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« Puisque nous devons prier, puisqu'il faut prier, prions ! Prions avant de parler, avant de travailler ; prions dans l'action, prions dans le repos, prions au milieu des foules, prions dans la solitude, prions partout, prions sans interruption. La prière est une puissance d'apostolat mise à notre disposition. S'il y avait quelque chose de meilleur pour nous que la prière, notre Seigneur nous l'aurait appris ; mais il a enseigné et il nous recommande surtout de veiller et de prier, de faire pénitence. Que notre vie soit donc une vie de prière ! "Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous marchiez, soit que vous travailliez ou vous reposiez, disait saint Paul, faites tout pour la gloire de Dieu", ce qui certainement veut dire en priant. Vie contemplative... Vie apostolique ! La première assurant le succès de l'autre ! C'est un peu paradoxal, mais ce ne l'est qu'apparemment, la réalité est affirmative. »
« D'où vient que nous aimions tant à parler et à converser lorsque si rarement il arrive que nous rentrions dans le silence avec une conscience qui ne soit point blessée ? C'est que nous cherchons dans ces entretiens une consolation mutuelle et un soulagement pour notre cœur fatigué de pensées contradictoires. Nous nous plaisons à parler, à occuper notre esprit de ce que nous aimons, de ce que nous souhaitons, de ce qui contrarie nos désirs.
Mais souvent, hélas ! bien vainement ; car cette consolation extérieure n'est pas un médiocre obstacle à la consolation que Dieu donne intérieurement. Il faut donc veiller et prier, afin que le temps ne se passe pas sans fruit. S'il est permis, s'il convient de parler, parlez de ce qui peut édifier. La mauvaise habitude et le peu de soin de notre avancement nous empêchent d'observer notre langue. Cependant de pieuses conférences sur les choses spirituelles, entre des personnes unies selon Dieu et animées d'un même esprit, servent beaucoup au progrès dans la perfection. »
Imitation de Jésus-Christ, Livre premier (10), Traduction de l'Abbé Félicité de Lamennais.
Texte intégral de l'Imitation en ligne :format pdf (à télécharger) - format html (pages web).
Être attentif et rester éveillé pour accueillir le Christ, c’est l’appel du Saint-Père pour ce premier dimanche de l’Avent. Lors de la prière de l’Angelus, ce 3 décembre 2017, de retour du Bangladesh et de la Birmanie, son 21e voyage apostolique, le Pape François a ainsi exhorté les fidèles à se préparer au retour du Seigneur « qui vient à notre rencontre » en ces fêtes de Noël.
Ce chemin de l’Avent qui s’ouvre aujourd’hui et culmine à Noël, a commencé le Pape, est un temps « qui nous est donné pour vérifier notre désir de Dieu ». Ce temps « nous rappelle aussi sa venue dans l’humilité de la condition humaine » à la rencontre de tous ceux qui sont disposés à l’accueillir. C’est pour cette raison, explique le Saint-Père, qu’il faut toujours être dans la veille et dans l’attente.
La personne attentive, souligne ainsi le Pape François, est celle qui se tourne d’abord vers les autres. « Dans le bruit du monde, elle ne se laisse pas submerger par les distractions ou ce qui est superficiel, mais qui vit pleinement et avec conscience, avec une préoccupation tournée avant tout vers les autres », qui permet de voir leurs larmes et leurs besoins. La personne qui fait attention, continue-t-il, se tourne aussi vers le monde, et cherche à « combattre l’indifférence et la cruauté qui s’y trouvent, et se réjouir de ses trésors de beautés qu’il faut préserver ». Il s’agit donc, insiste le Pape, d’avoir « un regard de compréhension pour reconnaître à la fois la misère et la pauvreté des individus et de la société, et la richesse cachée dans les petites choses de chaque jour », là aussi il y a une place pour le Seigneur.
Le Pape a ensuite appelé à rester éveillé, en cette période de l’Avent. La « personne qui veille » est celle qui « ne se laisse pas emporter par le sommeil du découragement, du manque d’espérance, de la déception », et dans le même temps, « rejette toutes les vanités » qui gâchent le temps pour soi ou sa famille. Ainsi, résume le Saint-Père, être attentif et éveillé sont les « conditions préalables » pour arrêter de s'éloigner des chemins du Seigneur, à se perdre « dans nos péchés et dans nos infidélités », car en étant dans l’attention et la veille, Dieu peut « pénétrer dans notre existence, lui redonner du sens et de la valeur à travers sa présence pleine de bonté et de tendresse ».
« Rien ne rend l'âme pure et joyeuse, ni ne l'illumine et en éloigne les pensées mauvaises, autant que les veilles. Pour cette raison, tous nos pères ont persévéré dans ce labeur des veilles et ont adopté pour règle de rester éveillés la nuit durant tout le cours de leur vie ascétique. Ils l'ont fait spécialement parce qu'ils avaient entendu notre Sauveur nous y inviter instamment en divers endroits par sa vivante Parole : « Veillez et priez en tout temps » (Lc 21,36) ; « Veillez et priez pour ne pas entrer en tentation » (Mt 26,41) ; et encore : « Priez sans cesse » (1Th 5,17).
Et il ne s'est pas contenté de nous avertir seulement par ses paroles. Il nous a donné aussi l'exemple en sa personne en honorant la pratique de la prière au-dessus de toute autre chose. C'est pourquoi il s'isolait constamment pour la prière, et cela non d'une façon arbitraire, mais en choisissant pour temps la nuit et pour lieu le désert, afin que nous aussi, évitant les foules et le tumulte, nous devenions capables de prier dans la solitude.
C'est pourquoi nos pères ont reçu ce haut enseignement concernant la prière comme s'il venait du Christ lui-même. Et ils ont choisi de veiller dans la prière selon l'ordre de l'apôtre Paul, avant tout afin de pouvoir demeurer sans aucune interruption dans la proximité de Dieu par la prière continuelle... Aucune chose venant du dehors ne les atteint et n'altère la pureté de leur intellect, ce qui troublerait ces veilles qui les remplissent de joie et qui sont la lumière de l'âme. »
St Isaac le Syrien (Isaac de Ninive, VIIe s.), Discours ascétiques, in Pl. Deseille, moine d'Aubazine, "La fournaise de Babylone", Éditions Présence, 1974.
« « Veillez ! » nous dit Jésus avec insistance. Nous n'avons pas seulement à croire, mais à veiller ; nous n’avons pas simplement à aimer, mais à veiller ; nous n’avons pas uniquement à obéir, mais à veiller. A veiller pour quoi ? Pour ce grand, pour ce suprême événement : la venue du Christ. Il semble bien y avoir là un appel spécial, un devoir dont l'idée ne nous serait jamais venue à l'esprit si Jésus lui-même ne nous l'avait enjoint. Mais qu'est-ce donc que veiller ?… Celui-là veille dans l'attente du Christ, qui garde l’esprit sensible, ouvert, sur le qui-vive, qui reste vif, éveillé, plein de zèle à le chercher et à l’honorer. Il désire trouver le Christ dans tout ce qui lui arrive. Il n'éprouverait aucune surprise, aucune épouvante ni agitation s'il apprenait que le Christ était là. Et celui-là veille avec le Christ (Mt 26,38) qui, tout en regardant l'avenir, sait qu'il ne doit pas oublier le passé, qui n’oublie pas ce que le Christ a souffert pour lui. Il veille avec le Christ celui qui, en souvenir de lui, s’associe à la croix et à l'agonie du Christ, qui porte joyeusement la tunique que le Christ a porté jusqu’à la croix et qu’il a laissée après son Ascension. Souvent dans les épîtres, les écrivains inspirés expriment leur désir du second avènement, mais ils n’oublient jamais le premier, la crucifixion et la résurrection… Aussi l'apôtre Paul qui invite les Corinthiens à « attendre la venue du Seigneur », ne manque pas de leur dire de « toujours porter dans notre corps la mort du Seigneur, pour que la vie du Christ Jésus se manifeste en nous » (2Co 4,10). La pensée de ce qu'est le Christ aujourd'hui ne doit pas effacer le souvenir de ce qu'il a été pour nous… Veiller, c’est donc vivre détaché de ce qui est présent, vivre dans l’invisible, vivre dans la pensée du Christ tel qu’il est venu une première fois et tel qu’il doit venir, désirer son deuxième avènement dans la mémoire aimante et reconnaissante du premier. »
Bx John Henry Newman (1801-1890), PPS 4,22 (trad. Bremond alt.).
« La première condition de la victoire sur le mal est la collaboration active à l’œuvre du Christ, en union avec les frères. La seconde est la vigilance. Jésus nous avertit que l'ennemi du bien est aux aguets et que même après avoir quitté une âme, il est prêt à y retourner, plus fort qu'auparavant, « avec sept autres esprits plus méchants que lui », lorsqu'il la trouve vide et désarmée contre ses embûches. Le grand moyen pour empêcher l'accès du mal est de veiller dans la prière et remplir son cœur de Dieu, afin qu'il n'y ait plus de place pour l'ennemi. Et il n'y a plus aucune place lorsque l'âme est totalement unie à Dieu par l'acceptation et l'observance de sa parole, de sa volonté. Jésus répond, en effet, à la femme qui loue sa Mère : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et la gardent ». Certes, la Très Sainte Vierge Marie est bienheureuse d'avoir donné le jour au Rédempteur, mais elle l'est davantage encore de Lui être parfaitement unie dans l'observance de sa parole. Or, cette béatitude n'est pas réservée à Marie, elle est offerte à toute âme de bonne volonté, et constitue la plus grande garantie de la victoire sur le mal, car celui qui est uni à Dieu devient fort de Sa force. »
P. Gabriel de Ste Marie-Madeleine, Intimité Divine Tome I (3e Dimanche de Carême, 8, 2), Monastère des Carmélites Déchaussées, Librairie du Carmel, 1963.
"Il arriva que l'on portait en terre un mort, fils unique d'une femme, et cette femme était veuve..." (Lc 7, 11-17)
« Nous ne savons pas à quelle heure nous serons appelés. Vous ne le savez pas, vous ne le pouvez savoir. Cependant vous ne veillez pas, c'est-à-dire que vous risquez votre salut, votre éternité. Songez-vous de quelle importance est le bien que vous risquez ? Songez-vous à ce que vous vous risquez de perdre ? Songez-vous à tous les malheurs dont vous êtes menacés ?... Le seul moyen de ne pas tomber dans tous ces malheurs, c'est de veiller continuellement. L'heure de la mort est incertaine ; nous ne savons quand nous mourrons. Donc il faut être prêt, et veiller sans intermission... Vous mourrez ; pourquoi donc tant d'attachement à la vie et aux biens de la terre ? Vous mourrez dans peu ; pourquoi donc ne vous hâtez-vous pas de vous convertir à Dieu ? Vous mourrez dans le temps que vous y penserez le moins ; pourquoi donc ne veillez-vous pas, afin de n'être point surpris ? Quand la mort menacera, il sera trop tard ; pourquoi donc ne vous préparez-vous pas pendant qu'il est encore temps ? O terrible instant que celui qui suit la mort ! Instant malheureux pour les pécheurs endurcis ! Instant qui ne peut être heureux que pour ceux qui veillent, et qui recevront la récompense promise aux serviteurs vigilants, dans la bienheureuse éternité. »
Joseph Lambert, Instructions courtes et familières pour tous les dimanches de l'année, Première année sur les Évangiles (XVe Dimanche après la Pentecôte), Nouvelle édition, A Paris, Chez Brajeux, Libraire, 1789.
Vierge la plus prudente et la plus sage des vierges, qui n’avez jamais cherché que Dieu, par tous les moyens et dans toutes vos actions, vous dont la lampe fut toujours fournie de l’huile des plus saintes œuvres, pour attendre le céleste époux, obtenez-nous la grâce de ne pas tomber dans le malheur des vierges folles, mais de nous tenir toujours préparés, comme vous, par l’exercice des vertus, à l’arrivée de l’époux de nos âmes.
« Il veille dans l'attente du Christ, celui qui a un coeur sensible, ouvert et accueillant, qui est éveillé, prompt, intuitif, qui se tient aux aguets, ardent à Le chercher et à L'honorer, qui L'attend dans tout ce qui arrive et qui ne serait ni surpris ni décontenancé ni bouleversé s'il était mis tout à coup devant le fait soudain de sa venue. Et il veille avec le Christ celui qui, en regardant vers l'avenir, ne néglige pas le passé et ne se borne pas à contempler ce que son Sauveur lui a acquis au point d'oublier ce qu'il a souffert pour lui. Il veille avec le Christ celui qui fait mémoire de la croix et de l'agonie du Christ et les revit en sa propre personne, celui qui prend sur lui, avec joie, ce manteau d'affliction que le Christ a porté ici-bas et a laissé derrière lui quand il est monté au ciel. »
Bx John Henry Newman, Veiller, in "Sermons paroissiaux" tome IV (22), Editions du Cerf, Paris, 1996.
"Tenez-vous sur vos gardes... Veillez donc et priez en tout temps..." (Lc 21, 34-36)
« Le Seigneur a fait à ses disciples de grandes recommandations pour que leur esprit secoue comme une poussière tout ce qui est terrestre dans la nature et s'élève ainsi au désir des réalités surnaturelles ; selon l'une de ces recommandations, ceux qui se tournent vers la vie d'en haut doivent être plus forts que le sommeil et garder toujours leur esprit vigilant... Je parle de cet assoupissement suscité chez ceux qui sont enfoncés dans le mensonge de la vie par ces rêves illusoires que sont les honneurs, les richesses, le pouvoir, le faste, la fascination des plaisirs, l'ambition, la soif de jouissance, la vanité et tout ce que l'imagination entraîne les hommes superficiels à poursuivre follement. Toutes ces choses s'écoulent avec la nature éphémère du temps ; elles sont du domaine du paraître... ; à peine ont-elles paru exister, elles disparaissent à la façon de vagues sur la mer... C'est pour que notre esprit soit dégagé de ces illusions que le Verbe nous invite à secouer des yeux de nos âmes ce sommeil profond, afin que nous ne glissions pas loin des réalités véritables en nous attachant à ce qui n'a pas de consistance. C'est pourquoi il nous propose la vigilance, en nous disant : "Tenez vos reins ceints et vos lampes allumées" (Lc 12,35). Car la lumière, en brillant devant les yeux, chasse le sommeil, et les reins serrés par la ceinture empêchent le corps d'y succomber... Celui qui est ceint par la tempérance vit dans la lumière d'une conscience pure ; la confiance filiale illumine sa vie comme une lampe... Si nous vivons comme cela, nous entrerons dans une vie semblable à celle des anges. »
Saint Grégoire de Nysse (v.335-395), Homélie 11 sur le Cantique des cantiques, in "La colombe et la ténèbre", textes choisis des "Homélies sur le Cantique des cantiques", choix, introd. et notes de Jean Daniélou, trad. de Mariette Canévet, Paris, Editions du Cerf, 1992.
« La lecture du saint évangile fortifie notre prière et notre foi, et nous dispose à nous appuyer non sur nous-mêmes mais sur le Seigneur. Y a-t-il un moyen plus efficace de nous encourager à la prière que la parabole du juge inique qui nous a été racontée par le Seigneur ? Le juge inique, évidemment, ne craignait pas Dieu ni ne respectait les hommes. Il n'éprouvait aucune bienveillance pour la veuve qui recourait à lui et cependant, vaincu par l'ennui, il finit par l'écouter. Si donc il exauça cette femme qui l'importunait par ses prières, comment ne serions-nous pas exaucés par celui qui nous encourage à lui présenter nos prières ? C'est pourquoi le Seigneur nous a proposé cette comparaison tirée des contraires pour nous faire comprendre qu'il faut toujours prier sans se décourager (Lc 18,1). Puis il a ajouté : Mais le Fils de l'homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ! (Lc 18,8).
Si la foi disparaît, la prière s'éteint. Qui pourrait, en effet, prier pour demander ce qu'il ne croit pas ? Voici donc ce que l'Apôtre dit en exhortant à prier : Tous ceux qui invoqueront le nom du Seigneur seront sauvés. Puis, pour montrer que la foi est la source de la prière et que le ruisseau ne peut couler si la source est à sec, il ajoute : Or, comment invoquer le Seigneur sans avoir d'abord cru en lui (Rm 10,13-14) ? Croyons donc pour pouvoir prier et prions pour que la foi, qui est au principe de notre prière, ne nous fasse pas défaut. La foi répand la prière, et la prière, en se répandant, obtient à son tour l'affermissement de la foi.
D'ailleurs, pour que la foi ne faiblisse pas dans les tentations, le Seigneur a dit: Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation (Mt 26,41). Telles sont ses paroles: Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation. Qu'est-ce qu'entrer en tentation ? Simplement, sortir de la foi. Car la tentation est d'autant plus forte que la foi est plus faible, et la tentation est d'autant plus faible que la foi est plus forte. Oui, vraiment, mes bien-aimés, c'est pour que la foi ne s'affaiblisse pas et ne se perde pas que le Seigneur a dit : Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation. Afin que vous le compreniez mieux, il a dit au même endroit dans l'évangile : Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le froment. Mais j'ai prié pour toi, Pierre, afin que ta foi ne sombre pas (Lc 22,31-32). Et celui que guette le danger ne ferait pas sienne la prière de son protecteur ?
Mais lorsque le Seigneur dit: Le Fils de l'homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ?, il a en vue la foi parfaite, celle qu'on peut à peine trouver sur la terre. Voyez : l'église de Dieu est remplie. Qui y viendrait s'il n'avait aucune foi ? Mais si cette foi était parfaite, qui ne transporterait pas les montagnes ? Regardez les Apôtres eux-mêmes : s'ils n'avaient pas eu une grande foi, ils n'auraient pas renoncé à tout ce qu'ils avaient, ils n'auraient pas foulé aux pieds les espoirs terrestres pour suivre le Christ. Et pourtant, leur foi n'était pas parfaite, car ils n'auraient pas dit au Seigneur: Augmente en nous la foi (Lc 17,5). »
« Puisque nous devons prier, puisqu'il faut prier, prions ! Prions avant de parler, avant de travailler ; prions dans l'action, prions dans le repos, prions au milieu des foules, prions dans la solitude, prions partout, prions sans interruption. La prière est une puissance d'apostolat mise à notre disposition. S'il y avait quelque chose de meilleur pour nous que la prière, notre Seigneur nous l'aurait appris ; mais il a enseigné et il nous recommande surtout de veiller et de prier, de faire pénitence. Que notre vie soit donc une vie de prière ! "Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous marchiez, soit que vous travailliez ou vous reposiez, disait saint Paul, faites tout pour la gloire de Dieu", ce qui certainement veut dire en priant. Vie contemplative... Vie apostolique ! La première assurant le succès de l'autre ! C'est un peu paradoxal, mais ce ne l'est qu'apparemment, la réalité est affirmative. »
« Combien ai-je encore à vivre ? Je n'en sais rien. Il meurt en moyenne sur le globe 4500 personnes par heure, 76 par minute. Quelle heure, quelle minute sera la mienne ? L'Évangile nous l'apprend : ce sera l'heure et la minute où je m'y attendrai le moins. Dieu l'a réglé ainsi, pour que je ne puisse pas raisonnablement me relâcher un seul jour et que je me tienne toujours prêt : car, si je m'endors un seul jour dans un état où je ne voudrais pas mourir, peut-être mon réveil serait en enfer. Non seulement j'ignore quand je mourrai ; mais j'ignore aussi profondément comment je mourrai. Mourrai-je de mort subite, sans avoir le temps de me préparer ? il en meurt tant de la sorte ! Mourrai-je d'une maladie qui m'enlèvera la connaissance et la parole, par conséquent la possibilité de me préparer ? Mourrai-je d'une maladie lente, qui fera croire à moi et aux miens que je ne suis pas en danger et que rien ne presse ? Mourrai-je entouré de gens qui, crainte de m'effrayer, n'oseront pas me parler de faire venir un prêtre ? Mourrai-je enfin sans confession, sans les derniers sacrements ? Je n'en sais rien, et lors même que je les recevrais, la douleur dans la maladie distrait, absorbe ; on est capable de bien peu de chose : c'est donc une folie de compter sur ce dernier moment pour régler la plus grave de toutes les affaires, l'affaire d'une éternité heureuse ou malheureuse. Soyons prêts aujourd'hui, soyons-le toujours, et ne remettons rien à un lendemain incertain. »
Abbé André-Jean-Marie Hamon (1795-1874), curé de Saint Sulpice, Méditations à l'usage du clergé et des fidèles pour tous les jours de l'année, Paris, Victor Lecoffre, 1886.
« C'est pour que notre esprit se dégage de tout mirage que le Verbe nous invite à secouer des yeux de notre âme ce lourd sommeil, afin que nous ne glissions pas hors des réalités véritables en nous attachant à ce qui n'a pas de consistance. C'est pourquoi il nous suggère la pensée de la vigilance, en nous disant : "Tenez vos reins ceints et vos lampes allumées"... Le sens de ces symboles est bien clair. Celui qui est ceint par la tempérance vit dans la lumière d'une conscience pure, car la confiance filiale illumine sa vie comme une lampe. Eclairée par la vérité, son âme demeure exempte du sommeil de l'illusion puisqu'aucun songe vain ne l'abuse. Si nous accomplissons cela, selon les indications du Verbe, nous entrons dans une vie semblable à celle des anges... Ce sont eux, en effet, qui attendent le Seigneur au retour de ses noces et qui siègent avec des yeux vigilants aux portes du ciel, afin que le Roi de gloire (Ps 23,7) puisse y passer à nouveau, lorsqu'il reviendra des noces et rentrera dans la béatitude qui est au-dessus des cieux. "Sortant de là comme un Epoux sort de sa chambre nuptiale" (Ps 18,6), il a uni comme une vierge, par la régénération sacramentelle, notre nature qui s'était prostituée aux idoles, l'ayant restituée à son incorruptibilité virginale. »
Saint Grégoire de Nysse, Homélie sur le Cantique des Cantiques ; PG 44, 996-997 (Trad. Mariette Canevet, La Colombe et la ténèbre - Textes extraits des Homelies sur le Cantique des C., Editions de l'Orante, 1967).
« Quand une mère est-elle davantage auprès de son enfant ? La nuit quand il est malade. Les ténèbres sont complètes pour que le sommeil du cher petit soit plus aisément obtenu. La plus faible lumière a encore été discrètement voilée. L'enfant n'aperçoit pas sa mère, c'est vrai ; à l'obscurité qui l'entoure, vient s'ajouter celle de l'inconscience et du délire. Mais c'est quand il n'est pas capable de la reconnaître que la mère est le plus près de lui ; la mère a les yeux ouverts, elle ; - elle est penchée sur le berceau, épiant le léger souffle qui halète, priant sans cesse en une sainte insomnie - refusant le repos comme une honte. A chaque gémissement une secousse la remue tout entière ; elle est là, le remède toujours à la main, aux heures où il faut le prendre, le geste toujours prêt au moindre secours, - le coeur gonflé de tout ce qu'elle voudrait donner au petit être vacillant qui est la chair de sa chair, le sang de son sang, l'âme de son âme. Dieu veille la nuit sur ses enfants malades, lui, notre mère, notre Père, notre frère, notre plus proche parent, le plus près de nous, le plus en nous, le plus nous-même. Dieu veille - Dieu veille - il est le grand Veilleur de toutes les nuits, - et de nuits qui sont pour lui des nuits terribles, les nuits de l'intelligence, les nuits du coeur, les nuits de la chair, les nuits du mal dont les ténèbres descendent à toute heure sur l'humanité douloureuse. Qui pourra dire avec quel amour il nous veille ? Cet amour a un nom et une qualité. C'est un amour infini... »
Prince Vladimir I. Ghika (1873-1954), Entretiens spirituels (3), Beauchesne, 1961.
« C'est à notre temps que songeait le Seigneur quand il a dit : "Le Fils de l'homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ?" (Lc 18,8) Nous voyons cette prophétie se réaliser. La crainte de Dieu, la loi de la justice, la charité, les bonnes oeuvres, on n’y croit plus... Tout ce que craindrait notre conscience, si elle y croyait, elle ne le craint pas, parce qu'elle n’y croit pas. Car si elle y croyait, elle serait vigilante ; et si elle était vigilante, elle se sauverait. Réveillons-nous donc, frères très chers, autant que nous en sommes capables. Secouons le sommeil de notre inertie. Veillons à observer et à pratiquer les préceptes du Seigneur. Soyons tels qu'il nous a prescrit d'être, quand il a dit : "Restez en tenue de service et gardez vos lampes allumées. Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces pour lui ouvrir dès qu'il arrivera et frappera à la porte. Heureux les serviteurs que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller". Oui, restons en tenue de service, de peur que, quand viendra le jour du départ, il ne nous trouve embarrassés et empêtrés. Que notre lumière brille et rayonne de bonnes oeuvres, qu'elle nous achemine de la nuit de ce monde à la lumière et à la charité éternelles. Attendons avec soin et prudence l'arrivée soudaine du Seigneur, afin que, lorsqu'il frappera à la porte, notre foi soit en éveil pour recevoir du Seigneur la récompense de sa vigilance. Si nous observons ces commandements, si nous retenons ces avertissements et ces préceptes, les ruses trompeuses de l’Accusateur ne pourront pas nous accabler pendant notre sommeil. Mais reconnus serviteurs vigilants, nous régnerons avec le Christ triomphant. »
Saint Cyprien (v.200-258), De l’unité, 26-27 (trad. cf. DDB, 1979 et AELF).
« Le Seigneur nous a dit : "Cette heure-là, personne ne la connaît, ni les anges, ni le Fils", pour empêcher toute question sur le moment de son avènement : "ce n'est pas votre affaire de connaître les jours et les temps" (Mt 24,36 ; Ac 1,7). Il nous a caché cela pour que nous veillions, et que chacun d'entre nous puisse penser que cet avènement se produira pendant sa vie... Veillez, car lorsque le corps sommeille, c'est la nature qui nous domine, et notre action est alors dirigée non par notre volonté, mais par la force de la nature. Et lorsque règne sur l'âme une lourde torpeur de faiblesse et de tristesse, c'est l'ennemi qui la domine et la mène contre son propre gré... C'est pourquoi notre Seigneur a parlé de la vigilance de l'âme et de celle du corps, afin que le corps ne sombre pas dans un lourd sommeil ni l'âme dans l'engourdissement. Comme le dit l'Écriture : "Réveillez-vous dans la droiture" (1Co 15,34) et "Je m'éveille et je suis avec toi" (Ps 138,18) et "Ne faiblissez pas" (cf Ep 3,13)... "Cinq d'entre elles, dit le Seigneur, étaient insensées et cinq étaient sages." Ce n'est pas leur virginité qu'il a qualifiée de sagesse, puisqu'elles étaient toutes vierges, mais bien leurs bonnes œuvres. Si ta chasteté égale la sainteté des anges, remarque que la sainteté des anges est pure de l'envie et de tout autre mal. Si donc tu ne seras pas réprimandé pour l'impureté, veille à ne pas l'être non plus pour l'emportement et la colère... "Que vos ceintures soient serrées autour de vos reins", pour que la chasteté nous allège. "Et vos lampes allumées" (Lc 12,35), parce que le monde est comme la nuit : il a besoin de la lumière des justes. "Que votre lumière brille devant les hommes, pour qu'ils voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est dans les cieux" (Mt 5,16). »
Saint Ephrem (v.306-373), Commentaire de l'Évangile concordant, §18, 15s, SC n°121 rev. (cf Bréviaire 1er jeudide l'Avent)