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Pères de l'Eglise - Page 7

  • Méditation : chercher Dieu...

    « Que l'âme s'en souvienne : c'est l'Époux qui, le premier, l'a cherchée et, le premier, l'a aimée ; telle est la source de sa propre recherche et de son propre amour...
    "J'ai cherché, dit l'Epouse [du Cantique des Cantiques], celui que mon cœur aime" (3,1). Oui, c'est bien à cette recherche que t'invite la tendresse prévenante de celui qui, le premier, t'a cherchée et aimée. Tu ne le chercherais pas, s'il ne t'avait d'abord cherchée ; tu ne l'aimerais pas, s'il ne t'avait d'abord aimée.
    Ce n'est pas une seule bénédiction de l'Epoux qui t'a prévenue, mais deux : il t'a aimée, il t'a cherchée. L'amour est la cause de sa recherche ; sa recherche est le fruit de son amour, c'en est aussi le gage assuré. Tu es aimée de lui, en sorte que tu ne peux pas le soupçonner de te chercher pour te punir. Tu es cherchée par lui, en sorte que tu ne peux pas te plaindre de ne pas être aimée réellement. Cette double expérience de sa tendresse t'a remplie d'audace : elle a chassé toute honte, elle t'a persuadée de revenir à lui, elle a soulevé ton élan. De la cette ferveur, de là cette ardeur à "chercher celui que ton cœur aime", car évidemment tu n'aurais pas pu le chercher, s'il ne t'avait d'abord cherchée ; et maintenant qu'il te cherche, tu ne peux pas ne plus le chercher. »

    Saint Bernard (1091-1153), Sermons sur le Cantique des Cantiques, n°84 (Trad. Sr Isabelle de la Source, Lire la Bible, Tome 6, Médiaspaul, 1988).

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  • 3 mars : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Bénis le Seigneur, ô mon âme,
    bénis son nom très saint, tout mon être !"
    Ps 102

    « En nous appelant à bénir le Seigneur, le Prophète s’adresse à ce qu’il y a d’intérieur en nous, ou à notre âme, qui a toujours quelqu’un qui l’écoute et qui doit chanter intérieurement, au souvenir de nos péchés pour les désavouer, au souvenir des bienfaits de Dieu, lequel stimulait dans les martyrs l’espérance de retrouver dans le ciel la vie qu’ils donnaient pour Dieu. Ils ne lui reportaient que ses dons, il est vrai, et ne pas oublier ses dons, c’est lui en rendre grâce ; s’il nous demande un culte, c’est pour nous attirer à lui. De nous-mêmes nous n’avons que le péché ; de lui nous vient le calice du salut, ou la douleur qu’il faut subir en invoquant son nom. N’oublions, donc jamais : — Qu’il nous remet nos fautes, mais en nous imposant des peines qui nous ramènent à lui ; — Qu’il guérit nos langueurs, pourvu que nous soyons patients dans nos peines dont il nous guérira certainement, comme le malade se laisse opérer par le médecin qui n’est pas sûr de le guérir ; — Qu’il nous délivrera ainsi de la corruption en nous donnant le Christ par qui nous sommes incorruptibles ; — Qu’il nous couronnera dans sa miséricorde, car la lutte qui nous donnera la couronne viendra de la grâce ; — Qu’il nous rassasiera de bonheur, en nous donnant Dieu lui-même, dont nous ne sentons point ici-bas l’ineffable douceur, parce que notre corps est appesanti ; — Qu’il renouvellera ce corps quand l’aigle sent son bec trop allongé par les années, pour laisser passage à la nourriture, il l’use sur la pierre et reprend par la nourriture de nouvelles forces ; ainsi Dieu usera notre corps sur la pierre qui est le Christ et le revêtira de. jeunesse en le rassasiant des trois pains de l’Evangile ou de Dieu en trois personnes ; — Qu’il fait miséricorde à ceux qui sont miséricordieux, et quand on lui amène la femme adultère, il écrit la loi sur la terre, pour marquer les vertus chrétiennes, et nous apprendre à chercher si nous ne sommes point coupables. Pour le juste nous n’avons que la miséricorde corporelle ; à l’injuste pourtant nous devons faire aussi miséricorde, non parce qu’il est injuste, mais parce qu’il est homme, comme au juste, parce qu’il est juste. La vengeance n’est permise que quand elle est une juste correction infligée à ceux qui nous sont soumis ; s’agit-il des puissants, endurons persécution. Dieu a montré à Moïse qu’il donnait la loi, afin que l’homme vit le nombre de ses fautes, et eût recours à l’aveu et à la grâce. Toutefois Dieu est lent à punir, parce qu’il nous invite à la pénitence, et pourtant nous remettons cette pénitence indéfiniment ; et Dieu ne nous traite point selon nos offenses ; chaque jour il nous protège comme le ciel protége la terre. Il met nos péchés au couchant pour n’y plus revenir, et sa grâce à un orient sans occident, Il sait que nous sommes faibles, que nos jours sont courts, que tout passe vite ici-bas, qu’il récompensera non ceux qui connaissent la loi, mais ceux qui en font les oeuvres, non point, seulement à l’extérieur, mais aussi de coeur. »

    Saint Augustin, Discours sur le Psaume CII, in Oeuvres complètes de saint Augustin , traduites pour la première fois en français sous la direction de M. l'abbé Raulx, Bar-Le-Duc, 1866.

    Source : Abbaye Saint Benoît.

  • 2 mars : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    La parabole du fils prodigue (Lc 15, 1-32)

    « Voici que le Père s'avance à ta rencontre ; il inclinera sa tête sur ton épaule, il te donnera un baiser, gage d'amour et de tendresse ; il te fera remettre un vêtement, un anneau et des chaussures. Tu crains encore une réprimande : il te rend ta dignité ; tu crains un châtiment : il te donne un baiser ; tu as peur d'un mot de reproche : il prépare un festin à ton intention. »

    Saint Ambroise, Expositio Ev. S. Lc, 7.

    « Est-ce nous, en effet, qui avons cherché Jésus Christ les premiers ? N'est-ce pas lui au contraire qui nous a cherchés le premier ? Est-ce nous, pauvres malades, qui sommes venus au-devant du médecin ? N'est-ce pas plutôt le médecin qui est venu trouver les malades ? Est-ce que la brebis ne s'était pas égarée avant que le pasteur, laissant les quatre-vingt-dix-neuf autres, se soit mis à sa recherche, l'ait trouvée et rapportée plein de joie sur ses épaules ? (Lc 15,4). La pièce d’argent n’était-elle pas perdue avant que la femme allume une lampe et la cherche dans toute sa maison jusqu'à ce qu'elle l'ait trouvée ? (Lc 15,8)… Notre pasteur a retrouvé sa brebis, mais il a commencé par la chercher ; comme cette femme, il a retrouvé sa pièce d’argent, mais seulement après l'avoir cherchée. Nous avons donc été cherchés, et c'est seulement après avoir été trouvés que nous pouvons parler ; loin de nous donc tout sentiment d'orgueil. Nous étions perdus sans retour, si Dieu ne nous avait pas cherchés pour nous retrouver. »

    Saint Augustin, Sermons sur St Jean, n° 7.

  • 1er mars : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Mois de St Joseph

    « Le Seigneur a réuni en Joseph comme dans un soleil tout ce que les saints ont ensemble de lumière et de splendeur. »

    Saint Grégoire de Nazianze.

  • 28 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Le séjour des morts (Lc 16, 19-31)

    « Le pauvre couvert d'ulcères devant la porte du riche fut porté par les anges au sein d'Abraham, voilà ce que nous lisons, ce que nous croyons. Quant à ce riche, qui était revêtu de pourpre et de fin lin, qui faisait chaque jour bonne chère, il fut jeté dans les flammes de l'enfer. Est-ce bien par le seul mérite de sa pauvreté que l'un fut reçu par les anges, et pour le crime d'être riche que l'autre fut jeté dans les tourments ? Dans ce pauvre, c'est l'humilité qui est glorifiée, et dans ce riche l'orgueil qui est châtié. Et je prouve en un mot que ce n'est point la richesse, mais bien l'orgueil que Dieu a condamné dans ce riche. Assurément ce pauvre fut porté au sein d'Abraham ; mais cet Abraham, au dire de l'Ecriture, était un riche de la terre, il avait de l'or, de l'argent (Gn 13, 2). Si le riche est jeté dans les tourments, comment Abraham était-il plus élevé en gloire que le pauvre qu'il recevait en son sein ? Mais Abraham était humble au milieu de ses richesses ; il tremblait devant les préceptes de Dieu, il s'y soumettait.
    Apprenez donc à être pauvres, à être indigents, soit que vous possédiez des biens ici-bas, soit que vous n'en possédiez point. Vous trouvez en effet des gens orgueilleux dans leur pauvreté, et des hommes riches qui confessent leurs péchés. Dieu regarde l'intérieur ; voilà ce qu'il pèse et ce qu'il juge. »

    Saint Augustin, Discours sur les Psaumes, 85 (3), Le Cerf, Paris,2007.

    Texte intégral sur le site internet de l'Abbaye Saint-Benoît.

  • 27 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude
    (Mt 20, 17-28)

    « C’est ainsi que Jésus-Christ a montré que c’est un désir de païens et d’infidèles de souhaiter d’être en charge, et d’avoir le premier rang. Car cette passion est étrangement dangereuse, et elle fait sentir sa violence et sa tyrannie aux plus grandes âmes.

    C’est pourquoi, comme elle a besoin d’un remède plus puissant, et comme d’une incision plus profonde, Jésus-Christ s’élève contre elle avec force, et réprime ce désir empoisonné dans ses disciples par la comparaison qu’il fait d’eux avec les païens et les idolâtres. Ainsi il guérit en même temps l’envie des dix apôtres, et l’ambition des deux frères ; comme s’il leur disait : N’entrez point dans ces sentiments d’aigreur, et ne vous croyez point offensés. Ceux qui recherchent ainsi les premières places se font eux-mêmes plus de mal qu’ils n’en peuvent faire aux autres. Ils se déshonorent par ce désir d’honneur, et leur superbe ambition est le comble de la bassesse.

    Car ma conduite est bien différente de celle des hommes, Ceux qui commandent parmi les païens, sont les princes et les rois ; mais dans la religion que j’établis, celui qui est le premier par sa charge, se doit considérer comme le dernier de tous. Et pour vous faire voir la vérité de ce que je dis, considérez qui je suis et ce que je fais. Quoique je sois le roi des anges, j’ai voulu néanmoins me faire homme : j’ai embrassé volontairement les mépris, les outrages, et non seulement les outrages, mais la mort même. "Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, amis pour servir et donner sa vie pour la rédemption de plusieurs ". Ainsi, je ne me suis pas contenté de souffrir la honte et l’ignominie, mais j’ai donné "ma vie même pour la rédemption de plusieurs". Car qui sont ceux pour qui je suis mort, sinon les païens et les idolâtres ? Quand vous vous humiliez vous autres, c’est pour vous-mêmes. Mais quand je me suis humilié, ce n’était point pour moi, mais pour vous.

    Ne craignez donc point, mes frères, que votre humilité vous déshonore. Vous ne sauriez jamais, quoi que vous fassiez, vous humilier autant que votre Maître. Et néanmoins son humiliation est devenue son plus grand honneur et le comble de sa gloire. Avant qu’il se fût fait homme, il n’était connu que des anges. Mais depuis qu’il s’est revêtu de notre corps, et qu’il est mort sur une croix, non seulement il n’a pas perdu cette première gloire, mais il y a encore ajouté celle de se faire connaître et adorer de toute la terre.

    Après cela, n’appréhendez point de vous abaisser en vous humiliant. C’est ainsi au contraire que vous vous relèverez davantage, parce que l’humilité est une source d’honneur et la porte du royaume. Craignons plutôt qu’en prenant une voie tout opposée pour nous élever, nous ne nous combattions nous-mêmes dans cette injuste prétention. Car on ne devient pas grand cri désirant de l’être. Mais celui qui veut être le plus grand de tous, deviendra au contraire le dernier de tous.

    C’est une conduite que Jésus-Christ garde toujours dans l’Evangile, d’apprendre aux hommes que le moyen d’obtenir ce qu’ils désirent, est d’y tendre par des voies toutes contraires à leurs pensées. Nous avons déjà fait voir cela plusieurs fois, comme à l’égard des ambitieux et des avares. Le Fils de Dieu dit à l’ambitieux : Pourquoi donnez-vous l’aumône aux pauvres, sinon pour acquérir de l’honneur devant les hommes ? Détruisez donc ce mauvais désir, et je vous comblerai d’honneur et de gloire. Il dit à l’avare : Pourquoi amassez-vous tant de biens, sinon pour devenir riche ? Cessez donc d’aimer ces richesses passagères, et je vous enrichirai véritablement. Il agit encore ici de la même manière. Pourquoi, dit-il, désirez-vous la première place, sinon pour être le premier de tous ? Choisissez donc d’être le dernier, et vous serez le premier. Si vous voulez être grand, ne désirez point de l’être, et vous le serez. Car ce désir d’être grand est de la dernière bassesse. Vous voyez comment il les guérit de leur passion, en leur montrant que s’ils veulent la satisfaire, ils n’obtiendront point ce qu’ils désirent, et qu’ils l’obtiendront en la combattant. »

    Saint Jean Chrysostome, Homélie LXV sur Saint Matthieu (4), in Oeuvres complètes (tome VIII) traduites pour la première fois en français sous la direction de M. Jeannin, Bar-le-Duc, L. Guérin & Cie, 1865.

    Source : Abbaye Saint Benoît.

  • 26 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Qui s'élèvera sera abaissé, qui s'abaissera sera élevé" (Mt 23, 1-12)

    « Quel est le vase où la grâce se déverse de préférence ? Si la confiance est faite pour recevoir en elle la miséricorde, et la patience pour recueillir la justice, quel récipient pourrons-nous proposer qui soit apte à recevoir la grâce ? Il s'agit d'un baume très pur et il lui faut un vase très solide. Or quoi de plus pur et quoi de plus solide que l'humilité du coeur ? C'est pourquoi Dieu "donne sa grâce aux humbles" (Jc 4,6) ; c'est à juste titre qu'il "a posé son regard sur l'humilité de sa servante" (Lc 1,48). À juste titre parce qu'un coeur humble ne se laisse pas occuper par le mérite humain et que la plénitude de la grâce peut s'y répandre d'autant plus librement...

    Avez-vous observé ce pharisien en prière ? Il n'était ni un voleur, ni injuste, ni adultère. Il ne négligeait pas non plus la pénitence. Il jeûnait deux fois par semaine, il donnait le dixième de tout ce qu'il possédait... Mais il n'était pas vide de lui-même, il ne s'était pas dépouillé lui-même (Ph 2,7), il n'était pas humble, mais au contraire élevé. En effet, il ne s'est pas soucié de savoir ce qui lui manquait encore, mais il s'est exagéré son mérite ; il n'était pas plein, mais enflé. Et il s'en est allé vide pour avoir simulé la plénitude. Le publicain, au contraire, parce qu'il s'est humilié lui-même et qu'il a pris soin de se présenter comme un vase vide, a pu emporter une grâce d'autant plus abondante. »

    Saint Bernard, 3e Sermon sur l'Annonciation, 9-10.

  • 25 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    (Lc 6, 36-38 - cf Mt 7, 1-2 ; Mc 4, 24)
    "Soyez miséricordieux... Ne jugez pas... Ne condamnez pas... Pardonnez... Donnez..."

    « Le Christ a donné sa vie pour toi et tu continues à détester celui qui est un serviteur comme toi ? Comment peux-tu t'avancer vers la table de la paix ? Ton Maître n'a pas hésité à endurer pour toi toutes les souffrances, et tu refuses même de renoncer à ta colère ?...  "Un tel m'a gravement offensé, dis-tu, il a été tant de fois injuste envers moi, il m'a même menacé de mort !" Qu'est-ce que cela ? Il ne t'a pas encore crucifié comme ses ennemis ont crucifié le Seigneur.

    Si tu ne pardonnes pas les offenses de ton prochain, ton Père qui est dans les cieux ne te pardonnera pas non plus tes fautes (Mt 6,15). Que dit ta conscience quand tu prononces ces paroles : "Notre Père, qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié" et ce qui suit ? Le Christ n'a pas fait de différence : il a versé son sang aussi pour ceux qui ont versé le sien. Pourrais-tu faire quelque chose de semblable ? Lorsque tu refuses de pardonner à ton ennemi, c'est à toi que tu causes du tort, pas à lui...; ce que tu prépares, c'est un châtiment pour toi-même au jour du jugement...

    Écoute ce que dit le Seigneur : "Lorsque tu vas présenter ton offrande sur l'autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande là, devant l'autel, va d'abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande"... Car le Fils de l'homme est venu dans le monde pour réconcilier l'humanité avec son Père. Comme Paul le dit : "Maintenant Dieu a réconcilié avec lui toutes choses" (Col 1,22) ; "par la croix, en sa personne, il a tué la haine" (Ep 2,16). »

    Saint Jean Chrysostome, Homélie sur la trahison de Judas, 2, 6 ; PG 49, 390 (Trad. Delhougne, Les Pères commentent, Brepols, 1991).

  • 24 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    La Transfiguration

    « Il nous faut contempler, mes bien-aimés, et expliquer le spectacle saint due le Seigneur présenta sur la sainte montagne. C'est de cet évènement qu'il avait dit : "Je vous le déclare en vérité, il y en a quelques-uns ici présents qui ne goûteront pas la mort qu'ils n'aient vu le Fils de l'homme dans son royaume" (Mt XVII,1-8).

    Voici le commencement de la lecture qui vient de nous être faite. "Six jours après avoir prononcé ces paroles, il prit avec lui trois disciples, Pierre, Jean et Jacques, et alla sur la montagne." Ces disciples étaient ceux dont il avait dit : "Il y en a ici quelques-uns qui ne goûteront point la mort qu'ils n'aient vu le Fils de l'homme dans son royaume." Qu'est-ce que ce royaume ? Question assez importante. Car l'occupation de cette montagne n'était pas la prise de possession de ce royaume. Qu'est-ce en effet qu'une montagne pour qui possède le ciel ? Non seulement les Ecritures nous enseignent cette différence, mais nous la voyons en quelque sorte des yeux de notre coeur.

    Or Jésus appelle son royaume ce que souvent il nomme le royaume des cieux. Mais le royaume des cieux est le royaume des saints ; car il est dit : "Les cieux racontent la gloire de  Dieu" ; et aussitôt après : "Il n'y a point de langues ni d'idiomes qui n'entendent leurs voix" ; les voix de ces mêmes cieux. "L'éclat s'en est répandu sur toute la terre, et leurs paroles ont retenti jusqu'aux extrémités de l’univers" (Ps XVIII, 4,5). N'est-ce donc pas des Apôtres et de tous les prédicateurs fidèles de la parole de Dieu qu'il est fait ici mention ? Ces mêmes cieux régneront avec le Créateur du ciel, et voici ce qui s'est fait pour le démontrer.

    Le Seigneur Jésus en personne devint resplendissant comme le soleil, ses vêtements blancs comme la neige, et avec lui s'entretenaient Moïse et Elie. Jésus lui-même, Jésus en personne parut resplendissant comme le soleil, marquant ainsi qu'il était la lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde (Jn I,9). Ce qu'est ce soleil pour les yeux de la chair, Jésus l'est pour les yeux du coeur ; l'un est pour les âmes ce que l'autre est pour les corps.

    Ses vêtements représentent ici son Eglise ; car ils tombent s'ils ne sont portés et maintenus. Paul était dans ces vêtements comme l'extrémité de la frange ; aussi dit-il. "Je suis le moindre des Apôtres" (I Cor. XV, 9) ; et ailleurs : "Je suis le dernier des Apôtres" (Ibid. IV,19). Or la frange est ce qu'il y a de moindre et d'extrême dans le vêtement. Aussi, comme cette femme qui souffrait d'une perte de sang fut guérie en touchant la frange de la robe du Seigneur (Lc VII,44) ; ainsi l'Eglise des gentils se convertit à la prédication de Paul. Eh ! qu'y a-t-il d'étonnant que l'Eglise soit figurée par de blancs vêtements, puisque nous entendons le prophète Isaïe s'écrier : "Vos péchés fussent-ils rouges comme l'écarlate, je vous blanchirai comme la neige" (Is I,18) ?

    Que peuvent Moïse et Elie, la loi et les prophètes, s'ils ne communiquent avec le Seigneur ? Qui lira la loi ? qui lira les prophètes, s'ils ne rendent témoignage au Fils de Dieu ? C'est ce que l'Apôtre exprime en peu de mots. "La loi dit-il, fait seulement connaître le péché, tandis qu'aujourd’hui, dans la loi, la justice de Dieu a été manifestée" : voilà le soleil ; "annoncée par la loi et les prophètes" : voilà l'aurore.

    Pierre est témoin de ce spectacle, et goûtant les choses humaines à la manière des hommes : "Seigneur, dit-il, il nous est bon d'être ici." Il s'ennuyait de vivre au milieu de la foule, il avait trouvé la solitude sur une montagne où le Christ servait d'aliment à son âme. Pourquoi en descendre afin de courir aux travaux et aux douleurs, puisqu'il se sentait envers Dieu un saint amour et conséquemment des moeurs saintes ? Il cherchait son propre bien ; aussi ajouta-t-il. "Si vous voulez, dressons ici trois tentes : une pour vous, une pour Moïse et  une autre pour Elie." Le Seigneur ne répondit rien à cette demande, et toutefois il y fut répondu. En effet, comme il parlait encore, une nuée lumineuse descendit et les couvrit de son ombre. Pierre demandait trois tentes ; et la réponse du ciel témoigna que nous n'en avons qu'une, celle que le sens humain voulait partager. Le Christ est la parole de Dieu, la Parole de Dieu dans la loi, la Parole de Dieu dans les prophètes. Pourquoi, Pierre, chercher à la diviser ? Cherche plutôt à t'unir à elle. Tu demandes trois tentes, comprends qu'il n'y en a qu'une.

    Pendant que la nuée les couvrait et formait comme une seule tente au dessus d'eux, une voix sortit de son sein et fit entendre ces paroles "Celui-ci est mon Fils bien-aimé." Là se trouvaient Moïse et Elie. La voix ne dit pas : Ceux-ci sont mes Fils bien-aimés. Autre chose est d'être le Fils unique, et autre chose, des enfants adoptifs. Celui qui se trouve aujourd'hui signalé est Celui dont se glorifient la loi et les prophètes : "Voici, est-il dit, mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes douces complaisances ; écoutez-le" ; car c'est lui que vous avez entendu dans les prophètes, lui aussi que vous avez entendu dans la loi, et où ne l'avez-vous pas entendu ? Ils tombèrent à ces mots la face contre terre.

    Voilà donc dans l'Eglise le royaume de Dieu. Là en effet nous apparaissent le Seigneur, la loi et les prophètes : le Seigneur dans la personne du Seigneur même, la loi dans la personne de Moïse et les prophètes dans celle d'Elie. Ces deux derniers figurent ici comme serviteurs et comme ministres, comme des vaisseaux que remplissait une source divine ; car si Moïse et les prophètes parlaient et écrivaient, c'est qu'ils recevaient du Seigneur ce qu'ils répandaient dans autrui.

    Le Seigneur ensuite étendit la main et releva ses disciples prosternés. [...]

    Descends, Pierre, tu voulais te reposer sur la montagne, descends, annonce la parole, insiste à temps, à contre-temps, reprends, exhorte, menace, en toute patience et doctrine (II Tim IV,2) ; travaille, sue, souffre des supplices afin de parvenir par la candeur et la beauté des bonnes oeuvres accomplies avec charité, à posséder ce que figurent les blancs vêtements du Seigneur. »

    Saint Augustin, Sermons, Première série, Passages détachés de Saint Matthieu, Sermon LXXVIII (1-6), in Oeuvres complètes de saint Augustin , traduites pour la première fois en français sous la direction de M. l'abbé Raulx, Tome VI, Bar-Le-Duc, 1866.

    Source : Abbaye Saint Benoît.

  • 23 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Aimez vos ennemis..." (Mt 5, 43-48)

    « En aimant ton ennemi, tu souhaites qu’il te soit un frère. Ce n’est pas ce qu’il est que tu aimes en lui, mais ce que tu veux qu’il soit. Imaginons du bois de chêne non taillé. Un artisan habile voit ce bois, coupé dans la forêt ; ce bois lui plaît ; je ne sais pas ce qu'il veut en faire, mais ce n'est pas pour qu'il demeure comme il est que l’artiste aime ce bois. Son art lui fait voir ce que ce bois peut devenir ; son amour ne va pas au bois brut, il aime ce qu'il en fera, non le bois brut.

    C'est ainsi que Dieu nous a aimés quand nous étions pécheurs. Il dit en effet : "Ce ne sont pas les bien portants qui ont besoin du médecin mais les malades." Nous a-t-il aimés pécheurs pour que nous demeurions pécheurs ? L'Artisan nous a vus comme un bois brut venant de la forêt, et ce qu'il avait en vue, c'est l’oeuvre qu'il tirerait de là, non le bois ou la forêt.

    Toi de même : tu vois ton ennemi s'opposer à toi, t'accabler de paroles mordantes, se rendre rude par ses affronts, te poursuivre de sa haine. Mais tu es attentif au fait qu'il est un homme. Tu vois tout ce que cet homme a fait contre toi, et tu vois en lui qu'il a été fait par Dieu. Ce qu'il est en tant qu'homme, c’est l’oeuvre de Dieu ; la haine qu'il te porte, c'est son oeuvre à lui. Et que dis-tu en toi-même ? "Seigneur, sois bienveillant pour lui, remets-lui ses péchés, inspire-lui ta crainte, change-le." Tu n'aimes pas en cet homme ce qu'il est, mais ce que tu veux qu'il soit. Donc, quand tu aimes ton ennemi, tu aimes un frère. »

    Saint Augustin, Commentaire sur la 1ère lettre de Jean, § 8,10.

  • 22 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Chaire de Saint Pierre

    « Dans tout l'univers, Pierre seul est choisi pour présider à la vocation de tous les peuples, à la direction de tous les Apôtres et de tous les Pères de l'Eglise. Ainsi, bien qu’il y ait dans le peuple de Dieu beaucoup de prêtres et beaucoup de pasteurs, Pierre en personne les gouvernerait tous, alors que le Christ les gouverne aussi à titre de chef. Dieu a daigné remettre à cet homme une grande et admirable participation à sa puissance. Et s'il a voulu que les autres chefs aient quelque chose de commun avec lui, tout ce qu'il n'a pas refusé aux autres, c'est toujours par lui qu'il le leur a donné.

    Le Seigneur demande à tous les Apôtres quelle est l'opinion des hommes à son sujet. Et ils disent tous la même chose aussi longtemps qu'ils exposent les doutes venus de l'ignorance humaine.

    Mais lorsque le Seigneur exige de connaître le sentiment des disciples eux-mêmes, le premier à confesser le Seigneur est celui qui est le premier dans la dignité d'Apôtre. Comme il avait dit : « Vous êtes le Messie, le Fils du Dieu vivant », Jésus lui répondit : « Heureux es-tu, Simon, fils de Yonas, car ce n'est pas la chair et le sang qui t’ont révété cela, mais mon Père qui est aux cieux. » C'est-à-dire : Heureux es-tu parce que c'est mon Père qui t'a enseigné ; l'opinion de la terre ne t'a pas égaré, mais c'est une inspiration céleste qui t'a instruit ; et ce n'est pas la chair et le sang, mais celui dont je suis le Fils unique qui t'a permis de me découvrir.

    « Et moi, dit-il, je te le déclare », c'est-à-dire : de même que mon Père t'a manifesté ma divinité, de même moi, je te fais connaître ta supériorité. « Tu es Pierre », c'est-à-dire : moi, je suis le rocher inébranlable, la pierre d'angle, qui fais l'unité de deux réalités séparées, le fondement tel que nul ne peut en poser un autre ; mais toi aussi, tu es pierre, car tu es solide par ma force, et ce que j'ai en propre par ma puissance, tu l'as en commun avec moi du fait que tu y participes.

    « Et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et la puissance de la mort ne l'emportera pas sur elle. » Sur cette solidité j'érigerai un temple éternel, et la hauteur de mon Église, qui doit la faire pénétrer dans le ciel, s'élèvera sur la fermeté de cette foi.

    Les puissances de l'enfer n'arrêteront pas cette confession, les liens de la mort ne l'enchaîneront pas : car cette parole est une parole de vie. Et de même qu'elle porte jusqu'au ciel ceux qui la confessent, de même plonge-t-elle dans les enfers ceux qui la refusent.

    C'est pourquoi il est dit à saint Pierre : « Je te donnerai les clefs du Royaume des Cieux ; tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les Cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les Cieux. »

    Sans doute, la possession de ce pouvoir a passé encore aux autres Apôtres et l'institution née de ce décret s'est étendue à tous les chefs de l'Eglise. Mais ce n'est pas en vain que ce qui doit être signifié à tous est confié à un seul. En effet, ce pouvoir est remis à Pierre personnellement, parce que Pierre est donné en modèle à tous ceux qui gouvernent l'Église. »

    Saint Léon le Grand, Homélie pour l’anniversaire de son sacre épiscopal (IV 2-3).

  • 21 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "Demandez, vous obtiendrez ; cherchez, vous trouverez ; frappez, la porte vous sera ouverte."
    (Mt 7, 7-12 - cf Lc 11, 9-13 & Lc 6, 31)

    « Croyez-vous donc, mes frères, que Dieu ignore ce qu'il vous faut ? Il le sait, il connaît notre pauvreté et prévient nos désirs. Aussi, lorsqu'il apprend à prier et qu'il avertit ses Apôtres de ne point parler beaucoup dans la prière, "Gardez-vous, dit-il, de parler beaucoup en priant ; car votre Père céleste sait de quoi vous avez besoin avant que vous le lui demandiez" (Mt VI, 7-8).

    Le Seigneur cependant dit autre chose. Qu'est-ce ? Pour nous défendre de parler beaucoup dans la prière : "Ne parlez pas beaucoup, a-t-il dit, lorsque vous priez ; car votre Père sait de quoi vous avez besoin avant que vous le lui demandiez."

    Mais si notre Père sait de quoi nous avons besoin avant que nous le lui demandions, pourquoi parler, si peu même que ce soit ? A quoi bon même la prière, si notre Père sait de quoi nous avons besoin ? Il dit à chacun : Ne me prie pas longuement ; je sais ce qu'il te faut. — Si vous savez ce qu'il me faut, Seigneur, pourquoi vous prier même tant soit peu ? Vous ne voulez pas que ma supplique soit longue, vous exigez même qu'elle soit presque nulle.

    Mais qu'enseigne-t-il ailleurs différemment ? Il dit bien : "Ne parlez pas longuement dans la prière". Cependant il dit encore dans un autre endroit : "Demandez et vous recevrez." Et pour ôter la pensée qu'il n'aurait recommandé la prière que d'une manière accidentelle, il ajoute : "Cherchez et vous trouverez." Dans la crainte encore que ces derniers mots ne paraissent prononcés qu'en passant, voici ceux qu'il y joint, voici comment il conclut : "Frappez et il vous sera ouvert" (Mt VII, 7). Ainsi donc il veut que l'on demande pour recevoir, que l'on cherche Pour trouver et que pour entrer on frappe. Mais puisque notre Père sait d'avance de quoi nous avons besoin, pourquoi demander ? pourquoi chercher ? pourquoi frapper ? pourquoi, en demandant, en cherchant et en frappant, nous fatiguer à instruire plus savant que nous ? Ailleurs encore le Seigneur parle ainsi : "Il faut prier toujours sans jamais se lasser" (Lc XVIII, 1). S'il faut prier toujours, comment dire : "Gardez-vous de parler beaucoup ?" Comment prier toujours quand on finit sitôt ? D'un côté vous me commandez de terminer promptement ; d'autre part vous m'ordonnez de "prier toujours sans me lasser" ; qu'est-ce que cela signifie ?

    Eh bien ! prie aussi pour comprendre, cherche et frappe à la porte. Si ce mystère est profond, ce n'est pas pour se rendre impénétrable, c'est pour nous exercer.

    Ainsi donc, mes frères, nous devons vous exhorter tous à la prière, et nous avec vous. Au milieu des maux innombrables de ce siècle, nous n'avons d'autre espoir que de frapper par la prière, que de croire invariablement que notre Père ne nous refuse que ce qu'il sait ne pas nous convenir. Tu sais bien ce que tu désires, mais lui connaît ce qu'il te faut. Figure-toi que tu es malade et entre les mains d'un médecin, ce qui est incontestable. Notre vie en effet n'est qu'une maladie et une longue vie n'est qu'une maladie longue. Figure-toi donc que tu es malade entre les mains d'un médecin. Tu voudrais boire du vin nouveau, tu voudrais en demander à ce médecin. On ne t'empêche pas d'en demander, car il pourrait se faire qu'il ne te nuisit pas, qu'il te fût même bon d'en prendre. Ne crains doue pas d'en demander, demande sans hésitation ; mais ne t'attriste point si on t'en refuse. Voilà ta confiance à l'homme qui soigne ton corps ; et tu n'en aurais pas infiniment plus envers Dieu, qui est à la fois le médecin, le créateur et le réparateur de ton corps aussi bien que de ton âme ? »

    Saint Augustin, Sermons détachés sur l'Evangile de Saint Matthieu, Sermon LXXX (2), in Oeuvres complètes de Saint Augustin, traduites pour la première fois en français, sous la direction de M. Raulx, Bar-Le-Duc, L. Guérin et Cie Editeurs, 1868.

    Source : Abbaye Saint Benoît.

  • 20 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Le Jugement dernier - le signe de Jonas (Lc 11, 29-32 - cf Mt 12, 38-42)

    « "Les Ninivites s’élèveront au jour du jugement contre ce peuple, et le condamneront, parce qu’ils ont fait pénitence à la prédication de Jonas, et cependant celui qui est ici est plus grand que Jonas". Jonas était le serviteur, et moi le Maître. Il est sorti d’une baleine, et je sortirai vivant du tombeau. Il a annoncé à un peuple la ruine de sa ville, et moi je vous annonce le royaume des cieux. Les Ninivites ont cru sans aucun miracle. Et moi j’en ai fait un très grand nombre. Ils n’avaient reçu aucune instruction avant la prédication de ce prophète, et moi je vous ai instruits de toutes choses, et je vous ai découvert les secrets de la plus haute sagesse. Jonas est venu aux Ninivites comme un serviteur qui leur parlait de la part de son maître, et moi je suis venu en Maître et en Dieu. Je n’ai point menacé comme lui, je ne suis point venu pour vous juger, mais pour vous offrir à tous le pardon de vos péchés.

    De plus ces Ninivites étaient un peuple barbare, au lieu que les Juifs avaient toujours entendu les prédications des prophètes. Personne n’avait prédit aux Ninivites la naissance de Jonas, et les prophètes avaient prédit de Jésus-Christ une infinité de choses, et les événements répondaient ponctuellement aux prophéties. Jouas prit la fuite, et voulut se dispenser de sa prédication, de peur d’être raillé des Ninivites ; et moi qui savais devoir être attaché en croix et moqué, je suis néanmoins venu. Jonas ne put souffrir d’être méprisé de ceux qu’il devait convertir, et moi je souffre pour eux la mort, et une mort honteuse, et je leur envoie encore après moi mes apôtres pour achever mon ouvrage. Enfin Jonas était un étranger inconnu aux Ninivites ; et moi je suis de la même race que les Juifs, et j’ai selon la chair les mêmes aïeux qu’eux. On pourrait trouver ainsi d’autres avantages de la prédication de Jésus-Christ sur celle de Jonas, si on s’arrêtait à les bien considérer. Mais Jésus-Christ ne se contente pas de cet exemple. Il en joint aussitôt un autre.

    "La reine du midi s’élèvera au jour du jugement contre ce peuple, et le condamnera, parce qu’elle est venue des extrémités de la terre, pour entendre la sagesse de Salomon, et cependant celui qui est ici est plus grand que Salomon." Cet exemple est encore plus puissant que le premier. Car Jonas au moins alla trouver les Ninivites, mais la reine du midi n’attendit pas que Salomon la vînt trouver. Elle le prévint et le visita dans son royaume. Elle ne considéra ni son sexe, ni sa qualité d’étrangère, ni l’éloignement des lieux. Elle se résolut à ce long voyage, non par la terreur des menaces, ni par la crainte de la mort, mais par le seul amour de la sagesse : "Et cependant celui qui est ici est plus grand que Salomon."

    Là c’est une femme qui va trouver un roi ; ici au contraire c’est un Dieu qui cherche des hommes. Elle vient trouver Salomon des extrémités de la terre ; et moi, descendu du haut du ciel, je viens vous chercher dans vos bourgs et dans vos villes. Salomon discourait sur les arbres et sur les plantes, ce qui ne pouvait pas être fort utile à celle qui le venait chercher ; et moi je vous annonce des choses également terribles et salutaires.

    Après donc les avoir mis dans leur tort, et leur avoir prouvé par tant de raisons, qu’ils ne méritaient point le pardon de leurs péchés ; après avoir montré et par l’exemple des Ninivites, et par celui de la reine du midi que leur désobéissance et leur incrédulité ne venait pas de la faiblesse du maître qui les instruisait, mais de leur opiniâtreté inflexible ; il leur déclare enfin le châtiment qui devait fondre sur eux. Il ne le fait que par des énigmes obscures, mais qui ne laissent pas d’imprimer la crainte dans les esprits. »

    Saint Jean Chrysostome, Homélie XLIII sur Saint Matthieu (2-3), in Oeuvres complètes (tome VIII) traduites pour la première fois en français sous la direction de M. Jeannin, Bar-le-Duc, L. Guérin & Cie, 1865.

    Source : Abbaye Saint-Benoît.

  • 19 février : Toute l'année avec les Pères...

    Enseignement du "Notre Père" (Mt 6, 7-15) - Le pardon des offenses

    « Vous savez ce que nous dirons à Dieu dans la prière avant d'en arriver à la communion : "Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés". Préparez-vous intérieurement à pardonner, car ces paroles, vous allez les rencontrer dans la prière. Comment allez-vous les dire ? Peut-être ne les direz-vous pas ? Finalement, telle est bien la question : direz-vous ces paroles, oui ou non ? Tu détestes ton frère, et tu prononces "Pardonne-nous comme nous pardonnons" ? - J'évite ces mots, diras-tu. Mais alors, est-ce que tu pries ? Faites bien attention, mes frères. Dans un instant, vous allez prier ; pardonnez de tout votre cœur !
    Regarde le Christ pendu sur la croix ; écoute-le prier : "Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font" (Lc 23,34). Tu diras sans doute : lui pouvait le faire, pas moi. Je suis un homme, et lui, il est Dieu. Tu ne peux pas imiter le Christ ? Pourquoi alors l'Apôtre Pierre a-t-il écrit : "Le Christ a souffert pour vous, il vous a laissé un exemple, afin que vous suiviez ses traces" (1P 2,21) ? Pourquoi l'Apôtre Paul nous écrit-il : "Soyez les imitateurs de Dieu comme des fils bien-aimés" (Ep 5,1) ? Pourquoi le Seigneur lui-même a-t-il dit : "Mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur" (Mt 11,29) ? Nous biaisons, nous cherchons des excuses, quand nous prétendons impossible ce que nous ne voulons pas faire... Mes frères, n’accusons pas le Christ de nous avoir donné des commandements trop difficiles, impossibles à réaliser. En toute humilité, disons-lui plutôt avec le Psalmiste : "Tu es juste, Seigneur, et ton commandement est juste" (Ps 118,137). »

    Saint Césaire d'Arles (470-543), Sermon Morin 35 ; PLS IV, 303s (Trad. En Calcat).

  • 18 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Le jugement dernier (Mt 25, 31-46)
    "Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces petits qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait."

    « Je vous prie de remarquer, mes frères, que lorsque Jésus-Christ veut donner des louanges aux bons, il commence par leur représenter l’amour éternel que Dieu a toujours eu pour eux : "Venez", dit-il, "vous que mon Père a bénis, possédez comme votre héritage le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde". Quel bonheur peut être comparable à celui d’être "bénis" et d’être bénis par le Père même ? D’où peut venir un si grand bonheur à un homme, et comment peut-il mériter une telle gloire ?

    "Car j’ai eu faim", dit-il, "et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire". O paroles pleines de joie, de consolation et d’honneur pour ceux qui mériteront de les entendre ! Il ne leur dit pas : Recevez le royaume, mais "possédez-le comme votre héritage" ; comme un bien qui est à vous, que vous avez reçu de votre Père, et qui vous est dû de tout temps. Car je vous l’ai préparé avant même que vous fussiez nés, parce que je savais que vous seriez ce que vous êtes. Quelles sont donc les actions que Jésus-Christ récompense dans ses saints d’une manière si divine ? C’est, mes frères, parce qu’ils ont retiré chez eux un étranger, c’est parce qu’ils ont revêtu un pauvre, c’est parce qu’ils ont donné du pain à celui qui avait faim, et de l’eau à celui qui avait soif, enfin c’est parce qu’ils ont visité un malade ou un prisonnier. Car Dieu a principalement égard au secours que nous donnons à ceux qui en ont besoin.

    [...]

    Mais Jésus-Christ parle à ceux qui seront à sa gauche d’une manière bien différente. Il dit aux uns : "Venez, bénis" ; il dit aux autres "Allez, maudits", et il n’ajoute pas "de mon Père" ; parce que ce n’est que leur malignité propre, et leurs actions criminelles qui leur ont attiré cette malédiction si effroyable. "Allez au feu éternel qui a été préparé", non pour vous, "mais pour le diable et pour ses anges". Quand il parle de ce royaume bienheureux, il dit expressément qu’il a été préparé pour ceux qu’il y fait entrer ; mais lorsqu’il parle des flammes qui ne s’éteindront jamais, il ne dit pas qu’elles ont été préparées pour les damnés, mais "pour le démon et pour ses anges". Ce n’est point moi, dit-il, qui vous ai préparé ces feux. Je vous ai bien préparé un royaume, mais ces flammes n’étaient destinées par moi que pour le démon et pour ses anges. C’est vous seuls que vous devez accuser de votre malheur, et vous vous êtes précipités volontairement dans ces abîmes.

    C’est donc pour se justifier en quelque sorte qu’il dit ces paroles. "Qui a été préparé au diable", aussi bien que celles qui suivent : "Car j’ai eu faim et vous ne m’avez pas donné à manger". Quand j’aurais été votre ennemi, ne suffisait-il pas pour toucher les coeurs les plus durs de voir tant de maux joints ensemble, la faim, la soif, la nudité, la captivité, la maladie ? Tant de maux ensemble n’adoucissent-ils pas d’ordinaire les coeurs les plus impitoyables et les plus envenimés ? Cependant c’est dans cet état même que vous n’avez pas secouru votre Dieu et votre Seigneur, qui vous fait tant de grâces, et qui vous aimait si tendrement.

    Si vous voyiez un chien, ou une bête sauvage mourir de faim, vous seriez touché de compassion. Vous voyez Dieu même pressé de la faim, qui vous demande du pain par la voix du pauvre, et vous n’en avez point de pitié. Qui peut excuser cette barbarie ? Quand vous n’auriez point d’autre récompense à attendre de la charité que vous lui faites, que l’action même de cette charité et l’honneur de pouvoir rendre ce service à votre maître, cela seul, sans parler de la reconnaissance qu’il vous en témoignera à la face de toute la terre, cela seul, dis-je, ne devrait-il pas vous porter à aimer les pauvres ? Cependant vous voyez qu’outre cet honneur, il vous promet encore, lorsqu’il sera assis sur le trône de son Père, et que tous les hommes seront au pied de son tribunal, de vous louer devant toute la terre, et de publier que c’est vous qui l’avez nourri, qui l’avez logé, et qui l’avez revêtu lorsqu’il était pauvre. Il ne rougit point de se rabaisser dans sa gloire, afin de contribuer à la vôtre.

    Si les uns sont punis si rigoureusement, c’est par une grande justice, et ce sont leurs péchés qui les condamnent. Et si les autres sont si glorieusement récompensés, c’est par une grande miséricorde, et c’est la grâce qui les couronne qui les a prévenus de sa bonté. Quand ils auraient fait mille actions de vertu, ce ne peut être que l’ouvrage de la grâce de rendre de si grands biens pour des choses si petites, et de récompenser des actions si légères et d’un moment, d’un poids éternel de gloire et de tout le bonheur du paradis. »

    Saint Jean Chrysostome, Homélie LXXIX sur Saint Matthieu (2), in Oeuvres complètes (tome VIII) traduites pour la première fois en français sous la direction de M. Jeannin, Bar-le-Duc, L. Guérin & Cie, 1865.

    Source : Abbaye Saint-Benoît.

  • 17 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    Jésus quarante jours au désert (Lc 4, 1-13)

    « Le diable s'est attaqué au premier homme, notre parent, par une triple tentation : il l'a tenté par la gourmandise, par la vanité et par l'avidité. Sa tentative de séduction a réussi, puisque l'homme, en donnant son consentement, a été alors soumis au diable. Il l'a tenté par la gourmandise, en lui montrant sur l'arbre le fruit défendu et en l'amenant à en manger ; il l'a tenté par la vanité, en lui disant : "Vous serez comme des dieux" ; il l'a tenté enfin par l'avidité, en lui disant : "Vous connaîtrez le bien et le mal" (Gn 3,5). Car être avide, c'est désirer non seulement l'argent, mais aussi toute situation avantageuse, désirer, au-delà de toute mesure, une situation élevée...
    Le diable a été vaincu par le Christ qu'il a tenté d'une manière tout à fait semblable à celle par laquelle il avait vaincu le premier homme. Comme la première fois, il le tente par la gourmandise : "Ordonne que ces pierres se changent en pains" ; par la vanité : "Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas" ; par le désir violent d'une belle situation, quand il lui montre tous les royaumes du monde et lui dit : "Tout cela, je te le donnerai, si tu tombes à mes pieds et m'adores"...
    Il est une chose qu'il faut remarquer dans la tentation du Seigneur : tenté par le diable, le Seigneur a riposté par des textes de la Sainte Ecriture. »

    St Grégoire le Grand, Homélies sur l'Evangile n°16 (Trad. Maurice Véricel, L’Evangile commenté par les Pères, Editions Ouvrières, Paris, 1961).

  • 16 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    L'appel de Matthieu "Suis-moi" (Lc 5, 27-32)

    « Ce que le Seigneur a commandé : "Si quelqu'un veut marcher à ma suite, qu'il renonce à lui-même" semble dur et pénible. Mais ce n'est ni dur ni pénible, parce que celui qui commande est celui qui aide à réaliser ce qu'il commande. Car si la parole du psaume "à cause des paroles de tes lèvres, j'ai suivi des chemins difficiles" (Ps 16,4) est vraie, elle est vraie aussi, la parole que Jésus a dite : "Mon joug est facile à porter, et mon fardeau léger"  (Mt 11,30). Car tout ce qui est dur dans le commandement, l'amour fait en sorte qu'il soit doux. Nous savons de quels prodiges l'amour est capable. Parfois l'amour est de mauvais aloi et dissolu ; mais que de difficultés endurent les hommes, que de traitements indignes et insupportables souffrent-ils pour parvenir à ce qu'ils aiment !... Comme la grande affaire de la vie doit être de bien choisir ce que l'on doit aimer, est-il surprenant que celui qui aime Jésus Christ et qui veut le suivre se renonce à lui-même pour l'aimer ?...
    Que signifie ce qui suit : "Qu'il prenne sa croix" ? Qu'il supporte ce qui est pénible et qu'ainsi il me suive. Car lorsqu'un homme commencera à me suivre en se conduisant selon mes préceptes, il aura beaucoup de gens pour le contredire, beaucoup pour s'opposer à lui, beaucoup pour le décourager. Et cela de la part de ceux qui se prétendent compagnons du Christ. Ils marchaient avec le Christ, ceux qui empêchaient les aveugles de crier (Mt 20,31). Qu'il s'agisse de menaces, de flatteries ou d'interdictions, si tu veux suivre le Christ, change tout cela en croix ; endure, supporte, ne te laisse pas accabler...
    Vous aimez le monde ; mais il faut lui préférer celui qui a fait le monde... Nous sommes dans un monde qui est saint, qui est bon, réconcilié, sauvé, ou plutôt qui doit être sauvé, mais qui est sauvé dès maintenant en espérance. "Car nous sommes sauvés, mais c'est en espérance" (Rm 8,24). Dans ce monde donc, c'est-à-dire dans l'Église, qui tout entière suit le Christ, celui-ci dit à tous : "Celui qui veut marcher à ma suite, qu'il renonce à lui-même". »

    Saint Augustin, Sermon 96 (1-4.9), Trad. Brésard, 2000 ans B, rev.

  • 14 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    "La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux." (Lc 10, 1-9)

    « Tous les travaux de l'agriculteur aboutissent naturellement à la moisson. Comment donc le Christ a-t-il appelé moisson une oeuvre qui en était encore à ses débuts ? L'idolâtrie régnait sur toute la terre… Partout la fornication, l'adultère, la débauche, la cupidité, le vol, les guerres… La terre était emplie de tant de maux ! Aucune semence n'y avait encore été jetée. Les épines, les chardons et les mauvaises herbes qui recouvraient le sol n'avaient pas encore été arrachés. Aucune charrue n'avait encore été tirée, aucun sillon tracé.


    Comment donc Jésus peut-il dire que la moisson est abondante ?… Les apôtres sont probablement bouleversés et déconcertés : "Comment pourrons-nous même ouvrir la bouche, nous tenir debout, devant tant d'hommes ? Nous, les Onze, comment corrigerons-nous tous les habitants de la terre ? Saurons-nous, si ignorants, aborder des savants ; nous si dépouillés, des hommes armés ; nous, des subordonnés, des autorités ? Nous ne connaissons qu'une langue, arriverons-nous à discuter avec les peuples barbares qui parlent des langues étrangères ? Qui nous supportera sans même comprendre notre langue ?"


    Jésus ne veut pas que de pareils raisonnements les plongent dans le désarroi. Aussi appelle-t-il l'Evangile une moisson. C'est comme s'il leur disait : "Tout est préparé, toutes les dispositions ont été prises. Je vous envoie récolter le grain mûr ; vous pourrez semer et moissonner le même jour." Quand l'agriculteur sort de chez lui pour aller faire la moisson, il déborde de joie et resplendit de bonheur. Il n'envisage ni les peines ni les difficultés qu'il pourra rencontrer… Prêtez-moi votre langue, dit le Christ, et vous verrez le grain mûr entrer dans les greniers du roi. Aussi les envoie-t-il ensuite en leur disant : "Moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde" (Mt 28,20). »

    Saint Jean Chrysostome, Homélie sur la moisson abondante, 10, 2-3 ; PG 63, 519-521 (Trad. Delhougne, Les Pères commentent, Brepols, 1991).

  • 13 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    « L'histoire sacrée rapporte que, jadis, le peuple hébreu et toutes les tribus d'Israël, accablés à cause de leurs péchés sous la lourde oppression des Philistins, s'astreignirent, pour pouvoir vaincre leurs ennemis, à un jeûne qui renouvela à la fois les forces de leur âme et celles de leur corps. Ils avaient, en effet, compris que le mépris des commandements de Dieu et leurs moeurs corrompues leur avaient mérité cette dure et misérable servitude et qu'ils combattaient en vain les armes à la main s'ils ne commençaient par faire la guerre aux vices. Ils s'imposèrent donc la punition d'une sévère pénitence en s'abstenant de manger et de boire ; et, afin de triompher de leurs ennemis, ils triomphèrent d'abord en eux-mêmes des appels de la gloutonnerie. Ainsi arriva-t-il que des adversaires redoutables et des maîtres impitoyables prirent la fuite devant des hommes affamés qu'ils avaient soumis, rassasiés, à leur joug.
    Nous aussi, bien-aimés, avons à faire face à mille adversités et à mille combats ; si nous voulons recourir à semblables remèdes, nous serons guéris par semblable discipline. Notre situation est à peu de chose près celle qui fut la leur : ils subissaient les violentes attaques d'adversaires charnels, comme nous subissons les violentes attaques d'ennemis spirituels. Si la réforme de nos moeurs, obtenue par l'aide de Dieu, nous fait triompher de ces derniers, la force aussi de nos ennemis visibles succombera ; ils seront affaiblis par notre amendement même, car, s'ils avaient acquis quelque pouvoir sur nous, c'était grâce à nos fautes et non par leurs mérites.
    Dans ces conditions, bien-aimés, afin d'être assez forts pour vaincre tous nos ennemis, recherchons le secours divin en obéissant aux commandements célestes, et sachons bien que nous ne pourrons prévaloir sur nos adversaires qu'après avoir prévalu sur nous-mêmes. [...] Il n'y a pour l'homme de vraie paix et de vraie liberté, que lorsque son corps est soumis à l'âme comme à son juge, et l'âme conduite par Dieu comme par son supérieur. »

    Saint Léon le Grand, Premier sermon sur le Carême (XXXIX - 1-2), in Sermons Tome II, Trad. Dom René Dolle, SC49, Editions du Cerf, Paris, 1957.

  • 10 février : Toute l'année avec les Pères de l'Eglise

    La pêche miraculeuse, appel des premiers disciples (Lc 5, 1-11)
    "Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur."
    "Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras."

    « Quelle est grande la bonté du Christ ! Pierre a été pêcheur, et maintenant un orateur mérite un grand éloge s'il est capable de comprendre ce pêcheur. Voilà pourquoi l'apôtre Paul dit en s'adressant aux premiers chrétiens : "Frères, vous qui avez été appelés par Dieu, regardez bien : parmi vous il n'y a pas beaucoup de sages aux yeux des hommes, ni de gens puissants ou de haute naissance. Au contraire, ce qu'il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion les sages... Ce qui est d'origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n'est rien, voilà ce que Dieu a choisi pour détruire ce qui est quelque chose" (1Co 1, 26-28). Car si le Christ avait choisi en premier lieu un orateur, l'orateur aurait pu dire : "J'ai été choisi pour mon éloquence". S'il avait choisi un sénateur, le sénateur aurait pu dire : "J'ai été choisi à cause de mon rang". Enfin, s'il avait choisi un empereur, l'empereur aurait pu dire : "J'ai été choisi en raison de mon pouvoir." Que ces gens-là se taisent, qu'ils attendent un peu, qu'ils se tiennent tranquilles. Ils ne seront pas oubliés ni rejetés ; qu'ils attendent un peu, parce qu'ils pourraient se glorifier de ce qu'ils sont en eux-mêmes. »

    Saint Augustin, Sermon XLIII (5-6), CCL 41, 510-511 (Trad. Delhougne, Les Pères commentent, Brepols, 1991).