St Jérôme, prêtre et docteur de l’Église
Albrecht Dürer, Saint Jérôme dans le désert
National Gallery, Londres (G.-B.)
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St Jérôme, prêtre et docteur de l’Église
Albrecht Dürer, Saint Jérôme dans le désert
National Gallery, Londres (G.-B.)
St Jérôme, prêtre et docteur de l’Église
Le Caravage, Saint Jérôme écrivant
Galerie Borghèse, Rome
(Crédit photo)
(suite de la méditation d'hier)
« C'est encore de quoi nous encourager et nous donner de nouvelles forces dans les tentations de songer que Dieu nous regarde combattre. Un soldat qui combat sous les yeux de son général et de son prince en devient plus brave. Or, nous combattons effectivement sous les yeux de Dieu, dans les tentations ; ainsi dans toutes les attaques que nous avons à soutenir, nous devons nous imaginer que nous sommes dans une lice ; que tous les esprits bienheureux sont les spectateurs du combat ; qu'ils en attendent le succès avec impatience, et que c'est Dieu qui en est le juge et le rémunérateur. Cette pensée est des saints Pères, et elle est fondée sur les paroles de l’Évangile, où il est marqué qu'après que le démon eut tenté inutilement Jésus-Christ, et qu'il l'eut quitté, les anges vinrent et le servirent (1). Nous lisons, dans la vie de St Antoine, qu'une nuit que les démons l'avaient tout brisé de coups, il leva les yeux en haut et vit une lumière éclatante qui, perçant le comble de sa cellule, en dissipa les ténèbres, chassa les démons, et lui ôta en un moment toute la douleur des coups qu'il avait reçus. Aussitôt s'adressant à Jésus-Christ, il lui dit : Où étiez-vous, mon Sauveur, pendant que vos ennemis me maltraitaient si cruellement ? Pourquoi n'êtes-vous pas venu dès le commencement du combat, pour les arrêter et me délivrer de leurs mains ? Antoine, lui répondit alors une voix, j'ai été ici dès le commencement de votre combat, et j'en ai été le spectateur ; et parce que vous avez combattu avec courage, je continuerai toujours de vous assister, et je rendrai votre nom célèbre par toute la terre ; ainsi dans les tentations nous pouvons nous assurer d'avoir Dieu et les anges pour témoins de notre résistance ; et qui est celui qui ne s'encouragerait à bien faire devant de tels spectateurs ? »
1. Et ecce angeli accesserunt, et ministrabant ei. Matth. 4. 11.
Suite et fin demain.
R.P. Alphonse Rodriguez s.j. (1526–1616), Pratique de la Perfection Chrétienne, Tome III, Part. II, Traité IV, Chap. XII, Trad. Abbé Regnier-Desmarais, Poitiers, Henri Oudin, 1866.
La Tentation de Saint Antoine Abbot, Annibale Carracci (1560–1609)
National Gallery, Londres
« Il nous sera d'un grand secours, pour nous encourager dans les tentations, de considérer la faiblesse de nos ennemis, et combien c'est peu de chose que ce que le démon peut contre nous, puisqu'il ne saurait nous faire tomber en aucun péché, si nous ne le voulons. Voyez, mes frères, dit St Bernard, combien notre ennemi est faible ; il ne peut vaincre que celui qui veut bien être vaincu (1). Si un homme qui va au combat était assuré de vaincre s'il le voulait, quelle joie n'aurait-il point ? Ne se croirait-il pas assuré d'une victoire qui ne dépendrait que de sa volonté ? Nous pouvons aller au combat contre le démon avec la même confiance et la même joie ; car nous savons bien qu'il ne peut nous vaincre, si nous ne le voulons. C'est ce que remarque très bien St Jérôme (2), sur ces paroles que l'esprit malin dit à Jésus-Christ, lorsque, l'ayant enlevé sur le pinacle du temple, il lui conseillait de se précipiter à terre : Jetez-vous en bas ; et voilà, dit le Saint, le véritable langage du démon, qui ne désire rien tant que la chute de tous les hommes. Il peut, à la vérité, leur persuader de se précipiter, mais il ne peut pas les jeter lui-même dans le précipice. La voix du démon qui vous tente, vous dit : Précipitez-vous en enfer ; il faut lui répondre : Précipitez-vous-y vous-même, qui en savez déjà le chemin ; pour moi je n'en veux rien faire ; il n'en saurait avoir le pouvoir, si vous n'en avez la volonté. »
1. Videte, fratres, quam debilis est hostis noster, qui non vincit nisi volentem. Bern. serm. in Dominic. 2. Quadrag. et 73. in Cant.
2. Hier. sup. c. 4. Math. in illud : Mitte te deorsum. Matth 4. 5. Vox diaboli est, qui semper omnes cadere deorsum desiderat : persuadere potest, praecipitare non potest.
A suivre demain.
R.P. Alphonse Rodriguez s.j. (1526–1616), Pratique de la Perfection Chrétienne, Tome III, Part. II, Traité IV, Chap. XI, Trad. Abbé Regnier-Desmarais, Poitiers, Henri Oudin, 1866.
Sandro Botticelli, Les tentations du Christ (détail)
Chapelle Sixtine, Rome
St Jérôme, prêtre, confesseur et docteur de l'Eglise
Saint Jérôme dans le désert
Albrecht Dürer (v.1495–1496), National Gallery, London
« Quoique l'Apôtre nous ordonne de prier sans cesse, quoique le sommeil lui-même soit pour les saints une sorte d'oraison, nous devons néanmoins partager en différentes heures le temps destiné à la prière, afin que s'il arrive que nous soyons retenus par quelque ouvrage, le temps lui-même nous rappelle un devoir à remplir. Qu'il faille prier à la troisième heure, à la sixième, à la neuvième, le matin et le soir, il n'est personne qui ne le sache. On ne doit point prendre de nourriture sans avoir prié d'abord, ni sortir de table, sans rendre des actions de grâces au Créateur. La nuit, il faut se lever deux ou trois fois, et repasser dans sa mémoire les endroits des Écritures que l'on sait par cœur. Au sortir de notre demeure, que la prière nous serve d'armure ; lorsque nous sommes revenus de la place publique, prions encore avant de nous asseoir, et que le corps ne se repose pas, avant que l’âme ait pris sa nourriture. À chaque action, à chaque démarche, que notre main retrace sur notre corps la croix du Seigneur. Ne parlez mal de personne, et ne tendez point de piège au fils de votre mère. Qui êtes-vous donc, vous, pour condamner ainsi le serviteur d'autrui ? S'il tombe, ou s'il demeure ferme, cela regarde son maître ; mais il demeurera ferme, parce que Dieu est tout puissant pour le soutenir. (1). Quand vous jeûnerez deux jours, trois jours, n'allez pas vous croire meilleur que ceux qui ne jeûnent point. Vous jeûnez, mais vous êtes emporté ; celui-ci ne jeûne pas, et peut-être qu'il est doux. Les peines de votre âme et la faim de votre corps, vous les digérez, pour ainsi dise, parmi les plaintes et les murmures ; celui-ci, plus modéré dans sa nourriture, rend grâces à Dieu. De là vient que le prophète Isaïe crie sans cesse : Je n'ai point choisi un tel jeûne (2) dit le Seigneur. Et encore : En vos jours de jeûne, vous suivez vos caprices, et vous fatiguez tous ceux qui sont sous votre domination. — Vous jeûnez parmi les procès et les querelles ; vous frappez les petits avec une violence impitoyable. (3). Pourquoi jeûnez-vous pour moi ? Quel jeûne peut faire celui qui nourrit des sentiments de colère, je ne dis pas jusqu'à la nuit, mais durant des mois entiers ? Attentive à vous-même, ne vous glorifiez pas dans la chute des autres, mais glorifiez-vous dans vos œuvres. »
1. Rom 14, 4. - 2. Is 58, 5 - 3. Ibid. 3, 4
St Jérôme, extrait de la Lettre XVIII à Eustochium, in "Lettres de Saint Jérôme", Trad. J.-F. Grégoire et F.-B. Collombet, Tome premier, Librairie catholique de Perisse Frères, Lyon - Paris, 1837 (pp.229-233).
Disponible en libre accès sur internet ici (pdf) et ici (copie html).
Mercredi des Cendres
(jeûne et abstinence)
Calendrier liturgique
« Oh ! combien de fois moi-même, retenu dans le désert, et dans cette vaste solitude qui, dévorée des feux du soleil, n'offre aux moines qu'une demeure affreuse, je croyais assister aux délices de Rome ! Je m'asseyais seul, parce que mon âme était pleine d'amertume. Mes membres étaient couverts d'un sac hideux, et mes traits brûlés avaient la teinte noire d'un Éthiopien. Je pleurais, je gémissais chaque jour, et si le sommeil m'accablait malgré ma résistance, mon corps décharné heurtait contre une terre nue. Je ne dis rien de ma nourriture ni de ma boisson, car, au désert, les malades eux-mêmes boivent de l'eau froide, et regardent comme une sensualité de prendre quelque chose de cuit. Eh bien ! moi qui, par terreur de l'enfer, m'étais condamné à cette prison, habitée par les scorpions et les bêtes farouches, je me voyais en imagination transporté parmi les danses des vierges romaines. Mon visage était pâle de jeûnes, et mon corps brûlait de désirs ; dans ce corps glacé, dans cette chair morte d'avance, l'incendie seul des passions se rallumait encore. Alors privé de tout secours, je me jetais aux pieds de Jésus-Christ, je les arrosais de larmes, je les essuyais de mes cheveux, et je domptais ma chair indocile par des jeûnes de plusieurs semaines. Je ne rougis pas de mon malheur ; au contraire, je regrette de n'être plus ce que j'ai été (*). Je me souviens que plus d'une fois je passai le jour et la nuit entière à pousser des cris, et à frapper ma poitrine, jusqu'au moment où Dieu renvoyait la paix dans mon âme (cf. Lc 8,24). Je redoutais l'asile même de ma cellule ; il me semblait complice de mes pensées. Irrité contre moi-même, seul je m'enfonçais dans le désert. Si je découvrais quelque vallée plus profonde, quelque cime plus escarpée, j'en faisais un lieu de prière et une sorte de prison pour ma chair misérable. Souvent, le Seigneur m'en est témoin, après des larmes abondantes, après des regards longtemps élancés vers le ciel, je me voyais transporté parmi les chœurs des anges, et triomphant d'allégresse, je chantais : "Nous courrons après vous, attirés par l'odeur de vos parfums". »
(*) : C’est-à-dire : de n’être plus aussi fervent qu’au début de ma profession monacale.
St Jérôme (fêté ce jour), Lettre XVIII à Eustochium, in "Lettres de St Jérôme" traduites par J.-F. Grégoire et F.-B. Collombet (Tome I), Librairie catholique de Perisse Frères, Lyon - Paris, 1837.
Source : Bibliothèque Saint Libère.
Saint Jérôme au désert - Tableau de Lazzaro Bastiani (v.1430-1512)