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  • Méditation : porter sa propre croix...

    « Il n'y a pas de journée - et même pas d'heure à certaines périodes de la vie - qui n'apporte au chrétien quelque croix à porter...
    Croix du corps et croix de l'âme : maladies, craintes, dégoût, insuccès.
    Croix de l'emploi et croix des événements.
    Croix imposées par nos proches, et croix que nous trouvons en nous-mêmes, dans la constatation humiliante de nos lâchetés et de notre médiocrité.
    Croix personnelles, et croix de nos amis que la sympathie nous fait partager.
    Croix venant du ciel qui se ferme obstinément, et de la terre, où nous ne trouvons plus de vrai bonheur s'il nous est arrivé de goûter les joies de l'amour divin...

    Chacun a "sa" croix propre, spéciale, qui parfois ne lui est commune avec personne de son entourage, et qui par conséquent ne peut être comprise. c'est celle-là qu'il doit porter et pas une autre, celle-là qu'il doit baiser (1) au lieu de la rejeter avec impatience en rêvant de croix plus glorieuses et - apparemment du moins - plus supportables.
    "Sa" croix, pour chaque chrétien, c'est celle que le Père céleste lui destine, celle qu'il lui a préparée de toute éternité, qu'il adapte à ses besoins et à sa croissance surnaturelle, "ne permettant pas qu'il soit tenté au delà de ses forces" (I Cor. X, 13) ; car Dieu lui offre, en lui permettant de prier et en l'y invitant, de quoi hausser ses forces au niveau de toutes les difficultés.

    Ô mon Dieu et mon Père céleste, "même quand je ne vois pas, quand je ne comprends pas, quand je ne sens pas, je crois que l'état où je me trouve et tout ce qui m'arrive est l’œuvre de votre amour ; et de toute ma volonté je le préfère à tout autre état qui me serait plus agréable, mais qui me viendrait moins de vous" (Extrait d'une prière indulgenciée par Benoît XV, décembre 1915). »

    (1) : "Chers frères et sœurs, cette semaine, cela nous fera du bien de prendre le crucifix dans nos mains et de beaucoup l’embrasser, beaucoup, en disant : merci Jésus, merci Seigneur." (Pape François, catéchèse du 16 avril 2014).

    P. J.-B. Gosselin, Sujets d'oraison pour tous les jours de l'année (La Croix de chaque jour), Tome III (2e édition), Apostolat de la Prière, Toulouse, 1947.
    (Cf. Imitation de Jésus-Christ, Livre II, ch. 12, 3-6.)

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  • Méditation - Prière avec le Bx Jean-Martin Moyë (fête ce jour)

    « Pénétrés d’amour et de reconnaissance, touchés de douleur et de componction nous adorons, nous baisons avec respect, et nous invoquons avec confiance vos plaies sacrées, ô divin Sauveur. Nous vous conjurons par ces plaies adorables de guérir toutes les blessures de notre âme. Gravez, Seigneur, gravez profondément dans nos cœurs ces divines plaies avec le souvenir continuel de votre douloureuse passion.

    Nous adorons la plaie de votre main droite, désirant et demandant que votre main droite nous bénisse, nous et nos intentions, nos paroles et nos actions, qu’elle nous aide à faire le bien et à empêcher le mal. Je remets, Seigneur, avec confiance mon corps et mon âme, ma vie et ma mort, mon sort éternel et temporel, mes desseins et mes entreprises entre vos mains. Je mets dans votre main droite mes parents, mes amis, mes bienfaiteurs, et tous vos élus, afin que ni le démon ni le monde ni la chair ne puissent les ravir de votre main. Seigneur, ayez pitié de nous, nous vous en conjurons par la plaie de votre main droite. Notre Père...

    Nous adorons la plaie de votre main gauche, et nous vous prions de bénir notre silence, notre repos, et nos affections. Nous recommandons à la même plaie de votre main gauche les pécheurs et nos ennemis, que nous aimons parce que Jésus-Christ a aimé les siens. Nous vous recommandons les méchants, les impies, les libertins de nos jours. Nous vous conjurons d’étendre votre main toute-puissante contre tous les ennemis de l’Église, pour réprimer leur méchanceté et tous leurs mauvais desseins. Tournez, Seigneur, par votre sagesse et votre grâce triomphante leur haine en charité, leur malice en bonté, leurs malédictions en bénédictions, leur guerre en paix, leur terreur en sécurité, leurs obstacles en moyens. Arrachez-les d’entre les mains du démon, faites qu’ils retournent à vous par une sincère conversion. Seigneur, ayez pitié de nous, etc.

    Nous adorons la plaie de votre pied droit. Nous vous prions par la vertu de cette plaie de diriger nos pas et nos démarches dans la voie du salut, et nous vous conjurons par la douleur que vous avez soufferte dans cette plaie d’avoir pitié des âmes souffrantes, des pauvres et des malades, des agonisants, des captifs et des prisonniers, des voyageurs et des âmes du Purgatoire. Seigneur, ayez pitié de nous, nous vous en conjurons.

    Nous adorons la plaie de votre sacré côté, et nous vous prions de répandre sur nous par l’ouverture de cette plaie les entrailles de votre miséricorde. Nous vous supplions de guérir nos cœurs par la plaie de votre Sacré-Cœur, et de laver les souillures de nos âmes dans le sang et l’eau qui sont sortis de votre sacré côté, et comme c’est par la vertu de cette eau et de ce sang que l’Église a été formée ainsi qu’Ève de la côte d’Adam, nous vous conjurons par les amertumes que vous avez ressenties dans votre Sacré-Cœur et par votre côté percé d’une lance d’avoir pitié de votre Église, que vous vous êtes acquise au prix de votre Sang. Purifiez-la, sanctifiez-la, unissez-la, gouvernez-la, conservez-la pure et sainte et sans tache, exaltez-la et faites-la triompher de toutes les erreurs et des ennemis qui l’attaquent, et faites régner dans votre Église l’union, la charité, la concorde, l’humilité, la chasteté, et toutes les vertus chrétiennes. Seigneur ayez pitié de nous, nous vous en conjurons par la plaie de votre sacré côté.

    Enfin, mon Dieu, nous recourons à vos cinq plaies comme à un refuge et un asile assuré dans tous nos maux et nos tentations et comme à une source intarissable de bénédictions. Montrez-nous vos plaies comme vous les avez fait voir à vos disciples après votre Résurrection. Faites qu’elles soient toujours ouvertes pour nous, qu’il en découle continuellement sur nous et sur tous les peuples de l’univers un fleuve de paix et de justice, un torrent de lumière, de grâce, et de vertu. Nous adorons enfin toutes les autres plaies dont votre Cœur adorable et vos membres sacrés ont été meurtris dans votre sanglante flagellation et dans tout le cours de votre Passion ; et nous vous supplions de nous en appliquer tous les mérites. »

    Prière pour honorer les plaies du Sauveur, composée en Chine et répandue dans les chrétientés de la région qu’évangélisait Jean-Martin Moyë. Il la traduisit lui-même en français et l’utilisa à son retour en Lorraine. Elle témoigne de sa profonde piété envers le Seigneur souffrant. Il a existé au XIXe siècle des images saintes qui reproduisaient cette prière.

    Bx Jean-Martin Moyë, fondateur des Sœurs de la Providence, prêtre des M.E.P., missionnaire en Chine.
    Liste des œuvres de Jean-Martin Moyë [établie par le Père Georges Tavard, rappelé à Dieu le 13 août 2007]

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    Église de Logonna-Daoulas, Ange aux cinq plaies (Source et crédit photo)

  • Méditation avec Ste Catherine de Sienne : gloire de la Résurrection

    « 1.- Ô notre Résurrection ! notre Résurrection ! puissante et éternelle Trinité, faites donc éclater mon âme ! Ô Rédempteur ! notre Résurrection ! Trinité éternelle ! Feu qui brûlez toujours, qui ne vous éteignez jamais, qui ne pouvez diminuer quand même vous vous communiqueriez à toute la terre ! Ô Lumière qui donnez la lumière, je vois dans votre lumière, et je ne puis rien voir sans vous, parce que vous êtes Celui qui êtes, et moi je suis celle qui ne suis pas! Je connais par vous mes besoins, ceux de l'Église et du monde ! C'est parce que je les connais que je vous conjure d'ébranler, d'enflammer mon âme pour le salut du monde ; non pas que je puisse porter quelque fruit par moi-même, mais je le puis par la vertu de votre charité, qui est la source de tout bien.

    2.- Oui, dans l'abîme de votre charité, l'âme agit pour son salut et pour celui de prochain, comme votre Divinité, ô éternelle Trinité, nous a sauvés au moyen de notre humanité bornée, qui nous a procuré un bien infini. C'est par cette vertu toute puissante de votre Divinité qu'a été créé tout ce qui participe à l'être, et qu'a été donné à l'homme le bien spirituel et temporel qui se trouve en lui. Ce bien, vous avez voulu que l'homme le cultivât par son libre arbitre.

    3.- Ô Trinité, Trinité éternelle ! votre lumière nous fait connaître que vous êtes le Jardin parfait qui renfermez les fleurs et les fruits. Vous êtes une Fleur de gloire qui vous glorifiez et qui fructifiez vous-même ! Vous ne pouvez rien recevoir d'un autre : sans cela vous ne seriez pas le Tout-Puissant, l’Éternel ! Celui qui vous donnerait ne paraîtrait pas venir de vous. Mais vous êtes votre gloire et votre fruit ; ce que vous offre votre créature vient de vous ; si elle ne recevait rien, elle ne pourrait rien vous rendre.

    4.- Ô Père éternel ! l'homme était renfermé dans votre sein ; vous l'avez tiré de votre sainte pensée, comme une fleur où se distinguent les trois puissances de l'âme. Dans chacune de ces puissances, vous avez mis un germe afin qu'elles puissent fructifier dans votre jardin et vous rendre le fruit que vous lui avez donné. Vous entrez dans l'âme pour la remplir de votre béatitude, et l'âme y est comme le poisson dans la mer et la mer dans le poisson.

    5.- Vous lui avez donné la mémoire afin qu'elle puisse retenir vos bienfaits, pour fleurir à la gloire de votre nom et porter de bons fruits. Vous lui avez donné l'intelligence afin qu'elle connaisse votre vérité et votre volonté qui veut toujours notre sanctification, et que, la connaissant, elle vous honore et produise des vertus ! Vous lui avez donné la volonté afin qu'elle puisse aimer ce que l'intelligence a vu et ce que la mémoire a retenu.

    6.- Si je regarde en vous, qui êtes la Lumière, ô Trinité éternelle, je vois que l'homme a perdu la fleur de la grâce par la faute qu'il a commise. Il ne pouvait dès lors vous rendre gloire et atteindre le but pour lequel vous l'aviez créé. Votre plan était détruit ; votre jardin était fermé, et nous ne pouvions recevoir vos fruits. Alors vous avez envoyé le Verbe, votre Fils unique, à notre secours.

    7.- Vous lui avez donné la clef de la Divinité et de l'humanité réunies pour nous ouvrir la porte de la grâce ; la Divinité ne pouvait l'ouvrir sans l'humanité, parce que l'humanité l'avait fermée par la faute du premier homme ; et l'humanité seule ne pouvait ouvrir sans la Divinité, parce que son action est finie et que la faute avait été commise contre la perfection infinie. La satisfaction devait égaler la faute ; tout autre moyen ne pouvait suffire. Et vous, doux et humble Agneau, vous nous avez ouvert les portes du jardin céleste ; vous nous livrez l'entrée du paradis et vous nous offrez les fleurs et les fruits de l'éternité.

    8.- Je comprends maintenant la vérité de ce que vous disiez, lorsque vous êtes apparu sous la forme d'un pèlerin à vos deux disciples, sur la route d'Emmaüs. Vous leur disiez qu'il fallait que le Christ souffrit et qu'il entrât dans la gloire par la voie de la Croix (Lc XXIV, 26) ; vous leur citiez les prophéties de Moïse, d'Élie, d'Isaïe, de David, et vous leur expliquiez les Écritures ; mais ils ne vous comprenaient pas, parce que les yeux de leur intelligence étaient obscurcis. Mais vous vous compreniez bien, doux et aimable Verbe, et vous saviez où était votre gloire ; il vous fallait souffrir pour entrer en vous-même. Ainsi soit-il. »

    Ste Catherine de Sienne (25 mars 1347 - 29 avril 1380), Prière faite à Rome le Jeudi 5 Avril 1379 (Prière XXI), in Œuvres, Trad. de l'italien par E. Cartier, Paris, P. Lethielleux, 1802.
    A lire en ligne et/ou à télécharger ici.

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    Sainte Catherine de Sienne, église de Sainte-Marie du Rosaire à Prati, Rome
    (Source)

  • Méditation : la Miséricorde divine

    « La miséricorde, en tant que perfection du Dieu infini, est elle-même infinie. Infinie donc, et inépuisable, est la promptitude du Père à accueillir les fils prodigues qui reviennent à sa maison. Infinies sont aussi la promptitude et l'intensité du pardon qui jaillit continuellement de l'admirable valeur du sacrifice du Fils. Aucun péché de l'homme ne peut prévaloir sur cette force ni la limiter. Du côté de l'homme, seul peut la limiter le manque de bonne volonté, le manque de promptitude dans la conversion et la pénitence, c'est-à-dire l'obstination continuelle qui s'oppose à la grâce et à la vérité, spécialement face au témoignage de la croix et de la résurrection du Christ.

    C'est pourquoi l’Église annonce la conversion et y appelle. La conversion à Dieu consiste toujours dans la découverte de sa miséricorde, c'est-à-dire de cet amour patient et doux comme l'est Dieu Créateur et Père : l'amour, auquel « le Dieu et Père de Notre Seigneur Jésus-Christ » est fidèle jusqu'à ses conséquences extrêmes dans l'histoire de l'alliance avec l'homme, jusqu'à la croix, à la mort et à la résurrection de son Fils. La conversion à Dieu est toujours le fruit du retour au Père riche en miséricorde.

    La connaissance authentique du Dieu de la miséricorde, Dieu de l'amour bienveillant, est une force de conversion constante et inépuisable, non seulement comme acte intérieur d'un instant, mais aussi comme disposition permanente, comme état d'âme. Ceux qui arrivent à connaître Dieu ainsi, ceux qui le « voient » ainsi, ne peuvent pas vivre autrement qu'en se convertissant à lui continuellement. Ils vivent donc in statu conversionis, en état de conversion ; et c'est cet état qui constitue la composante la plus profonde du pèlerinage de tout homme sur la terre in statu viatoris, en état de cheminement. Il est évident que l’Église professe la miséricorde de Dieu révélée dans le Christ crucifié et ressuscité non seulement par les paroles de son enseignement, mais surtout par la pulsation la plus intense de la vie de tout le peuple de Dieu. Grâce à ce témoignage de vie, l’Église accomplit sa mission propre de peuple de Dieu, mission qui participe à la mission messianique du Christ lui-même et qui, en un certain sens, la continue. »

    Jean-Paul II, extraits de l'Encyclique Dives in Misericordia (13), 30 novembre 1980.
    (Texte intégral)

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    Gravure d'Eugène Burnand

  • Célébration de la Passion du Seigneur présidée par le Pape François

    à 17h00 dans la basilique Saint-Pierre

     

    C’est dans la basilique Saint-Pierre que le Pape François a présidé vendredi en début de soirée la célébration de la Passion du Seigneur, l’office du Vendredi Saint qui se compose de la liturgie de la Parole, suivie de la vénération de la Croix et qui s’achève avec la Communion.

    Au Vatican, comme chaque année, l’homélie a été confiée au prédicateur de la Maison pontificale, le père Raniero Cantalamessa. Une homélie centrée sur la figure de Judas, le traître, cette figure qui a tant à nous dire.

    L'argent est le vrai concurrent de Dieu

    La trahison de Judas est l’un des drames les plus sombres de la liberté humaine. D’emblée, le prédicateur a voulu balayer la thèse selon laquelle Judas aurait été un militant, une sorte de Brutus qui tue Jules César en pensant sauver la république. Non, selon les Évangiles, Judas trahit pour de l’argent. Et cela ne doit pas nous surprendre, car l’argent c’est l’idole par excellence, la racine de tous les maux. On trahit pour obtenir quelque pouvoir ou quelque bénéfice temporel.

    C’est l’argent, a martelé le père Cantalamessa, qui est derrière le commerce de la drogue, l’exploitation de la prostitution, la corruption politique, la fabrication et le commerce des armes, la vente d’organes humains enlevés à des enfants. La crise financière est due en bonne partie à l’exécrable avidité d’argent de la part de quelques-uns.

    Attention au Judas qui se cache en nous

    Faisant allusion aux scandales qui ont défrayé la chronique en Italie, le prédicateur a fustigé les administrateurs de l’argent public qui soutirent de l’argent de la caisse commune, ceux qui perçoivent des salaires ou des retraites faramineux et qui refusent de renoncer à leurs privilèges. La trahison de Judas continue dans l’histoire mais, avertit le prédicateur, pas seulement dans les affaires retentissantes.

    Attention au Judas qui se cache au fond de nous, quand nous sommes infidèles à notre conjoint, à notre conscience, aux exigences de notre état. L’homélie du père Canatalamessa s’est achevée par un appel à s’en remettre à Celui qui volontiers pardonne. Le plus grand péché de Judas ne fut pas d’avoir trahi Jésus, mais d’avoir douté de sa miséricorde.

    Source : Radio Vatican.

    Texte intégral de l'homélie en ligne également sur Radio Vatican.

  • Méditation du Vendredi Saint

    « L'âme de Jésus avait une soif aussi ardente des âmes, que son corps de l'eau du puits. Sa pensée s'étendait sur tous les siècles à venir, et il désirait avec ardeur multiplier la multitude des âmes rachetées. Hélas ! nous pouvons mesurer approximativement le tourment de la soif physique ; mais nous n'avons pas même une ombre qui puisse nous donner une idée de la réalité du tourment qu'endurait son âme. Si l'amour du Créateur pour les créatures qu'il a tirées du néant ne ressemble à aucun amour des anges ni des hommes, si l'espèce en est unique, si le degré en dépasse la portée de notre intelligence, ainsi en est-il de l'amour spirituel pour les âmes que renferme l'âme du Sauveur du monde. L'amour sauveur reste sans terme de comparaison, comme l'amour créateur. [...] Le tourment de cette soif était incomparablement bien plus cruel que celui de l'autre soif. Marie le vit, et cette vue même la transporta aussitôt, pour ainsi dire, dans un monde nouveau et inconnu de douleurs. Elle vit que cette seconde soif serait presque aussi peu satisfaite que l'autre. Elle vit comment, à ce moment, Jésus contemplait dans son âme la procession sans fin des hommes qui s'avançaient chaque jour, sans interruption, d'une aurore à l'autre, en portant avec eux dans l'enfer le caractère du baptême et le sceau du précieux sang de leur Rédempteur. Voyez ! maintenant même, alors que le Sauveur est mourant de soif, le larron impénitent ne veut pas lui donner à boire son âme souillée ! Ainsi allait-il en être à jamais. Marie voyait tout cela. [...] Comme lui elle avait soif des âmes, et son cœur défaillait en voyant que la soif de Jésus ne serait pas étanchée. Ô malheureux enfants que nous sommes ! Combien de nos âmes n'avons-nous pas tenues éloignées, qui ce jour-là auraient consolé la Mère et le Fils ! »

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    Tableau de Pierre Paul Rubens (Source)

    « Il ne faut pas que nous quittions la croix. Nous ne devons pas descendre du Calvaire avant d'être crucifiés, et que la croix et nous soyons devenus inséparables. Mais le Calvaire est le grand théâtre de l'impatience humaine. Beaucoup ont le courage de gravir la colline, portant bravement leur croix sur leurs épaules. Mais, quand ils arrivent au sommet, ils posent leur croix à terre et descendent dans la cité pour prendre part au reste de la fête avec le peuple. Quelques-uns se laissent dépouiller, mais ils se retirent alors, refusant de se laisser attacher à la croix. D'autres y sont cloués, mais se détachent avant l'élévation de la croix. Quelques-uns supportent le choc de l'élévation, puis descendent de la croix avant que les trois heures soient passées ; ceux-ci dès la première heure, ceux-là dans la seconde, d'autres, hélas ! au moment même où la troisième heure est près de sa fin. Hélas ! le monde est plein des déserteurs du Calvaire, et il en est tellement plein que la grâce prudente ou dédaigneuse semble peu s'inquiéter de les arrêter. Car la grâce ne crucifie nul homme malgré lui ; elle laisse ce travail au monde et il le fait traîtreusement ou tyranniquement. [...] Nous voulons bien que notre sanctification ressemble à une opération douloureuse, mais nous désirons que cette opération soit de courte durée ; nous ne pouvons attendre, si elle vient sous la forme d'une guérison graduelle... [...]

    C'est seulement à l'aide de la grâce du silence que les saints portent de si lourdes croix. Une croix pour laquelle nous avons reçu de la sympathie, est bien plus lourde qu'elle ne l'était auparavant, ou il peut arriver que la sympathie nous ait énervés de telle sorte que le poids semble plus grand et la plaie plus douloureuse sur nos épaules. Le silence est l'atmosphère propre de la croix, comme le secret natal. Les meilleures croix sont secrètes, et nous pouvons être silencieux sous celles qui ne sont pas secrètes. Le silence crée réellement pour nous une sorte de secret, même en public. Car du moins nous pouvons cacher combien nous souffrons, si nous ne pouvons cacher tout à fait que nous souffrons. [...] D'une manière ou d'une autre, la sympathie humaine profane les opérations de la grâce. Elle mêle un élément avilissant à ce qui est divin : le Saint-Esprit s'en éloigne parce que c'est une chose qui "venant de la terre, est tout terrestre." Le consolateur ne donne ses meilleures consolations qu'aux cœurs inconsolables... »

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    « Mais il y a une vraie consolation, profondément cachée, il est vrai, et cependant à notre portée, dans ce renoncement à toute consolation humaine. C'est dans les ténèbres de la nature que nous trouvons réellement le voisinage de Jésus. C'est lorsque les créatures sont absentes que nous sommes soutenus dans l'embrassement sensible du Créateur. Les créatures apportent l'obscurité avec elles, partout où elles s'introduisent. Elles nous gênent toujours, interceptent les grâces, cachent Dieu, nous privent des consolations spirituelles, nous rendent languissants et irritables. Elles remplissent tellement nos sens extérieurs, que les sens intérieurs de nos âmes sont incapables d'agir. Nous désirons souvent que notre vie soit plus divine. Mais elle l'est en réalité plus que nous ne le croyons. C'est la douleur qui nous révèle cela... [...] Nous sommes avec Dieu, notre Créateur, notre Sauveur. il est tout à nous ; il est tel que nous l'a fait l'éloignement des créatures. Il était toujours là, toujours le même dans nos âmes ; seulement il était éclipsé par le faux éclat des créatures. Il paraît enfin dans la nuit comme les étoiles. La lune blanche du midi ne nous séduit pas par sa beauté, c'est seulement dans la nuit qu'elle nous charme. De même c'est l'obscurité d'un Calvaire spirituel qui répand sur nos âmes la douce clarté de notre admirable Sauveur. »

    R.P. F.W. Faber (1814-1863), Le pied de la Croix ou les douleurs de Marie (ch. VI), Quatrième édition, Paris, Ambroise Bray, 1862.

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     Plusieurs Chemins de Croix sont proposés ICI.

  • Méditation : "Celui qui ne porte pas sa croix, n'est pas digne de moi"

    « Nous aussi, nous devons porter notre croix.
    Notre Seigneur lui-même nous en a fait un précepte : "Celui qui ne porte pas sa croix, n'est pas digne de moi" nous a-t-il dit. Ne devons-nous pas en effet nous conformer à notre chef ? Si Notre-Seigneur a choisi la croix, c'est qu'elle est bonne, c'est qu'elle est nécessaire.
    Elle répare, elle efface le péché. Elle achète les grâces ; et chez nous, elle comprime les passions et les affaiblit.
    Elle est si nécessaire, que Notre-Seigneur en a fait la mesure de notre gloire. Quand il viendra nous juger, le signe de la rédemption planera dans le ciel. Ceux qui seront trouvés conformes à la croix, seront sauvés.
    Toute la vie d'ailleurs est semée de croix, c'est la condition de notre vie mortelle depuis la chute d'Adam. Ce serait folie de ne pas profiter de ces occasions de réparation et de mérite.
    Comment devons-nous porter la croix ? Avec résignation d'abord, comme Jésus, qui disait sans cesse : "Mon Père, que votre volonté soit faite et non la mienne !" - Avec confiance dans la grâce de Jésus-Christ qui nous aidera à porter la croix. - Avec joie, parce que la croix est le chemin du ciel. - Avec amour surtout parce que la croix nous rend semblables à Jésus-Christ, parce que notre générosité console le Cœur de Jésus et nous unit au Sauveur dans son œuvre rédemptrice, parce que nos croix, portées avec courage, sont des sources de grâces pour toutes nos œuvres, pour toutes les âmes que nous recommandons à Notre-Seigneur. »

    P. Léon Dehon (1843-1925), L'année avec le Sacré-Cœur - Méditations pour tous les jours de l'année, Tome I (Mardi Saint, III), Établissements Casterman, Tournai - Paris, s.d. (1910).

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    (Source et crédit photo)

  • Méditation - Prière : Dimanche des Rameaux (2)

    « Que ce rameau d'olivier consacré par votre Église, aujourd'hui, me soit, comme celui que la colombe de l'arche rapportait dans son bec, l'annonce efficace de votre paix, de cette Paix que vous êtes, ô Jésus. Vous, mon salut, ma Rédemption, Dieu si grand, devant lequel se tiennent les Trônes et les Dominations, qui venez à moi dans l'abondance de votre miséricorde (1).

    Mais les voix des enfants vont s'éteindre ; l'Hosanna va faire place aux cris de haine ; les palmes vont être foulées aux pieds ; vous allez, dans un instant, vous cacher, loin des hommes, ô Vous qui vous humiliez jusqu'à eux, pour les relever jusqu'à Vous (2), qui vous anéantissez, qui vous faites obéissant jusqu'à la mort et la mort de la Croix (3), qui allez m'apprendre la science unique de me taire, qui connaîtrez tous les abandons, et puis le fiel et le vinaigre (4), accueillant le calice de la Volonté de Dieu (5).

    Bénie soit votre sainte Passion qui commence, ô Modèle d'humilité parfaite, Dieu qui avez revêtu ma chair pour pouvoir vous soumettre au supplice de la Croix ! Enseignez-moi votre patience afin que j'aie part, un jour, à votre Résurrection (6).

    Père des Cieux, vous préférer à tout, vous aimer, c'est la justice. J'espère, par la mort de votre Fils, obtenir ce que je crois ; faites que par sa Résurrection, je parvienne au but où je tends (7). »

    1. Préf. à la Procession - 2. Bénédiction des Rameaux - 3. Épitre - 4. Offertoire - 5. Communion - 6. Collecte - 7. Oraison de la Bénédiction

    Dom Vandeur, Dimanche des Rameaux, in "Élévations sur la Messe de chaque jour" (Septuagésime - Carême - Passion), Éditions de Maredsous, 1955.

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    "Ecce Homo" par Antonio Ciseri (1821-1891), Galerie d'Art Moderne, Florence.
    (Source et crédit photo)

  • Méditation - Prière : Dimanche des Rameaux (1)

    « Jésus entre dans Jérusalem. Aussitôt le peuple se précipite à sa rencontre. Tous poussent des cris de joie ; tous lui font un cortège d'honneur. Les uns jonchent les rues de rameaux d'olivier, les autres étendent leurs vêtements partout où il doit passer. A la pensée de qui pouvait-il venir alors que ce même Jésus, acclamé comme le Messie et triomphalement reçu par tout ce peuple avec tant d'allégresse, devait, après sa condamnation à la mort, passer par ces mêmes rues en portant sa croix sur ses épaules ?

    Mon bien-aimé Jésus, vous entendez maintenant le peuple de Jérusalem qui fait retentir sur votre passage ces cris de triomphe : Hosanna, gloire au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! (Mt XXI, 9). Bientôt ils élèveront la voix pour exiger insolemment de Pilate qu'il vous déclare digne de mort et qu'il vous fasse mourir en croix. Enlevez-le ; enlevez-le ; crucifiez-le (Jn XIX, 15). Va, mon âme, et toi aussi, dis à Jésus avec amour : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Oui, soyez toujours béni, ô Sauveur du monde, d'avoir bien voulu venir ici-bas ; sans vous, nous étions tous perdus. De grâce, ô mon Sauveur, sauvez-moi. »

    St Alphonse de Liguori, Dimanche des Rameaux, in "Une année de méditations", Traduction nouvelle par le P. Eugène Pladys, Rédemptoriste, Tome I, Delhomme et Briguet, Éditeurs, Paris - Lyon, 1892.

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    "Entrée triomphale du Christ à Jérusalem", par Harry Anderson © IRI

  • Méditation : "Ave Crux, Spes unica..."

    « Pourquoi donc craignez-vous de porter la Croix, par laquelle on arrive au royaume du ciel ?

    Dans la Croix est le salut, dans la Croix la vie, dans la Croix la protection contre nos ennemis.

    C'est de la Croix que découlent les suavités célestes.

    Dans la Croix est la force de l'âme ; dans la Croix la joie de l'esprit, la consommation de la vertu, la perfection de la sainteté.

    Il n'y a de salut pour l'âme et d'espérance de vie éternelle, que dans la Croix.

    Prenez donc votre Croix et suivez Jésus, et vous parviendrez à l'éternelle félicité.

    Il vous a précédé portant sa Croix et il est mort pour vous sur la Croix afin que vous aussi vous portiez votre Croix, et que vous aspiriez à mourir sur la Croix.

    Car si vous mourez avec lui, vous vivrez aussi avec lui ; et si vous partagez ses souffrances, vous partagerez sa gloire.

    Ainsi tout est dans la Croix, et tout consiste à mourir. Il n'est point d'autre voie qui conduise à la vie et à la véritable paix du coeur que la voie de la Croix et d'une mortification continuelle.

    Allez où vous voudrez, cherchez tout ce que vous voudrez, vous ne trouverez pas au-dessus une voie plus élevée, au-dessous une voie plus sûre que la voie de la sainte Croix. »

    L'Imitation de Jésus-Christ, Livre II, ch. XII (2-3), Trad. Abbé Félicité de Lamennais.
    Texte intégral en ligne ici (à télécharger) et ici.

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  • Méditation : des bienfaits de la tentation (1)

    « Aucun mal moral n'est possible qu'autant que la volonté le veut : tant que la porte de la volonté est fermée, le démon ou l'imagination peuvent faire du bruit tout autour du cœur, ils ne peuvent en altérer la pureté. Voilà pourquoi Jésus-Christ et tous les saints ont subi l'épreuve de la tentation, sans que cette épreuve ait porté la moindre atteinte à leur sainteté. Voilà pourquoi toute désolation dans les tentations est déraisonnable : c'est ou un dépit de l'amour-propre mécontent de se voir misérable, ou une défiance de la bonté de Dieu, qui ne fait jamais défaut à qui l'invoque, ou la pusillanimité d'une âme qui se considère seule avec sa faiblesse, en dehors du secours de Dieu. Loin que la tentation soit un mal, elle peut au contraire tourner à notre grand avantage. Car :
    1° elle nous donne l'occasion de glorifier Dieu, puisqu'en résistant généreusement, nous lui prouvons notre fidélité, nous battons ses ennemis et en triomphons ;
    2° elle nous forme à l'humilité, en nous révélant le fonds mauvais qui est en nous ; à l'esprit de prière, en nous faisant sentir le besoin du recours à Dieu ; à la vigilance, en nous avertissant de nous défier de nos forces, et de fuir l'occasion du mal ; à l'amour divin, en faisant ressortir la bonté de Dieu qui veut bien abaisser sa grâce, s'abaisser lui-même par la communion, jusqu'à un fond aussi dépravé que le nôtre ; elle prévient le relâchement, elle réveille la ferveur, donne à la vertu un caractère plus ferme et plus solide (cf. II Cor XII, 9) ; elle nous apprend à nous connaître (cf. Eccl XXXIV, 9) ; elle vaut à l'âme plus de grâces en cette vie, plus de gloire dans l'autre, en proportion des mérites dont elle l'enrichit, et la rend plus digne de Dieu, comme les saints dont il est écrit : Dieu les a éprouvés et les a trouvés dignes de lui (Sap III, 5).
    Voilà pourquoi Dieu disait au peuple d'Israël : "Je n'ai point voulu détruire les Chananéens, afin que vous ayez des ennemis à combattre" (Jud II, 3) ; et le pape saint Léon dit dans le même sens : "Il est bon à l'âme de craindre de tomber, et d'avoir constamment une lutte à soutenir" (Serm. III). L'âme fidèle tire de la tentation du mal le même fruit que de l'inspiration du bien. C'est pour elle l'occasion de se porter vers la perfection de la vertu contraire avec toute la bonne volonté dont elle est capable. Dans les tentations des sens, elle s'élève à l'infinie grandeur de Dieu, si haut placé au-dessus des vues basses et sensuelles ; dans les tentations de l'esprit, elle s'abîme dans son néant ; dans les tentations de plaisir, elle aime et embrasse la croix : est-ce ainsi que nous avons fait notre profit de la tentation ? »

    (à suivre demain)

    Abbé André-Jean-Marie Hamon (1795-1874), curé de Saint Sulpice, Méditations à l'usage du clergé et des fidèles pour tous les jours de l'année (Tome I, Premier dimanche de Carême), Paris, Victor Lecoffre, 1886.

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    Diable gargouille à la Cathédrale Notre Dame de Paris (Crédit photo)

  • Méditation : le Christ transpercé sur la Croix...

    « Chers frères et sœurs, regardons le Christ transpercé sur la Croix ! Il est la révélation la plus bouleversante de l'amour de Dieu, un amour dans lequel eros et agapè, loin de s'opposer, s'illuminent mutuellement. Sur la Croix c'est Dieu lui-même qui mendie l'amour de sa créature : Il a soif de l'amour de chacun de nous. L'apôtre Thomas reconnut Jésus comme "Seigneur et Dieu" quand il mit la main sur la blessure de son flanc. Il n'est pas surprenant que, à travers les saints, beaucoup aient trouvé dans le Cœur de Jésus l'expression la plus émouvante de ce mystère de l'amour. On pourrait précisément dire que la révélation de l'eros de Dieu envers l'homme est, en réalité, l'expression suprême de son agapè. En vérité, seul l'amour dans lequel s'unissent le don désintéressé de soi et le désir passionné de réciprocité, donne une ivresse qui rend légers les sacrifices les plus lourds. Jésus a dit : "Quand je serai élevé de terre, j'attirerai à moi tous les hommes" (Jn 12, 32). La réponse que le Seigneur désire ardemment de notre part est avant tout d'accueillir son amour et de se laisser attirer par lui. Accepter son amour, cependant, ne suffit pas. Il s'agit de répondre à un tel amour pour ensuite s'engager à le communiquer aux autres : le Christ "m'attire à lui" pour s'unir à moi, pour que j'apprenne à aimer mes frères du même amour. »

    Benoît XVI, extrait du Message pour le Carême 2007.
    (Texte intégral)

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    La Bse Marie du Divin Cœur Droste zü Vischering et Ste Marguerite-Marie Alacoque
    en adoration devant le Sacré-Cœur de Jésus.

    (Source et crédit photo)

  • Méditation : le Carême

    « Dès les origines, donc, le Carême est vécu comme le temps de la préparation immédiate au Baptême, qu'il faut administrer solennellement au cours de la Veillée pascale. Tout le Carême était un chemin vers cette grande rencontre avec le Christ, cette immersion dans le Christ et ce renouveau de la vie. Nous sommes déjà baptisés, mais le Baptême n'est souvent pas très efficace dans notre vie quotidienne. C'est pourquoi, pour nous aussi, le Carême est un "catéchuménat" renouvelé, dans lequel nous allons à nouveau à la rencontre de notre Baptême pour le redécouvrir et le revivre en profondeur, pour devenir à nouveau réellement chrétiens. Le Carême est donc une occasion de "redevenir" chrétiens, à travers un processus constant de transformation intérieure, et de progrès dans la connaissance et dans l'amour du Christ. La conversion n'est jamais faite une fois pour toutes, mais c'est un processus, un chemin intérieur de toute notre vie. Cet itinéraire de conversion évangélique ne peut certes pas se limiter à une période particulière de l'année: c'est un chemin quotidien, qui doit embrasser tout le cours de l'existence, chaque jour de notre vie. Dans cette optique, pour chaque chrétien et pour toutes les communautés ecclésiales, le Carême est le temps spirituel favorable pour s'entraîner avec une plus grande ténacité à rechercher Dieu, en ouvrant son cœur au Christ...

    Cette conversion du cœur est tout d'abord un don gratuit de Dieu, qui nous a créés pour lui et qui nous a rachetés en Jésus Christ: notre véritable bonheur consiste à demeurer en Lui (cf. Jn 15, 3). C'est pour cette raison qu'il prévient lui-même, par sa grâce, notre désir et qu'il accompagne nos efforts de conversion. Que signifie, en réalité, se convertir ? Se convertir signifie chercher Dieu, aller avec Dieu, suivre docilement les enseignements de son Fils, de Jésus Christ... Se convertir signifie alors ne pas rechercher son propre succès personnel - qui est quelque chose qui passe - mais, en abandonnant toute certitude humaine, se placer avec simplicité et confiance à la suite du Seigneur pour que Jésus devienne pour chacun, comme aimait à le répéter la bienheureuse Teresa de Calcutta, "mon tout en tout". Celui qui se laisse conquérir par Lui ne craint pas de perdre sa propre vie, car sur la Croix Il nous a aimée et s'est donné lui-même pour nous. Et précisément en perdant notre vie par amour nous la retrouvons.

    [...]

    Chers frères et sœurs, que la période quadragésimale, que nous entreprenons aujourd'hui avec le rite austère et significatif de l'imposition des Cendres, soit pour tous une expérience renouvelée de l'amour miséricordieux du Christ, qui sur la Croix a versé son sang pour nous. Mettons-nous docilement à son école, pour apprendre à "redonner", à notre tour, son amour au prochain, en particulier à ceux qui souffrent et qui sont en difficulté. Telle est la mission de chaque disciple du Christ, mais pour l'accomplir il est nécessaire de rester à l'écoute de sa Parole et de se nourrir avec assiduité de son Corps et de son Sang. Que l'itinéraire quadragésimal, qui dans l’Église antique est l'itinéraire vers l'initiation chrétienne, vers le Baptême et l'Eucharistie, soit pour nous baptisés un temps "eucharistique" au cours duquel nous participons avec une plus grande ferveur au sacrifice de l'Eucharistie. Que la Vierge Marie qui, après avoir partagé la passion douloureuse de son divin Fils, a fait l'expérience de la joie de sa résurrection, nous accompagne au cours de ce Carême vers le mystère de la Pâque, révélation suprême de l'amour de Dieu.
    Bon Carême à tous ! »

    Benoît XVI, extrait de l'Audience générale du 21 février 2007.
    (Texte intégral)

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  • Méditation : que penser de la souffrance...?

    « Que devons-nous penser de la souffrance pour être dans la vérité ? Entendons cette souffrance que le monde multiplie et rend plus aiguë, plus amère, plus désolée... Jésus semble nous répondre du haut de sa croix : cette souffrance, je l'adopte. Car je l'ai faite mienne, jusqu'à la souffrance de la mort. Mais en l'adoptant ainsi :

    1) Je la console par les promesses que ma croix sanctionne et par l'exemple que ma croix propose. C'est sur des milliers de malades et de mourants que se répand cette consolation de la croix. Si nous en croyons de sérieuses statistiques, trente millions d'hommes meurent chaque année sur la terre, quand il n'y a pas d'épidémie ni de guerre. C'est donc en moyenne 82.200 par jour, 3.425 par heure, 57 par minute. Ceux des morts qui de leur lit de souffrances regardent la croix, ont les plus ineffables des consolations : celle de l'espérance, celle du pardon, celle de la paix. En baisant cette croix, plusieurs trouvent même doux de mourir.

    2) Je lui donne un sens : celui de l'amour.

    "Je ressens une vive satisfaction, ma très chère fille, dit un jour Jésus à sainte Catherine de Sienne, du désir que vous avez de souffrir toutes les peines, toutes les fatigues, et même la mort pour le salut des âmes ; car plus on souffre, plus on me prouve son amour, et plus on aime plus on connaît ma vérité ; et plus on me connaît, plus grande est la douleur, plus intolérable est la souffrance que cause un péché commis contre moi. Vous avez demandé à prendre sur vous le châtiment des crimes des autres, et vous ne saviez pas qu'en demandant cette grâce, vous demandiez en même temps amour, lumière et connaissance de la vérité ; car ainsi que je l'ai dit, plus grand est l'amour, plus grande est la douleur ; aussi la douleur croîtra en proportion de l'amour." (Dialogues, ch. V)

    C'est particulièrement sur la croix que le Maître Divin nous dit l'émouvante leçon de cette philosophie chrétienne de l'amour. Ce que le monde maudissait, les amants de Jésus l'exaltent et le bénissent : il leur devient doux de souffrir comme de mourir.

    3) Je la divinise, en communiquant à toute souffrance unie aux miennes, quelque chose de la valeur de ma rédemption. Aussi des déshérités, des impotents, des infirmes, dont l'existence semble stérile, peuvent redire après Saint Paul : "adimpleo ea quæ desunt passionum Christi" (*) et se persuader avec raison, qu'ils contribuent par leurs souffrances, supportées en union avec le Christ, à l'avancement du Royaume de Dieu.
    [...]
    Recueillons-nous donc et, dans la sincérité de notre âme, comprenons bien pourquoi saint Jean, qui fut si près de la croix, nous dit :

    "N'aimez pas le monde ni ce qui est dans le monde. Celui qui aime le monde, l'amour du Père n'est pas en lui, parce que tout ce qui est dans le monde est concupiscence de la chair, et concupiscence des yeux et orgueil de la vie ; laquelle concupiscence n'est pas du Père, mais elle est du monde. Or le monde passe et la concupiscence du monde passe avec lui, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement." (I Jn II, 15-17) »

    (*) : "adimpleo ea quæ desunt passionum Christi, in carne mea, pro corpore ejus, quod est ecclesia" (Col 1,24) : "Ce qu'il reste à souffrir des épreuves du Christ, je l'accomplis dans ma propre chair, pour son corps qui est l'Église."

    Albert Valensin s.j., Aux sources de la vie intérieure - Une grande retraite, Tome I Première semaine (La croix et le monde), Imprimerie catholique, Beyrouth, 1940.

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  • Méditation : Purification de Marie & Présentation du Seigneur au Temple

    « Offre ton fils, Vierge sainte, et présente au Seigneur le fruit béni de tes entrailles (Lc 1,42). Offre pour notre réconciliation à tous le sacrifice saint, le sacrifice agréable à Dieu (Rm 12,1). Dieu le Père accueillera pleinement cette offrande nouvelle, ce très précieux sacrifice, dont lui-même parle en ces termes : Voici mon Fils bien-aimé ; en lui, toute ma joie (Mt 3,17 ; 17, 5).

    Mais cette offrande-ci, mes frères, paraît bien légère : on se contente de la présenter devant le Seigneur, de la racheter avec des oiseaux, et aussitôt on la reprend et l’emporte. Viendra le jour où ce n’est plus dans le Temple, ni entre les bras de Syméon qu’il sera offert, mais en dehors de la ville et entre les bras de la croix. Viendra le jour où il ne sera plus racheté par un sang autre, mais où il rachètera les autres par son propre sang (He 9,12), car Dieu le Père l’a envoyé comme rédempteur pour son peuple (Ps 110,9). Ce sera alors le sacrifice du soir, tandis que maintenant, c’est le sacrifice du matin. Celui-ci, certes, est plus joyeux, mais l’autre sera plus plénier : celui-ci est offert au temps de sa naissance, celui-là le sera dans la plénitude de son âge (Ep 4, 13).

    À l’un comme à l’autre pourtant peut s’appliquer cette prédiction du Prophète : Il a été offert, parce que lui-même l’a voulu (Is 53, 7). En effet, même maintenant [dans le Temple], il a été offert non parce qu’il en avait besoin, ni que la Loi le lui imposait, mais parce qu’il l’a voulu. Et de même, il a été offert sur la croix non parce que le juif a été plus fort, ni que lui-même le méritait, mais parce qu’il l’a voulu.
    [...]

    Mais qu’allons-nous offrir, nous, mes frères, et que rendrons-nous au Seigneur pour tout ce qu’il nous a donné (Ps 115,12) ? Lui, il a offert pour nous la plus précieuse victime qu’il possédait ; en vérité, il ne pouvait en être de plus précieuse. Nous aussi donc, faisons ce qui est en notre pouvoir : offrons-lui ce que nous avons de meilleur : nous-mêmes ! Lui s’est offert lui-même (He 9,14) : qui es-tu, toi, pour hésiter à t’offrir toi-même ?
    [...]

    Frères, au Seigneur qui allait mourir, les juifs offraient des victimes mortes. Mais maintenant désormais je suis vivant, dit le Seigneur ; je ne veux pas la mort du pécheur, mais plutôt qu’il se convertisse et qu’il vive (Ez 33,11). Le Seigneur ne veut pas ma mort ; et moi, je ne lui offrirais pas volontiers ma vie ? Tel est en effet le sacrifice d’apaisement, le sacrifice agréable à Dieu, le sacrifice vivant (Rm 12,1). »

    St Bernard de Clairvaux, 3ème Sermon pour la Purification (2,3-5 & 3,1,3).
    Source : Famille cistercienne.

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    Fresque de Fra Angelico (1440)

  • Méditation - Prière : Épiphanie du Seigneur

    « Épiphanie du Seigneur ! Solennelle et divine revanche sur l'humiliation et l'effondrement d'un Dieu dans une crèche ! La crèche est le trône de l'abaissement du Verbe ; l’Épiphanie est la proclamation de la gloire du Dieu caché. Aujourd'hui, l’Église salue le Roi des rois, et le Dominateur des dominateurs.
    [...]

    Je vous adore, ô Jésus, Roi des rois, dans la main de qui est déposé la royauté qui doit régir mon âme : et regnum in manu ejus.

    Je vous adore, Dieu de Dieu, Lumière de Lumière, qui illumine tout homme, Vous dont la puissance est éternelle, à qui reste soumis tout ce qui doit se soumettre ici-bas : et potestas.

    Je vous adore, ô Mortel, Dieu-Roi, qui devez mourir un jour, Vous dont l'empire a pour centre le Calvaire, d'où vous régnerez par le bois sacré : et imperium.

    Main de l'Enfant-Dieu, je me rends à votre Domination ; je m'abrite sous l'aile de votre puissance ; je confesse l'empire de votre Croix ; Vous êtes le Dieu béni aux siècles des siècles.

    Venez, avancez, régnez, ô Tout-Puissant ! Prenez séjour en la maison de mon âme ; je vous en ouvre, ô Jésus, toutes les avenues. Vous avez tous les droits, tous les pouvoirs ; tous vos ordres, elle les adore, ô Jésus-Christ, Roi et Dieu, Homme qui venez mourir pour dominer. »

    Dom Vandeur, Épiphanie du Seigneur, in "Élévations sur la Messe de chaque jour" (Noël, Épiphanie), Éditions de Maredsous, 1955.

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  • Méditations : des tentations...

    « La prière est sans nul doute indispensable pour repousser les tentations. Mais n'avons-nous pas aussi un autre moyen non négligeable, c'est l'application à notre devoir d'état, à la tâche qui nous a été confiée. Quand nous sommes occupées à bien faire ce que nous devons faire, chacune pour l'amour de Dieu, en union avec la très Sainte Vierge Marie, toutes les facultés sont donc occupées, et bien sûr, les tentations n'ont pas autant de prise sur nous. Voici encore un autre moyen pour écarter les tentations. Ce moyen tout simple et que vous connaissez bien, il consiste à opposer le mépris. Nous savons en effet que le mépris est le moyen le plus court pour nous défaire d'un ennemi que rien ne blesse tant que le dédain. Il est donc préférable aussi de ne pas revenir par la pensée sur nos tentations passées. Car en y revenant, nous remettrions en quelque sorte du bois au feu. Et ainsi nous l'entretiendrions au lieu de l'éteindre. Conservons donc notre tranquillité et la paix sereine dans les tentations. [...] Enfin, n'oublions pas cette vérité que nous connaissons bien ! Dieu si miséricordieux, ne permettra jamais que nous soyons tentées au-dessus de nos forces. Les débats de notre conscience, ces luttes, cette croix crucifiante, il faut les accepter par amour, et en esprit de réparation pour nos fautes, et pour celles des autres. Les tentations ne peuvent nous faire que le mal que nous voulons. Puisque dans les âmes fidèles, elles produisent le contraire : elles produisent de bons effets, elles les maintiennent d'ailleurs dans une plus profonde humilité ; elles stimulent leur vigilance et leur courage. Et de plus elles les entretiennent dans leur ferveur, en les ramenant à Dieu plus souvent. Oui, les tentations nous donnent une heureuse expérience et pour les autres aussi, parce qu'elles nous rendent enfin plus compréhensives, et plus compatissantes pour les faiblesses du prochain. Mais il n'en demeure pas moins vrai que nous devons, vous et moi, être très vigilantes, par la prière, et par la pénitence. »

    Mère Marie de la Croix (1901-1999), Entretiens Évangéliques A XVII 1975, in "Textes choisis 5. Avec Marie - Vivre le combat spirituel", Éditions de la Morinaie, Saint Aignan sur Roë, 2012.

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    Retable d'Issenheim de Matthias Grünewald, musée Unterlinden, Colmar
    Seconde ouverture, panneau droit : la tentation de St Antoine (détail)

  • Méditation : tout à Jésus pour nos frères

    « Il faut avoir le cœur ouvert à Jésus-Christ sans s'arrêter aux créatures et à cet extérieur du monde. C'est un exercice qui est pénible à la chair, mais il faut se résoudre à lui faire souffrir cette peine. Il lui faut du bâton de la Croix pour la réduire ; il faut lui faire violence pour l'empêcher de se complaire au monde, et pour faire que notre âme n'ait rien à goûter que Jésus.

    Que notre esprit, notre âme et notre cœur soient tout à Jésus, et que rien ne leur donne lieu de s'épancher hors de lui. Que la terre se ferme, que le soleil s'obscurcisse, que tout le monde nous persécute, pour nous retenir en Jésus. Tout est à lui en nous : tout doit vivre de lui, tout doit être recueilli en lui pour être participant de lui, et être ainsi très puissant en sa vertu et en sa grâce. C'est le moyen d'agir ensuite sur les cœurs de nos frères avec toute vertu. La grâce répandue en nos sens et la joie de la chair qui se dilate dans les objets sensibles, énerve souvent la vigueur de l'esprit, qui, pour être puissant, doit toujours être renfermé dans le sein et l'intérieur de Dieu en nous.

    Il n'y a point d'autre principe ni d'autre fondement à jeter que la Croix, et il n'y a rien par quoi Jésus-Christ notre Tout nous veuille mieux instruire et nous attirer, que par ce saint et adorable moyen. C'est par là qu'il nous consommera, et qu'il nous fera tous un en lui pour l'éternité. »

    Jean-Jacques Olier (1608-1657), Lettre 93, Paris, Victor Lecoffre, 1885.

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  • Méditation : se préparer à la Rencontre

    « Sans un véritable amour pour le Christ, nous ne saurions être Ses véritables disciples ; et nous ne saurions L'aimer si notre cœur n'est ému de gratitude envers Lui ; et nous ne saurions sentir dûment cette gratitude, si nous ne ressentons vivement ce qu'Il a souffert pour nous. En vérité, il nous semble impossible que quiconque puisse atteindre à l'amour du Christ s'il n'éprouve aucune détresse, aucune angoisse de cœur à la pensée des amères douleurs qu'Il a souffertes, et ne ressent aucun remords d'y avoir contribué par ses péchés.
    [...]
    Un jour, mes frères, nous nous lèverons. Chacun de nous se lèvera de sa tombe et verra Jésus-Christ. Nous verrons Celui qui fut suspendu à la Croix, nous verrons Ses blessures, nous verrons les plaies de Ses mains, de Ses pieds et de Son côté. Avons-nous le désir d'être de ceux qui gémiront et se lamenteront, ou de ceux qui se réjouiront ? Si nous ne voulons pas nous lamenter alors à Sa vue, nous devons nous lamenter à présent, en pensant à Lui.

    Préparons-nous à rencontrer notre Dieu. Venons à Sa Présence aussi souvent qu'il se peut. Essayons de nous figurer que nous voyons Sa Croix, que nous Le voyons sur cette Croix. Alors, approchons-nous de Lui...
    Représentez-vous que vous voyez Jésus-Christ sur la Croix, et dites-Lui comme le bon larron : "Seigneur, souvenez-Vous de moi quand Vous entrerez dans Votre royaume." C'est-à-dire : "Souvenez-Vous de moi, Seigneur, avec miséricorde ; ne Vous souvenez pas de mes péchés, mais de Votre propre Croix ; souvenez-Vous de Vos propres souffrances, souvenez-Vous que Vous avez souffert pour moi, pécheur ; souvenez-Vous au dernier jour que j'ai, durant ma vie, ressenti Vos souffrances, que j'ai souffert sur ma croix à Vos côtés. Souvenez-Vous alors de moi et faites-moi à présent souvenir de Vous." »

    Bx John-Henry Newman (1801-1890), Extraits du Sermon sur Isaïe 53,7, in "12 sermons sur le Christ", Trad. Pierre Leyris, Paris, Seuil, 1954.

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  • Méditation : la véritable douceur

    « L'homme d'aujourd'hui reste stupéfait devant cette affirmation du Sauveur : Bienheureux les doux, car ils posséderont la terre. On nous a tellement étourdis avec l'éloge de la force, on a tellement exalté le surhomme qui se réalise en écrasant les autres, nous avons assisté à de si scandaleuses victoires de la violence, et les sages ont trouvé pour les absoudre de si péremptoires raisons que le mot de Jésus, pour les hommes du XXe siècle, ressemble à un paradoxe naïf.
    [...] On ne sait pas ce qu'est la douceur. La douceur est d'abord l'intelligence exacte, juste appréciation de sa valeur, de sa place, de ses possibilités, et de ses droits. Elle est sagesse, alors que la violence, qui ignore ces limites, est sottise.
    La douceur est maîtrise de soi. L'instinct, bouffi d'orgueil, nous porte à dépasser nos limites en des manifestations dangereuses. Il faut mater l'instinct pour rester doux ; il faut beaucoup de force pour rester maître chez soi.
    La douceur est respect et charité ; respect de la personne humaine et charité envers les hommes. L'homme a une dignité éminente, la violence le traite comme une chose ; tout homme est notre frère, la violence le traite comme un ennemi malfaisant.
    La douceur nous préserve de la colère, qui est une vraie folie, de la précipitation qui est un aveuglement, des gestes excessifs qui sont ridicules, des paroles amères qui sont un poison. Mais la douceur n'est pas doucereuse ni douceâtre : les doucereux sont hypocrites, les douceâtres sont pleutres ; les doux sont clairs et forts.
    Jésus a dit : beati mites ; et il a dit aussi : discite a me quia mitis sum. Il est doux ; mais il n'est pas doucereux ni douceâtre. Ses paroles les plus tendres ont un support ferme, presque rugueux, et quand il parle d'amour, il dit ou il sous-entend que l'amour est d'abord sacrifice. La vie dans son royaume n'est pas une idylle enrubannée. Il est venu apporter la guerre contre la nature corrompue, le couteau pour couper les attaches avec le monde ; il nous invite à nous dépouiller, à porter la croix, à boire le calice de l'amertume... »

    J. Calvet, La trame des jours (Ch. III - Béatitudes), La Colombe, Coll. Le Rameau, Paris, 1955.

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