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pauvreté - Page 2

  • Méditation : Inquiétude de l'amour-propre et paix en Dieu

    « O qu'on est heureux quand on n'écoute que Dieu, et qu'on n'écoute point les réflexions de l'amour-propre ! D'un côté sont la simplicité, la paix, l'abandon, et le commencement du paradis sur terre. De l'autre sont les incertitudes, les délicatesses, les dépits, le trouble, et la résistance à Dieu, qui divise le cœur. Heureux qui n'a plus d'autre délicatesse ni d'autre jalousie que celle que la grâce nous inspire pour Dieu contre nous-mêmes ! »

    « On n'est en paix que quand on est bien loin de soi ; c'est l'amour-propre qui trouble, c'est l'amour de Dieu qui calme. L'amour-propre est un amour jaloux, délicat, ombrageux, plein d'épines, douloureux, dépité. Il veut tout sans mesure, et sent que tout lui échappe, parce qu'il n'ignore pas sa faiblesse. Au contraire l'amour de Dieu est simple, paisible, pauvre et content de sa pauvreté, aimant l'oubli, abandonné en tout, endurci à la fatigue des croix, et ne s'écoutant jamais dans ses peines. Heureux qui trouve tout dans ce trésor du dépouillement ! Jésus-Christ, dit l'Apôtre (1), nous a enrichis de sa pauvreté, et nous nous appauvrissons par nos propres richesses. N'ayez rien, et vous aurez tout. Ne craignez point de perdre les appuis et les consolations, vous trouverez un gain infini dans la perte. »

    1. II Co VIII, 9.

    Fénelon (1651-1715), extraits des Lettres 462 et 465 à la comtesse de Montberon, in "Œuvres de Fénelon" Tome Deuxième, Lettres spirituelles, Paris, Lefèvre - Pourrat Frères, 1858.

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  • Méditation : Simplicité dans l'oraison

    « L'oraison, voilà une grande affaire, mais une affaire bien simple. Il faut donc que vous rendiez votre méthode d'oraison la plus simple possible. Pas de considérations nombreuses, et ne cherchez pas à suivre point pour point la méthode de Saint-Sulpice.
    Votre oraison doit consister dans un repos simple, humble, paisible et plein de confiance devant N.S. : voilà tout.
    Il ne faut pas viser à faire beaucoup de réflexions, ni à produire beaucoup d'affections. Qu'il n'y ait rien de forcé de votre part ; soyez devant Jésus comme un pauvre enfant devant son père ; rien de plus. Ne cherchez pas avec effort à lui exprimer les sentiments que vous avez ou que vous voudriez avoir, et à lui exposer vos besoins ; mais que votre âme se tienne à ses pieds dans toute sa pauvreté et sa bassesse. Regardez-vous devant N.S. comme une chose à lui appartenant, qui est là en sa présence pour qu'il en fasse et en dispose selon l'étendue de sa divine volonté ; et cela sans effort ni beaucoup de paroles intérieures ou extérieures.
    Ce doit être là une habitude de l'âme qui se considérant sans cesse devant Jésus comme lui appartenant, se tient, pendant le temps de l'oraison, extérieurement séparée de tout, pour manifester au divin Seigneur ce qu'elle lui est. Cette manifestation doit se faire sans travail et sans recherche : contentez-vous d'un regard de l'âme vers lui, de temps à autre, dans cette intention.
    Quand les distractions viennent, tâchez, mon bien cher, de les écarter doucement et sans inquiétude, par un paisible regard vers Celui à qui vous appartenez. Dans le cours de la journée, faites la même chose : de temps en temps un regard, sans effort, mais le désir calme d'être à Jésus et dans le sentiment de votre misère et pauvreté. Ne cherchez rien de plus.
    Même abandon quant à la direction que vous recevez du divin Maitre ; qu'il vous dirige à sa façon. Ne lui prescrivez rien, n'ayez pas d'idée préconçue de ce que doit être sa direction ; contentez-vous d'être devant lui, tout entier à sa disposition et vous livrant à sa conduite comme un aveugle, sans trop chercher à lui parler ni à l'entendre parler. Restez ainsi disposé, en mettant sans cesse toute votre confiance en lui seul. »

    Vénérable François Libermann (1802-1852), Lettre à un prêtre, 29 Janvier 1845, in "Lettres spirituelles du vénérable Libermann" Tome III, Paris, Librairie Poussielgue Frères, s.d.
    Le Vénérable Père Libermann sur le web : Textes, Etudes et Articles.

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  • Méditation : Providence de Dieu envers ses créatures

    « 1.- Maintenant, ma fille bien-aimée, dilate ton cœur, et que ton intelligence contemple à la lumière de la foi avec quel amour ma providence a créé l’homme, et tout préparé pour qu’il puisse jouir de mon suprême et éternel bonheur. J’ai tout disposé pour l’âme et le corps, pour les imparfaits et pour les parfaits, pour les bons et pour les mauvais, temporellement et spirituellement, au ciel et sur la terre, dans la vie qui passe et dans celle qui ne finit jamais.

    2.- Dans cette vie, où vous êtes étrangers et voyageurs, je vous ai liés par les liens de la charité ; car l’homme est forcément uni à son semblable. S’il veut s’en séparer en manquant de charité, il lui est uni cependant par la nécessité. Afin de vous unir par les œuvres en même temps que par l’amour, je n’ai pas donné à chacun ce qui est nécessaire à son existence, de sorte que celui qui par le péché perd l’amour du prochain ne peut s’en séparer à cause de ses besoins. Vous êtes ainsi tous liés ensemble par des actes de charité. L’ouvrier a nécessairement recours au laboureur, et le laboureur à l’ouvrier ; l’un se sert de l’autre parce qu’il ne sait pas faire ce qu’il fait. De même le religieux a besoin du séculier, et le séculier du religieux ; l’un ne peut agir sans l’autre : il en est ainsi du reste des hommes.

    3.- Ne pouvais-je pas donner à chacun tout ce qui lui est nécessaire ? Si, assurément ; mais j’ai voulu que chacun fût soumis à son semblable, afin que tous soient contraints de s’unir par un échange de bons services. J’ai montré la grandeur et la bonté de ma providence en eux, et ils préfèrent marcher dans les ténèbres de leur propre faiblesse.

    4.- Les membres de votre corps doivent vous faire rougir, car ils ont en eux l’union, qui vous manque. Quand la tête a besoin de la main, la main ne lui aide-t-elle pas sur-le-champ ? Si le doigt, qui est si peu considérable dans le corps, vient à souffrir quelque chose, la tête lui refuse-t-elle son secours parce qu’elle est plus noble et plus considérable ? Elle ne néglige au contraire aucun moyen de lui être utile par la vue, par l’ouïe ou par la parole. Tous les membres agissent ainsi entre eux.

    5.- Pourquoi l’homme orgueilleux ne fait-il pas de même lorsqu’il voit le pauvre, malade et manquant de tout ? N’est-ce pas un de ses membres ? Et cependant, loin de l’assister de ses biens, il ne lui fait même pas l’aumône d’une bonne parole ; il n’a pour lui que des reproches, et il s’en détourne comme d’une chose qui lui donne des nausées. Il regorge de richesses, et il laisse son semblable mourir de faim, Il ne songe pas que sa cruauté déplorable est d’une odeur infecte en ma présence, et que le fond des enfers est destiné à sa corruption.

    6.- Ma providence secourt le pauvre d’une autre manière, et c’est au poids de sa pauvreté que lui seront comptées d’abondantes richesses. Le riche au contraire sera durement repris par ma Vérité, ainsi qu’il est annoncé dans l’Évangile ; et s’il ne se corrige, il entendra cette parole : "J’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’ai eu soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ; j’étais nu, et vous ne m’avez pas vêtu ; j’étais infirme et en prison, et vous ne m’avez pas visité." (Mt XXV, 42).

    7.- Dans ce moment terrible, il lui sera inutile de dire : Je ne vous ai jamais vu, et si je vous avais vu, j’aurais tout fait pour vous bien volontiers. Ce misérable ne savait-il pas que mon Fils a déclaré dans l’Évangile que ce qui serait fait par amour pour Dieu au plus petit des hommes, il le tiendrait fait à lui-même ? Ce sera donc justement qu’il partagera avec les démons un supplice éternel ; car j’ai tout disposé sur la terre pour qu’il évite ce malheur. »

    Ste Catherine de Sienne, Dialogue, Traité de la Providence (CXLVIII), Trad. Abbé J. Hurtaud, o.p., Imprimatur 31 mai 1913 H. Odelin, vicaire général.

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  • Méditation : la tristesse et la joie

    « Il faut vivre joyeux et allègres, ainsi qu'il convient aux vrais amoureux de Dieu ; d'autant que Dieu est à soi-même tout son bien, et que tout notre plaisir en notre infini amour est que Dieu soit ce qu'il est, qu'il ait ce qu'il a, et qu'il se bienheure présentement soi-même en sa présente éternité. Voilà ce qui réjouit les anges en la gloire, et les hommes en la voie, en quelque condition prospère ou adverse qui se puisse rencontrer ; et c'est ainsi que le bonheur de Dieu et sa félicité dans les hommes est leur félicité en la terre, et que le Paradis de Dieu est en eux.

    A la vérité, comme l'homme est composé de deux parties, il se peut faire qu'il puisse pleurer, en demeurant joyeux au dedans ; mais encore ne voit-on point de sujet raisonnable de pleurer. Car quiconque désire d'un ardent amour la honte, la calomnie, l'opprobre et tout mépris, les maladies, les pertes, la pauvreté, la croix et la douleur, quand il y est, il a ce qu'il désire, et partant il a sujet de se réjouir, si en effet les maux et les oppressions ne le violentent pas trop en la partie sensitive, car alors il peut pleurer et en même temps se réjouir en son homme supérieur, qui est la raison. Cela même est souvent inconnu, d'autant que tout l'homme semble être occupé de la tristesse, et quand cela serait qu'on ne fût aucunement joyeux au-dedans, à cause de la cuisante et profonde tribulation, n'importe, la profonde résignation d'esprit et du sens tiennent en quelque façon le lieu de la joie. Pleurer donc de tristesse et de douleur, et se réjouir en même temps, c'est chose rare ; mais cela peut être, et on l'a vu et le voit-on encore aux excellents saints, qui vivent d'une terrible manière dans les présents et éternels exercices de Notre-Seigneur. Enfin la résignation contente et joyeuse est ici nécessaire et suffisante. C'est ainsi que la vie des hommes est laborieuse et joyeuse, heureuse et malheureuse, et il est vrai que tant moins l'homme aura de soulagement, de joie et de repos, tant plus excellemment et de plus près il imitera Notre Sauveur. »

    Jean de Saint-Samson (1571-1636), in R.P. Jérôme de la Mère de Dieu O.C.D., "La doctrine du vénérable Frère Jean de Saint-Samson", Édition de la Vie Spirituelle, Saint-Maximin, 1925.

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    « Au fidèle serviteur, persuadé de son inutilité, le Seigneur déclare tout à coup : « Bon serviteur, entre dans la Joie de ton Maître. » Il nous fait entrer dans sa Joie, parce que nous ne pouvons pas la faire entrer en nous : elle est trop vaste pour se limiter aux dimensions d'un cœur humain, pour se laisser mesurer à l'aune du sentir ou du comprendre. Ici encore, la joie émane d'une possession, mais on ne possède pas, on est possédé. On entre dans la Joie de Dieu jusqu'à y perdre pied, comme dans l'océan même de la Divinité. On est emporté par elle comme par une lame d'éternité. »

    Fr. François de Sainte-Marie, o. c. d., De la Joie chrétienne, in "Ma joie terrestre où donc es-tu ?", Études Carmélitaines, DDB, 1947.
  • Méditation de la 2ème semaine de l'Avent : l'humilité (6ème jour)

    « L'humilité est la capacité d'accepter paisiblement sa pauvreté radicale, parce qu'on met toute sa confiance en Dieu. L'humble accepte joyeusement de n'être rien, parce que Dieu est tout pour lui. Il ne considère pas sa misère comme un drame, mais comme une chance, car elle donne la possibilité à Dieu de manifester combien il est miséricordieux.
    Sans humilité, on ne peut pas persévérer dans l'oraison. En effet, l'oraison est inévitablement une expérience de pauvreté, de dépouillement, de nudité. Dans les autres activités spirituelles ou les autres formes de prière, on a toujours quelque chose sur quoi s'appuyer : un certain savoir-faire que l'on met en œuvre, le sentiment de faire quelque chose d'utile, etc. Ou bien encore, dans la prière communautaire, on peut s'appuyer sur les autres. Dans la solitude et le silence face à Dieu, on se retrouve au contraire seul et sans appui face à soi-même et à sa pauvreté. Or nous avons un mal terrible à nous accepter pauvres ; c'est pourquoi l'homme a une telle tendance à fuir le silence. Dans l'oraison il est impossible d'échapper à cette expérience de pauvreté. C'est vrai qu'on y fera souvent l'expérience de la douceur et de la tendresse de Dieu, mais bien fréquemment ce sera notre misère qui va se révéler : notre incapacité à prier, nos distractions, les blessures de notre mémoire et de notre imagination, le souvenir de nos fautes et de nos échecs, nos inquiétudes à l'égard de l'avenir, etc. L'homme trouvera donc mille prétextes pour fuir cette inaction devant Dieu qui lui dévoile son néant radical, parce qu'en fin de compte il refuse de consentir à être pauvre et fragile.
    Mais c'est précisément cette acceptation confiante et joyeuse de notre faiblesse qui est la source de tous les biens spirituels : "Heureux ceux qui ont une âme de pauvres, car le Royaume des Cieux leur appartient" (Mt 5, 3). »

    P. Jacques Philippe, Du temps pour Dieu - Guide pour la Vie d'Oraison (I,6), Éditions des Béatitudes, 1992.

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    Source image (avec un très beau commentaire des Béatitudes)

  • Méditation : « Je suis Jésus que tu persécutes »

    « Les impies se croient héroïques de résister à un Tout-Puissant. Ces superbes, dont quelques-uns ne sont pas inaccessibles à la pitié, pleureraient de honte, s'ils pouvaient voir la faiblesse, la misère, la désolation infinies de Celui qu'ils bravent et qu'ils outragent. Car Dieu, qui s'est fait pauvre en se faisant homme, est, en un sens, toujours crucifié, toujours abandonné, toujours expirant dans les tortures. Mais que penser de ceux-ci qui ne connurent jamais la pitié, qui sont incapables de verser des larmes, et qui ne se croient pas impies ? Et que penser enfin de ceux-là qui rêvent la vie éternelle, en bras de chemise et en pantoufles, au coin du feu de l'enfer ?

    ... Je vous ai parlé des locataires pauvres dont cette paroisse est suffisamment approvisionnée, et qui tremblent déjà, en songeant à ce que vous pouvez leur faire souffrir demain. Ai-je parlé à une seule âme vraiment chrétienne ? Je n’ose le croire.

    Ah ! que ne puis-je crier en vous ! sonner l’alarme au fond de vos cœurs charnels ! vous donner l’inquiétude salutaire, la sainte peur de trouver votre Rédempteur parmi vos victimes ? Ego sum Jesus quem tu persequeris ! est-il dit à saint Paul fumant de rage contre les chrétiens, qui étaient alors comme les locataires de la Cité du Démon et qu’on pourchassait de gîte en gîte, l’épée ou la torche dans les reins, jusqu’à ce qu’ils payassent de tout leur sang le logis permanent des cieux. Je suis Jésus que tu persécutes !

    On sait que ce Maître s’est souvent caché au milieu des indigents, et quand nous faisons souffrir un homme plein de misère, nous ne savons pas quel est celui des membres du Sauveur que nous déchirons. Nous avons appris du même saint Paul qu’il y a toujours quelque chose qui manque aux souffrances de Jésus-Christ, et que ce quelque chose doit être accompli dans les membres vivants de son Corps.

    — Quelle heure est-il ? Père, disent à Dieu ses pauvres enfants, tout le long des siècles, car nous veillons « sans savoir le jour ni l’heure ». Quand finira-t-on de souffrir ? Quelle heure est-il à l’horloge de votre interminable Passion ? Quelle heure est-il ?... »

    Léon Bloy (1846-1917), La femme pauvre (ch. XXIII), Paris, Bernouard, 1897 - Paris, Georges Crès et Cie, " Les maîtres du livre", 1924.

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  • Méditation : de la douceur dans la mission

    « J'ai compris qu'après l’humilité et la pauvreté, la vertu la plus nécessaire au missionnaire apostolique est la douceur. C’est pourquoi Jésus disait à ses disciples : « Apprenez de moi car je suis doux et humble de cœur et vous trouverez le repos. » Si l’humilité est la racine de l’arbre de la sainteté, la douceur en est le fruit. Avec l'humilité, dit saint Bernard, on plaît à Dieu ; et avec la douceur, on se fait aimer de son prochain. Dans le sermon sur la montagne, Jésus dit : « Bienheureux les doux, ils posséderont la terre. » Non seulement la terre promise, la terre des vivants qui est le ciel, mais aussi les cœurs des hommes qui vivent sur la terre.

    Nulle vertu ne les attire comme la douceur. Un étang rempli de poissons nous donne une idée de cette puissance pacifique de la douceur. Jetez des miettes de pain dans l’eau, et les poissons accourent de tous côtés et s'approchent jusqu'à vos pieds. Au lieu du pain, jetez une pierre, et ils fuiront aussitôt pour aller se cacher. Les hommes agissent de la même manière. Si, au cours de la mission, on les traite avec bonté et douceur, ils viennent nombreux pour écouter les sermons et se confesser ; si l’on se montre dur, ils se rebiffent et restent chez eux en murmurant contre le ministre de Dieu.

    La douceur est un signe de vocation au ministère apostolique. Quand Dieu choisit Moïse comme guide de son peuple, il lui a accordé le don de la douceur. Jésus était la douceur même, l'agneau de Dieu : « ll sera si doux » avaient annoncé les prophètes, « qu'il n'achèvera pas de briser le roseau froissé ni éteindra ta mèche qui fume encore ; » « il sera persécuté, calomnié, abreuvé d'opprobres et il se taira comme s'il n'avait pas de langue. » Quelle patience ! Quelle douceur ! ll a travaillé et souffert en silence, il est mort sur une croix sans proférer une seule plainte ; tout cela pour nous sauver et pour nous enseigner à sauver les âmes qu'il nous a confiées.

    Les apôtres, formés à l'école de Jésus, leur divin maître, étaient doux ; ils pratiquaient la douceur et l’enseignaient à tous, particulièrement aux prêtres. Saint Jacques disait : « Qui est sage et expérimenté parmi vous ? Qu'il montre, par une bonne conduite, que ses œuvres sont accomplies dans la douceur propre à la vraie sagesse. Mais si vous avez un zèle amer et un esprit de discorde dans votre cœur, évitez la complaisance en vous-mêmes et ne mentez point contre la vérité. Une telle sagesse n'est pas celle qui est venue d'en haut ; elle est terrestre, animale et diabolique » (Jc 3,13-15).

    La première fois que j'ai lu ce texte, j'ai été épouvanté en voyant que saint Jacques qualifiait de démoniaque la science sans douceur. Eh bien, oui, elle est démoniaque ! Je sais par expérience que le zèle amer est une arme dont le diable tire un grand parti ; et le prêtre qui travaille sans douceur sert le diable et non Jésus-Christ. Sil prêche, il fait fuir les auditeurs ; s'il confesse, les pénitents s'éloignent de lui ou, s'ils se confessent, ils le font mal parce qu'ils s'étourdissent et la peur leur fait dissimuler leurs péchés. Que de confessions générales n'ai-je pas entendues, dans lesquelles les pénitents m'avouaient avoir caché des péchés parce que les confesseurs, à qui ils avaient eu affaire, les avaient repris avec rudesse.

    Seigneur, accordez-moi un zèle discret et prudent afin qu'en tous mes travaux apostoliques j'agisse avec force et douceur. Avec force certainement, mais aussi avec douceur et mansuétude. Oui, donnez-moi cette prudence qui naît dans l’homme avec la raison naturelle, que l’instruction fait grandir, que l'âge fortifie, qui est éclairée par la compagnie des hommes sages et qui arrive au sommet avec l’expérience des événements. »

    St Antoine-Marie Claret (fêté ce jour au calendrier traditionnel, dies natalis demain), extrait de son Autobiographie, ch. XXV (372 à 376 et 383).
    Source : Missionnaires Clarétains.
    Texte intégral à lire et/ou télécharger (format .doc) ici.

  • Méditation : « Comment saint François expliqua à Frère Léon une très belle vision que celui-ci avait eue »

    « Une fois que saint François était gravement malade et que frère Léon le servait, ledit frère Léon, qui était en prière près de saint François, fut ravi en extase et conduit en esprit auprès d'un très grand fleuve, large et impétueux. Et comme il restait regarder ceux qui passaient, il vit quelques frères portant une charge entrer dans ce fleuve, et ils étaient aussitôt entraînés par l'impétuosité du fleuve et engloutis ; quelques autres allaient jusqu'au tiers, d'autres jusqu'à la moitié du fleuve, d'autres jusqu'auprès de l'autre rive, mais tous, en raison de l'impétuosité du fleuve et des poids qu'ils portaient sur le dos, tombaient finalement et se noyaient. Ce que voyant, frère Léon avait pour eux une très grande pitié. Et, comme il était ainsi, voici venir tout à coup une grande multitude de frères, sans aucune charge, sans aucun poids, en qui resplendissait la sainte pauvreté ; ils entrèrent dans ce fleuve et ils passèrent de l'autre côté sans aucun danger. Et, ayant vu cela, frère Léon revint à lui.

    Alors saint François, sachant en esprit que frère Léon avait eu une vision, l'appela à lui et lui demanda ce qu'il avait vu ; et quand frère Léon lui eut rapporté toute la vision en détail, saint François dit : « Ce que tu as vu est vrai. Le grand fleuve, c'est ce monde ; les frères qui se noyaient dans le fleuve sont ceux qui ne suivent pas la profession évangélique, surtout en ce qui touche à la très haute pauvreté ; mais ceux qui passaient sans danger sont ces frères qui ne cherchent ni ne possèdent en ce monde aucune chose terrestre ou charnelle, mais qui, ayant seulement la nourriture et le vêtement indispensables, vivent contents en suivant le Christ nu sur la croix, et portent avec allégresse et volontiers le fardeau et le joug suave du Christ et de la très sainte obéissance, ce pourquoi ils passent facilement de la vie temporelle à la vie éternelle. »

    A la louange du Christ. Amen. »

    "Actus", LIX : "D'une vision de frère Léon et comment cette vision fut révélée à saint François", in "Textes franciscains, Les Fioretti de saint François" (ch. XXXVI), traduction, introduction et notes d'Alexandre Masseron, aux Éditions Franciscaines, Paris, s.d. (1946).

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    Saint François, gravure de Wenceslas Hollar (1607-1677)
    (Source et crédit photo)

  • Méditation : "Ecoute la voix de ma prière quand je crie vers Toi"

    « Lorsque Dieu découvre un véritable homme de désir, un être qui est tendu vers lui de toutes ses forces, il vient le saisir et l'enlève jusqu'à lui. Comme dit Simone Weil : "Il ne vient qu'à ceux qui lui demandent de venir ; il ne peut pas s'empêcher de descendre vers eux." (Attente de Dieu, p.76)

    La vie habituelle en présence de Dieu ne résulte donc pas de nos efforts ; en toute rigueur de termes, nous ne pouvons même pas faire un pas vers Dieu, mais si nous regardons assez longtemps vers lui, il descendra et nous enlèvera facilement : Vers Toi, Yahvé, j'appelle (Ps 27, 1), Daigne, Yahvé, me secourir ! Yahvé, vite à mon aide ! (Ps 69, 2). Il faut donc accepter d'être pauvre en renonçant à vouloir mettre la main sur Dieu pour le capter ou l'obliger à descendre. La première attitude qui nous met en présence de Dieu est le geste d'abaisser et d'ouvrir les mains en l'appelant avec des cris véhéments : Écoute la voix de ma prière quand je crie vers toi, quand j'élève les mains, Yahvé, vers ton saint des saints (Ps 27, 2).

    L'acte par lequel Dieu se rend présent à nous correspond à une disposition de notre part. C'est l'attitude de Moïse au buisson ardent. Il doit renoncer à faire "le tour de la question de Dieu" pour se déchausser devant lui, le regarder à distance, l'adorer et le désirer de toutes les forces de son cœur. Lorsqu'on demeure indéfiniment à regarder Dieu, à contempler sa face, en lui exprimant faim et soif de lui, sans vouloir l'annexer ou l'accaparer, il descend vers nous et imprègne notre cœur de Son Visage. Le moment décisif où commence la vie en présence de Dieu n'est pas dans le mouvement que je fais vers lui, mais dans le mouvement de recul où je m'efface devant lui. »

    Jean Lafrance (1931-1991), Préférer Dieu (ch. 15), Médiaspaul, Paris, 1996.

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  • Mois de mars : mois de Saint Joseph

    « Saint Joseph m’a toujours exaucée au-delà de mes prières et de mes espérances. »
    Ste Thérèse d’Avila (1515-1582)
     
    « Mon saint Patriarche, je vous prie, au nom des peines que vous avez éprouvées lorsque vous avez vu le Verbe divin né dans une étable, en un tel état de pauvreté, sans feu, sans linge, et lorsque vous l’avez entendu pleurer par la souffrance que lui causait la rigueur du froid ; je vous prie, dis-je, de m’obtenir une vraie douleur de mes péchés, par lesquels j’ai été cause des larmes qu’a versées Jésus.

    Mais, au nom de la consolation que vous avez éprouvée lorsque, pour la première fois vous avez vu Jésus enfant, né dans une crèche, si beau, si gracieux, en sorte que dès cet instant votre cœur commença de brûler d’un plus ardent amour envers cet aimable et bien-aimé enfant, obtenez-moi la grâce de l’aimer moi aussi d’un grand amour sur la terre, pour être admis un jour à le posséder dans le ciel.

    Et vous, ô Marie, mère de Dieu et ma mère, recommandez-moi à votre fils, et obtenez-moi le pardon de toutes les offenses que j’ai commises envers lui, et la grâce de ne plus l’offenser.

    Et vous, mon bien-aimé Jésus, pardonnez-moi pour l’amour de Marie et de Joseph, et accordez-moi la grâce de pouvoir un jour vous voir en paradis pour vous y louer, et aimer votre beauté divine, et votre bonté qui vous a fait enfant pour l’amour de moi. Je vous aime, beauté infinie.

    Je vous aime, mon Jésus. Je vous aime, mon Dieu, mon amour, mon tout. »

    St Alphonse-Marie de Liguori

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  • Méditation : au coeur de la solitude, la Sainte Présence...

    « La solitude peut devenir l'écrin de la présence, de l'amour qui est Quelqu'un. "La cellule c'est le Ciel" écrivait Guillaume de Saint-Thierry dans sa Lettre aux Frères du Mont-Dieu. Ce n'est pas quelqu'un qu'on attend pour dans vingt ans ou après la mort... Il est là. Et s'Il est là, vraiment là, alors s'ouvre sur l'infini la porte de la chambre cachée. Elle s'ouvre afin que s'établisse une connivence avec ce qu'il y a, dans l'humanité, de plus universel, de plus ignoré aussi. C'est comme une complicité qui peut-être ne se concrétisera jamais sur cette terre mais qui est totalement réelle avec les millions de personnes humaines blessées par une solitude insupportable parce que non choisie, imposée par la vie : celle de l'isolement, de l'exclusion, de l'humiliation et de toutes ces formes de pauvreté qui privent l'homme de sa dignité. Le désert invisible de la souffrance qui attend dans le silence de leur cri le visage du véritable Amour.

    Cette solitude, c'est Quelqu'un. C'est l'Unique reconnu comme unique. C'est Dieu seul choisi pour Lui seul. Dans l'absolu d'une démarche qui n'a rien à voir avec un idéal de perfection inatteignable pour nos pauvres humanités. Mais c'est Lui parce qu'Il est Lui, parce qu'Il est l'Amour et que cela suffit. Cette solitude nous pousse irrésistiblement à rencontrer le Christ de la manière la plus directe qui soit, sans faire de détour : être face à sa Personne qui est là, présente dans le secret, et qui dans la foi nous montre le Père trop bon, mais vraiment trop bon, qui n'est que Père et qui n'a que faire de sa paternité sinon la donner. »

    Sœur Isabelle, sœur de Bethléem, in Inès de Warren, Cet Amour que le monde oublie (ch.4), Salvator, Paris, 2013.

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    Moines, par François Marius Granet (1775-1849)
    Musée de l'Ermitage, Saint-Petersbourg

  • Message de Carême du Pape François

    “Il s’est fait pauvre pour nous enrichir de sa pauvreté” (cf. 2Co 8, 9)
     
    Présentation du Message de Carême

    Ce matin près la Salle de Presse, le Cardinal Robert Sarah, Préfet du Conseil pontifical Cor Unum, assisté de Mgr Giampietro Dal Toso, Secrétaire du dicastère, de Mgr Segundo Tejado Muñoz, Sous-Secrétaire, et de M. et Mme Dotta, missionnaires en Haïti, a présenté le premier message de Carême du Pape François. Le Cardinal a tout d'abord annoncé qu'il retournera en mars en Haïti pour inaugurer une école et assurer la population de la solidarité papale.

    Puis il a expliqué que ce message reprenait un thème cher au Saint-Père, mis en exergue de la vie chrétienne dès le début du pontificat, le lien étroit entre toute pauvreté humaine et celle du Christ :

    "La vision chrétienne de la pauvreté ne recouvre pas celle du sens commun, qui n'y voit généralement qu'une dimension sociologique, le manque de biens matériels. Le concept d’Église pauvre pour les pauvres est souvent évoqué pour contester l’Église, en lui opposant" ce caractère à celui "de prédication et de vérité, de prière et de défense de la doctrine et de la morale... La première référence du chrétien pour comprendre la pauvreté est de savoir qu'il s'est fait pauvre pour nous enrichir de sa pauvreté... Son choix des pauvres nous montre qu'il existe une dimension positive de la pauvreté, exprimée dans l’Évangile par la formule bienheureux les pauvres. C'est une dimension qui implique un dépouillement et une renonciation, possibles car la richesse véritable de Jésus est d'être le Fils. N'allons pas croire nous donner bonne conscience en déplorant le manque de biens matériels d'autrui ou en dénonçant la pauvreté comme système. La pauvreté touche jusqu'au coeur de l'homme car le Fils s'est abaissé pour accomplir la volonté du Père au secours des hommes ses frères, assoiffés de salut. Ainsi le chrétien entre-t-il dans une dynamique de pauvreté et de don parce qu'il est riche d'être fils de Dieu... C'est pourquoi ce message quarésimal distingue nettement entre pauvreté et misère. Ce n'est pas la pauvreté comme valeur évangélique que nous entendons combattre mais la misère..."

    "Le Pape distingue la misère matérielle, la misère morale et la misère spirituelle". La première consiste à vivre dans l'indignité humaine, et l’Église se met au service des besogneux. La misère morale réside dans la soumission au vice et au péché, qui peut conduire à la misère matérielle. Elle touche toujours à la misère spirituelle, qui frappe lorsqu'on s'éloigne de Dieu en refusant son amour. Je crois, a ajouté le Cardinal, qu'une aussi large "vision de la pauvreté, de la misère et de l'aide que l’Église apporte aux victimes, nous aide à mieux percevoir l'homme et ses besoins, sans tomber dans une réduction anthropologique qui prétendrait résoudre les problèmes de l'homme en solutionnant son bien-être physique ou social... L'option préférentielle pour les pauvres doit avant tout se traduire par une attention religieuse... Pour ne pas transformer l’Église en une ONG...notre regard de qui est dans le besoin ne doit découler que de la misère spirituelle qui se cache souvent dans le coeur des gens et qui le tourmente, même s'il dispose de biens matériels... Et si nous voulons vraiment comprendre le message du Pape, il convient de le décliner dans son sens anthropologique. Par nature, l'homme est fils de Dieu. C'est cela sa richesse. La faute majeure de la culture contemporaine est de croire dans un homme heureux sans Dieu. En rejetant ainsi ce qu'il y a de plus profond dans la personne, on nie ce qui la lie de façon existentielle au Père qui donne la vie... C'est un crime de priver un pauvre de la présence de Dieu, mais aussi de considérer que l'homme peut vivre comme si Dieu n'existait pas, en niant la dimension de créature et la profonde appartenance de l'homme à Dieu... Le développement ne saurait donc se limiter à créer des besoins nouveaux induits, mais de prendre au sérieux la personne."

    Source : Vatican Information Service (Publié VIS Archive 01 - 4.2.14).
     

     Texte intégral du Message de Carême (en français) sur le site internet du Vatican

  • Méditation : tristesse et découragement

    « S'il est un écueil dans la vie chrétienne et plus encore dans la vie pieuse, - écueil d'autant plus perfide qu'il se voile sous de louables apparences, - c'est bien celui de la mauvaise tristesse et du sot découragement. Quand on va au fond de ces mélancolies abattues ou rêveuses, on ne trouve guère que de l'égoïsme. L'âme se replie sur soi et se regarde, au lieu de regarder Jésus ; elle s'occupe et s'inquiète de ses intérêts personnels plus que des intérêts de Dieu ; elle s'appuie sur les créatures et non sur la grâce, et comme elle ne rencontre guère dans les créatures et dans elle-même que misère et pauvreté, elle devient mécontente, morose, troublée, chagrine. Bientôt, elle trouve la piété trop difficile et commence à en abandonner les pratiques ; c'est que, déjà, elle en a abandonné l'esprit.
    Il faut combattre vigoureusement cette sotte et stérile tristesse ; elle est une tentation qui met l'âme en péril, et qui l'épuise sans profit.
    [...]
    Pour s'en délivrer, qu'on ait recours d'abord à la prière, selon le conseil de saint Jacques : "Quelqu'un est-il triste ? qu'il prie ! (Jc V, 3)" Mais qu'on réagisse aussi par un dégagement plus complet de soi-même, par une fidélité plus vigilante à tous les devoirs, au besoin par quelque pénitence ou quelque immolation spéciale, en tout cas par un don et un abandon plus absolu au divin Maître. Alors tout redeviendra radieux, tout, jusqu'à la souffrance ; et l'âme ne tardera pas à se revêtir de cette "robe d'allégresse" dont le Seigneur récompense les martyrs. Aussi bien, "il y a une inévitable tendance à la joie dans tout ce qui appartient à Dieu (P. Faber, Bethléem, VIII). On n'est triste que lorsque qu'on veut jouir de soi ; dès qu'on se renonce, la tristesse s'en va et fait place à la joie. La joie est le signe infaillible d'une âme saine, et toute âme saine est bien près d'être une âme sainte. »

    Abbé J.M. Buathier, Le Sacrifice dans le dogme catholique et dans la vie chrétienne (ch. XXI, 3), Paris, Gabriel Beauchesne, 1920 (dixième édition).

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    Albrecht Dürer (1471-1528), gravure sur cuivre, "Melancholia I"

  • Méditation : tendre la main...

    « L'homme n'a rien de plus commun avec Dieu que la capacité de faire le bien ; et même si nous n'en sommes capables que dans une mesure toute différente, faisons du moins tout ce que nous pouvons. Dieu a créé l'homme et l'a relevé après sa chute. Toi donc ne méprise pas celui qui est tombé dans la misère. Dieu, ému par la grande détresse de l'homme, lui a donné la Loi et les prophètes, après lui avoir donné la loi non écrite de la nature. Il a pris soin de nous conduire, de nous conseiller, de nous corriger. Finalement il s'est donné lui-même en rançon pour la vie du monde...
    Lorsque toi tu navigues le vent en poupe, tends la main à ceux qui font naufrage. Quand tu es en bonne santé et dans l'abondance, porte secours aux malheureux. N'attends pas d'apprendre à tes dépens combien l'égoïsme est un mal et combien il est bon d'ouvrir son cœur à ceux qui sont dans le besoin. Prends garde, parce que la main de Dieu corrige les présomptueux qui oublient les pauvres. Tire leçon des malheurs d'autrui et prodigue à l'indigent ne serait-ce que les plus petits secours. Pour lui, qui manque de tout, ce ne sera pas rien.
    Pour Dieu non plus d'ailleurs, si tu as fait ton possible. Que ton empressement à donner ajoute à l'insignifiance de ton don. Et si tu n'as rien, offre-lui tes larmes. La pitié jaillie du cœur est un grand réconfort pour le malheureux, et une compassion sincère adoucit l'amertume de la souffrance. »

    Saint Grégoire de Nazianze (330-390), De l'amour des pauvres, 27-28 ; PG 35, 891-894 (Trad. Orval et coll. Icthus, vol. 6, Grasset, Paris)

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  • Méditation : recueillement sur la Nativité, avec la Vénérable Mère Thérèse de St-Augustin (Madame Louise de France), dont nous fêtons aujourd'hui la "naissance au Ciel"

    « Qu’un Prince puissant descendît de son trône, pour venir se confondre dans les derniers rangs de ses sujets, s’asseoir à leur table, partager leur indigence, et essayer de leur rendre le fardeau de la pauvreté plus supportable, en le portant avec eux ; quelles impressions profondes d’amour et de vénération laisserait dans tous les cœurs le spectacle ou le récit d’un tel héroïsme de générosité ! Pour être plus accoutumés aux prodiges de la miséricorde divine, devons-nous en être moins touchés ? Ah ! plutôt que de permettre, Seigneur, que je me rende jamais coupable d’une ingratitude aussi monstrueuse, donnez-moi de recueillir dans mon âme toute la reconnaissance que l’univers vous doit.

    Parmi les réflexions qui viennent tumultueusement se présenter à mon esprit, à la vue de Jésus naissant, cinq objets doivent principalement fixer le désir qu’il veut bien m’inspirer, de lui préparer dans mon cœur une demeure digne de lui.

    I Son amour infini pour moi. J’étais présente à ses yeux, dès les premiers moments d’un sacrifice qui a commencé avec l’éternité. Il a daigné pourvoir à tous mes besoins. Pas une de mes misères qui ait échappé au dessein qu’il a formé, de venir lui-même apporter aux plaies du genre humain, les seuls remèdes que pût admettre la justice irritée de son Père ! Les intérêts de sa propre gloire, les ignominies et les besoins de cette chair mortelle qu’il n’a pas dédaigné de revêtir, pour m’élever jusqu’à lui, en s’abaissant jusqu’à moi, rien n’a pu l’arrêter.

    Ô amour ! qui faites disparaître dans un Dieu tout ce qu’il doit à sa grandeur, échapperez-vous au juste retour dont je me sens redevable ? Ne dois-je pas me donner sans partage à celui qui vient se donner tout entier à moi ?

    II Sa miséricordieuse charité. C’est pour tous les hommes, c’est pour les délivrer tous de l’esclavage du péché, c’est pour leur ouvrir à tous l’entrée du Ciel qu’il paraît sur la terre ; j’étais comprise dans cette multitude innombrable de pécheurs qu’il avait la vue et le désir de sauver. Mes infidélités à sa grâce qu’il prévoyait, n’ont pas mis obstacle à la générosité de ses démarches pour moi. Sa charité, comme me l’apprend son Apôtre, s’est manifestée en ma faveur, malgré toute mon indignité. Combien ce regard de bonté d’un Dieu naissant doit-il m’apprendre à renfermer dans ma charité ceux mêmes qui me paraissent si souvent la moins mériter !

    III Ses profondes abjections. En quel état paraît à mes yeux le Roi des Rois, le Dieu de l’univers, le dominateur suprême du Ciel et de la Terre ! Quelle escorte va l’environner dans la crèche ! Une étable sera son palais ; une cabane exposée à toutes les injures de l’air sera son asile ; de pauvres bergers composeront sa cour, le souffle de deux animaux sera l’unique adoucissement à ses premières souffrances ; telle est l’image abrégée de l’anéantissement auquel il s’est condamné pour moi.

    Puis-je croire cette vérité et souffrir encore que mon cœur soit susceptible de cet orgueil qui est le poison de toute la grandeur humaine. En peut-il être d’autre pour une âme chrétienne, que celle qui lui donne une conformité parfaite avec Jésus anéanti dans la crèche ? Qu’il est grand ce Dieu caché, malgré ce voile d’abjection qui le couvre à mes yeux ! Que je serai grande moi-même, quand je m’efforcerai de me rabaisser en sa présence !

    IV Son état d’infirmité et de souffrances. Jésus les embrasse dès sa naissance, pour m’apprendre à sanctifier les miennes, pour m’y fortifier, et pour m’y consoler. Mais, si le Saint des Saints accepte déjà dans un corps innocent ce douloureux partage, puis-je ne pas m’estimer heureuse des traits de ressemblance qu’il me fournira avec lui-même dans mille circonstances, où je pourrai unir mes souffrances aux siennes. En qualité de chrétienne et de pécheresse, je suis condamnée à la mortification et à la pénitence. La leçon qu’il me présente dans son berceau est un nouveau motif pour moi de me crucifier dans mes sensualités, et encore plus dans ma volonté propre. Plus je trouve de facilités à la satisfaire, plus j’apprendrai, dans ce premier sacrifice de Jésus naissant, à m’immoler dans tout ce que j’ai de plus intime pour les sens, pour l’esprit et pour le cœur.

    V L’étendue de ses satisfactions. C’est un Dieu qui me prévient, qui me recherche, qui paye pour moi à la justice de son Père. Que pourrais-je craindre avec une caution d’une valeur et d’une vertu aussi efficaces ? Je porterai à ses pieds bien des misères qu’il connaît, et dont il a compassion, mais qu’il est disposé à me pardonner, dès que je les détesterai toutes, dès que je n’en aimerai aucune. Indépendamment de tant de promesses miséricordieuses, qu’il m’a adressées tant de fois, ne s’offrira-t-il pas aux yeux de ma foi, avec tous les charmes qui peuvent lui attirer ma confiance ? Non, il ne viendra point à moi en juge, ni en vengeur, mais en Sauveur et en Père. Je me hâterai donc de me jeter entre les bras qu’il daigne me tendre ; je recueillerai avec ardeur ses soupirs ; je le conjurerai d’être mon Jésus et mon libérateur, à l’appui de ces tendres sentiments que je solliciterai au premier trône de son indulgence ; que ne trouverai-je pas de ressources auprès d’un cœur qui ne désire que la pleine confiance du mien !

    Ce mystère d’un Dieu naissant, doit donc ranimer tout mon amour pour lui, servir de règle à ma charité pour le prochain, rectifier tous mes jugements et toute ma conduite sur ce qui fait la véritable grandeur, soutenir mon courage dans l’usage de la pénitence chrétienne, réveiller et confirmer toute ma confiance aux miséricordes si étendues, dont la crèche est la dépositaire.

    Je demanderai donc avec un redoublement de ferveur, proportionné à tous mes besoins, ces heureux fruits de la fête qui approche ; je purifierai mon âme avec la plus exacte sincérité ; j’y ajouterai avec toutes les protestations de ma douleur, les promesses les plus sincères de ma fidélité future ; je réunirai tous mes désirs les plus ardents et les plus empressés pour attirer les grâces de ce divin enfant. Mille fois, je lui réitérerai ma consécration entière à son service, ma dépendance, ma gratitude et mon amour. Venez, lui dirai-je, venez auteur de tous les biens, répandez-les dans mon âme ; en la visitant, faites-lui goûter combien il est doux de vous aimer et d’être aimée de vous. Communiquez-moi ces saintes ardeurs dont le cœur de votre sainte mère était pénétré ; faites passer dans le mien ce feu céleste qui en consume toutes les froideurs ; remplissez-moi de cet esprit de foi, de cette fervente piété, qui accompagnaient ce saint Roi, mon Patron, à votre divin banquet ; qu’il n’y ait rien en moi qui ne se ressente de ces profonds hommages que vous rendirent à la crèche les esprits bienheureux dont elle était investie ; couronnez enfin, ô Dieu naissant ! tous vos bienfaits par cette paix que vous apportez à la terre ; qu’elle règne en moi, comme un gage de votre grâce et de votre clémence ; et qu’elle y persévère par la confiance de ma fidélité et de mon amour ! Le péché seul peut m’en priver. Ah ! Que jamais il ne trouble, il ne ravisse un trésor dont la possession m’est plus chère que tous les biens de ce monde, que ma vie même. C’est ô mon Jésus ! ce que je vous demande, et c’est ce que je ne cesserai de penser, et désirer jusqu’au dernier soupir ; il sera un soupir d’amour pour vous. »

    Vénérable Mère Thérèse de St-Augustin (Madame Louise de France (1787), fille de Louis XV, dies natalis ce 23 décembre), prieure du carmel de Saint Denis, "Au fil de l’année liturgique".
    Source : Le carmel en France.

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    Toile de Joseph Aubert (1849-1924), église Notre-Dame-des-Champs (Paris)

  • Méditation : en chemin vers la béatitude

    « Toute la vie chrétienne est en tension vers la béatitude, vers l'eschatologie, dans un surpassement incessant. Elle consiste à accueillir Dieu en soi, dans une démarche qui doit s'intensifier jour après jour, et qui donne au temps sa véritable dimension. Dans une aspiration infinie, qui a Dieu pour terme, et qu'aucune de nos actions ne pourra jamais combler.
    Plus que tout autre, le chrétien sait que la voie qui le mène à la béatitude est une voie qui l'engage tout entier. Une voie où, pour se vouloir lui-même, il lui faut vouloir Dieu et ses frères et le monde, sans espoir d'atteindre Dieu en plénitude avant la Parousie. Une voie qui le jettera inlassablement d'un élan à un autre, d'un don à un autre, d'un sacrifice à un autre. Voie dure, d'humilité, de sacrifices, de renoncements et de pauvreté, mais aussi voie joyeuse de perfection, de bonheur, de paix, de liberté spirituelle.
    Il faut le dire sans ambages : préférer à tout le reste ce consentement actif à Dieu, y subordonner toute notre vie, dans un dépassement qui se renouvelle sans cesse, c'est la loi de toute vie spirituelle authentique. En un sens, tout est déjà gagné, quand par-delà tous les soucis périssables, on a réveillé en soi le désir du paradis, quand on a dit oui à l'ouverture aux biens éternels, car ce oui profond libère une énergie spirituelle latente, capable de tarir en nous toutes les sources d'égoïsme.
    De la vie d'enfant de Dieu, de fils de lumière, d'héritier du Christ, la béatitude apparaît comme la véritable clef de voûte. »

    P. Marie-Joseph Le Guillou, Qui ose encore parler du bonheur ?, Mame, Paris, 1991

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  • Méditation : l'union à Jésus

    « Nous unir à Jésus, Lui demander de travailler en nous, de souffrir en nous, de prier en nous, nous considérer comme un membre du Christ, comme un instrument qu'Il doit Lui-même mettre en œuvre, comme un organe qu'Il doit animer, quelle pratique consolante et fortifiante ! Quand nous agissons, quand nous accomplissons nos devoirs d'état, nous sentons vivement notre impuissance ; quand nous souffrons, nous constatons avec peine que nous ne savons guère bien souffrir ; quand nous prions, nous nous trouvons fort indignes et nous avons conscience que nos prières ne peuvent guère glorifier notre Dieu. Donc unissons-nous à Jésus, demandons-Lui de remplir Lui-même en nous toutes ces saintes fonctions ; puis consolons-nous : Jésus, que nous avons appelé, est venu ; Il veut bien travailler, souffrir, prier en nous et donner à toutes nos œuvres une dignité, un mérite, une efficacité qu'elles n'auraient pas sans Lui. "Il nous faut toutes consommer, écrivait à une visitandine de Moulins sainte Marguerite-Marie, dans cette ardente fournaise du Sacré-Cœur de notre adorable Maître... et après avoir perdu notre cœur de corruption dans ces divines flammes du pur amour, il nous y en faut prendre un tout nouveau, qui nous fasse désormais vivre d'une vie toute renouvelée... il faut que ce divin Cœur de Jésus soit tellement substitué à la place du nôtre que lui seul vive et agisse en nous et pour nous, que sa volonté tienne tellement la nôtre anéantie qu'elle puisse agir absolument sans résistance de notre part ; enfin que ses affections, ses pensées et ses désirs soient en la place des nôtres, mais surtout son amour, qui s'aimera lui-même en nous et pour nous." (Œuvres, t.II, p.468.)

    On connaît bien la belle prière de M. Olier : "Ô Jésus vivant en Marie, venez et vivez en nous dans votre esprit de sainteté, dans la plénitude de votre puissance, dans la perfection de vos voies, dans la vérité de vos vertus, dans la communion de vos divins mystères ; dominez en nous sur toutes les puissances ennemies, dans la vertu de votre Esprit et pour la gloire de votre Père."

    Ainsi, que Jésus reproduise en nous ses vertus, nous communiquant les dispositions qu'Il avait dans les mystères de sa vie mortelle, l'humilité de son incarnation, la pauvreté de sa naissance, le recueillement de sa vie cachée, le zèle de sa vie publique, la ferveur de ses oraisons, la générosité de son immolation, si bien que Dieu voie en chacun de nous, non plus la créature avec ses misères, mais l'image fidèle, la photographie de son divin Fils, en qui Il a mis toutes ses complaisances ; on peut même dire : qu'Il voie en nous Jésus lui-même nous couvrant, nous enveloppant, nous cachant en Lui, Jésus nous animant, nous mouvant, agissant en nous et par nous. »

    Abbé Auguste Saudreau (1859-1946), L'idéal de l'âme fervente (ch.V : Jésus vivant en nous), Paris - Arras - Angers, Charles Amat - Brunet - G. Grassin, 1923.

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  • Méditation : de la difficulté de prier...

    « Quiconque veut prier connaîtra la fatigue, les distractions, le dégoût, le vertige devant les exigences évangéliques. A travers tout cela se fera l'apprentissage du "sens du mystère" : du "sens de Dieu" et du "sens de l'homme" tout à la fois.
    La prière n'est pas un jeu d'enfant, tout en étant patient cheminement dans "l'esprit d'enfance", tranquille confiance en plus grand que soi.
    Nul ne peut prier, sinon Dieu lui-même dont les pensées deviennent en nous nos pensées. "Nul ne peut crier Père, ni reconnaître Jésus comme Seigneur si l'Esprit ne le fait en lui". Ainsi parle saint Paul.
    Et l'Esprit ne peut parler que dans un cœur de pauvre : un cœur sans orgueil renonçant à la satisfaction de soi que la réussite dans la prière pourrait nourrir.

    Que se réjouissent donc ceux qui ne savent pas prier ; nous en sommes tous ! Mais ce qui nous est demandé, c'est d'accepter cette incapacité dans l'espérance, c'est-à-dire de ne pas nous y résigner.
    Cette acceptation espérante nous gardera sur le chemin d'une constante conversion, où devront sans cesse se refaire la disponibilité à l'égard de Dieu et l'accueil au prochain : les deux sont liés comme sont liées la difficulté de prier et la difficulté de rencontrer son frère. »

    Robert Guelly, Présence de Dieu (ch. 2, 6), Coll. "Vivre et croire", Casterman, 1970.

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  • Un mois avec Marie - Dix-huitième jour

    UN MOIS AVEC MARIE

    DIX-HUITIÈME JOUR
    La Pauvreté

    argentPetit écho de la Vierge Marie, Jacintha poursuit ses recommandations :
    « Fuyez le luxe, ne recherchez pas la richesse, aimez beaucoup la sainte pauvreté. »
    Elle devient sainte, la pauvreté, dès l'instant où sa valeur surnaturelle est comprise, appréciée. A son allure rapide et légère on devine le voyageur aux bagages réduits. Ce voyageur, c'est, dans le domaine spirituel, le véritable pauvre chrétien. A le voir passer sur la terre, on croirait volontiers qu'il plane. Ses ailes sont l'amour de Dieu et de sa Volonté. Il n'envie pas les biens d'autrui ; le luxe ne le tente pas. Gagner le pain de sa famille, assurer la bonne éducation de ses enfants, les armer pour la vie afin qu'ils marchent sur les traces du père : voilà toutes ses ambitions.
    Que de tentations et de chutes lui évite la modicité de ses ressources !
    Il va le cœur en paix et la conscience tranquille à la suite du Christ ouvrier et pauvre. Son épouse imite Marie dans les humbles soins du ménage.
    Heureux foyer où tout converge vers le But suprême !
    Il y a bien parfois des heures dures, très dures : maladie, chômage... Mais on se serre plus près de Jésus, on saisit la main de Notre-Dame et, malgré les larmes bien amères parfois, on poursuit sa route vaillamment.
    Vivre ainsi c'est être grand d'une grandeur souveraine, indépendante du nom, de la fortune, de toute distinction passagère et vaine. C'est marcher dans la voie des Saints.
    La même voie demeure ouverte à qui est gratifié des biens périssables ; mais à une condition : celle de ne point s'y attacher. Le divin Maître sait que notre nature orgueilleuse, avide de plaisir, la trouve dure :
    « Combien il est difficile à ceux qui se confient dans les richesses d'entrer dans le Royaume des Cieux ! » (1) déclare-t-il. Mais sa parole demeure :
    « Bienheureux les pauvres en esprit, parce que le Royaume des Cieux leur appartient » (2).
    Et toute âme de bonne volonté peut, avec le secours de sa Grâce, être, au sein même de l'opulence, un véritable « pauvre en esprit ».
    Certains sont entourés de luxe sans pouvoir le fuir, ils possèdent des richesses sans les avoir acquises. Ce luxe, ces richesses tiennent à leur naissance, à leur situation. Qu'ils en usent selon leur rang, mais en les regardant de haut, sans se laisser amollir par leurs invitations malsaines. Qu'ils méprisent les fascinations de la bagatelle.
    De la fortune, le riche est l'intendant plutôt que le propriétaire : il la quittera au trépas sans pouvoir l'emporter. Pour s'en constituer un trésor qui demeure sien pour jamais, il doit en faire bénéficier les bonnes œuvres, secourir ceux qui souffrent de la misère et de la faim.
    L'on a vu des princes, des rois, des reines rester simples sur le trône, subir le luxe comme nécessité de situation, à l'instar du protocole, et trouver leur plus douce joie à devenir la providence des malheureux.
    Ainsi fut Hélène de France, duchesse d'Aoste. Étant tombée gravement malade, un concert de gémissements et de prières sollicite du Ciel sa guérison parmi les pauvres gens. Les portes du palais ayant été condamnées, une vieille femme du peuple se présente néanmoins et prétend bien forcer la consigne : « Je veux la voir, je veux la voir, implore-t-elle. Je lui dois tant ! Si souvent elle est venue me visiter et me soigner dans ma mansarde ! Je veux la soigner à mon tour. »
    Que l'on possède des millions, ou bien la simple paie d'un ouvrier, le maigre gain d'une ouvrière, on est toujours riche de la plus désirable des richesses quand le cœur est grand, la pensée noble, le But poursuivi pur et saint.

    PRIÈRE

    Très saint Cœur de notre tendre Mère, c'est en vous que nous déposons nos cœurs. Nous vous les offrons avec amour et confiance, prenez-en soin, défendez-les contre tout danger, faites-leur aimer Jésus et imiter vos admirables vertus !
    Ainsi soit-il.


    Reine de tous les Saints, priez pour nous.

    (1) St Matth XIX, 23.
    (2) St Matth V, 3.

    Œuvre de Propagande du Sacré-Cœur, Lyon, 1945.
    Nihil obstat : Montepessulano, 12.03.1945 – A. Bonjean, c.d.
    Imprimatur : Montepessulano, 13.03.1945 – Jean Rouquette, v.g.

  • Un mois avec Marie - Seizième jour

    UN MOIS AVEC MARIE

    SEIZIÈME JOUR
    L’Esprit surnaturel

    lumière dans la nuitL'esprit surnaturel, l'esprit de Foi : voilà l'étoile qui éclaire ici-bas nos ténèbres.
    Laissons-la briller cette étoile bienfaisante, en notre Ciel si souvent orageux. Elle nous guidera en dissipant nos illusions, nos erreurs ; elle nous apaisera et nous consolera. Par elle nos peines, nos épreuves seront irradiées d'une clarté sereine venue de l'Au-Delà. Avec la force pour les supporter se répandra en nos âmes une certaine joie si profonde, si intime que nous la goûterons sans savoir l'exprimer.
    Que voyons-nous autour de nous ? Des créatures animées, inanimées - des personnes, des choses. Chacune a sa valeur propre, mais il y a deux façons de la regarder.
    Selon nos expériences et appréciations purement humaines, prenons tout à tour les plaisirs ! Ils ne durent qu'un moment !... La richesse ! La fortune inconstante n'empêche point de souffrir, de pleurer !... L'humanité ! Combien oublieuse, trompeuse et souvent méchante !...
    Attristés et déçus, l'on est tenté de se dire :
    « Aucune de ces choses ne vaut la peine qu'on se donne pour elle ! »
    Mais ouvrons maintenant sur chacune d'elles notre œil surnaturel. Les plaisirs honnêtes et permis seront une détente, un repos permettant au corps et à l'âme une activité renouvelée dans le travail ; un élan, une ascension plus soutenue vers le bien. — La fortune nous paraîtra un bien précieux quand on sait s'en servir. Le riche qui pleure adoucit ou tarit ses larmes en séchant celles des autres. — A côté des cœurs secs nous en verrons d'autres pleins de bonté. Les natures égoïstes feront ressortir les natures généreuses. Auprès des âmes viles, rampantes, dégradées nous découvrirons des âmes nobles et montantes ; des âmes divinisées par la grâce.
    Et nous constaterons que même sur la terre, il y a des joies très douces, très pures, très belles. Pour en parsemer notre existence il suffit de vivre de l'esprit de foi, de l'esprit surnaturel, à l'exemple de Marie, notre Mère.
    Mais, objecterez-vous, et les épreuves que notre pauvre nature redoute et fuit de tout son pouvoir ? — Oui, la souffrance nous effraie sans que nous puissions l'éviter bien souvent... Et nous la subissons en maugréant alors qu'il faudrait l'accepter pour la rendre plus légère et la sanctifier. Quel dommage !
    Dardons sur nos peines le grand projecteur surnaturel. En chacune d'elles, il nous montrera une pépite d'or à recueillir.
    La pauvreté chrétiennement supportée, c'est la richesse pour le Ciel. Elle nous assimile au Christ ouvrier, qui « n'avait pas où reposer sa tête ».
    Les privations (ou restrictions) nous permettent d'expier dès ici-bas, nos fautes de sensualité, de gourmandise, d'intempérance peut-être...
    La maladie ! un temps de solitude propre à nous rapprocher de Dieu.
    La Foi nous consolera même de la perte d'êtres chers, en nous les montrant qui nous attendent dans la gloire : « Bienheureux ceux qui meurent dans le Seigneur, ils vont aussitôt se reposer dans le Seigneur, car leurs œuvres les suivent » (1).
    Quant aux fruits de la malice humaine : injustices, trahisons, calomnies, persécutions, etc..., ce sont des maux qui, certes, ne viennent pas du Ciel... Mais le secours en vient. Fiez-vous à la Providence, elle est plus forte que les forts. Un jour ou l'autre, elle remettra tout en place.
    Ce n'est pas celui qui supporte le mal qui doit trembler, c'est celui qui le fait.
    Gardons-nous de perdre le mérite de nos souffrances par notre manque de Foi, de soumission : nous aurions la douleur sans sa compensation.
    Les épreuves de la Vierge ont coopéré à la réalisation du plan divin de la Rédemption : le rachat du genre humain. Et elles ont procuré à Marie elle-même une gloire, une félicité qui surpassent celles de tous les Saints.
    Que résultera-t-il de nos peines chrétiennement supportées ? Très sûrement, pour nous, des grâces précieuses de sanctification. Peut-être la conversion d'êtres chers. Et... des grâces de régénération et de paix pour notre France tant aimée.
    Imprégnons-nous d'esprit surnaturel jusqu'à le rayonner autour de nous. Au lieu des phrases banales en usage, à ceux qui souffrent disons, avec le mot du cœur qui touche, la parole réconfortante qui élève au-dessus de ce qui passe et qui fait déjà goûter l'Infini.

    PRIÈRE

    Marie, conçue sans péché, regardez la France, sauvez la France, priez pour la France.
    Plus elle est coupable, plus elle a besoin de votre intercession. Ô Marie, un mot à Jésus reposant dans vos bras, et la France est sauvée !
    Ô Jésus, obéissant à Marie, sauvez la France !
    Ô Marie, Reine de France, convertissez-nous, sauvez-nous !


    (1) Apocalypse, Joan. XIV, 13.

    Œuvre de Propagande du Sacré-Cœur, Lyon, 1945.
    Nihil obstat : Montepessulano, 12.03.1945 – A. Bonjean, c.d.
    Imprimatur : Montepessulano, 13.03.1945 – Jean Rouquette, v.g.