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Origène

  • 25 janvier : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Allez dans le monde entier. Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création." (Mc 16, 15-18)

    « Si Jésus avait choisi, pour en faire les ministres de son enseignement, des hommes savants selon l'opinion publique, capables de saisir et d'exprimer des idées chères aux foules, il aurait été soupçonné d'avoir prêché suivant la méthode des philosophes qui tiennent école, et le caractère divin de sa doctrine n'aurait pas paru dans toute son évidence. Sa doctrine et sa prédication auraient consisté "en discours persuasifs de la sagesse" (1Co 1,17)... ; et notre foi, pareille à celle qu'on accorde aux doctrines des philosophes de ce monde, "reposerait sur la sagesse des hommes et non sur la puissance de Dieu" (1Co 2,5). Mais quand on voit des pêcheurs et des publicains sans instruction assez hardis pour discuter avec les juifs de la foi en Jésus Christ, et pour le prêcher au reste du monde, et y réussir, comment ne pas chercher l’origine de cette puissance de persuasion ? Comment ne pas avouer que la parole de Jésus : "Venez à ma suite, je vous ferai pêcheurs d'hommes" (Mt 4,19), il l'a réalisée dans ses apôtres par une puissance divine ?

    Paul aussi manifeste cette puissance quand il écrit : "Ma parole et mon message n’avaient rien des discours persuasifs de la sagesse, c’était une démonstration de l'Esprit et de la puissance de Dieu" (1Co 2,4)... C’est ce qu’ont dit les prophètes déjà, quand ils ont annoncé par avance la prédication de l'Evangile : "Le Seigneur donnera sa parole aux messagers de la bonne nouvelle avec une grande puissance", afin que "rapide court sa parole" (Ps 67,12 ; 147,4). Et de fait, nous voyons que "la voix" des apôtres de Jésus "a retenti par toute la terre et leurs paroles jusqu'aux limites du monde" (Ps 18,5 ; Rm 10,18). Voilà pourquoi ceux qui écoutent la parole de Dieu annoncée avec puissance sont remplis eux-mêmes de puissance ; ils le manifestent par leur conduite et par leur lutte pour la vérité jusqu’à la mort. »

    Origène (v.185-253), Contre Celse I, 62 (Trad. SC 132).

  • 26 décembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Vous serez détestés de tous à cause de mon nom..." (Mt 10, 17-22)

    « Si, en passant de l'incroyance à la foi, nous sommes "passés de la mort à la vie" (Jn 5,24) ne soyons pas étonnés que le monde nous hait. Car tous ceux qui ne sont pas passés de la mort à la vie, mais qui demeurent dans la mort, ne peuvent pas aimer ceux qui sont passés de la demeure ténébreuse de la mort…aux "édifices faits de pierres vivantes" (1P 2,5) où règne la lumière de la vie…
    Pour nous chrétiens voici venu le temps de nous glorifier, car il est dit : "Nous nous glorifions dans nos épreuves, car nous savons que l'épreuve produit la persévérance, la persévérance produit la valeur éprouvée, la valeur éprouvée produit l’espérance, et l'espérance ne trompe pas. Que seulement l'amour de Dieu soit répandu dans nos coeurs par l’Esprit Saint" (Rm 5,3-5)…
    "De même que nous avons largement part aux souffrances du Christ, de même, par le Christ, nous sommes largement consolés" (2Co 1,5). Accueillons donc avec une grande ferveur les souffrances du Christ ; qu'elles nous soient largement accordées, si nous voulons être largement consolés, puisque tous "ceux qui pleurent seront consolés" (Mt 5,5)… Ceux qui participent aux souffrances participeront aussi à la consolation en proportion des souffrances qui les font participer au Christ. Apprenez-le de l’apôtre qui a dit avec confiance : "Nous le savons : puisque vous connaissez comme nous la souffrance, vous obtiendrez comme nous la consolation" (2Co 1,7). »

    Origène (v.185-253), Exhortation au martyre, 41-42 (Trad. Bréviaire rev.)

  • 22 décembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Magnificat (Lc 1, 46-56)

    « On me demande comment l'âme magnifie (c'est-à-dire agrandit) le Seigneur. Car, si le Seigneur ne peut être ni augmenté ni diminué, s'il est ce qu'il est, comment Marie peut-elle dire maintenant : "Mon âme magnifie le Seigneur" ? Si je considère que le Seigneur notre Sauveur est "l'image du Dieu invisible" (Col I,15), si je vois mon âme faite "à l'image du créateur" (Gn I,27), afin d'être l'image de l'image (car mon âme n'est pas exactement l’image de Dieu, mais elle a éte créée à la ressemblance de la première image) alors voici ce que je comprendrai : à la manière de ceux dont le métier est de peindre des images et d'utiliser leur art à reproduire un seul modèle, le visage d'un roi par exemple, chacun de nous donne à son âme l'image du Christ ; il en trace une image plus ou moins grande, délavée ou ternie, ou, au contraire, claire et lumineuse, ressemblant au modèle. Donc, lorsque j'aurai agrandi l'image de l'image, c'est-à-dire mon âme, lorsque je l'aurai "magnifiée" par mes actions, mes pensées et mes paroles, alors l'image de Dieu grandira et le Seigneur lui-même sera "magnifié" dans mon âme qui en est l'image. De même que le Seigneur grandit dans cette image que nous sommes de lui, de méme, si nous tombons dans le peché, il diminue et décroît...

    Voilà pourquoi l'âme de Marie magnifie d'abord le Seigneur et ensuite "son esprit exulte en Dieu." En effet, si nous n'avons pas grandi auparavant, nous ne pouvons exulter. "Parce que, dit-elle, il a jeté les yeux sur l'humilité de sa servante." (Lc I,48) Quelle est cette humilité de Marie que le Seigneur a regardée ? Qu’avait d'humble et de bas la mère du Sauveur qui portait en elle le Fils de Dieu ? "Il a jeté les yeux sur l'humilité de sa servante", cela veut dire à peu près : il a jeté les yeux sur la justice de sa servante, sur sa tempérance, sur sa force et sur sa sagesse. D'ailleurs, il est naturel que Dieu regarde les vertus. On me dira peut-être : Je comprends que Dieu regarde la justice et la sagesse de sa servante ; mais il n'est pas évident qu'il fasse attention à son humilité. Celui qui cherche à comprendre doit remarquer que précisement l'humilité est designée dans les Ecritures comme l’une des vertus. Du reste, le Sauveur déclare : "Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez soulagement pour vos âmes." (Mt XI,29)

    "Désormais toutes les générations me diront bienheureuse." (Lc I,48) Si je comprends dans le sens le plus simple les mots "toutes les générations", je l'interprète des croyants. Mais si je réfléchis plus profondément, je remarque qu'il vaut bien mieux ajouter : "car le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses. (Lc I,49)" En effet, puisque "tout homme qui s'abaisse sera élevé" (Lc XIV,11), Dieu qui a regardé l'humilité de la bienheureuse Marie, a naturellement le Tout-Puissant fait pour elle de grandes choses.

    "Et sa miséricorde s'étend d'âge en âge." (Lc I,50) La miséricorde de Dieu s'étend non pas sur une, deux, trois, ni même cinq genérations, mais éternellement, d'âge en âge. "Pour ceux qui le craignent, il a déployé la force de son bras." (Lc I,50-51) Si, malgré ta faiblesse, tu approches du Seigneur dans la crainte, tu pourras entendre sa promesse en réponse à ta crainte. Quelle est cette promesse ? Il se fait, dit Marie, la force de ceux qui le craignent. La force ou la puissance est une qualité royale... Si donc tu crains Dieu, il te donne sa force et sa puissance, il te donne son Royaume, afin que, soumis au Roi des rois, tu possèdes le Royaume des Cieux, dans le Christ Jésus.

    "Marie demeura avec Elisabeth environ trois mois, puis elle s’en retourna chez elle." (Lc I,56) S'il a suffi de la venue de Marie chez Elisabeth et de sa salutation pour que l'enfant tressaille de joie et qu'Elisabeth, remplie de l'Esprit-Saint, prophétise ce que rapporte l'Evangile, si une seule heure a apporté de si grandes transformations, il nous reste à imaginer quels progrès Jean a réalisés pendant les trois mois du séjour de Marie près d'Elisabeth. Si en un instant le petit enfant a tressailli et, pourrait-on dire, bondi de joie, et si Elisabeth a été remplie de l'Esprit Saint, il est anormal que, pendant trois mois, ni Jean, ni Elisabeth n'aient pas réalisé de progrès au voisinage de la mère du Seigneur et en la présence du Sauveur lui-même. »

    Origène, Homélie sur l'Evangile de Luc (suite du commentaire proposé hier).

    Source : missel.free.fr

  • 21 décembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    La Visitation (Lc 1, 39-45)

    « Les meilleurs vont vers les moins bons, pour leur procurer quelque avantage par leur venue. Ainsi, le Sauveur vient près de Jean pour sanctifier son baptême ; et dès que Marie eut entendu l'ange lui annoncer qu'elle allait concevoir le Sauveur et que sa cousine Elisabeth était enceinte, elle partit, se rendit en hâte vers le haut pays et entra dans la maison d'Elisabeth. Car Jésus, dans le sein de Marie, se hâtait de sanctifier Jean, encore dans le sein de sa mère. Avant l'arrivée de Marie et son salut, l'enfant n'avait pas tressailli dans le sein de sa mère ; mais dès que Marie eut prononcé la parole que le Fils de Dieu, dans son sein maternel, lui avait suggérée, l'enfant tressaillit de joie et, dès lors, de son précurseur, Jésus fit un prophète.

    Marie, tout à fait digne d'être mère du Fils de Dieu, devait, après son entretien avec l'ange, gravir la montagne et demeurer sur les sommets. D'où ces mots : "En ces jours-là, Marie partit et se rendit en hâte vers le haut pays." Il lui fallait aussi, parce qu'elle était active et pleine de sollicitude se hâter avec zèle et, remplie de l'Esprit-Saint, être conduite sur les sommets et protégée par la puissance divine, qui l'avait déjà couverte de son ombre. Elle vint donc "dans une ville de Juda ; elle entra chez Zacharie et salua Elisabeth. Or, dès qu'Elisabeth eut entendu la salutation de Marie, l'enfant tressaillit dans son sein et Elisabeth fut remplie du Saint-Esprit." (Lc I, 39-41)

    C'est pourquoi il n'est pas douteux que, si Elisabeth fut alors remplie du Saint-Esprit ce fut à cause de son fils. Car ce n'est pas la mère qui, la première, a mérité le Saint-Esprit ; mais lorsque Jean, encore enfermé dans son sein, eut reçu le Saint-Esprit, alors, Elisabeth, après la sanctification de son fils, fut remplie du Saint-Esprit. Tu pourras le croire, si tu as remarqué une chose semblable à propos du Sauveur... Car Marie fut remplie du Saint-Esprit, quand elle commença à avoir le Sauveur en son sein. En effet, dès qu'elle eut reçu l'Esprit Saint, créateur du corps du Seigneur, et que le Fils de Dieu eut commencé à être dans son sein, Marie aussi fut remplie de l’Esprit-Saint.

    "Alors Elisabeth poussa un grand cri et dit : Tu es bénie entre les femmes." (Lc I, 42)

    Si la naissance du Sauveur n'avait pas été céleste et bienheureuse, si elle n’avait pas eu quelque chose de divin et de supérieur à l'humanité, jamais sa doctrine ne se serait répandue sur toute la terre. S'il y avait eu dans le sein de Marie un homme au lieu du Fils de Dieu, comment pourrait-on expliquer, au temps du Christ comme maintenant, des guérisons de maladies de toutes sortes, non seulement physiques, mais encore morales ?...

    Avant Jean, Elisabeth prophétise ; avant la naissance du Seigneur notre Sauveur, Marie prophétise. Et de même que le péché a commencé par une femme pour atteindre ensuite l'homme, de même le salut a débuté par des femmes, pour que les autres, oubliant la faiblesse de leur sexe, imitent la vie et la conduite des saintes, surtout de celles que l'Evangile nous décrit maintenant. Voyons donc la prophétie de la Vierge. "Mon âme magnifie le Seigneur, dit-elle, et mon esprit exalte en Dieu mon Sauveur." (Lc I, 46-47) Deux principes, l'âme et l'esprit, s'acquittent d'une double louange. L'âme célèbre le Seigneur, l'esprit célèbre Dieu, non pas que la louange du Seigneur soit différente de celle de Dieu, mais parce que Dieu est aussi Seigneur et que le Seigneur est également Dieu. »

    Origène, Homélie sur l'Evangile de Luc.

    Source : missel.free.fr

  • 19 décembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    La naissance de Jean (Lc 1, 5-25)

    « La naissance de Jean est pleine de miracles. Un archange a annoncé l'avènement de notre Seigneur et Sauveur ; de même, un archange annonce la naissance de Jean. "Il sera rempli du Saint-Esprit dès le sein de sa mère." Le peuple ne reconnaissait pas notre Seigneur qui accomplissait "des miracles et des prodiges" et guérissait leurs maladies, mais Jean, encore dans le sein maternel, exulte de joie. A l'arrivée de la mère de Jésus, on ne peut pas le retenir et il essaie d'aller à sa rencontre. "Dès l'instant que ta salutation a frappé mes oreilles, dit Elisabeth, l'enfant a tressailli de joie dans mon sein" (Lc I,44). Encore dans le sein de sa mère, Jean avait déjà reçu le Saint-Esprit... L'Ecriture dit ensuite "qu'il ramènera de nombreux fils d'Israël au Seigneur leur Dieu". Jean en ramena "un grand nombre" ; le Seigneur, non pas un grand nombre, mais tous. En effet, c'était son oeuvre de ramener le monde entier à Dieu le Père. "Et il marchera le premier en présence du Seigneur dans l'esprit et la puissance d'Elie"... Comme en tous les prophètes, il y avait en Elie puissance et esprit... L'Esprit, qui avait reposé sur Elie, est venu sur Jean et la puissance qui habitait Elie est apparue en lui. L'un a été transporté au ciel (2R 2,11) mais l'autre a été le précurseur du Seigneur, et il est mort avant lui pour descendre au séjour des morts annoncer son avènement. »

    Origène, Homélies sur saint Luc, n°4 (Trad. SC n°87).

  • 6 décembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    La maison bâtie sur le roc (Mt 7, 21-27)

    « Quand vous affrontez courageusement les tentations, ce n'est pas la tentation qui vous rend fidèles et constants ; elle révèle seulement les vertus de constance et de courage qui étaient déjà en vous, mais de façon cachée. "Penses-tu, dit le Seigneur, que j'avais un autre but, en parlant ainsi, que de faire apparaître ta justice ?" (Jb 40,3 LXX) Et il dit ailleurs : "Je t'ai affligé et je t'ai fait sentir la faim pour manifester ce que tu avais dans le coeur" (Dt 8,3-5).

    De la même manière, la tempête ne rend pas solide l'édifice bâti sur le sable. Si tu veux bâtir, que ce soit sur la pierre. Alors, quand la tempête se lèvera, elle ne renversera pas ce qui est fondé sur la pierre ; mais pour ce qui vacille sur le sable, elle montre aussitôt que ses fondations ne valent rien. C'est pourquoi, avant que s'élève la tempête, que se déchaînent les rafales de vent, que débordent les torrents, tandis que tout demeure encore en silence, tournons toute notre attention sur le fondement de l'édifice, construisons notre demeure avec les pierres variées et solides des commandements de Dieu. Et quand la persécution se déchaînera et qu'une tourmente cruelle s'élèvera contre les chrétiens, nous pourrons montrer que notre édifice est fondé sur la pierre, le Christ Jésus (1Co 3,11). »

    Origène (v.185-253), Homélies sur St Luc, n°26, 4-5 (Trad. SC 87 & Delhougne, Les Pères de l'Eglise commentent l'Evangile, Brepols, 1991).

  • 27 novembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Prenez garde de ne pas vous laisser égarer, car beaucoup viendront sous mon nom en disant : 'C'est moi', ou encore : 'Le moment est tout proche.' Ne marchez pas derrière eux !" (Lc 21, 5-11)

    « Les apparences du bien, que le Christ possède toutes en lui-même en vérité pour édifier les hommes, le diable les possède toutes en lui-même en apparence pour abuser les saints.
    L'Antichrist se contente de prendre le nom de Christ sans accomplir d'oeuvres, ni enseigner ses paroles de vérité, ni montrer en lui sa sagesse. Et de la même manière que (d'après certains) Barabbas s'appelait aussi Jésus mais était un brigand qui n'avait de Jésus que le nom, ainsi j'estime qu'il y a beaucoup de christs, mais uniquement par le nom. Remarque d'ailleurs que nulle part on ne trouve le Seigneur utilisant précisément ce mot dans les Ecritures et disant : "Je suis le Christ" ; il évitait ainsi de parler comme beaucoup qui allaient venir en son nom en disant : "Je suis le Christ" (cf. Mt 24,5). Car pour que les fidèles croient qu'il est le Christ lui suffisaient les oeuvres de Dieu, que seul le Christ pouvait accomplir, la parole qu'il enseignait, et ses miracles qui criaient plus fort que mille voix : "Je suis le Christ." »

    Origène, Commentaire sur Matthieu, 33 (Trad. E. Gillon, L'Antichrist, coll. Bibliothèque 4, Migne, Paris, 2011)

  • 22 novembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Jésus pleure sur Jérusalem (Lc 19, 41-44)

    « Quand notre Seigneur et Sauveur fut proche de Jérusalem, à sa vue, il pleura sur elle : "Ah ! si en ce jour tu avais compris, toi aussi, le message de paix ! Mais maintenant encore il demeure caché à tes yeux. Oui, des jours vont fondre sur toi où tes ennemis t'environneront de retranchements"... Quelqu'un dira peut-être : "Le sens de ces paroles est clair ; de fait, elles se sont réalisées au sujet de Jérusalem ; l'armée romaine l'a assiégée et dévastée jusqu'à l'extermination, et le temps viendra où il n'en restera plus pierre sur pierre."

    Je ne le nie pas, Jérusalem a été détruite à cause de son aveuglement, mais je pose la question : ces pleurs ne concernaient-ils pas notre Jérusalem à nous ? Car nous sommes la Jérusalem sur laquelle Jésus a pleuré, nous qui imaginons avoir un regard si pénétrant. Si, une fois instruit des mystères de la vérité, après avoir reçu la parole de l'Évangile et l'enseignement de l'Église..., l'un de nous pèche, il provoquera lamentations et pleurs, car on ne pleure sur aucun des païens, mais sur celui qui après avoir fait partie de Jérusalem a cessé d'en être.

    Des pleurs sont versés sur notre Jérusalem parce qu'en raison de ses péchés "les ennemis vont l'entourer", c'est-à-dire les forces adverses, les esprits mauvais. Ils dresseront autour d'elle un retranchement ; ils l'assiègeront, et "ils n'en laisseront pas pierre sur pierre". C'est ce qui arrive lorsqu'après une longue continence et plusieurs années de chasteté, un homme succombe, vaincu par les séductions de la chair... Voilà donc la Jérusalem sur laquelle des pleurs sont versés. »

    Origène (v.185-253), Homélie 38 sur Luc, PG 13, 1896-1898 (Trad. A.-G. Hamman, "Thèmes et figures bibliques", Desclée de Brouwer, Paris, 1984).

  • 16 novembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Ce qui se passera dans les jours du Fils de l'homme ressemblera à ce qui est arrivé dans les jours de Noé." (Lc 17, 26-37)

    « Autant que la petitesse de mon esprit me le permet, je pense que le déluge, qui mit alors, pour ainsi dire, un terme au monde, figure la véritable fin du monde. Le Seigneur lui-même l'a proclamé quand il a dit : "Aux jours de Noé les hommes achetaient, vendaient, bâtissaient, se mariaient, mariaient leurs filles, et le déluge vint qui les perdit tous : ainsi en sera-t-il à l'avènement du Fils de l'homme." (Lc XVII,26-27)
    Dans ce texte, il apparaît bien que le Seigneur décrit d'une seule et même façon le déluge qui est passé et la fin du monde qu'il annonce. Jadis, il fut dit à l'antique Noé de faire une arche et d'y introduire avec lui non seulement ses fils et ses proches mais des animaux de toute espèce ; à la consommation des siècles, il a été dit par le Père au Seigneur Jésus-Christ, notre Noé, qui est véritablement le seul Juste et le seul Parfait, de se faire une arche de bois équarris et de lui donner des mesures pleines de mystères célestes [le bois de la Sainte Croix]. C'est ce qui est indiqué dans le Psaume qui dit : "Demande et je te donnerai les nations pour héritage et pour domaine les extrémités de la terre." (Ps II,8) Il construit donc une arche et il fait des cellules, c'est-à-dire des logements pour recevoir les différentes espèces d'animaux. Ce sont ces logements que vise le prophète quand il dit : "Va, mon peuple, entre dans tes logements, cache-toi pour quelques instants jusqu'à ce que ma colère ait passé." (Is XXVI,20) La comparaison s'impose donc entre ce peuple qui est sauvé dans l'Eglise, et tous ces êtres, hommes et animaux, qui ont été sauvés dans l'arche. »

    Origène, Homélies sur la Genèse, II, 3 (Trad. SC 7, Le Cerf, 1943).

  • 15 novembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Le règne de Dieu ne vient pas d'une manière visible" (Lc 17, 20,25)

    « Comme l'a dit notre Seigneur et Sauveur : "Le règne de Dieu vient sans qu'on puisse le remarquer. On ne dira pas : Le voilà, il est ici, ou bien : Il est là. Car voilà que le règne de Dieu est au-dedans de vous".  Et en effet, "elle est tout près de nous, cette Parole, elle est dans notre bouche et dans notre coeur" (Dt 30,14). En ce cas, il est évident que celui qui prie pour que vienne le règne de Dieu a raison de prier pour que ce règne de Dieu germe, porte du fruit et s'accomplisse en lui-même. Chez tous les saints en lesquels Dieu règne et qui obéissent à ses lois spirituelles, il habite comme dans une cité bien organisée. Le Père est présent en lui et le Christ règne avec le Père dans cette âme parfaite, selon sa parole : "Nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui." (Jn 14,23)
    Le règne de Dieu qui est en nous, alors que nous progressons toujours, parviendra à sa perfection lorsque la parole de l'apôtre Paul s'accomplira : le Christ "après avoir soumis" tous ses ennemis, "remettra son pouvoir royal à Dieu le Père pour que Dieu soit tout en tous" (1Co 15,28). C'est pourquoi, priant sans relâche, avec des dispositions divinisées par le Verbe, disons : "Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne" (Mt 6,9). »

    Origène, Traité sur la prière, 25 ; GCS 3, 356 (Trad. Bréviaire).

  • 29 octobre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Le jour du Sabbat (Lc 13, 10-17)

    « Nous ne voyons pas que les paroles de la Genèse : "Au jour du sabbat Dieu s’est reposé de ses oeuvres" (2,2) se soient réalisées en ce septième jour de la création, ni même qu'elles se réalisent aujourd'hui. Nous voyons toujours Dieu au travail. Il n'y a pas de sabbat où Dieu cesse de travailler, pas de jour où il ne "fasse se lever son soleil sur les bons et sur les méchants et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes" (Mt 5,45), où il ne "fasse pousser l'herbe sur les montagnes et les plantes au service des hommes" (Ps 146,8)..., où il ne "fasse mourir et vivre" (1Sm 2,6).
    Ainsi, le Seigneur répond à ceux qui l'accusaient de travailler et de guérir le jour du sabbat : "Mon Père travaille jusqu'à maintenant, et moi aussi je travaille" (Jn 5,17). Il montrait par là que, durant le temps de ce monde, il n'y a pas de sabbat où Dieu se repose de veiller à la marche du monde et aux destinées du genre humain... Dans sa sagesse de Créateur il ne cesse d’exercer sur ses créatures sa providence et sa bienveillance "jusqu’à la fin du monde" (Mt 28,20). Donc le vrai sabbat où Dieu se reposera de tous ses travaux sera le monde futur, quand "s'enfuiront douleur, tristesse et gémissements" (Is 35,10), et que Dieu sera "tout en tous" (Col 3,11). »

    Origène (v.185-253), Homélies sur les Nombres, n°23 (Trad. SC 29).

  • 8 octobre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Parabole du bon Samaritain

    « D'après un ancien qui voulait interpréter la parabole du bon Samaritain, l'homme qui descendait de Jérusalem à Jéricho représente Adam, Jérusalem le paradis, Jéricho le monde, les brigands les forces hostiles, le prêtre la Loi, le lévite les Prophètes, le Samaritain le Christ.
    Par ailleurs, les blessures symbolisent la désobéissance, la monture le corps du Seigneur, et le "pandochium", c'est-à-dire l'auberge accueillant tous ceux qui veulent y entrer, est l'image de l'Eglise. En outre, les deux deniers représentent le Père et le Fils, l'aubergiste le chef de l'Eglise qui a charge de l'administrer. Et la promesse de revenir, faite par le Samaritain, figure, selon cet interprète, le second avènement du Seigneur. [...]
    Ce Samaritain "porte nos péchés" (Mt 8,17) et souffre pour nous. Il porte le moribond et le conduit dans une auberge, c'est-à-dire dans l'Eglise. Celle-ci est ouverte à tous, ele ne refuse son secours à personne et tous y sont invités par Jésus : Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je vous procurerai le repos (Mt 11,28).
    Après y avoir conduit le blessé, le Samaritain ne part pas aussitôt, mais demeure toute la journée dans l'hôtellerie auprès du moribond. Il soigne ses blessures non seulement le jour, mais encore la nuit, l'entourant de toute sa sollicitude empressée. [...]
    Vraiment ce gardien des âmes s'est montré plus proche des hommes que la Loi et les Prophètes "en faisant preuve de bonté" (Lc 10,37) envers celui qui était tombé dans les mains des bandits et il s'est montré son "prochain" (Lc 10,36) moins en paroles qu'en actes.
    Il nous est donc possible, en suivant cette parole : "Soyez mes imitateurs comme je le suis moi-même du Christ" (1 Co 11,1), d'imiter le Christ et d'avoir pitié de ceux qui sont tombés dans les mains des bandits, de nous approcher d'eux, de verser de l'huile et du vin sur leurs plaies et de les bander, de les charger sur notre propre monture et de porter leurs fardeaux. Aussi, pour nous y exhorter, le Fils de Dieu a-t-il dit en s'adressant à nous tous, plus encore qu'au docteur de la Loi : "Va, et toi aussi, fais de même" (Lc 10,37). Et si nous le faisons, nous obtiendrons la vie éternelle dans le Christ Jésus, "à qui appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen" (1 P 4,11). »

    Origène († 254), Homélies sur l'Evangile de Luc, 34, 3.7-9 ; GCS 9, 201-202.204-205 (Trad. Delhougne, Les Pères de l'Eglise commentent l'Evangile, Brepols, 1991).


    « "C'est là mon bien-aimé, c'est là mon ami, filles de Jérusalem" (Ct 5,16). L'Épouse du Cantique montre celui qu'elle cherchait en disant : "Voici celui que je cherche, celui qui pour devenir notre frère est monté du pays de Juda. Il est devenu l'ami de celui qui était tombé aux mains des brigands : il a guéri ses plaies avec de l'huile, du vin et des pansements ; il l'a fait monter sur sa propre monture ; il l'a fait reposer dans l'hôtellerie ; il a donné deux pièces d'argent pour son entretien ; il a promis de donner à son retour ce qui aurait été dépensé en plus pour accomplir ses ordres". Chacun de ces détails a une signification bien évidente.
    Le docteur de la Loi tentait le Seigneur et voulait se montrer au-dessus des autres ; dans son orgueil il faisait fi de toute égalité avec les autres, disant : "Qui est mon prochain ?" Le Verbe alors lui expose, sous forme d'un récit, toute l'histoire sainte de la miséricorde : il raconte la descente de l'homme, l'embuscade des brigands, l'enlèvement du vêtement incorruptible, les blessures du péché, l'envahissement par la mort de la moitié de notre nature (puisque notre âme est restée immortelle), le passage inutile de la Loi (puisque ni le prêtre ni le lévite n'ont soigné les plaies de celui qui était tombé aux mains des brigands).
    "Il était en effet impossible que le sang des taureaux et des boucs efface le péché" (He 10,4) ; seul pouvait le faire celui qui a revêtu toute la nature humaine - des Juifs, des Samaritains, des Grecs - en un mot, de toute l'humanité. Avec son corps, qui est la monture, il s'est rendu dans le lieu de la misère de l'homme. Il a guéri ses plaies, l'a fait reposer sur sa propre monture, et il a fait pour lui de sa miséricorde une hôtellerie, où tous ceux qui peinent et ploient sous le fardeau trouvent le repos (Mt 11,28). »

    Saint Grégoire de Nysse (v.335-395), Homélie 15 sur le Cantique des Cantiques ; PG 44, 1085-1087 (Trad. Canevet, Cerf, 1992).

  • 30 septembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Il vaut mieux entrer borgne dans le royaume de Dieu que d'être jeté avec tes deux yeux dans la géhenne, là où le ver ne meurt pas et où le feu ne s'éteint pas." (Mc 9,48)

    « Partons en guerre comme Josué ; prenons d’assaut la cité la plus considérable de ce monde – la malice – et détruisons les murailles orgueilleuses du péché. Regarderais-tu alentour quel chemin il faut prendre, quel champ de bataille il faut choisir ? Tu vas sans doute trouver mes paroles étonnantes ; elles sont vraies pourtant : limite tes recherches à toi seul. En toi est le combat que tu vas livrer ; à l’intérieur de toi l’édifice de malice qu’il faut saper ; ton ennemi sort du fond de ton coeur.
    Ce n’est pas moi qui le dis, mais le Christ ; écoute-le : "C’est du coeur que viennent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les impudicités, les vols, les faux témoignages, les paroles injurieuses" (Mt 15,19). Réalises-tu la puissance de cette armée ennemie qui s’avance contre toi du fond de ton coeur ? Les voilà, nos ennemis à massacrer au premier combat, à terrasser en première ligne. Si nous sommes capables de renverser leurs murailles et de les exterminer jusqu’à ce qu’il n’en reste aucun pour le raconter, aucun pour reprendre haleine (Jos 11,14), s’il n’en est plus un seul pour reprendre vie et pour resurgir dans nos pensées, alors Jésus nous donnera le grand repos. »

    Origène (v.185-253), Homélies sur Josué, n°5, 2 (trad. SC 71).

  • 26 septembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Jésus convoqua les Douze... Il les envoya proclamer le règne de Dieu et faire des guérisons." (Lc 9, 1-6)

    « Si Jésus avait choisi, pour en faire les ministres de son enseignement, des hommes savants selon l'opinion publique, capables de saisir et d'exprimer des idées chères aux foules, il aurait été soupçonné d'avoir prêché suivant la méthode des philosophes qui tiennent école, et le caractère divin de sa doctrine n'aurait pas paru dans toute son évidence. Sa doctrine et sa prédication auraient consisté "en discours persuasifs de la sagesse" (1Co 1,17)... ; et notre foi, pareille à celle qu'on accorde aux doctrines des philosophes de ce monde, "reposerait sur la sagesse des hommes et non sur la puissance de Dieu" (1Co 2,5). Mais quand on voit des pêcheurs et des publicains sans instruction assez hardis pour discuter avec les juifs de la foi en Jésus Christ, et pour le prêcher au reste du monde, et y réussir, comment ne pas chercher l’origine de cette puissance de persuasion ? Comment ne pas avouer que la parole de Jésus : "Venez à ma suite, je vous ferai pêcheurs d'hommes" (Mt 4,19), il l'a réalisée dans ses apôtres par une puissance divine ?

    Paul aussi manifeste cette puissance quand il écrit : "Ma parole et mon message n’avaient rien des discours persuasifs de la sagesse, c’était une démonstration de l'Esprit et de la puissance de Dieu" (1Co 2,4)... C’est ce qu’ont dit les prophètes déjà, quand ils ont annoncé par avance la prédication de l'Evangile : "Le Seigneur donnera sa parole aux messagers de la bonne nouvelle avec une grande puissance", afin que "rapide court sa parole" (Ps 67,12 ; 147,4). Et de fait, nous voyons que "la voix" des apôtres de Jésus "a retenti par toute la terre et leurs paroles jusqu'aux limites du monde" (Ps 18,5 ; Rm 10,18). Voilà pourquoi ceux qui écoutent la parole de Dieu annoncée avec puissance sont remplis eux-mêmes de puissance ; ils le manifestent par leur conduite et par leur lutte pour la vérité jusqu’à la mort. »

    Origène (v.185-253), Contre Celse I, 62 (Trad. SC n°132).

  • 3 septembre : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "L'Esprit du Seigneur est sur moi, il m'a consacré par l'onction."

    « Ce n'est pas un simple hasard mais une intervention de la divine Providence si Jésus a déroulé ce livre et a trouvé dans le texte le chapitre qui prophétisait à son sujet. S'il est écrit : "Un moineau ne tombe pas dans le filet sans la volonté du Père, les cheveux de votre tête sont tous comptés" (Mt 10, 29-30), serait-ce un effet du hasard que le choix du livre d'Isaïe exprimait le mystère du Christ ? En effet, ce texte nous rappelle le Christ... Car Jésus dit : "Il m'a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres". "Les pauvres" désignent les païens. De fait, ils étaient pauvres, eux qui ne possédaient absolument rien : ni Dieu, ni Loi, ni prophètes, ni justice, ni aucune autre vertu. c'est pour ce motif que Dieu l'a envoyé comme messager auprès des pauvres, pour "annoncer la libération, aux captifs la délivrance"... Y a-t-il un être plus opprimé et plus meurtri que l'homme, avant qu'il soit libéré et guéri par Jésus ? "Après avoir lu cela et roulé le livre, Jésus le rendit et s'assit ; et tout le monde dans la synagogue avaient les yeux fixés sur lui". »

    Origène (v.185-253), Homélies sur Saint Luc, n°32, 3-6 (trad. SC 87 rev.)

  • 17 juin : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    « Comme l'a dit notre Seigneur et Sauveur : "Le règne de Dieu vient sans qu'on puisse le remarquer. On ne dira pas : Le voilà, il est ici, ou bien : Il est là. Car voilà que le règne de Dieu est au-dedans de vous".  Et en effet, "elle est tout près de nous, cette Parole, elle est dans notre bouche et dans notre coeur" (Dt 30,14). En ce cas, il est évident que celui qui prie pour que vienne le règne de Dieu a raison de prier pour que ce règne de Dieu germe, porte du fruit et s'accomplisse en lui-même. Chez tous les saints en lesquels Dieu règne et qui obéissent à ses lois spirituelles, il habite comme dans une cité bien organisée. Le Père est présent en lui et le Christ règne avec le Père dans cette âme parfaite, selon sa parole : "Nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui." (Jn 14,23)
    Le règne de Dieu qui est en nous, alors que nous progressons toujours, parviendra à sa perfection lorsque la parole de l'apôtre Paul s'accomplira : le Christ "après avoir soumis" tous ses ennemis, "remettra son pouvoir royal à Dieu le Père pour que Dieu soit tout en tous" (1Co 15,28). C'est pourquoi, priant sans relâche, avec des dispositions divinisées par le Verbe, disons : "Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne" (Mt 6,9). »

    Origène (v.185-253), Traité sur la prière, 25 ; GCS 3, 356 (trad. Bréviaire).

  • 31 mai : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    « 1. "L’âme" de Marie magnifie d’abord le Seigneur et "son esprit" ensuite exulte en Dieu. De fait, si nous n’avons pas d’abord grandi, nous ne pouvons pas exulter.
    "Parce que, dit-elle, il a jeté les yeux sur l’humilité de sa servante." Mais où est cette humilité que le Seigneur a regardée en Marie ? Qu’avait donc d’humble et d’abject la mère du Sauveur qui portait le Fils de Dieu en son sein ?
    Ces paroles : "Il a jeté les yeux sur l’humilité de sa servante", équivalent à celles-ci : "il a jeté les yeux" sur la justice de sa servante, "il a jeté les yeux" sur sa tempérance, "il a jeté les yeux" sur sa force et sa sagesse.
    De fait il est normal que Dieu porte son regard sur les vertus et l’on me dira : je comprends bien que Dieu regarde la justice et la sagesse de sa servante, mais je ne vois pas très bien comment il peut prêter attention à son humilité.
    Celui qui cherche la solution de cette difficulté, remarquera que précisément dans l’Écriture l’humilité est considérée comme une des vertus.

    2. Le Sauveur l’affirme : "Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur ; et vous trouverez le repos de vos âmes." Si vous voulez connaître le nom de cette vertu et savoir comment l’appellent les philosophes, sachez que la vertu d’humilité que Dieu considère est celle même que les sages appellent atyphía ou metriótês, "absence d’orgueil" ou "modestie". Mais nous pouvons la définir en une périphrase : c’est l’état d’un homme qui ne s’enfle pas, mais s’abaisse lui-même. S’enfler d’orgueil, selon l’Apôtre, c’est "tomber sous la condamnation du diable" qui, précisément, a commencé par l’enflure de l’orgueil et de la superbe ; voici la citation : "Afin que, n’étant pas bouffi d’orgueil, il ne tombe pas sous la condamnation du diable." "Il a jeté les yeux sur l’humilité de sa servante." Dieu m’a regardée, dit-elle, parce que je suis humble et cherche la douceur et l’abjection.

    3. "Voici que désormais toutes les générations m’appelleront bienheureuse." Si je comprend l’expression "toutes les générations" selon le sens le plus simple, je l’interprète des croyants. Mais si je scrute ce verset plus profondément, je m’aperçois qu’il est préférable d’ajouter "car le Tout-puissant a fait pour moi de grandes choses". Puisque "tout homme qui s’humilie sera exalté", Dieu a jeté les yeux sur l’humilité de la bienheureuse Marie, c’est pourquoi "le Tout-puissant, dont le nom est saint, a accompli pour elle de grandes choses."
    "Et sa miséricorde s’étend de génération en génération." Ce n’est pas sur une, deux, trois ni même cinq générations que s’étend "la miséricorde" de Dieu, mais éternellement, "de génération en génération." "Pour ceux qui le craignent, il a déployé la puissance de son bras." Malgré ta faiblesse, si tu approches du Seigneur dans la crainte, tu pourras entendre sa promesse en réponse à ta crainte." »

    Origène, Homélies sur Saint Luc, VIII, 4-6.