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oraison - Page 3

  • Méditation : Toujours prier avant d'agir

    « Se représenter saint Vincent de Paul entouré de pauvres et d'enfants, portant en ses bras un petit nouveau-né, l'enveloppant et le pressant sur son sein avec une tendresse de mère.

    Dilatez mon cœur, mon Dieu, dans votre amour et dans l'amour du prochain. Heureux l'homme qui compatit aux maux de ses frères et qui les soulage : il ne sera pas ébranlé dans l'éternité. (Ps CXI, 5, 6)

    Je me plains de n'avoir ni forces, ni temps, ni ressources pour les œuvres de zèle et de bienfaisance : est-ce que je prie ? est-ce que je puise dans la vie intérieure et l'oraison la charité qui ne connaît pas de frontières ? cette charité qui crie au fond de moi-même : "Fais du bien toujours, du bien partout, du bien à tous. Donne ce qui t'appartient, donne ce que tu ne dois pas ; on t'a pris, donne encore, couvre l'injure par le bienfait... ainsi le veut l'amour. Donne pour obéir à Dieu et secourir le besoin de l'homme ; que l'universalité dans le bien soit ton rêve et ton ambition." (Père Félix) - J'entendrai ce langage de l'Esprit-Saint à l'âme chrétienne, je m'identifierai avec Lui dans la prière ; Il nourrit, Il alimente le zèle, Il rend vif et ardent. Plus on aime Dieu dans l'oraison, plus on aime le prochain dans l'action. »

    Jésus-Christ médité et contemplé tous les jours de l'année, T. IV, Saint Vincent de Paul (Préludes et 1er Point), Imp. de la Société St-Augustin, Desclée, De Brouwer et Cie, Lille, 1888.

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  • Méditation : Oraison et silence

    « Dans l'oraison il y a plus à écouter qu'à parler : c'est à nous d'écouter le Fils de Dieu, et non de parler ; nous ne sommes pas dignes de parler devant lui ; laissons à Dieu le choix du discours, sans nous mettre en peine d'en chercher nous-mêmes. Dieu ne parle au cœur que dans le recueillement...
    Vous êtes à l'oraison, Dieu ne vous donne rien : ne sauriez-vous faire autre chose, adorez-le, adorez sa présence, ses voies, ses opérations ; il n'est pas besoin pour cela de grandes pensées, vous l'adorez mieux par le silence que par le discours... Tournez-vous vers la Sainte Vierge, ou quelques Saints ; priez-les de faire oraison pour vous, ou de vous donner part à celles qu'ils font continuellement au ciel... Quand vous ne feriez autre chose que de demeurer en la présence de Dieu et consumer devant lui votre vie, comme un cierge qui se consume devant le Saint-Sacrement, ne seriez-vous pas bienheureuse ? »

    Ste Jeanne de Chantal, Œuvres, t. III ; Cf. A. Saudreau, "L'oraison d'après sainte Jeanne de Chantal", Éditions de la Vie Spirituelle, Saint-Maximin, 1925.

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  • Méditation - Prière : Acte de conformité à la divine Volonté

    « Faites en moi votre volonté, Seigneur, faites que mon cœur l'accomplisse et qu'il s'y conforme. Il est bien juste que votre Cœur soit la règle du mien, puisque le Vôtre est le plus droit et le plus soumis de tous les cœurs. Vous avez regardé la volonté de votre Père comme votre nourriture ; vous la goûtiez dans toutes les rencontres, lors même qu'elle entra dans l'amertume de votre calice. Hélas ! puis-je me nourrir de Vous-même à l'Autel, me revêtir de Vous-même dans tous vos autres mystères de la grâce, m'ensevelir en Vous par le Baptême, sans unir mon cœur à votre volonté, également aimable et souveraine ! Ah ! je sens bien que je m'y oppose, et votre grâce m'invite à ne plus m'y opposer. Je me trouve dans la paix, aussitôt que je la désire ; que sera-ce donc, quand mon cœur Vous sera entièrement soumis ? Quelque grandes et continuelles soient les peines de la vie, elles sont encore plus grandes si mon cœur ne vous est pas soumis.

    C'est à Vous, ô Cœur divin ! d'achever en moi ce que je voudrais accomplir, et ce que je ne fais pas ; inclinez mon cœur vers Vous, attirez-le à Vous. O Cœur adorable, soyez mon soleil, vers lequel mon cœur se porte, comme cette fleur qui se tourne toujours vers le soleil, lors même que le ciel est obscurci. Qu'il vous cherche et vous regarde sans cesse, lors même que quelques nuages semblent empêcher vos rayons d'exercer leur salutaire influence sur moi. Que ce Cœur Sacré soit mon but et mon repos, non seulement lorsqu'il commande, mais encore lorsqu'il désire, lorsqu'il inspire, lorsqu'il fait connaître son inclination et son bon plaisir. O Jésus ! Vous me faites trouver mon avantage dans ma soumission et dans la conformité de mon cœur au Vôtre ; je ne puis donc que vouloir mon bien, quand je ne veux que ce que Vous voulez ; mais Vous y trouvez votre gloire, cela me suffit ; mon cœur devient votre conquête, je n'en veux pas davantage, c'est pour cela seulement que je ne désire que ce que Vous voulez. »

    Extrait de l'ouvrage "Entretiens sur la dévotion au Sacré-Cœur" par le P. Bouzonié, 1697, in "Les vertus demandées par le Cœur de Jésus à ses serviteurs d'après la B. Marguerite-Marie" (ch. X) par un Prêtre Oblat de Marie-Immaculée, Montmartre, Paris, 1902.

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  • Méditation : Simplicité dans l'oraison

    « Il faut s'accoutumer à nourrir son âme d'un simple et amoureux regard en Dieu, et en Jésus-Christ Notre-Seigneur, et pour cet effet il faut la séparer doucement du raisonnement, du discours, et de la multitude d'affections, pour la tenir en simplicité, respect et attention, et l'approcher ainsi de plus en plus de Dieu, son unique souverain bien, son premier principe et sa dernière fin.
    [...] L'âme quittant le raisonnement se sert d'une douce contemplation qui la tient paisible, attentive et susceptible des opérations et impressions divines, que le Saint-Esprit lui communique : elle fait peu, elle reçoit beaucoup ; son travail est doux, et néanmoins plus fructueux ; et comme elle approche de plus près la source de toute lumière, de toute grâce et de toute vertu, on lui en élargit aussi davantage.
    [...]
    Il ne faut pas oublier qu'un des plus grands secrets de la vie spirituelle, est que le Saint-Esprit nous y conduit non seulement par les lumières, douceurs, consolations, tendresses et facilités ; mais encore par les obscurités, aveuglements, insensibilités, chagrins, angoisses, tristesses, révoltes des passions et des humeurs ; je dis, bien plus, que cette voie crucifiée est nécessaire, qu'elle est bonne, qu'elle est la meilleure, la plus assurée, et qu'elle nous fait arriver beaucoup plus tôt à la perfection ; l'âme éclairée estime chèrement la conduite de Dieu qui permet qu'elle soit exercée des créatures, et accablée de tentations et de délaissements ; et elle comprend fort bien que ce sont des faveurs plutôt que des disgrâces, aimant mieux mourir dans les croix sur le Calvaire, que de vivre dans les douceurs sur le Thabor. L'expérience lui fera connaître avec le temps la vérité de ces belles paroles : "Et nox illuminatio mea in deliciis meis, et mea nox obscurum non habet ; sed omnia in luce clarescunt". Après la purgation de l'âme dans le purgatoire des souffrances où il faut nécessairement passer, viendra l'illumination, le repos, la joie, par l'union intime avec Dieu qui lui rendra ce monde, tout exil qu'il est, comme un petit paradis. La meilleure oraison est celle où l'on s'abandonne le plus aux sentiments et aux dispositions que Dieu même met dans l'âme, et où l'on s'étudie avec plus de simplicité, d'humilité et de fidélité à se conformer à sa volonté, et aux exemples de Jésus-Christ. »

    Bossuet, Opuscules de piété (Septième opuscule, I, IV, XV), in "Œuvres complètes de Bossuet", J.-P. Migne, Tome III, Paris, 1866. (p.512 sq.)
    Œuvres complètes de Bossuet en ligne à l'Abbaye Saint-Benoît de Port-Valais (Paris, Librairie de Louis Vivès Éditeur, 1862).

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  • Méditation : de la nécessité de l'oraison

    « Commencez toutes sortes d’oraisons, soit mentale soit vocale, par la présence de Dieu, et tenez cette règle sans exception, et vous verrez dans peu de temps combien elle vous sera profitable.

    Si vous me croyez, vous direz votre Pater, votre Ave Maria et le Credo en latin ; mais vous apprendrez aussi à bien entendre les paroles qui y sont, en votre langage, afin que, les disant au langage commun de l’Eglise, vous puissiez néanmoins savourer le sens admirable et délicieux de ces saintes oraisons, lesquelles il faut dire fichant profondément votre pensée et excitant vos affections sur le sens d’icelles, et ne vous hâtant nullement pour en dire beaucoup, mais vous étudiant de dire ce que vous direz, cordialement ; car un seul Pater dit avec sentiment vaut mieux que plusieurs récités vitement et couramment.

    Le chapelet est une très utile manière de prier, pourvu que vous le sachiez dire comme il convient : et pour ce faire, ayez quelqu’un des petits livres qui enseignent la façon de le réciter. Il est bon aussi de dire les litanies de Notre Seigneur, de Notre Dame et des saints, et toutes les autres prières vocales qui sont dedans les Manuels et Heures approuvées, à la charge néanmoins que si vous avez le don de l’oraison mentale, vous lui gardiez toujours la principale place ; en sorte que si après icelle, ou pour la multitude des affaires ou pour quelque autre raison, vous ne pouvez point faire de prière vocale, vous ne vous en mettiez point en peine pour cela, vous contentant de dire simplement, devant ou après la méditation, l’oraison dominicale, la salutation angélique et le symbole des apôtres.

    Si faisant l’oraison vocale, vous sentez votre cœur tiré et convié à l’oraison intérieure ou mentale, ne refusez point d’y aller, mais laissez tout doucement couler votre esprit de ce côté-là, et ne vous souciez point de n’avoir pas achevé les oraisons vocales que vous vous étiez proposées ; car la mentale que vous aurez faite en leur place est plus agréable à Dieu et plus utile à votre âme. J’excepte l’office ecclésiastique si vous êtes obligée de le dire ; car en ce cas-là, il faut rendre le devoir.

    S’il advenait que toute votre matinée se passât sans cet exercice sacré de l’oraison mentale, ou pour la multiplicité des affaires, ou pour quelque autre cause (ce que vous devez procurer n’advenir point, tant qu’il vous sera possible), tâchez de réparer ce défaut l’après-dînée, en quelque heure la plus éloignée du repas, parce que ce faisant sur icelui, et avant que la digestion soit fort acheminée, il vous arriverait beaucoup d’assoupissement, et votre santé en serait intéressée. Que si en toute la journée vous ne pouvez la faire, il faut réparer cette perte, multipliant les oraisons jaculatoires, et par la lecture de quelque livre de dévotion avec quelque pénitence qui empêche la suite de ce défaut ; et, avec cela, faites une forte résolution de vous remettre en train le jour suivant. »

    St François de Sales, Introduction à la vie dévote (Seconde Partie de l'Introduction, ch. I, 5-9), in "Œuvres", nrf-Gallimard, 1969.
    Texte intégral en ligne (publié d’après l’édition de 1619) à l'Abbaye Saint Benoît de Port-Valais.

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  • Méditation : De la liturgie

    « La liturgie est la joie des hommes ; les hommes sont faits pour Dieu, pour aller à Dieu ; ils ont besoin de rédemption, ils ont besoin de sainteté, pour retrouver ou maintenir le contact avec le Dieu Saint. Or c'est la liturgie qui leur procure tout cela. "En elle, l'Esprit Saint a eu l'art de concentrer, d'éterniser, de diffuser par tout le Corps du Christ, la plénitude inaltérable de l’œuvre rédemptrice, toutes les richesses surnaturelles du passé de l’Église, du présent, de l'éternité."
    La liturgie est la joie des hommes, parce qu'elle est pour eux le moyen privilégié de l'approche divine, "une voie majeure, quasi sacramentelle" ; la source de leur progrès spirituel : jour après jour, dimanche après dimanche, "la frappe du balancier liturgique imprime dans l'âme baptisée une plus grande ressemblance avec le Seigneur."
    [...]
    La liturgie est la joie des hommes, parce qu'elle est la plus haute école d'oraison : d'une manière persuasive, presque sans contrainte, elle nous apprend la contemplation chrétienne, qui est prière et amour. C'est dans le cadre de la liturgie que nous recevons les sacrements, canaux de la grâce, que nous participons au Sacrifice du Calvaire, que nous communions au Corps du Christ. Quand, prêtre, je dis la messe, "j'ai en mains ce qu'il faut pour dire à Dieu un merci digne de Lui, puisque je Lui offre Jésus-Christ. Quand, membre du Christ par le baptême, je communie, je possède Jésus-Christ. Quand on a Jésus-Christ, on a tout. La supplication, l'adoration, l'action de grâce, c'est Lui, et quand je l'offre au bon Dieu, je suis quitte avec le bon Dieu, parce que Jésus-Christ c'est tout, c'est l'Offrande Infinie !" Par l'eucharistie, nous touchons Dieu et Dieu nous touche, c'est déjà pour nous le Ciel anticipé. Où trouverions-nous un plus grand sujet de joie ? »

    "Quatre bienfaits de la liturgie" par un moine bénédictin [Dom Gérard], Éditions Sainte-Madeleine, Le Barroux, 1995.

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  • Méditation : de l'assiduité dans la prière

    « Aux premiers moments de chaque jour, disait le Prophète Roi, j'irai me présenter devant vous, Seigneur, pour implorer vos miséricordes. Là je considèrerai que vous êtes un Dieu saint, qui hait infiniment l'iniquité. (Ps 5, 5 ?)
    Que n'ai-je toujours suivi l'exemple de ce saint Roi, ô mon Dieu ! Sous prétexte de satisfaire à de prétendus besoins du corps, souvent je me suis lâchement abandonné au sommeil ; et je me suis privé par là les jours entiers de la nourriture spirituelle que je devais à mon âme, et qu'elle aurait trouvée dans la prière.
    Hélas ! Seigneur, j'éprouve à toute heure ma faiblesse pour le bien, et je m'en plains ; c'est de moi seul que je dois me plaindre. J'envie la force et le courage des saintes âmes pour pratiquer la vertu : c'est le pain de l'oraison qui les leur donne ; que n’imitè-je leur assiduité et leur confiance à s'en nourrir chaque jour dans la prière, et à prévenir pour cela toute autre occupation qui pourrait les en distraire ?
    Les vertus sont les seules richesses de l'homme chrétien : quelle plus grande indigence que la mienne ! mais à qui tient-il, ô mon Dieu, que je ne sois riche ? Ces richesses ne sont pas celles que le hasard donne : elles doivent être le fruit de mes efforts pour seconder la grâce ; et je suis dans une langueur extrême, faute de vouloir prendre la divine nourriture qui me doit fortifier.
    Il est vrai que j'ai souvent du dégoût pour cette divine nourriture : mais c'est faute de la prendre que je m'en suis dégoûté. Le mondain qui cherche la nourriture dans les plaisirs du siècle, ne trouve que du dégoût dans l'usage qu'il en fait. Il arrive tout le contraire à vos serviteurs, ô mon Dieu, qui se nourrissent de la prière : Votre conversation n'a rien d'amer (Sap. 8, 16), l'usage ne fait qu'en augmenter le goût. »

    P. Paul Segneri (1624-1694) s.j., La manne céleste de l'âme, ou Méditations sur des passages choisis de l’Écriture Sainte, pour tous les jours de l'année, Tome II (Juillet Ier jour, Entretien), Traduit de l'italien, A Bruxelles, Chez Simon T'Serstevens, 1714.

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  • Méditation : l'utilité de l'oraison mentale

    « Un chrétien ne devrait mesurer l'utilité d'un exercice, que par le fruit spirituel qui lui en revient. N'est-ce pas une chose déplorable, qu'élevés comme nous le sommes à un état surnaturel, nous ne soyons sensibles qu'à ce qui est naturel, qu'à ce qui regarde le corps ? On juge utile tout ce qui sert au bien de ce corps ; tout ce qui nous procure quelque intérêt temporel ; et on ne forme pas le même jugement de ce qui sert au bien de l'âme, et qui procure l'intérêt éternel. O mon Dieu ! jusques à quand ramperons-nous ainsi dans la poussière ? Ne nous élèverons-nous jamais au-dessus des sens ? Les biens spirituels ne règleront-ils jamais nos jugements ?

    Considérez donc que l'oraison mentale est une source féconde de toute sorte de biens spirituels ; de toutes les connaissances surnaturelles ; de toutes les affections saintes qui naissent de ces connaissances ; de toutes les grâces attachées à la prière. C'est là où on se remplit l'esprit des vérités de la foi, et où l'on apprend à pratiquer toutes les vertus ; là où l'on apprend à connaître Dieu, à le craindre, à l'aimer, à le servir. On apprend à se connaître soi-même, et à se mépriser, à connaître le néant des créatures, et à s'en détacher ; à estimer les biens de la grâce, et à les rechercher. Là on apprend à connaître l'énormité du péché, et à le fuir comme le souverain mal ; la nécessité de la pénitence ; le danger de la différer. C'est là qu'on étudie les leçons et la morale de Jésus-Christ, qu'on travaille à former en soi un esprit et un cœur chrétien. C'est là où l'on reçoit les lumières qui découvrent les perfections de Jésus-Christ, les obligations infinies que nous lui avons, de quelle nécessité il est de lui devenir semblables par l'imitation de ses vertus, etc. C'est dans l'oraison que l'on s'exerce à toutes sortes d'actes de vertus, de foi, d'espérance, d'amour, d'adoration, de louange, d'actions de grâces, d'offrande, de contrition, d'humilité, etc. C'est là où les saintes affections s'excitent et s'enflamment ; et où les saintes résolutions se forment. C'est là où la prière et les demandes sont plus ferventes, et plus efficaces. C'est là où l'on apprend à parler à Dieu, à se tenir en sa présence, à s'unir à lui. En un mot, c'est dans l'oraison où l'on apprend la science des saints, qui renferme tout ce qu'on vient de dire. Et on peut ajouter avec vérité, que ce n'est que là où cette science s'apprend. Qu'on trouve un homme qui ait acquis cette science sans le secours de l'oraison ? Qu'on en trouve un qui avec ce secours n'y ait pas fait de grands progrès ? »

    R.P. Joseph de Gallifet s.j., Sujets de méditations pour une retraite de huit jours Sur la fin de l'homme, et la grande affaire du Salut (Préliminaire, IV), A Lyon, Chez Pierre Valfray, 1734.

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  • Méditation : l'oraison, ni "faire", ni "dire" !

    « L'important, ce n'est pas de beaucoup réciter ou dire à Dieu, c'est de Le laisser agir en nous.

    Quitter l'église parce qu'on ne sait pas quoi y « faire », parce qu'on ne sait pas quoi « dire » à Notre-Seigneur, est-ce avoir le sens religieux, le sens de l'oraison ?

    Aimer Dieu, c'est peut-être travailler pour Lui ; mais c'est surtout Lui donner entrée et place en moi ! C'est cela vouloir que son règne s'étende ! Recueillement vaut mieux qu'activité vocale ou cérébrale. »

    Père Jérôme (1907-1985), Vie contemplative - Théologie spirituelle III (Quatorzième thèse), Parole et Silence, 2007.

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  • Méditation : de la tristesse

    « Pour ce qui regarde une certaine tristesse qui resserre le cœur et qui l'abat, voici deux règles qu'il me paraît important d'observer. La première est de remédier à cette tristesse par les moyens que la Providence nous fournit : par exemple, ne se point surcharger d'affaires pénibles, pour ne point succomber sous un fardeau disproportionné ; ménager non seulement les forces de son corps, mais encore celles de son esprit, en ne prenant point sur soi des choses où l'on compterait trop sur son courage ; se réserver des heures pour prier, pour lire, pour s'encourager par de bonnes conversations ; même s'égayer pour délasser tout ensemble l'esprit avec le corps, suivant le besoin...
    La seconde règle est de porter paisiblement toutes les impressions involontaires de tristesse que nous souffrons, malgré les secours et les précautions que nous venons d'expliquer. Les découragements intérieurs nous font aller plus vite que tout le reste dans la voie de la foi, pourvu qu'ils ne nous arrêtent point, et que la lâcheté involontaire de l'âme ne la livre point à cette tristesse qui s'empare, comme par force, de tout l'intérieur...
    Ô mon Dieu ! pourvu que je ne cesse de vous voir, je ne cesserai point de me voir dans toutes mes misères, et je me verrai bien mieux en vous qu'en moi-même. La vraie vigilance est de voir en vous votre volonté pour l'accomplir, et non de raisonner à l'infini sur l'état de la mienne.
    Quand les occupations extérieures m'empêcheront de vous voir seul, en fermant dans l'oraison les avenues de mes sens, du moins alors, Seigneur, je vous verrai faisant tout en tous. Je verrai partout avec joie votre volonté s'accomplir, et au dedans de moi et au dehors ; je dirai sans cesse amen ! comme les bienheureux, je chanterai toujours dans mon cœur le cantique de la céleste Sion ; je vous bénirai même dans les méchants, qui par leur volonté mauvaise ne laissent pas d'accomplir malgré eux votre volonté toute juste, toute sainte, toute-puissante. »

    P. Edouard de Lehen s.j., La voie de la paix intérieure, dédiée à Notre-Dame de la Paix (ch. IV, art. XIV), Paris, René Haton, 1876 (1ère éd. Vve Poussielgue-Rusand, 1855).

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  • Méditation : de la tenue dans la prière

    « Veux-tu être magnifiquement exaucé, lorsque tu pries, mon frère ? Prie avec une tenue digne et le cœur rempli d'un immense respect pour le Dieu qui t'écoute.
    Toute prière fervente est une œuvre de recueillement, elle est le fruit d'un double effort : d'un effort corporel extérieur, d'un effort spirituel intime. Pourquoi ? Parce que, avant tout, ta prière doit être l'expression d'un hommage de respect à l'égard du Bon Dieu. Prier, c'est parler au Seigneur et s'entretenir avec Lui. Mais Dieu n'est pas n'importe qui ; nous ne sommes pas ses égaux ; Il ne peut pas permettre que tu oublies son adorable dignité et le traites comme le premier venu ; je n'ai pas besoin d'insister pour que tu comprennes ce que je veux dire. Or, c'est par son attitude extérieure que l'homme témoigne d'abord son respect à celui avec qui il converse; puis par son attention à suivre la conversation engagée. Ne va pas t'imaginer que le Très-Haut, parce qu'Il est esprit, ne prend pas garde à la tenue de ton corps quand tu lui parles ; Dieu voit le corps comme Il voit l'âme ; l'âme doit l'adorer, le corps aussi ; n'est-Il pas l'auteur de l'un comme de l'autre ?
    Le corps doit prier avec l'âme. Notre corps rend-il au Bon Dieu des hommages, supplie-t-il, quand, durant la prière, nous le laissons aller dans une tenue qu'on ne voudrait pas se permettre devant un supérieur ? Oui ou non, sont-ce des témoignages de filial respect à l'égard du Seigneur adorablement distingué, ces recherches de l'aise, ces positions flasques et sans gêne, cette mollesse extérieure, dont si souvent la récitation des formules de prière est accompagnée ? Est-ce là l'attitude que nous enseigne le grand priant, Jésus-Christ ?
    Considère-le, ce Maître béni, au Jardin des Oliviers ou au Très Saint-Sacrement de l'autel, et vois dans quelle prostration Il offre à son Père ses adorations et ses supplications qui donnent à nos pauvres prières leur efficacité. C'est abîmé dans l'anéantissement de la victime immolée, que le Fils de Dieu prie au milieu de nous sur la terre. Elle n'est pas authentique, la prière qui ne porte pas les signes de celles de Jésus-Christ ; elle n'a pas le droit de pénétrer au ciel.
    Et, sincèrement, ne semble-t-il pas que le Seigneur doit être peu disposé à exaucer ces demandes enveloppées de sensualité qui lui arrivent unies à la prière de son Fils anéanti ? Le Fils de Dieu prie sur un gibet, fixé au bois par des clous qui lui déchirent les mains et les pieds ; et toi, tu ne saurais pas faire l'effort de te tenir dignement, respectueusement, en présence du Crucifix, durant les quelques minutes que dure la prière ?
    Ah ! si nous réfléchissions avant d'entrer en oraison, si nous réfléchissions que notre pauvre prière n'arrivera jusqu'au trône de la grâce que mélangée à la prière du Crucifié, n'aurions-nous pas le souci d'imposer à notre corps une tenue mortifiée, à l'église et ailleurs, durant les instants spécialement consacrés à la prière ? »

    Chanoine Marie-Eugène Henry, Chapelain de Paray-le-Monial, Lueurs divines Tome II, Éditions Alsatia, Paray-le-Monial, 1940.

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  • Méditation : silence et prière

    « Il faut s'habituer à prier en tout lieu comme en tout temps. Le lieu de la prière, c'est l'âme et Dieu qui l'habite. Quand vous prierez, suivant le conseil de Jésus, entrez dans la chambre intime et retirée de votre âme, enfermez-vous là, et parlez à votre Père dont le regard aimant cherche votre regard. Voilà le vrai temple, le sanctuaire réservé. On le porte avec soi ; on peut sans cesse ou s'y tenir ou y rentrer bien vite après quelque sortie. Il faut en faire un lieu bien propre ; il faut l'orner : le grand ornement, c'est Dieu même. Il doit y retrouver ses traits. Ses traits, ce sont ses perfections. Participées par notre âme elles prennent le nom de vertus. L'âme qui les porte est belle de la beauté divine. Les vertus nous refont à l'image de Dieu, à l'image du divin Fils qui est venu les pratiquer ici-bas pour nous montrer les traits divins.

    Dans ce sanctuaire réservé, nouveau ciel et royaume de Dieu, la solitude et le silence doivent régner. Dieu est seul avec lui-même. Les Personnes divines ne portent pas atteinte à cette solitude ; elles la constituent. L'amour qui les anime les ferme à tout ce qui n'est pas lui : la cité est immense mais close, et Dieu seul l'occupe qui est "tout en tous" (1Co 15, 28). L'âme qui prie doit reproduire cette solitude, s'emplir de lui, rejeter tout autre.

    Le colloque qui s'engage alors est silence...

    C'est vers cette unité que nous tendons quand nous sommes enfermés en Dieu. il est devenu tout, nous le lui disons et nous ne savons plus dire autre chose. C'est le silence de l'âme rentrée en elle-même et occupée de Celui qu'elle y trouve... »

    Dom Augustin Guillerand (1877-1945), Face à Dieu, Parole et Silence, 1999.

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    Atelier de Rembrandt : L'adoration des bergers (1646)

  • Méditation de la 3ème semaine de l'Avent : le recueillement (5ème jour)

    Manière de nous préparer plus prochainement à la fête de Noël

    « Il est pour cela trois moyens : le recueillement, la sainteté de la vie, l'usage fréquent des oraisons jaculatoires.

    1° Le recueillement. Rien n'éloigne Dieu d'un cœur comme la dissipation, qui épanche l'âme toute au dehors, l'absorbe dans un monde de pensées et d'imaginations étrangères, et par là-même la trouble et l'agite (1R XIX,11). A mesure que le grand jour approche, il faut donc garder davantage notre cœur contre tout ce qui dissipe, penser plus souvent au mystère de Noël, à l'amour du Dieu de la crèche, aux sentiments pieux et aux bonnes résolutions que nous devrons lui offrir en retour de son amour et de sa bonté.

    2° Au recueillement il faut joindre la sainteté de la vie. Il nous faut, pendant ces jours, veiller davantage sur nous pour éviter tout péché, consacrer toutes nos actions à l'amour de l'Enfant Jésus, et les faire en cette vue le plus parfaitement possible ; il nous faut lui offrir chaque jour quelques sacrifices, par exemple, le sacrifice d'un désir, d'un empressement, d'une répugnance, d'une parole d'amour-propre ou de mauvaise humeur, et faire de tous ces sacrifices comme un bouquet de myrrhe à offrir à l'Enfant-Dieu ; il nous faut surtout prier l'Esprit-Saint de former lui-même en nous cette piété tendre et fervente qu'ont apportée à la crèche Marie et Joseph, les pasteurs et les mages, et qu'y ont apportée et y apportent aujourd'hui encore tant de saintes âmes.

    3° La pratique des oraisons jaculatoires, c'est-à-dire des saints désirs qui appellent en l'âme le Dieu Sauveur, complètera notre préparation. L’Église nous en fournit l'expression touchante dans les soupirs qu'elle emprunte aux patriarches et aux prophètes : "O cieux, versez sur nous votre rosée, et que les nuées nous envoient le Juste (Is XLV,8) ! O Sauveur tant désiré, puissiez-vous ouvrir les cieux et descendre jusqu'à nous (Is LXIV,1) ! Je vous en conjure, Seigneur, envoyez à mon âme son Sauveur (Ex IV,13). Montrez-nous, Seigneur, votre miséricorde, et donnez-nous celui qui doit nous sauver (Ps LXXXIV,8). Vous qui sauvez ceux qui espèrent en vous, faites éclater sur nous la merveille de vos bontés (Ps XVI,7)". Les belles antiennes "O" de l'Avent nous fournissent encore d'autres soupirs semblables. Redisons-les souvent, et ajoutons-y le soupir de saint Jean dans son Apocalypse : "Venez, Seigneur Jésus, venez" (Ap XXII,20). Avons-nous une ferme volonté de nous préparer à la fête qui s'approche par les trois moyens que nous venons de méditer ? »

    Abbé André-Jean-Marie Hamon (1795-1874), curé de Saint Sulpice, Méditations à l'usage du clergé et des fidèles pour tous les jours de l'année (Tome I, Quatrième dimanche de l'Avent), Paris, Victor Lecoffre, 1886.

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    Friedrich Wilhelm Schadow (1789-1862), La parabole des vierges sages et des vierges folles (1838-42)
  • Méditation de la 3ème semaine de l'Avent : le recueillement (3ème jour)

    « L'oraison commence avec la première parole que notre âme adresse à Dieu ; elle cesse dès que nous quittons volontairement l'audience qu'il nous accorde, pour nous porter ailleurs et converser avec d'autres frères.
    Nous ne demandons pas toutefois à une créature aussi imparfaite que l'homme, de demeurer en tête-à-tête parfait avec Dieu, pendant la durée intégrale d'un exercice. Sa faiblesse le rend incapable d'une telle fixité. Ce que nous voulons, ce qu'exige l'oraison, c'est le sentiment explicite ou implicite de la présence de Dieu. L'aborder, lui parler, s'efforcer de l'entretenir, quelques nombreuses et importunes que soient les distractions, ne pas plus le quitter en un mot qu'on ne quitte la société de son interlocuteur dans une conversation, encore qu'on ne le regarde point tout le temps, avec les yeux du corps, voilà la tâche du chrétien à l'oraison. « Quand vous êtes à l'oraison, dit sainte Chantal, il ne faut voir ni écouter autre chose que Dieu ; s'il se présentait à vous même un ange, vous ne devriez pas le regarder, car vous parlez à un plus grand que lui » (Vie et Œuvres, III, p.267)...
    En allant à l'oraison, ayez donc soin de secouer la torpeur, de bannir toute négligence, de dilater votre cœur. Dites-vous : « Voici le moment de m'entretenir avec mon Dieu, mon Maître, mon Père. Qu'il est bon de m'admettre à son audience et combien je dois m'appliquer à profiter d'une si précieuse faveur ! » Puis, saisissez-vous énergiquement du sentiment de sa présence, et dès que vous aurez conscience de quelque distraction, dès que vous verrez votre pauvre petit esprit se tourner de côté et d'autre comme les enfants à l'église, vous tâcherez de revenir à une attitude plus convenable, vous demanderez filialement à votre Père de vous aider à continuer la conversation commencée. Ainsi désirée, cherchée, reconquise, la présence de Dieu vous imprégnera d'un sentiment profondément religieux, qui se reflètera sur tout votre être et doublera la puissance de votre âme. »

    Abbé Louis Gillot (Supérieur des Chapelains de Paray-le-Monial), L'Oraison - Étude pratique (ch. II), Paray-le-Monial, Charles Diard, 1894.

    recueillement,oraison

  • Méditation de la 2ème semaine de l'Avent : l'humilité (6ème jour)

    « L'humilité est la capacité d'accepter paisiblement sa pauvreté radicale, parce qu'on met toute sa confiance en Dieu. L'humble accepte joyeusement de n'être rien, parce que Dieu est tout pour lui. Il ne considère pas sa misère comme un drame, mais comme une chance, car elle donne la possibilité à Dieu de manifester combien il est miséricordieux.
    Sans humilité, on ne peut pas persévérer dans l'oraison. En effet, l'oraison est inévitablement une expérience de pauvreté, de dépouillement, de nudité. Dans les autres activités spirituelles ou les autres formes de prière, on a toujours quelque chose sur quoi s'appuyer : un certain savoir-faire que l'on met en œuvre, le sentiment de faire quelque chose d'utile, etc. Ou bien encore, dans la prière communautaire, on peut s'appuyer sur les autres. Dans la solitude et le silence face à Dieu, on se retrouve au contraire seul et sans appui face à soi-même et à sa pauvreté. Or nous avons un mal terrible à nous accepter pauvres ; c'est pourquoi l'homme a une telle tendance à fuir le silence. Dans l'oraison il est impossible d'échapper à cette expérience de pauvreté. C'est vrai qu'on y fera souvent l'expérience de la douceur et de la tendresse de Dieu, mais bien fréquemment ce sera notre misère qui va se révéler : notre incapacité à prier, nos distractions, les blessures de notre mémoire et de notre imagination, le souvenir de nos fautes et de nos échecs, nos inquiétudes à l'égard de l'avenir, etc. L'homme trouvera donc mille prétextes pour fuir cette inaction devant Dieu qui lui dévoile son néant radical, parce qu'en fin de compte il refuse de consentir à être pauvre et fragile.
    Mais c'est précisément cette acceptation confiante et joyeuse de notre faiblesse qui est la source de tous les biens spirituels : "Heureux ceux qui ont une âme de pauvres, car le Royaume des Cieux leur appartient" (Mt 5, 3). »

    P. Jacques Philippe, Du temps pour Dieu - Guide pour la Vie d'Oraison (I,6), Éditions des Béatitudes, 1992.

    Jacques Philippe,vertu,humilité

    Source image (avec un très beau commentaire des Béatitudes)

  • Méditations de la 1ère semaine de l'Avent : la douceur (1er jour)

    « Discite a me quia mitis sum et humilis corde »
    « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur »
    Mt XI, 29
     
    « Ne jamais parler quand on est ému.

    Quand vous murmurez contre tout, temps, personnes et choses, reconnaissez que c'est vous qui avez tort et que votre mauvaise humeur ne vient que de vous.

    C'est dans les difficultés imprévues que le fond de l'âme se révèle. On sent, on pense, puis on parle et on agit tel qu'on est.

    Jésus vous rendra doux, doucement. Il faut longtemps pour introduire une bonne habitude dans la vie.

    Il faut à tout prix arriver à la complète domination de soi-même. Notre divin Sauveur est notre modèle. Il est doux. Il veut des âmes douces comme Lui.

    Pour la perfection de la vie contemplative, il faut au moins une paix suffisante avec le prochain. Il y a certains caractères irascibles, un peu à charge aux autres. Comment faut-il les prendre ? On les compare à un fagot d'épines : je me piquerai de quelque côté que je le touche... Ils souffrent et font souffrir... Il n'y a pas là évidemment cette ouverture de cœur, cet épanouissement de la charité nécessaire à la vie contemplative.

    De plus nous avons la grande mission de nous aider les uns les autres à aimer le Bon Dieu. Il ne faut pas être obstacle.

    Et quel a été le résultat de nos manifestations de mauvaise humeur, qu'est-ce que cela arrange ? Rien du tout.

    Que faire si l'on a pas su lentement, réellement se discipliner ? Parer tout d'abord aux difficultés immédiates : s'interdire toute manifestation extérieure, étouffer les sentiments intérieurs. Puis demander instamment à Notre Seigneur dans la Sainte Communion la vertu de douceur : « Discite a me quia mitis sum et humilis corde » (Mt XI, 29). Il la fera descendre goutte à goutte dans notre âme. Il nous donnera grâce ensuite à chaque occasion pour surmonter l'impatience qui gronde parce que nous tenons trop à notre jugement, à notre volonté ou à nos goûts et pour étouffer toute mauvaise humeur.

    Donc résolution très nette de ne se fâcher jamais, de ne s'irriter ni au dehors, ni au dedans, de réprimer dès qu'on s'en aperçoit le moindre mouvement d'impatience.

    Faites tout ce qui dépend de vous pour retrouver le calme. Ce calme divin qui vient de Dieu nous donne à nous-même, nous donne à Dieu et nous donne Dieu. Si nous savions en comprendre le prix, nous ferions tout pour le garder quand nous le possédons, tout pour le retrouver quand il nous est enlevé, tout pour le rétablir dans sa plénitude quand il a été troublé. Pour goûter Dieu, il faut être calme. Pour voir et réaliser la volonté de Dieu, il faut encore et toujours être calme.

    Une âme qui n'est pas paisible, calme et douce ne peut pas plaire au Bon Dieu : elle n'a pas la piété filiale parfaite parce qu'elle ne sait pas reconnaître la volonté du Bon Dieu dans tout ce qu'elle rencontre de pénible, dans les caractères qui l'entourent, dans les événements qui arrivent.

    Elle ne voit que ce qui la heurte ; elle ne peut pas dire au Bon Dieu qu'elle L'aime vraiment puisqu'elle regimbe contre l'aiguillon !

    Nous sommes appelés à vivre avec le Bon Dieu, à nous entretenir familièrement avec Lui, à L'aimer, à Le faire aimer dans une certaine mesure : par cette impatience, cette irritation, tout cela est compromis.

    Combien avons-nous perdu de temps à cause de nos mouvements d'humeur ? Que de souffrances inutiles, que de grâces tombées à terre !

    A quel degré d'intimité avec Notre-Seigneur serions-nous parvenus si nous étions vraiment bons et doux au dedans et au dehors ? »

    Robert de Langeac [Abbé Augustin Delage p.s.s. (1877-1947)], Conseils aux âmes d'oraison (ch. IV), 2ème série, Paris, P. Lethielleux, 1952.

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  • Méditation : journées de fatigue, journées de grâce

    « Jésus aime que nous considérions les journées de fatigue comme des journées de grâce, qui nous donnent l'occasion de dépasser un peu les occupations habituelles. Il demande ce petit effort, plus difficile et plus grand en ces jours de souffrance mais aussi plus méritoire, de venir se reposer près de lui, l'effort de surmonter quelques instants la fatigue pour, dans ce repos, sortir de soi et s'unir à l'Amour ; ou plus simplement encore pour apporter sa fatigue à l'Amour. Jésus nous demande de soutenir notre effort au moyen de petits appels d'amour, en fixant notre esprit sur l'Amour, en évitant avec beaucoup de douceur de se replier sur soi-même.
    L'amour peut se donner plus profondément que les maux physiques, les migraines, et ceux-ci peuvent devenir presque une aide en empêchant l'imagination et la raison de s'agiter. Quand le bon Dieu le veut, l'amour peut même adoucir et envelopper divinement les souffrances.
    Au plan de l'amour, ces journées ne doivent pas être un poids mais un fardeau tout allègre. Jésus laissera sans doute quelques moments de souffrance plus aiguë, en union avec sa passion et son agonie, mais il aimera les entourer de moments d'oraison qui donneront la force du sacrifice. »

    Père Thomas Philippe (1905-1993), ... des miettes pour tous, Saint-Paul, Paris.
    Le Père Thomas Philippe est avec Jean Vanier à l'origine de la Communauté de l'Arche (1963, Trosly Breuil).

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  • Méditation : "prier sans cesse"

    « Quoique l'Apôtre nous ordonne de prier sans cesse, quoique le sommeil lui-même soit pour les saints une sorte d'oraison, nous devons néanmoins partager en différentes heures le temps destiné à la prière, afin que s'il arrive que nous soyons retenus par quelque ouvrage, le temps lui-même nous rappelle un devoir à remplir. Qu'il faille prier à la troisième heure, à la sixième, à la neuvième, le matin et le soir, il n'est personne qui ne le sache. On ne doit point prendre de nourriture sans avoir prié d'abord, ni sortir de table, sans rendre des actions de grâces au Créateur. La nuit, il faut se lever deux ou trois fois, et repasser dans sa mémoire les endroits des Écritures que l'on sait par cœur. Au sortir de notre demeure, que la prière nous serve d'armure ; lorsque nous sommes revenus de la place publique, prions encore avant de nous asseoir, et que le corps ne se repose pas, avant que l’âme ait pris sa nourriture. À chaque action, à chaque démarche, que notre main retrace sur notre corps la croix du Seigneur. Ne parlez mal de personne, et ne tendez point de piège au fils de votre mère. Qui êtes-vous donc, vous, pour condamner ainsi le serviteur d'autrui ? S'il tombe, ou s'il demeure ferme, cela regarde son maître ; mais il demeurera ferme, parce que Dieu est tout puissant pour le soutenir. (1). Quand vous jeûnerez deux jours, trois jours, n'allez pas vous croire meilleur que ceux qui ne jeûnent point. Vous jeûnez, mais vous êtes emporté ; celui-ci ne jeûne pas, et peut-être qu'il est doux. Les peines de votre âme et la faim de votre corps, vous les digérez, pour ainsi dise, parmi les plaintes et les murmures ; celui-ci, plus modéré dans sa nourriture, rend grâces à Dieu. De là vient que le prophète Isaïe crie sans cesse : Je n'ai point choisi un tel jeûne (2) dit le Seigneur. Et encore : En vos jours de jeûne, vous suivez vos caprices, et vous fatiguez tous ceux qui sont sous votre domination.Vous jeûnez parmi les procès et les querelles ; vous frappez les petits avec une violence impitoyable. (3). Pourquoi jeûnez-vous pour moi ? Quel jeûne peut faire celui qui nourrit des sentiments de colère, je ne dis pas jusqu'à la nuit, mais durant des mois entiers ? Attentive à vous-même, ne vous glorifiez pas dans la chute des autres, mais glorifiez-vous dans vos œuvres. »

    1. Rom 14, 4. - 2. Is 58, 5 - 3. Ibid. 3, 4

    St Jérôme, extrait de la Lettre XVIII à Eustochium, in "Lettres de Saint Jérôme", Trad. J.-F. Grégoire et F.-B. Collombet, Tome premier, Librairie catholique de Perisse Frères, Lyon - Paris, 1837 (pp.229-233).
    Disponible en libre accès sur internet ici (pdf) et ici (copie html).

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  • Méditation : les fruits de la prière

    « Que produit la prière ? Elle élève l'homme au-dessus de lui-même, au-dessus de la terre, elle le plonge dans Dieu, abîme de la douceur et de la suavité. Que produit la prière ? Elle s'empare de Dieu, en quelque sorte, elle le renferme dans le cœur de celui qui prie comme dans son sanctuaire, afin que l'homme le possède, l'aime, jouisse de lui avec toute liberté. Que produit la prière ? Elle place l'âme en face de Dieu, et Dieu en face de l'âme : ravissant spectacle, paysage autrement délectable que les plaines des cieux avec leurs étoiles. Que produit la prière ? Elle place le suppliant aux pieds de Dieu pour qu'il entende de la bouche divine la doctrine véritable, pour qu'il soupire avec l'épouse des Cantiques : Mon âme se fond de tendresse, quand le bien-aimé me parle. Que produit la prière ? Elle détruit le vieil homme, elle enfante l'homme nouveau, elle arrache les vices, elle sème les vertus. Que produit la prière ? Elle donne le mépris du monde, le courage dans la détresse, la possession de soi-même dans le bonheur, le calme dans le péril, la sérénité en toute occurrence. Que produit enfin la prière ? Elle relève, assouplit, éclaire, enflamme l'âme, et cette âme, décuplée de la sorte, s'envole aux spectacles éternels, aime ce qu'elle contemple, s'enivre de son amour, se repose dans cet enivrement céleste, et se procure dans ce repos inénarrable toute la gloire et la jouissance que les âmes peuvent obtenir sur terre.

    La prière est donc comme le pâturage de l'âme, le baiser de Dieu, la source du Liban, la demeure des délices ; c'est un miroir radieux où l'homme contemple avec son Seigneur et les mondes ; c'est la vie des vertus, l'exterminateur des vices, l'origine de tout bien ; c'est le lait où s'abreuvent les enfants de l'Esprit, le pain qui nourrit les forts, la manne des débiles, le secours des morts, le refuge de l’Église universelle ; c'est le port tranquille, le bocage frais sous le soleil ardent, le bouclier du combat, la couronne du vainqueur ; c'est l'échelle de Jacob, la porte royale qui mène au cœur de Dieu ; c'est la prémisse de la gloire ; c'est une reine magnifique dont les jeûnes, les aumônes, les chant des hymnes, le désert, les images, les temples sont le cortège et la parure ; c'est cette part opime que s'était réservée Marie, la sœur de Marthe, au témoignage du Sauveur ; c'est notre armure, enfin, notre invincible mais indispensable armure. Avec elle nous pouvons affronter l'enfer et conquérir le ciel ; sans elle nous ne pouvons rien pour le salut et la gloire. Qui a fait des miracles sans la prière, et que de victoires n'a-t-elle pas remportées sur l'ennemi du genre humain ? Quelle grâce n'obtient pas l'enfant de l'oraison, et que de guérisons miraculeuses, de prodiges sur terre et sur mer ne prodigue-t-elle pas à chaque heure ? La prière, voilà l'armure de Moïse, de Josué, de Gédéon, de Jephté, de David, d'Ezéchias, de Josaphat, des Machabées, des Constantin, des Théodose : voilà l'armure des vrais chrétiens.

    Aussi rien de plus familier aux saints que l'oraison. Jésus-Christ, le Saint des saints, passait les nuits dans cet exercice aimé ; il préluda par la contemplation à sa vie publique, il se prépara à mourir sur le Calvaire par une longue et fervente méditation. David, au milieu de ses occupations de roi, vaquait sept fois par jour à la prière, et y consacrait une partie de son sommeil. Dans l’Église naissante, on méditait sans cesse dans les temples, on y louait, on y bénissait toujours Dieu. Saint Bartholomée s'agenouillait cent fois le jour et cent fois la nuit. Saint Jacques avait les genoux durcis comme les genoux d'un chameau pour ses génuflexions prolongées et sans nombre. Les apôtres remirent le soin des intérêts temporels à des diacres, pour se livrer librement à la contemplation. La vie de saint François ne fut qu'une absorption continuelle en Dieu. Saint Dominique prêchait tout le jour et priait toute la nuit ; il puisait au pied du Christ les inspirations de ses prédications ardentes. Aussi quels fruits admirables opérait sa parole de feu ! Je ne parle pas de saint Antoine, de saint Benoît et de tant d'autres qui se retirèrent dans le désert pour prier loin du bruit.

    Si tant de saints ont mendié si assidûment, dans l'oraison, la grâce de Dieu, désiré sa lumière, imploré son secours, malgré leurs richesses spirituelles, que ferons-nous, nous les vrais pauvres et les vrais mendiants ? Pourquoi cueillaient-ils des moissons si abondantes, et pourquoi cette stérilité de nos labeurs et de nos peines ? C'est qu'ils étaient humbles, quoique riches, et que nous sommes superbes, quoique misérables. Ils plaçaient leur espérance en Dieu, et nous nous appuyons sur notre sagesse. Je vous exhorte donc à acquérir cette précieuse vertu, si vous désirez parvenir rapidement et sûrement à la possession du bien suprême, le béni des siècles. »

    St Robert Bellarmin (1542-1621), in "Les Discours", soigneusement revus et corrigés par l'auteur, Traduits du latin par Elie Berton, Tome IV, 11, 1, Paris, Louis Vivès, 1855 (Google Books, p. 257 sq.).

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    Gravure de Hieronymus Wierix (v.1553-1619)

  • Méditation : distractions et tentations dans la prière

    « Quelque désir qu'on ait de sa perfection, quelque soin qu'on apporte à l'exercice de la méditation, on ne doit pas s'attendre à y éprouver constamment la même facilité, la même dévotion. Il arrivera quelquefois, même aux plus fervents, que ce saint exercice sera pour eux sans goût, sans lumière, sans consolation ; qu'il leur paraîtra insipide, soit que cela provienne de leur disposition naturelle, soit que ce soit un effet de la malice du démon, ou une épreuve de Dieu. Leur imagination ne pourra se fixer à rien ; mille pensées se présenteront à leur esprit, leur cœur sera en proie à mille désirs, des tentations viendront en foule les assiéger ; mais qu'ils sachent que tout cela ne diminuera point devant Dieu le prix et le mérite de leur oraison ; moins ils seront contents d'eux-mêmes, plus le Seigneur sera content d'eux. Il est vrai que leur oraison ne sera pas proprement alors une méditation ; ils ne pourront former ni considérations, ni raisonnements, ni affections ; ce sera une oraison de travail et de combat ; mais leur constance à soutenir patiemment une si pénible situation, sans en vouloir abréger la durée un seul instant, profitera plus à leur âme que la meilleure méditation.

    Qu'ils ne soient pas non plus effrayés d'une pareille épreuve ; elle sera proportionnée à leurs forces et aux grâces que le Seigneur leur destine. Loin d'en être abattus, ils se réjouiront d'être dans un état où ils peuvent témoigner à Dieu leur fidélité d'une manière plus parfaite. Sans trop vouloir pénétrer la cause du changement qui s'est fait en eux, ils en prendront occasion de s'humilier, de se résigner entièrement au bon plaisir de Dieu, de mettre en lui seul toute leur confiance, et d'implorer avec plus d'ardeur le secours de sa grâce toute-puissante.

    S'ils se comportent de cette manière, ils connaîtront, par leur propre expérience, que ces aridités et ces épreuves de l'oraison ne leur seront pas moins utiles que les lumières et les consolations qu'on y reçoit. C'est un moyen dont Dieu se sert d'ordinaire pour détacher l'âme elle-même, pour la disposer à recevoir de plus grandes grâces, et la rendre capable de plus parfaites communications. »

    Pierre-Joseph Picot de Clorivière s.j. (1735-1820), in "cahiers sur l'oraison" n°14, Février 1959, Paris, éditions du Feu Nouveau, 1959.

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