parce que, lorsqu'il fait quelque chose sans rien dire, il nous montre comment nous devons agir. Voici donc qu'il envoie ses disciples en prédication deux par deux, parce que les commandements de la charité sont deux : l'amour de Dieu et du prochain. Le Seigneur envoie prêcher ses disciples deux par deux pour nous suggérer, sans le dire, que celui qui n'a pas la charité envers autrui ne doit absolument pas entreprendre le ministère de la prédication.
    Il est fort bien dit qu'"il les envoya deux par deux devant lui dans toutes les villes et les localités où lui-même devait aller" (Lc 10, 1). En effet, le Seigneur vient après ses prédicateurs, parce que la prédication est un préalable ; le Seigneur vient habiter notre âme lorsque les paroles d'exhortation sont venues en avant-coureur et font accueillir la vérité dans l'âme. C'est pourquoi Isaïe dit aux prédicateurs : "Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez les sentiers de notre Dieu" (40, 3). Et le psalmiste leur dit aussi : "Frayez la route à celui qui monte au couchant" (Ps 67, 5 Vulg). Le Seigneur monte au couchant parce que, s'étant couché par sa passion, il s'est manifesté avec une plus grande gloire dans sa résurrection. Il est monté au couchant, parce que, en ressuscitant, il a foulé aux pieds la mort qu'il avait subie. Nous frayons donc la route à celui qui monte au couchant lorsque nous prêchons sa gloire à vos âmes, afin que, venant ensuite, il les éclaire par la présence de son amour. »

    Saint Grégoire le Grand (v.540-604), Homélies sur l’Evangile, 17, 1-3 ; PL 76, 1139 (Trad. Bréviaire).

  • 4 octobre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Priez donc le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour sa moisson." (Lc 10, 1-12)

    « Vous pouvez, vous aussi, si vous le voulez, mériter ce beau nom de messager de Dieu. En effet, si chacun de vous, selon ses possibilités, dans la mesure où il en a reçu l'inspiration du ciel, détourne son prochain du mal, s'il prend soin de l'amener au bien, s'il rappelle à l'égaré le Royaume ou le châtiment qui l'attendent dans l'éternité, il est évidemment un messager des saintes paroles de Jésus. Et que personne ne vienne dire : Je suis incapable d'instruire les autres, de les exhorter. Faites du moins votre possible, pour qu'un jour on ne vous demande pas compte du talent reçu et malheureusement conservé. Car celui qui a préféré cacher son talent plutôt que de le faire valoir n'avait pas reçu plus d'un talent, lui non plus (Mt 25,14 sq)...

    Entraînez les autres avec vous ; qu'ils soient vos compagnons sur la route qui mène à Dieu. Quand, en allant sur la place ou aux bains publics, vous rencontrez quelque désoeuvré, invitez-le donc à vous accompagner. Car vos actions quotidiennes elles-mêmes servent à vous unir aux autres. Vous alliez à Dieu ? Essayez de ne pas y arriver seuls. Que celui qui, dans son coeur, a déjà entendu l'appel de l'amour divin en tire pour son prochain une parole d'encouragement. »

    Saint Grégoire le Grand (v.540-604), Homélies sur les Evangiles, 6 (Trad. Maurice Véricel, L'Evangile commenté par les Pères, Editions Ouvrières, Paris, 1961).

  • 7 mai : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    « Le Seigneur promet à juste titre que l'Esprit "vous enseignera tout". Car si cet Esprit ne touche pas le coeur de ceux qui écoutent, vaine est la parole de ceux qui enseignent. Que personne n'attribue donc à celui qui enseigne ce que la bouche de cet enseignant lui fait comprendre : s'il n'y a pas quelqu'un pour nous enseigner au-dedans, la langue de l'enseignant travaille dans le vide.

    Tous ici, vous entendez ma voix de la même manière ; et cependant vous ne saisissez pas de la même façon ce que vous entendez... C'est-à-dire que la voix n'instruit pas si l'âme ne reçoit pas l'onction de l'Esprit. La parole du prédicateur est vaine si elle n'est pas capable d'allumer le feu de l'amour dans les coeurs. Les disciples qui disaient : "Notre coeur n'était-il pas brûlant en nous tandis qu'il nous parlait en chemin, et qu'il nous expliquait les Écritures ?" (Lc 24,32), avaient reçu ce feu de la bouche même de la Vérité. Lorsqu'on entend une telle parole, le coeur s'échauffe, sa torpeur froide le quitte, l'esprit ne connaît plus de repos et se prend à désirer les biens du Royaume des cieux. L'amour véritable qui le remplit lui arrache des larmes... Comme il est heureux d'entendre cet enseignement qui vient d'en-haut et ces commandements qui deviennent en nous comme une torche qui nous enflamme...de l'amour intérieur. La parole parvient à notre oreille, et notre esprit transformé se consume d'une douce flamme intérieure. »

    Saint Grégoire le Grand (v.540-604), Homélies sur les Evangiles, n°30, 3.5 (Trad. Le Barroux)