« Mon Dieu, vous êtes la Bonté en sa Source essentielle. Vous ne la recevez de personne, vous la possédez en même temps que votre être ; elle est votre être même ; vous êtes bon comme vous êtes, autant que vous êtes, aussi longtemps que vous êtes ; vous êtes bon depuis toujours, pour toujours, éternellement, immuablement, infiniment. Être et être bon, pour vous, cela ne fait qu'un : la bonté c'est votre être et votre Être est la Bonté même.
Toute bonté finie vient de votre Bonté infinie, elle en est une dérivation, un ruisselet, une gouttelette. Elle n'est que ce que vous lui donnez d'être, elle est seulement si elle se rattache à vous, elle cesse dès qu'elle coupe le lien. Toutes ces bontés finies m'attirent ; je les aime, je voudrais m'en emparer, je les poursuis, je m'épuise à ces poursuites le plus souvent irréalisables, et qui, réalisées, me laissent si vide et si altéré, et je néglige la Réalité sans bornes qui seule peut me combler et qui s'offre à moi. Pourtant, c'est vous que je désire et recherche en ces formes mêlées ; je ne les aime que pour ce qu'elles me représentent de votre seule vraie bonté. Vous êtes le seul vraiment aimé et désiré et le mouvement des êtres partant de ce désir cesserait si vous cessiez d'être le Bien qui se donne.
La bonté, c'est le don de soi. La Bonté infinie, c'est le don total de soi, sans bornes, sans réserve ni dans la durée ni dans l'espace ni dans la communication de ce que l'on a et de ce que l'on est. La Bonté se donne comme le soleil brille, rayonne et éclaire, comme le feu réchauffe, comme la source se répand. Et vous êtes cette Bonté, ce Don de soi, cette Lumière, cette Chaleur, cette Source répandue.
Et vous m'avez posé en face de Vous, moi, petite chose vide, froide, obscure, égoïste, pour accueillir, selon la mesure de mon être possible, votre Être qui est tout cela et veut me combler de Lui. »
Dom Augustin Guillerand (1877-1945), Face à Dieu (Louange à la Bonté), Benedettine di Priscilla, Roma, 1956.