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  • Méditation : tristesse et découragement

    « S'il est un écueil dans la vie chrétienne et plus encore dans la vie pieuse, - écueil d'autant plus perfide qu'il se voile sous de louables apparences, - c'est bien celui de la mauvaise tristesse et du sot découragement. Quand on va au fond de ces mélancolies abattues ou rêveuses, on ne trouve guère que de l'égoïsme. L'âme se replie sur soi et se regarde, au lieu de regarder Jésus ; elle s'occupe et s'inquiète de ses intérêts personnels plus que des intérêts de Dieu ; elle s'appuie sur les créatures et non sur la grâce, et comme elle ne rencontre guère dans les créatures et dans elle-même que misère et pauvreté, elle devient mécontente, morose, troublée, chagrine. Bientôt, elle trouve la piété trop difficile et commence à en abandonner les pratiques ; c'est que, déjà, elle en a abandonné l'esprit.
    Il faut combattre vigoureusement cette sotte et stérile tristesse ; elle est une tentation qui met l'âme en péril, et qui l'épuise sans profit.
    [...]
    Pour s'en délivrer, qu'on ait recours d'abord à la prière, selon le conseil de saint Jacques : "Quelqu'un est-il triste ? qu'il prie ! (Jc V, 3)" Mais qu'on réagisse aussi par un dégagement plus complet de soi-même, par une fidélité plus vigilante à tous les devoirs, au besoin par quelque pénitence ou quelque immolation spéciale, en tout cas par un don et un abandon plus absolu au divin Maître. Alors tout redeviendra radieux, tout, jusqu'à la souffrance ; et l'âme ne tardera pas à se revêtir de cette "robe d'allégresse" dont le Seigneur récompense les martyrs. Aussi bien, "il y a une inévitable tendance à la joie dans tout ce qui appartient à Dieu (P. Faber, Bethléem, VIII). On n'est triste que lorsque qu'on veut jouir de soi ; dès qu'on se renonce, la tristesse s'en va et fait place à la joie. La joie est le signe infaillible d'une âme saine, et toute âme saine est bien près d'être une âme sainte. »

    Abbé J.M. Buathier, Le Sacrifice dans le dogme catholique et dans la vie chrétienne (ch. XXI, 3), Paris, Gabriel Beauchesne, 1920 (dixième édition).

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    Albrecht Dürer (1471-1528), gravure sur cuivre, "Melancholia I"

  • Méditation : la joie du chrétien

    « ... Tiens, je vais te définir un peuple chrétien par son contraire. Le contraire d'un peuple chrétien c'est un peuple triste, un peuple de vieux. Tu me diras que la définition n'est pas trop théologique. D'accord. Mais elle a de quoi faire réfléchir les messieurs qui bâillent à la messe du dimanche. Bien sûr qu'ils bâillent ! Tu ne voudrais pas qu'en une malheureuse demi-heure par semaine, l’Église puisse leur apprendre la joie ! Et même s'ils savaient par cœur le catéchisme du Concile de Trente, ils n'en seraient probablement pas plus gais.
    D'où vient que le temps de notre petite enfance nous apparaît si doux, si rayonnant ? Un gosse a des peines comme tout le monde, et il est, en somme, si désarmé contre la douleur, la maladie ! L'enfance et l'extrême vieillesse devraient être les deux grandes épreuves de l'homme. Mais c'est du sentiment de sa propre impuissance que l'enfant tire humblement le principe même de sa joie. Il s'en rapporte à sa mère, comprends-tu ? Présent, passé, avenir, toute sa vie, la vie entière tient dans un regard, et ce regard est un sourire. Eh bien, mon garçon, si l'on nous avait laissé faire, nous autres, l’Église eût donné aux hommes cette espèce de sécurité souveraine. Retiens que chacun n'en aurait pas moins eu sa part d'embêtements. La faim, la soif, la pauvreté, la jalousie, nous ne serons jamais assez forts pour mettre le diable dans notre poche, tu penses ! Mais l'homme se serait su le fils de Dieu, voilà le miracle ! Il aurait vécu, il serait mort avec cette idée dans la caboche - et non pas une idée apprise seulement dans les livres - non. Parce qu'elle eût inspiré, grâce à nous, les mœurs, les coutumes, les distractions, les plaisirs et jusqu'aux plus humbles nécessités. Ça n'aurait pas empêché l'ouvrier de gratter la terre, le savant de piocher sa table de logarithmes ou même l'ingénieur de construire ses joujoux pour grandes personnes. Seulement nous aurions aboli, nous aurions arraché du cœur d'Adam le sentiment de sa solitude... Hors l’Église, un peuple sera toujours un peuple de bâtards, un peuple d'enfants trouvés. Eh bien, l’Église a été chargée par le bon Dieu de maintenir dans le monde cet esprit d'enfance, cette ingénuité, cette fraîcheur. Le paganisme n'était pas l'ennemi de la nature, mais le christianisme seul l'agrandit, l'exalte, la met à la mesure de l'homme, du rêve de l'homme... L’Église dispose de la joie, de toute la part de joie réservée à ce triste monde. Ce que vous avez fait contre elle, vous l'avez fait contre la joie... »

    Georges Bernanos, Journal d'un curé de campagne, Plon, 1936.

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  • Méditation : les saints Innocents

    Les plus anciens témoins de la fête des saints Innocents en Occident sont les sermons de St Pierre Chrysologue (+ avant 451) et St Césaire d’Arles (+ 543) :

    « Où mène la jalousie ?… Le crime commis aujourd’hui nous le montre : la peur d’un rival pour son royaume terrestre remplit Hérode d’angoisse ; il complote de supprimer « le Roi qui vient de naître » (Mt 2, 2), le Roi éternel ; il combat son Créateur et met à mort des innocents… Ces enfants, quelle faute avaient-ils commise ? Leurs langues étaient muettes, leurs yeux n’avaient rien vu, leurs oreilles rien entendu, leurs mains n’avaient rien fait. Ils ont reçu la mort, eux qui ne connaissaient pas la vie…

    Pourquoi le Christ qui lit l’avenir et connaît les secrets des cœurs, qui juge les pensées et scrute les intentions (Ps 138), pourquoi a-t-il abandonné ceux qu’il savait devoir être poursuivis à cause de lui et mis à mort en son nom ? Le roi du ciel qui venait de naître, pourquoi a-t-il négligé ces compagnons de son innocence, méprisé cette armée de son âge, oublié les sentinelles en poste autour de son berceau, si bien que lorsque l’ennemi a voulu atteindre le seul roi, il a ravagé toute la cohorte ?

    Mes frères, le Christ n’a pas abandonné ses soldats, mais il les a comblés d’honneur en leur donnant de triompher avant de vivre, et de remporter la victoire sans avoir à combattre… Il a voulu qu’ils possèdent le ciel de préférence à la terre…, il les a envoyés devant lui comme des hérauts. Il ne les a pas abandonnés : il a sauvé son avant-garde, il ne l’a pas oubliée…

    Bienheureux ceux qui sont nés pour le martyre et non pour le monde ! Bienheureux ceux qui ont échangé les travaux pour le repos, les douleurs pour le soulagement, les souffrances pour la joie ! Ils vivent, oui, ils vivent de la vraie vie, ceux qui ont subi la mort pour le Christ. Heureuses les mères qui ont porté de tels enfants et les ont nourris de leur lait, heureuses les larmes qu’elles ont répandues pour eux et qui leur ont valu la grâce du baptême. Car les mères comme les enfants ont été baptisées par un don unique, elles dans leurs larmes, eux dans leur sang. Les mères ont souffert le martyre de leurs enfants : l’épée qui transperçait les corps des petits atteignait le cœur des mères ; et si elles furent associées à leur passion, il est juste qu’elles partagent aussi leur récompense.

    Que celui qui écoute le comprenne bien : le martyre ne dépend pas du mérite, il est donné par la grâce. Dans ces petits enfants, où donc était la volonté, où donc la décision, alors qu’en eux la nature humaine était, pour ainsi dire, prisonnière ? Le martyre est un don de Dieu, il ne doit rien à nos efforts. Livrer son corps, mépriser sa chair, supporter les tortures, s’emparer de la gloire par les souffrances, de la vie par la mort, cela n’appartient pas à la force humaine, c’est une grâce de Dieu.

    Que celui qui a daigné reposer dans notre étable veuille nous conduire nous aussi aux pâturages du ciel. »

    Saint Pierre Chrysologue, Sermon 152 (PL 52, 604), Trad. En Calcat et Bouchet, & Lectionnaire monastique pour le 28 décembre, Solesmes-Cerf, 1993.

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    Le Massacre des Innocents, Giotto  (1304-1306)
    (Fresque, Chapelle des Scrovegni, Padoue, Italie)

  • Angélus de ce dimanche 15 décembre 2013


    « L’Église est la maison de la joie »

    C’est bien évidemment au troisième dimanche de l’Avent que le Pape François a consacré sa catéchèse lors de l’Angélus de ce dimanche. Appelé aussi dimanche du "Gaudete", le dimanche de la joie. Il s’agit pour nous de nous réjouir dans le Seigneur. « Soyez toujours dans la joie, priez sans relâche, rendez grâce en toute circonstance. » C’est cet appel à la joie que nous retrouvons dans chacune des lectures de ce dimanche. Parce que le Seigneur est proche. « Comme une mère, a déclaré le Pape, l’Église nous encourage à poursuivre avec confiance l’itinéraire spirituel qui nous mènera à Noël. Le Message chrétien s’appelle Évangile, c’est-à-dire Bonne Nouvelle, une annonce de joie pour le peuple tout entier ; l’Église n’est pas un refuge pour personnes tristes, l’Église est la maison de la joie ! »

    « Mais cette joie de l’Évangile n’est pas une joie comme les autres. Elle trouve son fondement dans le fait de se savoir écoutés et aimés de Dieu. Comme nous le rappelle aujourd’hui le prophète Isaïe, Dieu est Celui qui vient nous sauver, et apporte son secours tout spécialement aux personnes perdues. Sa venue parmi nous nous fortifie, nous donne courage, fait exulter et fleurir le désert et la steppe, c’est-à-dire notre vie quand elle devient aride, sans l’eau de la Parole de Dieu et de son Esprit d’amour. Même si nos limites et nos égarements sont grands, il ne nous est pas permis d’être mous et vacillants face aux difficultés et nos faiblesses. Au contraire, nous sommes invités à renforcer nos mains, à solidifier nos genoux, à avoir du courage et à ne pas craindre, parce que notre Dieu montre toujours la grandeur de sa miséricorde. Grâce à son aide nous pouvons toujours recommencer tout dès le début, rouvrir les yeux, vaincre la tristesse et les larmes en entonnant un chant nouveau. Et cette joie véritable reste alors aussi dans les épreuves, dans les souffrances, parce qu’elle n’est pas superficielle, mais descend en profondeur dans la personnes qui se confie à Dieu et à confiance en Lui. »

    « La joie chrétienne, comme l’espérance, a encore ajouté le Pape, trouve son fondement dans la fidélité de Dieu, dans la certitude qu’Il maintient toujours ses promesses. Le prophète Isaïe exhorte ceux qui se sont égarés et ont des difficultés à croire à la fidélité du Seigneur, parce que son salut ne tardera pas à faire irruption dans leur vie. Ceux qui ont rencontré Jésus le long du chemin, font l’expérience dans leur cœur d’une sérénité et d’une joie dont rien ni personne ne pourra les priver. Notre joie c’est le Christ, son amour fidèle est inépuisable ! C’est pourquoi, lorsqu’un chrétien devient triste, cela signifie qu’il s’est éloigné de Jésus. Mais alors il ne faut pas le laisser seul ! Nous devons prier pour lui, et lui faire sentir la chaleur de la communauté. »

    Le Pape a conclu sa catéchèse en invoquant Marie : « Que la Vierge Marie nous aide à presser le pas vers Bethléem, pour rencontrer l’Enfant qui est né pour nous, pour le salut et la joie de tous les hommes. L’Ange lui a dit : « Réjouis-toi, pleine de grâce : le Seigneur est avec toi » (Luc 1,28). Qu’elle obtienne pour nous de vivre la joie de l’Évangile en famille, au travail, en paroisse, et partout. Une joie intime, merveilleuse et tendre. Celle qu’éprouve une mère lorsqu’elle regarde son enfant à peine né, et comprend que c’est un don de Dieu, un miracle que nous ne pouvons que remercier ! »

    Source : Radio Vatican.

  • Méditation : vigilance et persévérance dans nos luttes quotidiennes

    « Vous devez travailler par des efforts continuels, à détruire tout ce que vous apercevrez en vous d'affections terrestres, d'inclinations charnelles, et en un mot, que vous ne pardonniez à rien de tout ce qui n'y aura pas été mis de la main de Dieu. Les moindres réserves vous causeraient d'extrêmes dommages, et ce que vous auriez conservé ou par une volonté déterminée, ou par une négligence grossière, vous produirait par des conséquences certaines, des pertes que vous ne pourriez réparer. Le Gouverneur d'une place qui y reçoit au dedans de ses murs son ennemi, qui se croit en sûreté, parce qu'il ne le met ni dans le Donjon, ni dans la Citadelle, et qui ne lui donne pour habiter que la maison d'un bourgeois, se trompe : car cet homme qui est tout rempli de la volonté de lui nuire, et qui n'en attend que les occasions, ne manquera point de se servir des avantages qu'il a dans les mains, de former des cabales et des partis, de ménager des intelligences, et trouvera à quelque prix que ce soit, un moment et une conjoncture favorable dans laquelle il le pourra surprendre.

    C'est ce qui vous arrivera si vous ne faites main-basse sur les ennemis de Dieu, qui sont les vôtres ; j'entends vos vices et vos passions. Le démon sans doute s'appliquera à celle que vous aurez négligée ; il la fortifiera, il augmentera sa malignité, il essayera d'y en joindre d'autres ; ainsi le mal et la corruption venant à s'étendre et à se communiquer, ce qui vous aura paru un rien dans les commencements, vous sera dans la suite des blessures auxquelles vous ne pourrez plus apporter de remèdes ; il suffit pour vous obliger de garder dans une affaire de cette importance toute l'exactitude nécessaire, de savoir comme Jésus-Christ nous l'a appris, qu'un peu de levain gâte et aigrit toute la pâte (1Co 5,6) ; et l'expérience nous fait connaître que la même barque qui a résisté aux coups de la mer les plus furieux, et aux tempêtes les plus violentes, fait naufrage dans le port, par une fente et par une ouverture, quelque petite qu'elle soit, lorsqu'on néglige d'y mettre la main et de la réparer. Réjouissez-vous donc, mes frères, réjouissez-vous, Gaudete in Domino, iterum dico gaudete (*), puisque bien loin de trouver quelque chose de terrible dans l'avènement de Jésus-Christ, vous n'y voyez rien qui ne vous console, puisque les voies dans lesquelles la Providence vous a engagés, vous conduisent à la fin de toutes vos espérances... comme un torrent de grâces qui vous porte de lui-même, par une heureuse rapidité, à cette terre de bénédiction, qui est la fin et le comble de tous vos désirs. »

    (*) : Introït de la Messe de ce dimanche : "Soyez toujours joyeux dans le Seigneur ! Je vous le répète : soyez joyeux." (Phil. 4, 4-6) »

    Dom Armand Jean [de Rancé] (1626-1700), Ancien Abbé de la Trappe, extrait de la Conférence pour le IIIe Dimanche de l'Avent, in "Conférences ou Instructions sur les Épitres et Évangiles des Dimanches et principales fêtes de l'année", Tome Premier, A Paris, Chez Florentin & Pierre Delaulne, 1698.

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  • Résumé de l'exhortation "Evangelii Gaudium"

    "La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus" : c’est par ces mots que s’ouvre l’exhortation apostolique Evangelii Gaudium dans laquelle le Pape François développe le thème de l’annonce de l’Évangile dans le monde actuel, en se basant, entre autres, sur la contribution offerte par les travaux du Synode qui s’est déroulé au Vatican du 7 au 28 octobre 2012 ("La nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi chrétienne"). Après l'encyclique Lumen Fidei, rédigée en collaboration avec Benoît XVI, Evangelii Gaudium est le premier texte entièrement de la main du Pape François. Je désire, écrit-il, "m’adresser aux fidèles chrétiens, pour les inviter à une nouvelle étape évangélisatrice marquée par cette joie et indiquer des voies pour la marche de l’Église dans les prochaines années ". Il s’agit d’un appel vibrant à tous les baptisés afin que, avec une ferveur et un dynamisme nouveaux, ils portent à leurs prochains l’amour de Jésus dans un "état permanent de mission", en évitant "le grand risque du monde d’aujourd’hui, celui de tomber dans "une tristesse individualiste".

    Le Pape invite à "retrouver la fraîcheur originale de l’Évangile", en cherchant "de nouvelles voies" et "des méthodes créatives", et à ne pas enfermer Jésus dans nos "schémas ennuyeux". Il faut une "conversion pastorale et missionnaire, qui ne peut laisser les choses comme elles sont" et une "réforme des structures" ecclésiales pour les rendre plus missionnaires. Le Souverain Pontife pense aussi à une "conversion de la papauté" pour qu’elle soit "plus fidèle à la signification que Jésus Christ entend lui donner et aux besoins actuels de l’évangélisation". Le souhait que les Conférences épiscopales puissent offrir leur contribution afin que "le sentiment collégial se réalise concrètement ne s’est pas pleinement réalisé". Il est nécessaire de procéder à une "décentralisation salutaire". Dans ce processus de renouveau, il ne faut pas avoir peur de réviser certaines coutumes de l’Église qui ne sont pas "directement liées au cœur de l’Évangile…certains usages s’étant très enracinés dans le cours de l’histoire".

    Pour témoigner de l’accueil de Dieu, il faut "avoir partout des églises avec les portes ouvertes" afin que ceux qui cherchent ne rencontrent pas "la froideur d’une porte close". "Même les portes des sacrements ne devraient pas se fermer pour n’importe quelle raison". Ainsi, l’Eucharistie "n’est pas un prix destiné aux parfaits, mais un généreux remède et un aliment pour les faibles. Ces convictions ont aussi des conséquences pastorales que nous sommes appelés à considérer avec prudence et audace". Le Pape réaffirme qu’il préfère une Église "accidentée, blessée et sale pour être sortie dans la rue, plutôt qu’une Église malade de la fermeture et du confort de s’accrocher à ses propres sécurités. Je ne veux pas une Église préoccupée d’être le centre et qui finit renfermée dans un enchevêtrement de fixations et de procédures. Si quelque chose doit saintement nous préoccuper…c’est que tant de nos frères vivent" sans l’amitié de Jésus-Christ.

    Le Pape énonce ensuite les tentations auxquelles sont exposés les agents pastoraux, de l'individualisme à la crise d’identité et au déficit de ferveur. "La plus grande menace" c’est "le triste pragmatisme de la vie quotidienne de l’Église, dans lequel apparemment tout arrive normalement, alors qu’en réalité, la foi s’affaiblit". Le Pape exhorte à ne pas se laisser saisir par un "pessimisme stérile" à être des signes d’espérance en réalisant la "révolution de la tendresse". Il faut repousser la "spiritualité du bien-être" qui refuse "les engagements fraternels" et vaincre "la mondanité spirituelle" qui "consiste à rechercher, au lieu de la gloire du Seigneur, la gloire humaine". Le Pape parle de ceux qui "se sentent supérieurs aux autres" parce qu’ils sont "inébranlablement fidèles à un certain style catholique propre au passé" et qui "au lieu d’évangéliser, analysent et classifient les autres" et de ceux qui manifestent "un soin ostentatoire de la liturgie, de la doctrine ou du prestige de l’Église, mais sans que la réelle insertion de l’Évangile dans le Peuple de Dieu les préoccupe". Il s’agit là "d’une terrible corruption sous l’apparence du bien… Que Dieu nous libère d’une Église mondaine sous des drapés spirituels et pastoraux !"

    Le Pape demande aux communautés ecclésiales de ne pas se laisser aller à l’envie et à la jalousie : "A l’intérieur du Peuple de Dieu et dans les diverses communautés, que de guerres !". "Qui voulons-nous évangéliser avec de tels comportements ?". Il souligne la nécessité d’accroître la responsabilité des laïcs, qui sont maintenus "en marge des décisions" par "un cléricalisme excessif". Il affirme "qu’il faut encore élargir les espaces pour une présence féminine plus incisive dans l’Église", en particulier "dans les divers lieux où sont prises des décisions importantes". "Les revendications des droits légitimes des femmes…ne peuvent être éludées superficiellement". Les jeunes doivent avoir un rôle plus important. Face à la pénurie des vocations dans certaines régions, il affirme qu’on ne peut pas "remplir les séminaires sur la base de n’importe quelles motivations".

    Abordant le thème de l’inculturation, le Pape rappelle que "le christianisme n’a pas un seul modèle culturel" et que le visage de l’Église est "multiforme". "Nous ne pouvons pas prétendre que tous les peuples de tous les continents, en exprimant la foi chrétienne, imitent les modalités adoptées par les peuples européens à un moment précis de leur histoire". Le Pape réaffirme "la force évangélisatrice de la piété populaire" et encourage la recherche des théologiens en les invitant à viser la finalité évangélisatrice de l’Église et à ne pas se contenter "d’une théologie de bureau".

    Le Pape s’attarde "avec soin sur les homélies" parce que "nous ne pouvons pas rester sourds aux nombreuses réclamations concernant cet important ministère". Les homélies "doivent être brèves et éviter de ressembler à une conférence ou à un cours", elles doivent savoir dire "des paroles qui font brûler les cœurs", et surtout ne pas se limiter à faire la morale et à vouloir endoctriner. Les homélies, il faut les préparer : "Un prédicateur qui ne se prépare pas n’est pas “spirituel”, il est malhonnête et irresponsable envers les dons qu’il a reçus". "Une bonne homélie…doit contenir une idée, un sentiment, une image". La prédication doit être positive, offrir toujours l’espérance et ne pas laisser les fidèles "prisonniers de la négativité". L’annonce de l’Évangile elle-même doit avoir des connotations positives, la "proximité, l'ouverture au dialogue, la patience, l'accueil cordial qui ne condamne pas".

    Évoquant les défis du monde contemporain, il dénonce le système économique actuel : "il est injuste à sa racine". "C’est une économie qui tue" parce que c’est la "loi du plus fort" qui prévaut. La culture actuelle du déchet a engendré "quelque chose de nouveau" : "Les exclus ne sont pas des exploités, mais des déchets, des restes". Nous vivons "une tyrannie invisible, parfois virtuelle, qui impose ses lois et ses règles, de façon unilatérale et implacable", un "marché divinisé" où règnent "la spéculation financière", "une corruption ramifiée", "une évasion fiscale égoïste". Le Pape dénonce les "atteintes à la liberté religieuse" et les "nouvelles situations de persécution des chrétiens… Dans de nombreux endroits, il s’agit plutôt d’une indifférence relativiste diffuse". La famille traverse une crise culturelle profonde". Réaffirmant "la contribution indispensable du mariage à la société" il souligne que "l’individualisme postmoderne et mondialisé favorise un style de vie qui affaiblit le développement et la stabilité des liens entre les personnes, et qui dénature les liens familiaux".

    Le Pape réaffirme par ailleurs "la connexion intime entre évangélisation et promotion humaine" et le droit des Pasteurs "d’émettre des opinions sur tout ce qui concerne la vie des personnes". "Personne ne peut exiger de nous que nous reléguions la religion dans la secrète intimité des personnes, sans aucune influence sur la vie sociale et nationale". Il cite Benoît XVI lorsqu’il affirme que l’Église "ne peut ni ne doit rester à l’écart dans la lutte pour la justice". Pour l’Église, l’option pour les pauvres est une catégorie "théologique" avant d’être sociologique. "Pour cette raison, je désire une Église pauvre pour les pauvres. Ils ont beaucoup à nous enseigner". "Tant que ne seront pas résolus radicalement les problèmes des pauvres…les problèmes du monde ne seront pas résolus". "La politique tant dénigrée - affirme-t-il encore - est…une des formes les plus précieuses de la charité". "Je prie le Seigneur qu’il nous offre davantage d’hommes politiques qui aient vraiment à cœur la vie des pauvres !". Puis cet avertissement : Toute communauté de l’Église qui oublie les pauvres "court aussi le risque de la dissolution".

    Le Pape exhorte à prendre soin des plus faibles, "les sans-abris, les toxicomanes, les réfugiés, les populations indigènes, les personnes âgées toujours plus seules et abandonnées" et les migrants et il encourage les nations "à une généreuse ouverture". Il évoque les victimes de la traite et des nouvelles formes d’esclavage : "Ce crime mafieux et aberrant est implanté dans nos villes, et beaucoup ont les mains qui ruissellent de sang à cause d’une complicité confortable et muette". "Doublement pauvres sont les femmes qui souffrent des situations d’exclusion, de maltraitance et de violence". "Parmi les faibles dont l’Église veut prendre soin avec prédilection" il y a "aussi les enfants à naître, qui sont les plus sans défense et innocents de tous, auxquels on veut nier aujourd’hui la dignité humaine". "On ne doit pas s’attendre à ce que l’Église change de position sur cette question… Ce n’est pas un progrès de prétendre résoudre les problèmes en éliminant une vie humaine". Suit un appel au respect de toute la création : "Nous sommes appelés à prendre soin de la fragilité du peuple et du monde dans lequel nous vivons".

    En ce qui concerne le thème de la paix, le Pape affirme qu’il faut des voix prophétiques car certains veulent instaurer une fausse paix "qui servirait d’excuse pour justifier une organisation sociale qui réduit au silence ou tranquillise les plus pauvres, de manière à ce que ceux qui jouissent des plus grands bénéfices puissent conserver leur style de vie". Pour la construction d’une société bénéficiant de la paix, de la justice et de la fraternité, le Pape indique quatre principes : "le temps est supérieur à l’espace" cela veut dire "travailler à long terme, sans être obsédé par les résultats immédiats". "L’unité prévaut sur le conflit" cela veut dire œuvrer afin que les oppositions parviennent à une "unité multiforme qui puisse engendrer une nouvelle vie". "La réalité est plus importante que l’idée" cela veut dire éviter que la politique et la foi se réduisent à la rhétorique. "Le tout est supérieur à la partie" cela veut dire mettre ensemble globalisation et localisation.

    L’évangélisation, poursuit le Saint-Père, "implique aussi un chemin de dialogue" qui permette à l’Église de collaborer avec toutes les réalités politiques, sociales, religieuses et culturelles. L’œcuménisme est "un chemin incontournable de l’évangélisation". L’enrichissement réciproque est important : "Nous pouvons apprendre tant de choses les uns des autres !", par exemple "dans le dialogue avec les frères orthodoxes, nous les catholiques, nous avons la possibilité d’apprendre quelque chose de plus sur le sens de la collégialité épiscopale et sur l’expérience de la synodalité" ; "le dialogue et l’amitié avec les fils d’Israël font partie de la vie des disciples de Jésus" ; "le dialogue inter-religieux", qui doit être mené "avec une identité claire et joyeuse", est "une condition nécessaire pour la paix dans le monde" et il n’éclipse pas l’évangélisation ; "La relation avec les croyants de l’Islam acquiert à notre époque une grande importance" : le Pape implore "humblement" les pays de tradition musulmane d’assurer la liberté religieuse aux chrétiens, "prenant en compte la liberté dont les croyants de l’Islam jouissent dans les pays occidentaux ! Face au fondamentalisme violent qui nous inquiète, l’affection envers les vrais croyants de l’Islam doit nous porter à éviter d’odieuses généralisations, parce que le véritable Islam et une adéquate interprétation du Coran s’opposent à toute violence". Et contre la tentative de privatiser les religions dans certains contextes, il affirme que "le respect dû aux minorités agnostiques et non croyantes ne doit pas s’imposer de manière arbitraire qui fasse taire les convictions des majorités croyantes ni ignorer la richesse des traditions religieuses". Le Pape réaffirme l’importance du dialogue et de l’alliance entre croyants et non-croyants.

    Le dernier chapitre est consacré aux évangélisateurs avec esprit, "ceux qui s’ouvrent sans crainte à l’action de l’Esprit Saint" qui "infuse la force pour annoncer la nouveauté de l’Évangile avec audace, (Parresia), à voix haute, en tout temps et en tout lieu, même à contre-courant". Ces "évangélisateurs prient et travaillent", en sachant que "la mission est une passion pour Jésus mais, en même temps, une passion pour son peuple" : "Jésus veut que nous touchions la misère humaine, la chair souffrante des autres". "Dans notre rapport avec le monde nous sommes invités à rendre compte de notre espérance, mais non pas comme des ennemis qui montrent du doigt et condamnent". Pour être missionnaires, il faut chercher le bien du prochain et désirer le bonheur des autres : "si je réussis à aider une seule personne à vivre mieux, cela justifie déjà le don de ma vie". Il invite à ne pas se décourager face aux échecs ou aux faibles résultats parce que la "fécondité est souvent invisible, insaisissable, elle ne peut pas être comptée" ; "nous savons seulement que notre don de soi est nécessaire". L’exhortation s’achève par une prière à Marie "Mère de l’évangélisation". "Il y a un style marial dans l’activité évangélisatrice de l’Église. Car, chaque fois que nous regardons Marie nous voulons croire en la force révolutionnaire de la tendresse et de l’affection".

    Source : Vatican Information Service (Publié VIS Archive 01 - 26.11.13).

  • « Evangelii gaudium », « la joie de l'Évangile », première exhortation apostolique du Pape François, a été rendue publique ce mardi 26 novembre à midi au Vatican.

    A lire en ligne sur le site internet du Vatican

    ou à télécharger sur ce même site ICI (format pdf).

  • Méditation : tabernacles du Christ

    « La dévotion à Jésus Maître nous porte à bien adorer, communier, assister à la sainte messe. En plus, elle nous porte à vivre la vie d'union à Jésus, une vraie vie eucharistique.

    La très sainte Vierge a porté Jésus dans son cœur. Elle l'a reçu souvent dans la sainte Eucharistie.

    Après la communion, la présence réelle de Jésus dure peu de temps en nous ; la présence spirituelle, au contraire, peut durer toujours. L'âme qui fait une bonne communion devient la demeure de Dieu, notre cœur devient le tabernacle vivant de la Sainte Trinité. “Nous viendrons à lui et nous établirons chez lui notre demeure” (Jn.14,23). Après avoir communié, la personne qui quitte l'église pour vaquer à ses devoirs, jardin, ménage, cuisine, est toujours porteuse du Christ, et cela, même si elle marche sur les routes, elle est “christophore” c'est-à-dire qu'elle est “porteuse du Christ”. Elle ressemble à un tabernacle qu'on transporte d'un lieu à l'autre.

    J'imagine comment la bienheureuse Vierge menait une vie de recueillement profond lorsqu'elle portait Jésus en elle. Toujours absorbée dans le trésor qu'elle portait. La noblesse de ses pensées, la plénitude de son amour, sa donation totale à Dieu rayonnaient extérieurement.

    Comme elle chemine joyeusement l'âme qui porte Jésus ! Mon trésor est avec moi. Quelle joie ! »

    Bx Giacomo Alberione (fêté ce jour), Aux Sœurs Disciples du Divin Maître (ch.5, 26-30, 6 janvier 1947), Ed. 1986.
    Source : Écrits en téléchargement.

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  • Méditation : en chemin vers la béatitude

    « Toute la vie chrétienne est en tension vers la béatitude, vers l'eschatologie, dans un surpassement incessant. Elle consiste à accueillir Dieu en soi, dans une démarche qui doit s'intensifier jour après jour, et qui donne au temps sa véritable dimension. Dans une aspiration infinie, qui a Dieu pour terme, et qu'aucune de nos actions ne pourra jamais combler.
    Plus que tout autre, le chrétien sait que la voie qui le mène à la béatitude est une voie qui l'engage tout entier. Une voie où, pour se vouloir lui-même, il lui faut vouloir Dieu et ses frères et le monde, sans espoir d'atteindre Dieu en plénitude avant la Parousie. Une voie qui le jettera inlassablement d'un élan à un autre, d'un don à un autre, d'un sacrifice à un autre. Voie dure, d'humilité, de sacrifices, de renoncements et de pauvreté, mais aussi voie joyeuse de perfection, de bonheur, de paix, de liberté spirituelle.
    Il faut le dire sans ambages : préférer à tout le reste ce consentement actif à Dieu, y subordonner toute notre vie, dans un dépassement qui se renouvelle sans cesse, c'est la loi de toute vie spirituelle authentique. En un sens, tout est déjà gagné, quand par-delà tous les soucis périssables, on a réveillé en soi le désir du paradis, quand on a dit oui à l'ouverture aux biens éternels, car ce oui profond libère une énergie spirituelle latente, capable de tarir en nous toutes les sources d'égoïsme.
    De la vie d'enfant de Dieu, de fils de lumière, d'héritier du Christ, la béatitude apparaît comme la véritable clef de voûte. »

    P. Marie-Joseph Le Guillou, Qui ose encore parler du bonheur ?, Mame, Paris, 1991

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  • Méditation - Prière de Ste Gertrude

    « Ô amour unissant, Dieu de mon cœur, la louange et la joie de mon esprit ! ô mon Roi et mon Dieu (1) ! mon bien-aimé choisi entre mille (2) ! Époux chéri de mon âme, Seigneur Roi des armées, vous que mon cœur aime, cherche et désire uniquement ! De grâce, ô amour, soyez en ce monde ma dot, vous qui êtes riche des bénédictions et de la douceur divines. Jusqu'à ce qu'elle ne fasse qu'un avec vous pour jamais, que mon âme n'ait par son union intime avec vous qu'un même esprit, qu'un même souffle, qu'une même volonté, qu'une même affection. Vous êtes l'amour enflammé ; répandez sur moi, dans le cours de mon pèlerinage, une bénédiction vivante et efficace, tendre en même temps que brûlante, afin que mon âme, mon énergie et tout mon être s'allument, comme une étincelle, au feu de votre charité et ne s'éteignent jamais.

    Et vous, vivant amour, soyez pour moi la bénédiction qui consomme et qui achève. Faites que mon âme marche au-devant de vous comme une digne épouse. Réglez ma vie entière dans votre amour. Disposez ma mort en vous, qui êtes ma vie bienheureuse, dans la parfaite vigueur de la foi, de l'espérance et de la charité ; préparez-la par la digne réception de tous les sacrements de l’Église. Anéantissez à votre service toutes mes forces, consumez par votre amour jusqu'au dernier suc de mon corps ; alors mon âme, débarrassée de ce fardeau, vous suivra, joyeuse, tranquille et libre, ô vous qui daignez m'aimer si tendrement, jusque dans les profondeurs intimes, délicieuses et lumineuses de la Sainte Trinité. C'est là que tous mes péchés me seront remis par votre bonté ; là que votre inestimable charité couvrira toutes mes offenses ; là que ma vie perdue verra relever toutes ses ruines par sa très parfaite intimité avec vous, mon Jésus, trésor d'amour ! là que mon âme, languissante et malade aujourd'hui par l'ennui de cette vie, se rajeunira en vous, ô vivant amour ! qu'elle se renouvellera comme l'aigle (3), et ressentira les transports d'une joie et d'un bonheur immenses à la vue de votre visage d'où coule le miel ; car elle aura trouvé et déjà elle saisira les joies infinies de la vie éternelle, vous ayant en sa possession pour toujours, ô Dieu qui êtes l'amour ! Amen ! »

    (1) : Ps. V, 3.
    (2) : Cant. V, 10.
    (3) : Ps. CII, 5.

    Ste Gertrude, in Les Exercices de Sainte Gertrude (Sixième exercice, prière finale), Trad. Dom Albert Schmitt, Moine de Solesmes, Librairie Plon, Paris, 1942.

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  • Méditation : de l'essentiel et de l'accessoire...

    « Si cette question des images vous suggère quelques difficultés, cela vient de ce que vous ne comprenez pas bien le dénuement et l'esprit de pauvreté que requiert la perfection ; du moins vous reconnaîtrez l'imperfection que l'on apporte généralement dans l'usage des chapelets. On trouvera à peine une personne qui n'ait quelque faiblesse à leur sujet ; on veut qu'ils soient de telle sorte plutôt que de telle autre, de telle couleur, de tel métal, ou avec tel ou tel ornement ; or il importe peu qu'ils soient d'une façon ou d'une autre. Dieu n'écoute pas mieux la prière qu'on fait avec ce chapelet que celle qu'on fait avec un autre ; il a pour agréable celle qu'on lui adresse avec un cœur simple et droit, avec l'unique but de lui être agréable, sans se préoccuper de ce chapelet plutôt que d'un autre...

    Notre nature est tellement avide de jouissance qu'elle cherche à s'attacher à tout... N'est-ce pas là ce que vous faites, quand vous prenez plaisir à avoir un beau chapelet, de telle matière plutôt que de telle autre ? Est-ce que vous ne mettez pas votre joie dans ce qui n'est qu'un instrument ? Et quand vous préférez cette image à une autre, vous ne considérez pas si elle éveillera davantage en vous l'amour de Dieu, mais si elle est précieuse et plus belle. Évidemment si vous n'aviez d'autre désir et d'autre joie que de plaire à Dieu, vous ne tiendriez aucun compte de ces accessoires. »

    Saint Jean de la Croix, La Montée du Carmel, L.III, ch.XXXIV, in Œuvres complètes, Le Seuil, 1945.

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  • Méditation avec St Jérôme : les tentations

    « Oh ! combien de fois moi-même, retenu dans le désert, et dans cette vaste solitude qui, dévorée des feux du soleil, n'offre aux moines qu'une demeure affreuse, je croyais assister aux délices de Rome ! Je m'asseyais seul, parce que mon âme était pleine d'amertume. Mes membres étaient couverts d'un sac hideux, et mes traits brûlés avaient la teinte noire d'un Éthiopien. Je pleurais, je gémissais chaque jour, et si le sommeil m'accablait malgré ma résistance, mon corps décharné heurtait contre une terre nue. Je ne dis rien de ma nourriture ni de ma boisson, car, au désert, les malades eux-mêmes boivent de l'eau froide, et regardent comme une sensualité de prendre quelque chose de cuit. Eh bien ! moi qui, par terreur de l'enfer, m'étais condamné à cette prison, habitée par les scorpions et les bêtes farouches, je me voyais en imagination transporté parmi les danses des vierges romaines. Mon visage était pâle de jeûnes, et mon corps brûlait de désirs ; dans ce corps glacé, dans cette chair morte d'avance, l'incendie seul des passions se rallumait encore. Alors privé de tout secours, je me jetais aux pieds de Jésus-Christ, je les arrosais de larmes, je les essuyais de mes cheveux, et je domptais ma chair indocile par des jeûnes de plusieurs semaines. Je ne rougis pas de mon malheur ; au contraire, je regrette de n'être plus ce que j'ai été (*). Je me souviens que plus d'une fois je passai le jour et la nuit entière à pousser des cris, et à frapper ma poitrine, jusqu'au moment où Dieu renvoyait la paix dans mon âme (cf. Lc 8,24). Je redoutais l'asile même de ma cellule ; il me semblait complice de mes pensées. Irrité contre moi-même, seul je m'enfonçais dans le désert. Si je découvrais quelque vallée plus profonde, quelque cime plus escarpée, j'en faisais un lieu de prière et une sorte de prison pour ma chair misérable. Souvent, le Seigneur m'en est témoin, après des larmes abondantes, après des regards longtemps élancés vers le ciel, je me voyais transporté parmi les chœurs des anges, et triomphant d'allégresse, je chantais : "Nous courrons après vous, attirés par l'odeur de vos parfums". »

    (*) : C’est-à-dire : de n’être plus aussi fervent qu’au début de ma profession monacale.

    St Jérôme (fêté ce jour), Lettre XVIII à Eustochium, in "Lettres de St Jérôme" traduites par J.-F. Grégoire et F.-B. Collombet (Tome I), Librairie catholique de Perisse Frères, Lyon - Paris, 1837.
    Source : Bibliothèque Saint Libère.

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    Saint Jérôme au désert - Tableau de Lazzaro Bastiani (v.1430-1512)

  • Méditation avec le Cardinal François-Xavier Nguyen Van Thuan

    « Quel que soit le soin que peuvent lui assurer d'autres personnes, le petit enfant ne les suivra pas si sa mère ne l'accompagne pas. Mais, avec sa mère, il traversera des forêts, franchira des rivières, affrontera la faim et les fièvres.

    Au cours des guerres, nombreuses furent les mères que l'on trouva mortes avec leur enfant, encore vivant, couché auprès d'elles. Sur le chemin de l'espérance, tu tiens, dans ta main, celle de la Vierge Marie. Avec elle, tu n'es plus seul. Elle est "la source de vie, notre joie et notre espérance".

    Le petit enfant n'a besoin que de sa mère. Il éclate en sanglots dès qu'elle s'absente ; il ne peut s'en passer. Donnez-lui un bonbon, un beau jouet, de l'or ou une pierre précieuse, il rejettera tout. Il ne recouvrera sa joie qu'en revoyant sa mère. Redeviens un petit enfant pour comprendre et aimer la Vierge Marie. »

    Cardinal François-Xavier Nguyen Van Thuan (1928-2002), Sur le chemin de l'espérance (Ch. 35 - Notre Mère Marie), Le Sarment, Fayard, 1991.

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  • Angélus de ce dimanche 15 septembre 2013

    A midi, le Pape François a récité l'Angélus avec les fidèles rassemblés sur une place St Pierre remplie de parapluies en raison de l'averse qui s'est abattue sur Rome. Le Pape a commenté l’Évangile du jour qui contient trois paraboles sur la miséricorde, celle de la brebis égarée, celle de la pièce perdue et celle du fils prodigue :

    "Ces trois paraboles parlent de la joie de Dieu. Dieu est content parce que la joie de Dieu est de pardonner... C'est la joie d'un pasteur qui retrouve sa brebis, celle d'une femme qui retrouve sa pièce, celle d'un père qui voit revenir chez lui son fils perdu... Ici, on trouve tout l’Évangile, tout le christianisme ! Mais il ne s'agit pas d'un sentiment, ce n'est pas du 'bonisme' ! Au contraire, la miséricorde est la vraie force qui peut sauver l'homme et le monde du cancer qu'est le péché, le mal moral, le mal spirituel. Seul l'amour remplit les vides, les gouffres négatifs que le mal ouvre dans le cœur et dans l'histoire. Seul l'amour peut faire cela, et cela est la joie de Dieu !... Chacun de nous est cette brebis perdue, cette pièce perdue ; chacun de nous est ce fils qui a gaspillé sa liberté en suivant de fausses idoles, des mirages de bonheur, et a tout perdu. Mais Dieu ne nous oublie pas, le Père ne nous abandonne jamais. C'est un père patient, il nous attend toujours ! Il respecte notre liberté mais reste toujours fidèle. Et quand nous revenons à lui, il nous accueille comme des fils, dans sa maison, parce qu'il ne cesse jamais, pas même un instant, de nous attendre, avec amour. Et son Cœur est en fête pour chaque fils qui revient. Il est en fête car il est joie. Dieu a cette joie quand l'un de nous, pécheur, va à lui et lui demande son pardon".

    "Le danger est de présumer que nous sommes justes, et nous jugeons les autres. Nous jugeons aussi Dieu, parce que nous pensons qu'il devrait punir les pécheurs, les condamner à mort, au lieu de leur pardonner. C'est là que nous risquons de rester en dehors de la maison du Père ! Comme ce frère aîné de la parabole qui, au lieu de se réjouir du retour de son frère, se fâche contre son père qui l'accueille et lui fait fête. Si dans notre cœur, il n'y a pas la miséricorde, la joie du pardon, nous ne sommes pas en communion avec Dieu, même si nous observons tous ses préceptes, parce que c'est l'amour qui sauve, et non la seule pratique des préceptes. C'est l'amour pour Dieu et pour le prochain qui permet d'accomplir tous les commandements".

    "Si nous vivons selon l’œil pour œil, dent pour dent, nous ne sortons jamais de la spirale du mal. Le Malin est fourbe, et nous fait croire qu'avec notre justice humaine nous pouvons nous sauver et sauver le monde. En réalité, seule la justice de Dieu peut nous sauver ! Et la justice de Dieu s'est révélée dans la croix : la croix est le jugement de Dieu sur nous tous et sur ce monde. Mais comment nous juge Dieu ? En donnant sa vie pour nous ! Voilà l'acte suprême de justice qui a vaincu une fois pour toute le prince de ce monde ; et cet acte suprême de justice est aussi justement l'acte suprême de miséricorde. Jésus nous appelle tous à suivre cette route : Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux". Le Saint-Père a conclu en demandant à tous de penser à "une personne avec laquelle nous ne sommes pas bien, avec qui nous sommes fâchés, que nous n'aimons pas, Pensons à cette personne et, en silence, prions pour elle. Et soyons miséricordieux avec elle".

    Source : Vatican Information Service (Publié VIS Archive 01 - 16.9.13).

  • Méditation : Vie trinitaire...

    « Les Personnes divines auraient pu distribuer à l'homme des aumônes de leur Amour bienheureux, des miettes de leur table, c'eut été déjà des dons inappréciables. Elles ont pourtant voulu mieux : que chaque homme, que l'humanité entière soit l'invité de leur Amour, de leur bonheur ; non pas à la porte de la Famille trinitaire, au-dehors, mais au sein de la Vie trinitaire. Notre place, notre patrie à nous baptisés, c'est la communauté trinitaire. Là, dans le Fils et avec le Fils, dans l’Église et avec l’Église, nous sommes tout ouverts, tout accueillant à l'effusion d'Amour du Père qui fait de chacun de nous, au sens fort du terme, son enfant. Dans le Fils, avec le Fils, nous sommes tout bondissant vers le Père dans un immense élan de gratitude joyeuse. Avec le Père et le Fils, nous exultons de joie en leur commun Amour, l'Esprit Saint. Tel est le mystère profond de la vie et de la prière de l’Église, et donc de la vie et de la prière chrétienne individuelle. De même qu'un enfant est non seulement l'invité de l'amour de son père et de sa mère, mais aussi le témoin de leur amour, de même nous, les invités de l'Amour du Père et du Fils, nous devons être parmi les hommes les témoins de leur Amour mutuel. Ou plus exactement, il nous faut être tout transparent à l'Esprit Saint qui nous habite pour que les hommes, nos frères, comprennent cette bonne nouvelle qu'ils sont eux aussi les invités de cet Amour du Père et du Fils, et de leur éternelle Joie. »

    Père Henri Caffarel (1903-1996), Bienheureuse Trinité, Editions du Feu Nouveau.

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  • Méditation - Poème : "Adest dies laetitiae"

    « Voici venu le jour de joie
    Eblouissant de sa lumière ;
    Voici que la Reine des vierges
    Gravit le céleste chemin.
    Voici qu'autour d'elle s'avance
    La claire légion des anges
    Et derrière elle, célébrée,
    La cohorte des vierges saintes.
    A tous il est bon de croire ;
    Brillant du céleste diadème,
    Voici qu'Il court à sa rencontre ;
    Le Christ, le Christ naquit d'elle !
    Bien plus que la gloire des anges,
    Ce rameau pur et sans péché,
    Au trône du Père avec Lui,
    En fameux gage il le rapporte.
    La cité du règne céleste
    Et sa plénière dignité
    Honorent du Prince la Mère,
    De leurs vœux et de leur honneur.
    Avec eux chantons l'allégresse
    Dans le triomphe de ce jour,
    Et dans sa joie, célébrons Dieu,
    Louons Dieu et Le supplions.
    Accomplissons de cette fête
    Les éclatants enseignements ;
    Va, mon âme, implore et supplie,
    Vous, mes lèvres, chantons la joie. »

    Saint Odilon de Mercoeur (961-1049), cinquième abbé de Cluny.

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  • Méditation : pour se préparer à la fête de l'Assomption...

    « ... Qu’apporte à notre chemin, à notre vie, l’Assomption de Marie ? La première réponse est la suivante : dans l’Assomption, nous voyons qu’en Dieu, il y a de la place pour l’homme, Dieu lui-même est la maison aux nombreuses demeures dont parle Jésus (cf. Jn 14, 2) ; Dieu est la maison de l’homme, en Dieu il y a l’espace de Dieu. Et Marie, en s’unissant, en étant unie à Dieu, ne s’éloigne pas de nous, elle ne se rend pas sur une galaxie inconnue ; au contraire celui qui va à Dieu se rapproche, parce que Dieu est proche de nous tous, et Marie, unie à Dieu, participe de la présence de Dieu, elle est très proche de nous, de chacun de nous. Saint Grégoire le Grand a eu, au sujet de saint Benoît, une belle expression que nous pouvons appliquer encore aussi à Marie : saint Grégoire le Grand dit que le cœur de saint Benoît est devenu si grand que toute la création peut entrer dans ce cœur. Cela est encore plus vrai pour Marie : Marie, entièrement unie à Dieu, a un Cœur si grand que toute la création peut entrer dans ce Cœur, et les ex-voto partout sur la terre le démontrent. Marie est proche, elle peut écouter, elle peut aider, elle est proche de chacun de nous. En Dieu, il y a de la place pour l’homme, et Dieu est proche et Marie, unie à Dieu, est très proche, elle a un Cœur aussi large que celui de Dieu.

    Mais il y a encore un autre aspect : non seulement il y a en Dieu, de la place pour l’homme, mais dans l’homme, il y a de la place pour Dieu. Nous voyons cela aussi en Marie, l’Arche Sainte qui porte la présence de Dieu. En nous, il y a de la place pour Dieu, et cette présence de Dieu en nous, si importante pour illuminer le monde dans sa tristesse et dans ses problèmes, se réalise dans la foi : dans la foi, nous ouvrons les portes de notre être pour que Dieu puisse entrer en nous, pour que Dieu puisse être la force qui donne vie et ouvre un chemin à notre être. En nous, il y a de l’espace, ouvrons-nous, comme Marie s’est ouverte, en disant : « Que ta volonté soit faite, je suis la servante du Seigneur ». En nous ouvrant à Dieu, nous ne perdons rien. Au contraire, notre vie s’enrichit et grandit.

    Ainsi, foi et espérance se rejoignent. On parle beaucoup aujourd’hui d’un monde meilleur qui devrait venir : ce serait cela notre espérance. Si et quand ce monde meilleur doit venir, nous ne le savons pas, je ne le sais pas. Mais il est sûr qu’un monde qui s’éloigne de Dieu ne devient pas meilleur, mais pire. Seule la présence de Dieu peut garantir également un monde bon. Mais ne parlons pas de cela. Il y a une chose, une espérance qui est certaine : Dieu nous attend, nous n’avançons pas dans le vide, nous sommes attendus. Dieu nous attend et, en allant dans l’autre monde, nous trouvons la bonté de la Mère, nous retrouvons nos proches, nous trouvons l’Amour éternel. Dieu nous attend : voilà la grande joie et la grande espérance qui naît précisément de cette fête. Marie nous rend visite, elle est la joie de notre vie et la joie est espérance.

    Que dire de plus ? Un cœur grand, la présence de Dieu dans le monde, une place pour Dieu en nous et une place en Dieu pour nous, l’espérance, être attendus : voilà la symphonie de cette fête, l’indication que nous donne la méditation de cette solennité. Marie est l’aurore et la splendeur de l’Eglise triomphante ; elle est consolation et espérance pour le peuple encore en chemin... Confions-nous à son intercession maternelle, afin qu’elle nous obtienne du Seigneur la grâce de renforcer notre foi dans la vie éternelle ; qu’elle nous aide à bien vivre dans l’espérance le temps que Dieu nous donne. Une espérance chrétienne, qui n’est pas seulement une nostalgie du Ciel, mais un désir de Dieu vivant et actif, ici, dans le monde, un désir de Dieu qui fait de nous des pèlerins infatigables et qui alimente en nous le courage et la force de la foi, qui sont dans le même temps le courage et la force de l’amour. Amen. »

    Benoît XVI, Homélie pour l'Assomption 2012, conclusion.
    (Texte intégral)

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    Icône de la Dormition, Sainte Sophie de Novgorod

  • Méditation : la maternité spirituelle

    « Eveiller des enfants pour le Ciel, c'est la maternité authentique - une maternité spirituelle qui est indépendante de la maternité physique - la maternité la plus belle, la plus sublime et la plus riche de joies, même si c'est au prix de soucis, de sacrifices et de peines non moindres que la maternité physique. Faire jaillir l'étincelle divine dans un coeur d'enfant, voir croître et s'épanouir en lui la vie divine ou encore contribuer à allumer une nouvelle fois la vie de la grâce dans l'âme éteinte, dégénérée ou enténébrée d'un adulte auquel Dieu est devenu étranger, et pouvoir assister ensuite au merveilleux processus de transformation qui s'opère dans cette âme et y coopérer en tant qu'instrument, c'est témoigner et éduquer pour le Ciel, et cela procure une joie qui n'est pas de ce monde. Une telle maternité spirituelle peut combler la vie d'un être humain. »

    Edith Stein, La Femme, Ed. du Carmel, Paris, 2008.

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  • Méditation : péché, repentir, purification et joie du pardon

    « Dans le secret, dans le silence, lorsque se taisent les bruits du monde, une petite voix se fait entendre. Celle qui veut en nous la vérité. Elle devient à certains moments de nos vies extrêmement ténue, cette voix. Presque inaudible. Car le mal commis, car le sang versé aux idoles égare l’homme. S’use en lui le sens du bien. Alors tout se confond, le bien, le mal, tout s’efface dans la tristesse. Mais il veille en nous, l’Esprit Saint, le gardien de nos âmes. Feu sous la cendre, il attend le réveil. Au choc d’une rencontre, d’un mot, d’une chute, au craquement des « os broyés », peut-être, la petite voix se fait plus forte, elle crie ! Tu as perdu le sens du bien ! Et la tristesse peu à peu s’évanouit.
    Elle cède la place à la douleur d’avoir péché, douleur des cœurs brisés à la vision d’un désastre, lorsque la brume des illusions se dissipe. Oui, j’ai failli à aimer comme Lui aime. « Contre toi et toi seul, j’ai péché. » Et le voilà de retour en mon âme, Celui qui l’a créée et vient la recréer. Il souffle à nouveau l’Esprit de vérité. Il console. Il lave. Il purifie. Il rend plus blanc que neige. Et il fait entendre une douce musique. Elle se reconnaît entre mille. C’est la joie ! Et la joie ne trompe pas. Déjà le salut est à l’œuvre. Un esprit généreux travaille au cœur. Il rend zélé pour aimer comme Il aime.

    Esprit de sainteté, viens laver nos cœurs de ce qui les souille ! Redresse ce qui est faussé ! Donne-nous la joie éternelle ! »

    Frère Pascal Marin, Psaume dans la ville.

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  • Méditation : solitude et tendresse...

    « La solitude est comme la peste, elle afflige particulièrement les grandes villes modernes. J'entends par solitude la situation de tous ceux qui sont privés de cette aide et de cette compagnie qui leur serait due, qui leur serait nécessaire, et qui à cause de cela, sont en état de prostration, de souffrance, souvent proches du découragement, et quelquefois du désespoir : personnes âgées, malades, personnes avec un handicap, prisonniers, étrangers.
    La tendresse, c'est l'amour respectueux, délicat, concret, attentif, joyeux. La tendresse, c'est l'amour sensible, ouvert à la réciprocité ; non pas avide, cupide, prétentieux et possessif, mais fort de sa faiblesse, efficace, victorieux, désarmé et désarmant. La tendresse comporte le courage de faire de petits pas et de petits gestes d'affection : un sourire, une parole, un merci, un souhait en temps voulu, une simple phrase "voici ton journal", "je t'ai fait un café".
    En Jésus, Dieu semble se perdre dans le détail, en se cachant volontiers dans les choses minuscules et très simples : celles de prêter attention à une action de peu d'importance, comme celle de donner un verre d'eau à quelqu'un. Jésus est attentif aux choses pour lesquelles nous n'avons pas de temps, nous n'avons pas de calme, nous n'avons pas d'attention.
    Dans notre manière de prier, dans notre manière de rencontrer une personne, de lui serrer la main, dans notre manière de nous intéresser à l'autre, de faire attention à lui, de ne pas passer distraitement à côté des nécessités d'un frère, nous manifestons la gloire de Dieu. »

    Cardinal Carlo Maria Martini, S'ouvrir à la Parole du Christ, Paris, Le Cerf, coll. Foi Vivante, 1995.

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